J.O n° 174 du 30 juillet 2003 page 12939 texte n° 8 Décrets, arretés, circulaires Textes généraux Ministere de la justice Circulaire du 17 mars 2003 relative `a l'entrée en vigueur du reglement n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité NOR: JUSC0320134C Paris, le 17 mars 2003. Le garde des sceaux, ministre de la justice, `a Mesdames et Messieurs les procureurs généraux pres les cours d'appel, Monsieur le procureur pres le tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, Mesdames et Messieurs les procureurs de la République (pour attribution) ; Mesdames et Messieurs les premiers présidents des cours d'appel, Monsieur le président du tribunal supérieur d'appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, Mesdames et Messieurs les présidents des tribunaux de grande instance, Mesdames et Messieurs les présidents des tribunaux de commerce (pour information). Le reglement communautaire n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, entré en vigueur le 31 mai 2002 et directement applicable en droit interne aux procédures ouvertes `a compter de cette date, bouleverse les regles traditionnelles de la « faillite internationale ». La présente circulaire en présente les grandes lignes, apporte des précisions sur sa portée et propose, sous réserve de l'appréciation souveraine des juridictions, des solutions `a certaines difficultés que peut poser son application en France (cf. note 1) . Le reglement se fixe comme objectif la coordination des mesures affectant le patrimoine d'un débiteur déclaré insolvable, dont le centre des intérets principaux est situé dans un Etat membre et qui possede des biens dans plusieurs Etats membres (cf. considérant n° 3). L'instauration d'une procédure unique produisant ses effets dans tous les Etats serait le moyen de garantir la parfaite cohérence du traitement international de l'insolvabibité. Cependant, le reglement entend sauvegarder la diversité des lois internes, notamment en ce qui concerne les suretés, et protéger certains créanciers en leur permettant de bénéficier de l'application de la loi locale (cf. considérants n°s 11, 19, 25 `a 28). Le texte s'attache `a concilier ces objectifs. C'est pourquoi il adopte le schéma suivant : Plusieurs procédures d'insolvabilité peuvent etre ouvertes contre un meme débiteur, l'une par la juridiction de l'Etat ou est situé son siege, l'autre par la juridiction de chaque Etat ou il possede un établissement (art. 3). Toute procédure d'insolvabilité ouverte selon l'un de ces criteres de compétence confere de plein droit au syndic la faculté d'exercer certaines prérogatives dans les autres Etats. En outre, le reglement organise la coordination des procédures ouvertes `a l'égard d'un meme débiteur et la prééminence de la procédure ouverte dans l'Etat ou est situé le siege. Mais au-del`a de ces effets minimums, la procédure n'a pas la meme efficacité dans les autres Etats, selon que la compétence de la juridiction est fondée sur l'un ou l'autre des criteres de compétence territoriale ci-dessus indiqués : - la procédure ouverte dans l'Etat du siege du débiteur produit de plein droit dans les autres Etats les effets prévus par la loi de cet Etat, sous réserve d'exceptions importantes (art. 17, § 1er). Ce principe marque une rupture avec le droit français antérieur ; - la procédure ouverte dans l'Etat ou se trouve l'établissement ne produit pas d'effet sur les biens situés dans les autres Etats (art. 17, § 2). L'exécution forcée dans un Etat des décisions rendues dans un autre Etat, au cours de la procédure d'insolvabilité, est réglementée. Le reglement est applicable lorsque le débiteur a son siege dans tout Etat membre, `a l'exception du Danemark (considérants n°s 14 et 33). Il ne l'est donc pas des lors que le débiteur a son siege en dehors de la Communauté, peu important qu'il possede un établissement dans un Etat membre. Dans ce cas, le droit commun antérieur, principalement d'origine jurisprudentielle, s'applique. En outre, lorsqu'une procédure d'insolvabilité entre dans le champ d'application territorial du reglement, ses effets sur un bien ou `a l'égard d'un créancier situés dans un Etat tiers `a l'Union européenne ne sont pas soumis `a ses dispositions. * * * Dans la présente circulaire, les termes « procédure principale » et « procédure territoriale » seront utilisés pour désigner la procédure ouverte par une juridiction compétente respectivement `a raison du siege du débiteur et `a raison de l'un de ses établissements. Les procédures territoriales recouvrent, selon le cas, les procédures ouvertes avant l'ouverture d'une procédure principale au centre des intérets principaux du débiteur (procédure « territoriale » stricto sensu) ou les procédures ouvertes postérieurement (procédure « secondaire »). Le terme « syndic », traditionnel en matiere de faillite internationale, est repris du reglement, il renvoie aux professions qui figurent sur une liste limitative qui y est annexée (cf. note 2) . Pour la France, il s'agit de l'administrateur judiciaire, du mandataire liquidateur, du représentant des créanciers et du commissaire `a l'exécution du plan. * * * 1. Les procédures d'insolvabilité concernées par le reglement et les regles de compétence juridictionnelle 1.1. Les procédures concernées par le reglement 1.1.1. Les débiteurs Toutes les personnes `a l'égard desquelles une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte en France et qui possedent des biens dans plusieurs Etats membres sont soumises aux dispositions du reglement. Toutefois, celui-ci ne s'applique pas aux procédures qui concernent les entreprises d'assurance, les établissements de crédit et les entreprises d'investissement et de placement collectif définies en son article 1, § 2. Ces entreprises sont placées sous une surveillance particuliere des pouvoirs publics et les procédures d'insolvabilité ouvertes `a leur égard sont régies par des textes communautaires destinés `a etre transcrits en droit interne : directive 2001/17/CE du 19 mars 2001, pour les entreprises d'assurances, et directive 2001/24/CE du 4 avril 2001 pour les établissements de crédit. 1.1.2. Les types de procédures Il s'agit, aux termes du reglement, des « procédures collectives fondées sur l'insolvabilité du débiteur qui entraînent le dessaisissement partiel ou total de ce débiteur ainsi que la désignation d'un syndic » (art. 1er, § 1). Par souci de clarté, les procédures en vigueur dans chaque Etat, qui répondent `a cette définition, sont mentionnées sur une liste `a caractere limitatif annexée au reglement (cf. note 3) . En ce qui concerne la France, y figurent : - le redressement judiciaire avec nomination d'un administrateur judiciaire ; - la liquidation judiciaire. Le champ d'application effectif du reglement est déterminé par l'application combinée de l'article 1er et de l'annexe : seule une procédure répondant aux criteres énoncés dans cet article et figurant `a l'annexe y est soumise. Il en résulte pour les juridictions françaises plusieurs conséquences : Ni le mandat ad hoc, ni le reglement amiable, ni le redressement judiciaire simplifié (sans désignation d'un administrateur judiciaire), ni la procédure de surendettement des particuliers ne figurent sur la liste de l'annexe. L'ouverture de ces procédures en France n'aura donc pas d'effet direct dans les autres Etats. Cependant, il convient de remarquer que les procédures de traitement de l'insolvabilité des particuliers de certains Etats (notamment l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas) sont mentionnées `a l'annexe. Celles-ci sont, en conséquence, susceptibles de produire leurs effets en dehors de ces Etats, et notamment en France. Par ailleurs, les procédures de redressement judiciaire dans lesquelles le tribunal confie `a l'administrateur une simple mission de surveillance (en vertu de l'article L. 621-22 [II, 1°] du code de commerce) n'entrent pas dans le champ d'application du reglement. En effet, elles n'entraînent pas le dessaisissement du débiteur, contrairement `a la mission d'assistance, qui a pour effet un dessaisissement partiel. Enfin, le reglement est applicable aux seules hypotheses dans lesquelles le redressement ou la liquidation judiciaire est ouvert en raison d'un état de cessation des paiements du débiteur. Les procédures n'étant pas fondées sur son insolvabilité ne sont donc pas concernées. Les situations suivantes peuvent etre distinguées : - extension de la procédure `a une société déclarée fictive ou `a une personne dont le patrimoine est confondu avec celui du débiteur insolvable (art. L. 621-5 du code de commerce) : des lors que les patrimoines ne peuvent plus etre distingués, l'état de cessation des paiements leur est commun. L'instance, apres extension, sera donc soumise au reglement. Néanmoins, si elle concerne une personne demeurant dans un autre Etat que celui dans lequel a été prononcée l'extension, la décision devra y etre reconnue conformément `a l'article 25 du reglement (examiné au chapitre 5 de la présente circulaire). Si la personne visée par l'extension possede des biens `a l'étranger, ceux-ci pourront etre appréhendés dans les conditions prévues par cet article (apres exequatur simplifié de la décision d'extension) ; - ouverture d'une procédure `a titre de sanction `a l'encontre d'un dirigeant qui n'a pas payé le passif social mis `a sa charge (art. L. 624-4 du code de commerce), ou contre lequel a été relevé l'un des faits visés `a l'article L. 624-5 du code de commerce : la nouvelle procédure n'étant pas fondée sur son insolvabilité ne peut etre soumise aux dispositions du reglement ; - ouverture d'une procédure `a la suite de la résolution d'un plan de redressement ou d'un accord amiable (art. L. 621-3 du code de commerce, L. 621-82 du code de commerce et L. 621-91 du code de commerce) : s'il apparaît que le manquement aux obligations imposées par le plan révele un état de cessation des paiements, la nouvelle procédure releve des dispositions du reglement. Dans le cas contraire, et notamment si les engagements non tenus ne sont pas financiers, la solution inverse peut prévaloir : la procédure est alors fondée sur une sanction et non sur l'insolvabilité ; - ouverture d'une procédure `a l'égard des membres ou associés indéfiniment et solidairement responsables du passif d'une personne morale précédemment placée en redressement ou en liquidation judiciaire, telle qu'une SNC ou un GIE (art. L. 624-1 du code de commerce) : cette décision est fondée sur une présomption d'insolvabilité de l'associé qui n'a pas assuré le financement de la personne morale. La procédure ouverte `a son égard entre donc dans le champ d'application du reglement. Néanmoins, si le centre principal des intérets de l'associé est situé dans un autre Etat que celui du siege de la personne morale, la juridiction ayant ouvert la procédure `a l'égard de cette derniere n'est pas compétente `a cette fin. Une demande d'ouverture d'une procédure `a son égard devra etre faite dans cet autre Etat, qui l'examinera selon sa loi interne. Il en irait différemment s'il était constaté que l'associé a frauduleusement déplacé son siege ou son domicile. Dans toutes ces hypotheses, les juridictions pourront utilement etre invitées `a préciser si le fondement juridique retenu pour l'ouverture de la procédure est la cessation des paiements du débiteur. 1.2. Les regles de compétence juridictionnelle Le reglement énonce deux criteres de compétence territoriale : le centre des intérets principaux du débiteur et, sous certaines conditions, le lieu ou il possede un établissement. L'énumération de ces criteres est limitative car le reglement ne réserve pas l'application de la loi de la juridiction saisie. Des lors, l'application des articles 14 et 15 du code civil (compétence en raison de la nationalité française du débiteur ou du créancier) ne peut plus etre invoquée. 1.2.1. La compétence `a raison du centre des intérets principaux du débiteur (art. 3, § 1) Ce critere de compétence est défini comme étant le lieu ou le débiteur gere habituellement ses intérets (considérant n° 13). Ce terme peut etre compris comme désignant le centre effectif de direction de ses affaires. Lorsque celui-ci est une personne morale, le centre de ses intérets principaux est présumé etre le lieu de son siege, cette présomption supportant la preuve contraire (art. 3, § 1). Le droit interne ne peut pas écarter l'application du reglement. Par conséquent, la regle de droit français selon laquelle, lorsque le siege a été transféré moins de six mois avant la saisine, la compétence du tribunal de l'ancien siege demeure, ne peut etre appliquée alors que le transfert du siege s'est opéré d'un Etat `a un autre. Une telle regle serait en effet incompatible avec celle de la compétence du fait du siege, seule applicable au sens du reglement. Toutefois, il convient de réserver l'hypothese de la fraude, qui pourrait etre retenue lorsque le transfert du siege est dicté exclusivement par la volonté de nuire aux créanciers ou `a certains d'entre eux. 1.2.2. La compétence `a raison d'un établissement du débiteur (art. 3, § 2) Il importe ici de souligner que l'établissement n'est pas une société filiale, dotée de la personnalité morale, laquelle ferait l'objet d'une procédure autonome de droit commun. 1.2.2.1. La notion d'établissement Un établissement est défini par le reglement comme « tout lieu d'opérations ou le débiteur exerce de façon non transitoire une activité économique avec des moyens humains et des biens » (art. 2, h). Le demandeur doit donc établir la présence en France d'une activité économique et de moyens présentant une certaine permanence. Une succursale, un bureau de représentation, une agence répondront `a ces conditions. Par conséquent, ni la détention de simples avoirs en compte ni l'existence de biens isolés en France ne constituent un critere de compétence suffisant pour qu'y soit ouverte une procédure. Dans l'hypothese ou le débiteur possede en France plusieurs établissements, la juridiction française compétente est, en application de l'article 1er, alinéa 1, du décret du 27 décembre 1985, celle dans le ressort de laquelle est situé le centre principal de ses intérets. 1.2.2.2. Les conditions d'application du critere de compétence `a raison de l'établissement La compétence de la juridiction de l'Etat ou le débiteur possede un établissement est parfois soumise `a certaines conditions. Le reglement opere sur ce point une distinction fondée sur la date de sa saisine : - si elle est saisie apres que la juridiction de l'Etat ou se trouve le siege du débiteur a ouvert une procédure, elle est compétente sans restriction. La procédure alors ouverte du chef de l'établissement est dite « secondaire ». Il ne peut s'agir que d'une liquidation judiciaire ; - si elle est saisie avant que la juridiction de l'Etat du siege ait ouvert une procédure principale, la faculté d'ouvrir la procédure territoriale est subordonnée `a deux conditions alternatives (art. 4) : - l'impossibilité d'ouvrir la procédure dans l'Etat du siege, selon la loi de cet Etat (par exemple parce que l'actif est considéré comme insuffisant pour payer les frais de procédure, ou en raison de la nature de l'activité professionnelle du débiteur) ; - la saisine par un créancier domicilié dans l'Etat sur le territoire duquel est situé l'établissement ou qui se prévaut d'une créance ayant son origine dans son exploitation (art. 3, § 4, b). Cette condition sera en fait assez facilement remplie. Il convient de souligner que dans cette hypothese la juridiction ne pourra etre saisie ni par le débiteur, ni par le procureur de la République ni se saisir d'office. Dans ces deux hypotheses, le tribunal peut ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. 1.2.3. Les mentions accompagnant le choix d'un critere de compétence Il est important que le tribunal énonce dans le jugement d'ouverture le critere de compétence territoriale retenu, c'est-`a-dire la qualification de « centre des intérets principaux » ou d'« établissement » se trouvant dans son ressort. Sa décision sur ce point doit figurer dans le dispositif de ce jugement, le critere de compétence faisant partie des mentions publiées. Elle doit en outre etre motivée, car ce critere détermine la nature de la procédure (principale ou territoriale) et en conséquence l'étendue des effets transfrontaliers de la décision. Le critere de compétence requis doit etre évoqué `a l'audience, le respect du principe du contradictoire exigeant que cette question soit débattue avant d'etre tranchée. Le demandeur peut ne pas avoir indiqué le critere de compétence dans son acte de saisine, ce qui ne semble pas etre une cause de nullité de l'assignation, en application de l'article 114 du nouveau code de procédure civile, faute d'un texte en ce sens et faute de pouvoir qualifier cette mention de formalité substantielle ou d'ordre public. En ce cas, le tribunal invitera les parties `a présenter leurs explications sur la qualification du lieu situé dans son ressort. Si un tribunal est saisi d'une demande d'ouverture d'une procédure principale, et si, estimant que le centre des intérets principaux du débiteur n'est pas situé dans son ressort mais que la cessation des paiements de l'un de ses établissements est caractérisée, il ouvre une procédure territoriale, la décision, statuant `a la fois sur la compétence et sur le fond (l'état d'insolvabilité), sera susceptible d'appel et non de contredit (art. 80, al. 1, NCPC). Une solution identique vaut pour l'hypothese ou la juridiction saisie d'une demande d'ouverture de procédure territoriale décide d'ouvrir une procédure principale, toujours apres avoir recueilli les observations des parties sur ce point. 2. Les effets internationaux communs aux deux types de procédure L'article 16, § 1, du reglement dispose que toute décision d'ouverture est reconnue dans les autres Etats membres des qu'elle produit ses effets dans l'Etat d'ouverture. La reconnaissance d'un jugement étranger entraîne son admission dans l'ordre juridique interne (sans permettre toutefois de mesure d'exécution forcée sur les biens). Ainsi la décision d'ouverture de la procédure principale rendue dans un Etat ne saurait etre contrariée par une juridiction d'un autre Etat saisie d'une deuxieme demande tendant aux memes fins. De meme, la qualification d'établissement figurant dans un jugement d'ouverture d'une procédure territoriale s'impose dans tous les Etats. L'exercice des voies de recours est seul `a meme de résoudre les éventuels conflits de compétence. L'article 26 du reglement confere aux Etats la faculté de refuser de reconnaître une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre Etat lorsque cette reconnaissance produirait des effets manisfestement contraires `a son ordre public. La notion d'ordre public sera examinée au chapitre 5, mais il convient de souligner qu'elle fait l'objet d'une interprétation stricte (« effets manifestement contraires... »), et qu'elle ne saurait permettre d'écarter le constat, opéré par le jugement d'ouverture, de l'insolvabilité ou de l'existence d'un siege ou d'un établissement. Par ailleurs, le jugement d'ouverture permet au syndic d'exercer certaines prérogatives, dans les autres Etats : il peut demander que cette décision soit publiée dans tout autre Etat, il doit avertir tous les créanciers connus, il peut exercer les actions en nullité de la période suspecte. En outre, ont été arretées des dispositions relatives aux conditions d'exercice de la mission du syndic dans les autres Etats, ainsi qu'`a la coopération entre syndics lorsque plusieurs procédures sont ouvertes. 2.1. La publicité du jugement d'ouverture dans tous les Etats membres L'article 21 du reglement est relatif `a la publicité du jugement d'ouverture dans les autres Etats, que l'on distinguera de son inscription sur un registre, qui n'est prévue que pour la procédure principale (art. 22, cf. chap. 3 ci-dessous). 2.1.1. Les modalités de la publicité L'accomplissement des mesures de publicité, selon les modalités prévues dans chaque Etat, peut etre demandé par le syndic désigné dans un autre Etat (art. 21, § 1). Le greffier ne peut pas rejeter cette demande : le reglement étant d'application directe, sa mise en oeuvre n'est subordonnée `a aucune modification du droit interne. Conformément `a l'article 21 du décret du 27 décembre 1985, le greffier du tribunal français dans le ressort duquel est situé l'établissement d'un débiteur ayant son siege `a l'étranger doit, sur demande du syndic désigné par la juridiction étrangere, adresser un avis mentionnant la décision d'ouverture au BODACC et dans un journal d'annonces légales. Il en est de meme lorsque la décision ouverte `a l'étranger est une procédure territoriale : sur demande du syndic, elle devra faire l'objet d'une publicité `a la diligence du greffier du tribunal dans le ressort duquel est situé en France le siege du débiteur. Selon l'article 21 du reglement, c'est le « contenu essentiel » de la décision qui doit etre publié. Cette notion recouvre les dispositions de l'article 21, alinéa 4, du décret du 27 décembre 1985 qui prévoit l'indication du nom du débiteur, du siege de l'entreprise, de son immatriculation, de l'activité exercée, de la date du jugement d'ouverture, du nom et de l'adresse du syndic (représentant des créanciers), et de l'avis aux créanciers d'avoir `a déclarer. En outre, la publicité doit mentionner le critere de compétence retenu par la juridiction d'ouverture (siege ou établissement). 2.1.2. La portée de la publicité Elle n'est pas nécessaire pour que le jugement produise ses effets transfrontaliers. Elle aide simplement le syndic `a reconstituer l'actif : en effet, selon l'article 24 du reglement, lorsqu'apres la publicité de la décision d'ouverture, un débiteur du débiteur exécute son obligation directement entre les mains de ce dernier et non du syndic, dans un autre Etat membre que celui de l'ouverture de la procédure, il est présumé en avoir eu connaissance et il n'est pas libéré. Mais, contrairement au droit français, le débiteur pourra échapper `a la demande du syndic tendant `a dire inopposable le paiement effectué, en démontrant qu'il ignorait l'ouverture de la procédure. Cette disposition est moins favorable au syndic que le droit français, auquel elle se substitue `a l'égard des débiteurs du débiteur qui résident dans un autre Etat membre. 2.2. L'information individuelle des créanciers connus dans tous les Etats membres 2.2.1. Les créanciers concernés 2.2.1.1. Le principe de l'information de l'ensemble des créanciers connus et la déclaration des créances Des qu'une procédure est ouverte, le syndic doit informer sans délai les créanciers connus qui ont leur résidence habituelle, leur domicile ou leur siege dans les autres Etats membres (art. 40). Le reglement ne limite pas l'obligation d'avertir les créanciers `a ceux dont la créance est liée `a l'exploitation du siege ou de l'établissement situé dans l'Etat d'ouverture. Par conséquent, en France, le représentant des créanciers ou le liquidateur, meme lorsqu'il est désigné dans le cadre d'une procédure territoriale, doit se faire remettre la liste de tous les créanciers de la personne morale, y compris de ceux qui résident dans les autres Etats et de ceux dont la créance est sans rapport avec l'activité de l'entreprise dans l'Etat d'ouverture. Le syndic doit accepter la production de tout créancier domicilié dans un Etat membre autre que celui ou la procédure a été ouverte (art. 39). En outre, dans le cas ou deux procédures sont ouvertes, tout créancier peut produire `a la procédure principale et `a la procédure secondaire (art. 32, § 1). Il devra respecter les regles prévues par la loi d'ouverture de chaque procédure relatives `a la recevabilité des déclarations de créance (art. 4, § 2, h). 2.2.1.2. L'information et la situation particuliere des créanciers titulaires de droits réels L'article 5 du reglement dispose que « l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel d'un créancier (...) sur des biens appartenant au débiteur, et qui se trouvent, au moment de l'ouverture de la procédure, sur le territoire d'un autre Etat membre ». La combinaison de ce principe et de l'obligation d'informer les créanciers évoquée ci-dessus conduit `a examiner si les créanciers titulaires de tels droits réels doivent etre recherchés et avisés. Il peut etre prudent de les aviser d'avoir `a déclarer tout en leur rappelant les dispositions des articles 5 `a 7. En effet, les titulaires des droits visés par ces articles sont, comme tous les créanciers, soumis `a la loi d'ouverture : ils doivent donc déclarer dans le délai qu'elle prévoit. Cependant, la sanction du défaut de déclaration réguliere doit etre déterminée en considération du principe selon lequel le droit réel n'est pas affecté. Ainsi, le cas échéant, dans une procédure ouverte en France, faute d'avoir produit régulierement, le créancier titulaire d'un droit réel sur un bien situé dans un autre Etat ne pourra participer aux opérations de répartition de l'actif dans le cadre de la procédure. En revanche, il pourra exercer sans aucune restriction les facultés spécifiques de recouvrement conférés par le droit réel : dans l'Etat ou est situé le bien qui en est grevé, la créance ne saurait etre considérée comme éteinte, seul le droit français prévoyant cette sanction. 2.2.2. Les modalités de l'information et de la déclaration des créances Pour les modalités d'information et de production des créances, le reglement soumet les créanciers `a des regles identiques, qu'ils résident ou non dans l'Etat d'ouverture. Selon l'article 40 du reglement, le syndic doit adresser aux créanciers connus et domiciliés dans un autre Etat membre une note portant notamment sur les délais `a observer, leur sanction, l'organe habilité `a recevoir les déclarations de créances et « les autres mesures prescrites ». Cette note doit comporter le titre suivant traduit dans toutes les langues de l'Union européenne « Invitation `a produire une créance. Délais `a respecter ». Mais le corps du document lui-meme, qui doit indiquer les mesures prescrites aux créanciers par la loi de l'Etat d'ouverture, peut etre rédigé dans la langue de ce dernier. En France, il doit reprendre les mentions indiquées dans l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 et rappeler, en outre, que les créanciers bénéficiant d'un privilege ou d'une sureté réelle doivent déclarer. L'article L. 621-43 du code de commerce impose, s'il y a lieu, d'adresser aux créanciers titulaires de suretés publiées un avis au domicile élu, en plus de l'information adressée au domicile personnel. Dans l'incertitude dans laquelle se trouve le représentant des créanciers de l'existence de contrats publiés, il est prudent de lui recommander d'aviser systématiquement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception le créancier domicilié `a l'étranger si ce dernier est susceptible d'avoir effectué une telle publicité (cf. note 4) . Le représentant des créanciers pourra demander au créancier domicilié `a l'étranger de traduire en français sa déclaration (art. 42, § 2). Il semble qu'il puisse également réclamer une traduction des pieces justificatives importantes. Ces demandes pourraient utilement etre formées par avance dans l'avis d'avoir `a déclarer la créance lorsque le créancier n'est pas domicilié dans un Etat francophone. La demande de traduction ne saurait etre assimilée `a une discussion de la créance au sens de l'article L. 621-47 du code de commerce. Ainsi, le défaut de remise de la traduction dans les trente jours de la demande n'interdit pas au créancier de contester la proposition du représentant des créanciers et ne dispense pas le juge-commissaire de le convoquer `a son audience. Le défaut de réponse `a une demande de traduction ne saurait etre sanctionné comme un défaut de production. 2.3. L'exercice par le syndic des actions en nullité prévues par la loi d'ouverture dans les autres Etats membres Le syndic peut se fonder sur les dispositions de la loi d'ouverture pour engager une action en nullité ou en inopposabilité d'un acte antérieur `a l'ouverture et préjudiciable aux créanciers (art. 4, § 2, m, et art. 18, § 2). Cette faculté porte sur tous les actes irréguliers au sens de la loi d'ouverture, quels que soient l'Etat dans lequel ils ont été passés, le domicile du contractant et la nature de la procédure (territoriale ou principale). Si le syndic devra saisir le tribunal compétent en vertu de la loi de l'Etat d'ouverture, cette juridiction, si elle est étrangere, aura `a appliquer la loi d'ouverture. (Sur ce point, voir également le § 3.3.4.) 2.4. Les conditions d'exercice de la mission du syndic dans les autres Etats membres Indépendamment des pouvoirs spécifiques dont le syndic dispose dans le cadre de chaque type de procédure (principale ou territoriale), il doit respecter certaines regles communes. 2.4.1. La justification de ses pouvoirs Elle sera satisfaite par la présentation de deux sortes de documents : - une copie, certifiée conforme par une autorité qui peut etre le greffier, de la décision de nomination, ou de tout autre certificat établi par la juridiction. Il sera utile que le jugement d'ouverture rendu en France précise quelles sont les missions respectives de l'administrateur et du représentant des créanciers. Une traduction dans la langue de l'Etat ou le syndic entend agir peut etre exigée (art. 19), notamment par les créanciers ; - bien que le reglement ne le prévoie pas, le syndic invoquant dans un Etat les pouvoirs que lui confere la loi d'un autre Etat devra rapporter la preuve du contenu de cette loi. Ses interlocuteurs (juridictions, créanciers) pourront exiger `a ce titre la production d'un certificat de coutume ou de tout autre document équivalent, par exemple un exemplaire traduit des dispositions pertinentes de la loi. 2.4.2. La prohibition de l'emploi de moyens contraignants et l'impossibilité de statuer sur un litige ou un différend (art. 18, § 3) Le syndic ne dispose pas de la force publique. Ainsi, lorsqu'il est désigné dans le cadre d'une procédure principale, s'il peut déplacer les biens du débiteur hors du territoire ou ils sont situés (art. 18, § 1), il n'a cependant pas la faculté de passer outre `a la contestation d'un tiers ou du débiteur : il doit saisir le juge local pour etre autorisé `a exercer ses prérogatives. Désigné dans le cadre d'une procédure territoriale, il ne peut davantage transférer les biens contre la volonté d'autrui et son pouvoir est en outre cantonné `a l'organisation du retour dans l'Etat d'ouverture des biens qui en ont été déplacés postérieurement (art. 18, § 2). Une autre limitation des pouvoirs du syndic concerne l'impossibilité de statuer sur un différend ou sur un litige. Elle ne remet pas en cause l'obligation du représentant des créanciers français d'examiner les déclarations de créance. En effet, s'il les conteste, c'est au juge qu'il appartiendra de se prononcer. 2.5. Les relations entre les syndics en cas de pluralité de procédures 2.5.1. Le devoir mutuel d'information et de coopération Cette obligation porte notamment sur le passif admis et sur les mesures visant `a mettre fin `a la procédure (art. 31). L'énumération des informations susceptibles d'échanges n'est pas limitative, de sorte que les syndics pourront se communiquer tous les éléments relatifs `a l'actif et au passif des procédures ainsi qu'aux perspectives de clôture. Il y aura lieu de veiller `a ce que l'exécution de cette obligation de coopération soit effective et loyale. Le reglement réserve l'application des regles internes limitant la communication des renseignements et relatives notamment au respect de la vie privée ou au secret professionnel. A ce titre, les lettres adressées au débiteur qui ont un caractere personnel ne doivent pas etre transmises, comme le prévoient les articles L. 621-20 et L. 622-15 du code de commerce. Il convient de rappeler qu'apres l'ouverture dans un Etat membre d'une procédure secondaire, le syndic de la procédure principale ne peut plus y exercer la plénitude de ses pouvoirs (art. 18, § 1). En revanche, il peut présenter des propositions relatives `a la liquidation ou `a l'utilisation des actifs (art. 31, § 3). 2.5.2. La faculté du syndic de produire dans toute autre procédure Selon l'article 32 du reglement, un syndic peut produire dans toute autre procédure les créances déj`a produites dans la procédure qu'il a `a connaître, s'il respecte les délais de la loi applicable `a cette autre procédure, et dans la mesure ou cette production est utile aux créanciers. Cette disposition importante est de nature `a rendre plus complexe la tâche des représentants des créanciers français mais elle permet aux juridictions, meme saisies `a raison d'un établissement, d'avoir une connaissance exacte du passif du débiteur. Ainsi, le syndic désigné dans une procédure principale pourra produire dans une procédure secondaire, dont il aura pu demander lui-meme l'ouverture (art. 29, a), les créances déj`a produites dans la procédure principale. Les créanciers seront donc dispensés de produire eux-memes `a nouveau dans la procédure secondaire. Ils sont présumés avoir donné mandat au syndic pour produire dans celle-ci. Le syndic doit fait usage de cette faculté avec discernement, apres s'etre assuré de l'intéret de cette production, par exemple s'il constate que l'actif de l'autre procédure permet de désintéresser les créanciers de la procédure qu'il a en charge. Les créanciers concernés peuvent s'opposer `a cette démarche du syndic, notamment si elle ne leur est pas utile et est onéreuse pour eux. 3. L'effet universel de l'ouverture de la procédure principale L'article 17, § 1, énonce le principe essentiel du reglement : la décision d'ouverture d'une procédure principale produit dans tout autre Etat, sans aucune autre formalité, les effets que lui attribue la loi de l'Etat d'ouverture (dite loi d'ouverture). Les créanciers résidant `a l'étranger sont donc soumis aux effets de la procédure ouverte en France, sans qu'une mesure d'exequatur ou de publicité de la décision d'ouverture soit nécessaire. Aucune disposition du reglement ne leur permet de contester devant la juridiction de l'Etat de leur domicile le bien-fondé de cette décision, au motif, par exemple, que l'insolvabilité du débiteur n'est pas démontrée. Ils ont simplement la faculté de former un recours dans l'Etat d'ouverture, dans les limites fixées par la loi locale tenant par exemple `a leur qualité pour agir en justice. Ils pourront également former un recours contre la reconnaissance du caractere exécutoire d'une décision ultérieure prise dans le cadre de la procédure principale (cf. infra chap. 5). Il convient en premier lieu d'examiner les conséquences du principe des effets universels de la procédure principale, puis ses limites liées `a l'existence des droits de certains créanciers. 3.1. Les effets généraux de l'ouverture de la procédure 3.1.1. L'arret des poursuites individuelles Le syndic peut s'en prévaloir dans les autres Etats `a l'égard des créanciers concernés, et selon les dispositions de la loi d'ouverture (art. 4, f). Par conséquent, les créanciers qui saisissent les biens situés dans un autre Etat doivent spontanément cesser leurs poursuites. S'ils ne le font pas, la juridiction de cet autre Etat peut les y contraindre en appliquant la loi d'ouverture sans exiger l'exequatur de la décision d'ouverture. En France, le juge de l'exécution sera donc conduit `a appliquer la loi de l'Etat d'ouverture pour déterminer les conséquences de l'ouverture de la procédure d'insolvabilité dans cet Etat sur une procédure civile d'exécution en cours en France. Toutefois, il résulte de l'article 15 du reglement que les effets de l'ouverture de la procédure d'insolvabilité sur une insistance en cours n'ayant pas pour objet une mesure d'exécution sont régis par la loi de l'Etat ou elle se déroule ; c'est `a cette derniere, et non `a la loi d'ouverture, que le syndic devra se référer pour connaître les modalités de la reprise d'instance. Tel est le cas, par exemple, d'une demande en paiement. 3.1.2. L'inopposabilité des paiements effectués apres l'ouverture de la procédure Selon l'article 20 du reglement, le syndic peut exiger la restitution, par des créanciers soumis aux effets transfrontaliers de la procédure, des sommes perçues apres l'ouverture : celles-ci doivent etre restituées quel que soit le lieu ou elles ont été versées, et meme si elles proviennent de la saisie d'un bien situé dans un autre Etat. Cette disposition est de nature `a assurer l'efficacité de la mission de conservation de l'actif incombant au syndic. 3.2. Les effets de l'ouverture de la procédure principale sur les pouvoirs du syndic dans les autres Etats membres Le jugement produisant en France effet `a compter de sa date, il conviendra de veiller `a ce que, des celle-ci, l'administrateur judiciaire et le représentant des créanciers disposent des deux documents évoqués plus haut constituant la preuve de leurs pouvoirs. En cas de désignation d'un administrateur judiciaire, celui-ci devra impérativement se coordonner avec le représentant des créanciers pour engager les actions et diligences nécessaires `a l'étranger, en tenant compte de leurs attributions respectives. 3.2.1. L'inscription sur un registre du jugement d'ouverture de la procédure principale Le reglement dispose que la procédure principale peut faire l'objet d'une mention dans un registre public (art. 22, § 1). En France, il s'agit du registre du commerce et des sociétés, du répertoire des métiers, du répertoire des entreprises dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, ou du registre tenu au tribunal de grande instance. Cette demande ne peut pas etre rejetée car le reglement communautaire prévaut sur la loi interne. Par conséquent, lorsque le débiteur est une personne morale ayant son siege `a l'étranger et possédant un ou plusieurs établissements en France, le jugement d'ouverture de la procédure principale prononcé par la juridiction étrangere doit etre mentionné au registre tenu par le greffe de chaque lieu d'immatriculation du débiteur en France. 3.2.2. Les pouvoirs de gestion et la préparation du redressement 3.2.2.1. La compétence de principe de la loi d'ouverture (art. 4, § 2, c, e, h, et art. 18, § 1) Pour gérer le patrimoine du débiteur pendant la procédure et préparer la décision de redressement ou de liquidation, le syndic peut faire usage dans tous les Etats des pouvoirs que lui attribue la loi de l'Etat d'ouverture, dans les limites examinées ci-dessus (§ 2.4.2). Ainsi, lorsque la procédure principale est ouverte dans un Etat autre que la France, les dispositions de la loi de cet autre Etat, relatives `a la poursuite des contrats en cours, s'appliqueront `a l'exécution en France des contrats passés pour l'exploitation des établissements français du débiteur étranger. En revanche, pour déterminer si un contrat est ou non en cours `a la date de l'ouverture de la procédure, il y a lieu de se référer `a la loi du contrat, cette question n'étant pas relative `a la procédure d'insolvabilité proprement dite. La vérification du passif se fait selon les regles de la loi d'ouverture, notamment en ce qui concerne les conditions de régularité des déclarations de créance (art. 4, h). Il convient de rappeler que si les créanciers domiciliés hors de France peuvent déclarer leur créance dans la langue de leur Etat, le représentant des créanciers a la faculté de leur demander une traduction française (art. 42, al. 2). D'autre part, les créanciers domiciliés `a l'étranger bénéficient déj`a d'un allongement de deux mois du délai pour déclarer leurs créances. Celui-ci court `a compter de la publication au BODACC français, et non de la publicité faite éventuellement dans l'Etat ou ils résident. Enfin, il convient de rappeler que lorsque plusieurs procédures sont ouvertes, un créancier peut produire dans chacune d'elles (art. 32, § 2). Le syndic pourra intenter les actions en nullité ou en inopposabilité prévues par la loi d'ouverture `a l'encontre des actes préjudiciables antérieurs `a l'ouverture, meme si l'acte a été passé dans un autre Etat. Ainsi, un représentant des créanciers français pourra toujours contester le paiement d'une dette en période suspecte, sur le fondement des articles L. 621-107 et L. 621-108 du code du commerce, meme si le paiement a été effectué dans le cadre d'un contrat non soumis `a la loi française. Le syndic peut déplacer les biens du débiteur d'un Etat `a l'autre, par exemple pour les réunir (sous réserve qu'ils soient libres de tout droit réel au sens des articles 5 `a 7 examinés ci-dessous). Mais, si un tiers s'y oppose, il doit invoquer cette prérogative devant la juridiction compétente, car il ne dispose pas de la force publique (art. 18, § 3). Le plan de redressement doit etre élaboré apres examen de la situation du débiteur dans tous les Etats ou il possede des actifs et ou il a des dettes. Sa préparation sera donc complexe. 3.2.2.2. Les exceptions `a cette compétence (art. 8 `a 12) Le reglement, dans un souci affirmé de protection des cocontractants, donne compétence `a la loi d'un Etat autre que celui de l'ouverture, en ce qui concerne les effets de la procédure d'insolvabilité sur certains contrats : - les effets de la procédure sur un contrat donnant le droit d'acquérir ou de jouir d'un bien immobilier (par exemple le bail ou le crédit-bail immobilier) sont régis par la loi de l'Etat ou est situé l'immeuble ou de l'Etat sous l'autorité duquel le registre est tenu (art. 8) ; - les effets de la procédure sur les droits et obligations des participants `a un systeme de paiement sont régis exclusivement par la directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractere définitif du reglement dans les systemes de paiement (art. 9) ; - les effets de la procédure d'insolvabilité sur le contrat de travail sont régis par la loi de l'Etat applicable `a ce contrat (art. 10). Selon la convention de Rome du 19 juin 1980, la loi applicable `a un contrat de travail est déterminée par l'accord des parties, `a condition que ce choix ne prive pas le salarié de la protection que lui assurerait la loi de l'Etat avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits. Si la volonté des parties ne peut se déduire d'aucun élément probant, la loi applicable sera celle du lieu de travail habituel (art. 6 de la convention de Rome). La loi applicable au contrat de travail régissant les effets de la procédure d'insolvabilité sur celui-ci est également compétente pour fixer les conditions de la rupture de ce contrat et il convient donc de s'y référer pour savoir si le syndic a le pouvoir de procéder `a des licenciements sans autorisation judiciaire. Dans l'affirmative, la juridiction française saisie de la régularité du licenciement pourrait cependant examiner la conformité de l'application de la loi étrangere `a l'ordre public. En revanche, le rang et éventuellement le privilege des créances salariales sont déterminés par la loi d'ouverture (art. 4, § 2, i). Il convient de distinguer les effets de la procédure d'insolvabilité sur le contrat de travail, qui déterminent par exemple les conditions de rupture et les droits du salarié sur les biens du débiteur détenus par le syndic, des regles instituées pour la protection des salariés contre l'insolvabilité de l'employeur. Le texte applicable en la matiere est la directive 80/987/CEE, modifiée par la directive 2002/74/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 (JOCE du 8 octobre 2002). Selon le nouvel article 8 bis de la directive l'organisme de garantie compétent, qui applique la loi de son Etat, est celui sur le territoire duquel le travailleur exerce ou exerçait habituellement son travail ; - les effets de la procédure d'insolvabilité concernant les droits du débiteur sur un bien immobilier, un aéronef ou un navire, qui sont soumis `a l'inscription dans un registre public, sont régis par la loi de l'Etat sous l'autorité duquel est tenu le registre public ; - enfin il résulte de l'article 14 que la validité des actes par lesquels, apres l'ouverture de la procédure, le débiteur dispose, au mépris du dessaisissement, de biens situés dans un autre Etat sont soumis `a la loi de ce dernier. Cette disposition, qui tend `a protéger les acquéreurs, est néanmoins limitée `a certains biens importants : immeubles, aéronefs, navires, valeurs mobilieres dont l'existence suppose une inscription dans un registre prévu par la loi et tenu par un établissement de crédit pour enregistrer les opérations sur celles-ci. 3.2.3. Les pouvoirs de réalisation de l'actif du débiteur Lorsque la loi de l'Etat d'ouverture confere au syndic le pouvoir de vendre sans autorisation du juge, il convient d'examiner quelle forme prescrit la loi de l'Etat ou se trouve le bien (vente de gré `a gré ou par adjudication). En effet, les modalités de réalisation de l'actif sont régies par la loi ou sont situés les biens `a liquider (art. 18, § 3). Si la loi d'ouverture exige une autorisation judiciaire, le syndic devra l'obtenir du juge qui a ouvert la procédure, puis demander dans l'Etat du lieu de situation du bien d'en constater le caractere exécutoire, selon la procédure de l'article 25 du reglement examinée au chapitre 5 de la présente circulaire. 3.2.4. Les pouvoirs spécifiques du syndic 3.2.4.1. Le pouvoir de demander des mesures conservatoires sur les biens qui se trouvent dans un autre Etat L'article 38 du reglement fait référence `a l'hypothese dans laquelle la loi d'ouverture donne `a la juridiction la faculté de désigner un « syndic provisoire », en vue d'assurer la conservation des biens du débiteur pour la période séparant la demande d'ouverture de la procédure de la décision elle-meme. Cette faculté de procéder `a des mesures provisoires n'existe en droit français que dans le cas ou, bien que la procédure soit déj`a ouverte, la juridiction compétente n'est pas encore définitivement désignée (art. 3 du décret du 27 décembre 1985). L'article 38 permet au syndic provisoire de saisir la juridiction d'un autre Etat, dans le ressort de laquelle est situé un établissement du débiteur, afin que soit ordonnée toute mesure conservatoire prévue par la loi de l'Etat d'ouverture de la procédure secondaire. La juridiction devra vérifier que les conditions d'ouverture d'une procédure secondaire sont remplies (existence d'un établissement dans son ressort), car elle ne pourra ordonner une mesure provisoire que dans ce cas. En effet, l'article 38 est inséré dans le chapitre III relatif aux procédures secondaires, et il dispose que la mesure provisoire vaut « pour la période séparant la demande d'ouverture d'une procédure d'insolvabilité de la décision d'ouverture », ne faisant ainsi référence qu'`a l'ouverture d'une procédure secondaire dans l'Etat ou la mesure provisoire est ordonnée. Par ailleurs elle devra vérifier que le syndic provisoire a le pouvoir de présenter une telle demande. Cette preuve résultera de la production de toute piece utile sur le contenu de la loi d'ouverture et sur la nomination du demandeur en qualité de syndic provisoire. 3.2.4.2. Le pouvoir d'intervenir dans une procédure territoriale Le syndic de la procédure principale peut demander l'ouverture d'une procédure secondaire devant la juridiction compétente `a raison d'un établissement situé dans un autre Etat. A l'inverse, le reglement ne confere pas au syndic d'une procédure territoriale ouverte en premier lieu la possibilité de saisir la juridiction compétente `a raison du siege (art. 29). Lorsque deux procédures sont successivement ouvertes par plusieurs juridictions compétentes `a raison du siege puis de l'établissement, le reglement permet au syndic de la procédure principale d'intervenir activement dans la procédure territoriale : Il doit etre rendu destinataire par le syndic de la procédure secondaire de tous les élements utiles relatifs `a cette procédure. Informé, il peut alors en influencer le cours et présenter des propositions relatives `a l'utilisation des actifs (art. 31) : il peut demander la suspension de la procédure territoriale, que celle-ci soit antérieure ou postérieure `a la procédure principale (art. 33 et 36), par exemple en faisant valoir que la conservation d'actifs destinés `a etre réalisés dans ce cadre est nécessaire dans la perspective du redressement qu'il envisage dans le cadre de la procédure principale. Il doit cependant dans ce cas prendre toutes mesures utiles pour sauvegarder les intérets des créanciers de la procédure secondaire. La juridiction saisie de la procédure territoriale ne peut rejeter la demande que si elle est manifestement sans intéret pour les créanciers de la procédure principale. Cette restriction de son pouvoir d'appréciation, qui va plus loin que l'examen du seul intéret pour agir, est nouvelle en droit français. La suspension a en principe une durée maximale de trois mois, mais elle peut etre prolongée ou renouvelée. A la demande d'un créancier ou de l'un des syndics, la juridiction peut y mettre fin, si elle n'est plus justifiée, notamment par l'intéret des créanciers (art. 33, § 2). Dans l'hypothese ou la premiere procédure ouverte est une procédure territoriale de redressement, le syndic de la procédure principale ouverte ultérieurement peut demander sa conversion en une procédure de liquidation, si cette mesure lui paraît utile aux intérets des créanciers de la procédure principale dont il a la charge (art. 37). Le syndic de la procédure principale ouverte en premier lieu peut demander `a la juridiction compétente de clôturer par un plan de redressement la procédure territoriale liquidative ouverte ultérieurement (art. 34), si la loi d'ouverture de cette derniere le permet. Enfin, il convient de rappeler que la procédure principale cesse de produire ses effets dans un autre Etat lorsqu'une procédure territoriale y est ouverte (art. 17, § 1). Le devoir de coopération entre syndics prend tout son sens dans cette hypothese : le syndic de la procédure principale doit en effet communiquer au syndic de la procédure territoriale tous documents utiles, sur les productions reçues, les états de créances admises, les réalisations d'actifs en cours, etc. 3.3. Les effets restreints de la procédure principale sur certains droits Il s'agit des droits visés par les articles 5, 6 et 7 du reglement. 3.3.1. Les droits réels sur un bien situé `a l'étranger 3.3.1.1. La détermination de ces droits Le reglement vise les droits réels de façon large et non limitative mais ne définit pas ce qu'ils sont (art. 5). Il n'a pas pour objet de modifier en quoi que ce soit les regles de droit relatives `a la propriété. La liste figurant au texte n'est prise qu'`a titre d'exemples et ne peut etre comprise comme une définition des droits réels au sens du droit communautaire. C'est donc au droit applicable `a la sureté de déterminer la nature du droit et en particulier de déterminer s'il s'agit d'un droit réel ou personnel. Les exemples de l'article 5 ne sont donnés qu'`a titre d'illustration. Sont visés notamment le droit de réaliser un bien et d'etre désintéressé par son produit ou ses revenus (tels que le gage, l'hypotheque, le nantissement de biens corporels ou incorporels), mais également la clause de réserve de propriété et le droit réel de percevoir les fruits d'un bien. Ainsi, le droit applicable, déterminé conformément aux regles de conflit de lois du for, continuera de régir les conditions de validité de la sureté et ses effets. 3.3.1.2. Le régime applicable `a ces droits Les créanciers titulaires de ces droits ne sont pas soumis `a l'arret des poursuites individuelles prescrit par la loi d'ouverture s'ils portent sur des biens situés dans un autre Etat. Ils restent soumis aux dispositions de droit commun de la loi régissant le droit réel, qui est tres souvent la loi de l'Etat sur le territoire duquel le bien est situé : la loi relative `a l'insolvabilité de cet Etat ne s'applique pas. Les conséquences en sont importantes : les biens grevés ne peuvent pas etre appréhendés par le syndic, sous la réserve indiquée au paragraphe suivant. La distribution du prix de vente des biens que les créanciers titulaires de ces droits saisissent est indépendante des regles prévues par la loi d'ouverture pour le classement des privileges. Si le créancier titulaire d'un droit réel ne réalise pas le bien grevé, le syndic a le pouvoir de le faire, selon les formes de la loi de l'Etat de situation du bien (art. 18, § 3), `a condition de verser immédiatement au créancier le montant de ses droits en application du contrat et de la loi du lieu de situation du bien, sans que les regles de la procédure d'insolvabilité ne leur portent atteinte. 3.3.2. La faculté d'invoquer la compensation prévue par la loi applicable `a la créance du débiteur Lorsque la possibilité de compenser deux créances réciproques est permise par la loi applicable `a une créance du débiteur insolvable, l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit du créancier de l'invoquer. Les termes « loi applicable » font référence `a la législation en matiere d'insolvabilité de l'Etat dont le droit commun régit la créance. 3.3.3. Le droit fondé sur la clause de réserve de propriété situé sur un bien situé `a l'étranger Lorsqu'un bien qui fait l'objet d'une clause de réserve de propriété se trouve, `a la date de l'ouverture de la procédure d'insolvabilité `a l'égard du vendeur ou de l'acheteur, sur le territoire d'un autre Etat, les droits de son cocontractant ne sont pas affectés (art. 7). 3.3.4. Les limites apportées `a ces regles Il convient de souligner que ces exceptions, apportées `a l'efficacité de la procédure principale, peuvent dans certains cas etre écartées : - d'une part, si les biens grevés sont situés dans un Etat ou le débiteur possede un établissement, l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité territoriale secondaire dans cet Etat sera possible et elle permettra d'appréhender ces biens dans les conditions fixées par la loi qui lui est applicable (art. 27) ; - d'autre part, les regles relatives aux nullités de la période suspecte relevent de la loi de l'Etat d'ouverture (art. 4-2, m) : la validité de tout acte préjudiciable aux créanciers peut etre contestée par le syndic devant la juridiction de l'Etat ou est situé le bien grevé en application de cette loi. Il en est ainsi de l'acte constitutif du droit réel mais aussi de l'acte par lequel le créancier a transféré le bien grevé dans un autre Etat apres l'ouverture de la procédure (art. 5, § 4, art. 6, § 2, et art. 7, § 3, s'agissant du bien grevé d'une clause de réserve de propriété). Néanmoins, le cocontractant qui prétend échapper `a la nullité ou `a l'inopposabilité prévue par la loi de l'Etat d'ouverture dispose d'un moyen de défense spécifique : si l'acte litigieux est soumis `a une loi différente de la loi d'ouverture, et que cette loi ne permet par aucun moyen de l'attaquer, ni selon le droit de l'insolvabilité (actions en nullité ou en inopposabilité), ni selon le droit commun (action paulienne en particulier), il ne peut etre remis en cause (art. 13). La charge de la preuve de la loi étrangere pese sur le contractant qui s'oppose `a l'action du syndic. 4. Les conditions d'ouverture et l'effet limité de la procédure territoriale Cette procédure est ouverte `a l'égard du débiteur mais ses effets sont limités aux biens situés sur le territoire d'ouverture (art. 3, § 2). 4.1. Les conditions d'ouverture de la procédure territoriale 4.1.1. L'ouverture de la procédure territoriale lorsque aucune autre procédure n'a été ouverte L'article 3, § 4, pose certaines conditions de recevabilité. La procédure ne peut etre ouverte que dans l'un des cas suivants : - le créancier demandeur est situé dans le meme Etat que l'établissement ; - le créancier demandeur invoque une créance ayant son origine dans l'exploitation de l'établissement ; - la loi de l'Etat du siege rend impossible l'ouverture d'une procédure principale. En outre, sont habilités `a saisir le tribunal : - dans les deux premiers cas : seulement un créancier ; - dans le troisieme cas : toute personne et tout organe désigné par la loi d'ouverture. En outre, le tribunal devra vérifier avec attention qu'un véritable établissement, au sens du reglement, est situé dans son ressort. Il n'est pas lié, sur ce point, par la qualification donnée par le demandeur. S'il apparaît que c'est le centre des intérets principaux qui est situé dans le ressort, la procédure ouverte serait principale. Les débats et les motifs du jugement d'ouverture devront porter sur ce point. La juridiction devra également rechercher si le débiteur peut faire face `a son passif exigible avec son actif disponible. L'application de cette regle est difficile lorsque le centre des intérets principaux du débiteur est situé dans un autre Etat que celui ou le tribunal est saisi, car les actifs peuvent etre mal connus et la comptabilité difficilement accessible. Le respect du principe d'unité du patrimoine conduit néanmoins `a considérer que la preuve de la cessation des paiements du débiteur doit etre rapportée `a l'égard de la personne morale elle-meme, dans son entier. 4.1.2. L'ouverture de la procédure territoriale apres l'ouverture d'une procédure principale Une conséquence de l'effet universel de l'ouverture de la procédure principale est que la question de l'insolvabilité du débiteur n'a plus `a etre examinée puisqu'elle a été tranchée par le jugement d'ouverture de la procédure rendu par la juridiction compétente `a raison du siege du débiteur (art. 27). La juridiction devra néanmoins vérifier que les autres conditions d'ouverture prévues par son droit national sont réunies, notamment la qualité du débiteur (en droit français commerçant, artisan, agriculteur...) et, le cas échéant, les autres exigences de forme et de délai (par exemple, toujours en droit français, le délai d'un an institué `a l'article L. 621-15 du code de commerce). Le reglement donne aux juridictions compétentes des Etats membres la faculté de refuser de reconnaître la procédure principale ouverte dans un autre Etat lorsque cette reconnaissance aurait des effets manifestement contraires `a leur ordre public (art. 26). Mais la juridiction saisie en second lieu ne saurait se livrer `a un réexamen des conditions d'ouverture de la procédure principale, que ce soit sur l'insolvabilité ou sur la qualification de siege retenue par la juridiction étrangere `a propos des moyens d'exploitation situés dans son ressort. En effet, la notion d'ordre public s'entend restrictivement, au sens de l'ordre public international, comme l'ensemble des regles auxquelles aucune dérogation ne peut etre apportée (par exemple le respect des droits de la défense au cours de la procédure principale). La procédure secondaire ne peut etre que liquidative. Il est apparu, en effet, que la coexistence d'une procédure principale et d'une procédure secondaire de redressement serait excessivement difficile `a gérer, en particulier si la procédure étrangere est une procédure de liquidation. 4.2. Les effets de l'ouverture de la procédure territoriale 4.2.1. L'obligation de rechercher les créanciers Il y a lieu de rappeler que le syndic de toute procédure d'insolvabilité, y compris d'une procédure territoriale, doit avertir tous les créanciers connus, meme ceux qui sont domiciliés dans un autre Etat ou dont la créance ne se rattache pas `a l'exploitation de l'établissement considéré. Le syndic d'une procédure territoriale secondaire devra aviser les créanciers titulaires de droits réels grevant des biens situés dans l'Etat ou elle est ouverte, meme s'ils l'ont été auparavant au titre de la procédure principale. 4.2.2. La suspension des poursuites individuelles L'article 17, § 2, indique qu'une limitation des droits des créanciers résultant de cette procédure, telle qu'un sursis des paiements ou une remise de dette, ne peut etre opposée « quant aux biens situés sur le territoire d'un autre Etat » qu'aux créanciers qui ont exprimé leur accord. Ainsi, la procédure territoriale n'affecte le droit de poursuite individuelle des créanciers sur les biens situés dans un autre Etat qu'avec l'accord des intéressés. Il en résulte que le tribunal pourrait faire figurer dans la décision arretant un plan de redressement la mention selon laquelle les créanciers ont accepté ou non que la procédure affecte leurs poursuites individuelles sur les biens situés dans les autres Etats. L'administrateur judiciaire devra interroger les créanciers sur ce point dans son projet de plan. 4.2.3. La gestion et la reconstitution de l'actif Le syndic gere les biens et les contrats selon les prescriptions de la loi d'ouverture. Seuls les biens situés dans l'Etat d'ouverture sont soumis `a la procédure. La date `a laquelle s'apprécie leur localisation est celle du jugement d'ouverture. Par conséquent, le syndic peut s'opposer au transfert d'un bien apres cette date. Il doit s'adresser au juge de l'Etat dans lequel le bien a été deplacé (art. 18, § 2). Le syndic peut engager, sur le fondement de la loi d'ouverture, toute action révocatoire (art. 18, § 2). Ce terme désigne les actions en nullité ou inopposabilité de la période suspecte. Les actions du syndic ne sont pas limitées aux actes passés dans l'Etat ou la procédure est ouverte. Enfin, il convient de rappeler `a nouveau que, selon l'article 17 du reglement, l'ouverture d'une procédure secondaire met fin aux effets de la procédure principale sur le territoire de l'Etat ou cette procédure secondaire est ouverte. 4.3. La clôture de la procédure territoriale La procédure territoriale peut aboutir `a un redressement judiciaire de l'entreprise qui fait l'objet de la procédure, meme dans le cas ou elle est une procédure secondaire liquidative, `a la condition que la loi applicable le permette (ce qui n'est pas le cas en France, sauf `a rappeler qu'une procédure de liquidation peut aboutir au maintien, au moins partiel, de l'exploitation, dans le cadre de la cession d'unité de production prévue par l'article L. 622-17). Une procédure de liquidation ouverte dans un Etat `a raison d'un établissement doit etre clôturée lorsque l'insuffisance de l'actif situé sur le territoire de cet Etat est constatée apres, le cas échéant, que le syndic a obtenu (sur le fondement de l'art. 18, § 2) le retour des biens transférés `a tort dans un autre Etat apres l'ouverture, ou reconstitué l'actif grâce aux actions en nullité. Sauf le cas de fraude, la clôture pour insuffisance d'actif d'une procédure ouverte en France `a raison de l'établissement ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice de leurs actions contre le débiteur, qui a son siege dans un autre Etat, sur les biens situés sur le territoire français qu'il viendrait `a acquérir ultérieurement. Par conséquent, si ce débiteur implante un autre établissement en France, ou un premier établissement a été liquidé, le nouvel actif qui en résulte ne semble pas pouvoir etre appréhendé par les créanciers de la liquidation. Lorsque le débiteur qui a son siege `a l'étranger est une personne morale et que la procédure ouverte en France `a raison de l'établissement aboutit `a une liquidation, l'article 3, § 2, du reglement conduit `a écarter l'application des dispositions de l'article 1844-7 [7°] du code civil, selon lesquelles la société prend fin par l'effet du jugement de liquidation judiciaire. En effet, les effets de la procédure française, limités aux biens situés en France, n'affectent pas la personnalité morale d'une société relevant d'un droit étranger, dont les conditions de dissolution restent régies par ce droit. 5. La reconnaissance et l'exécution des décisions relatives au déroulement et `a la clôture de la procédure d'insolvabilité L'article 25 du reglement dispose que les décisions relatives au déroulement et `a la clôture d'une procédure d'insolvabilité sont reconnues sans autre formalité, et éxécutés conformément aux articles 31 `a 51, `a l'exception de l'article 34, § 2, de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, dite Bruxelles I. La meme regle est applicable aux décisions portant approbation d'un concordat, `a celles qui sont relatives aux mesures conservatoires prises apres la demande d'ouverture, et `a celles qui dérivent directement de la procédure ou s'y inserent étroitement. Cette derniere catégorie embrasse les décisions qui correspondent aux objectifs de la procédure d'insolvabilité et font spécifiquement application du droit de l'insolvabilité, non du droit commun. Elle inclut par exemple l'ouverture de la procédure `a l'égard des dirigeants fautifs prononcée en application de l'article L. 624-5 du code de commerce et `a l'égard d'une personne ayant confondu son patrimoine avec celui du débiteur en vertu de l'article L. 621-5 du code de commerce. Toujours `a titre d'exemple, une décision condamnant un client du débiteur `a payer au syndic le montant d'une prestation réalisée par celui-ci ou statuant sur la propriété d'un bien sont exclues du champ d'application de l'article 25 du reglement. Les articles visés ci-dessus de la convention de Bruxelles organisent la procédure de présentation de la requete en exequatur simplifié de la décision étrangere : le juge statue dans un premier temps de façon non contradictoire, au vu de certaines pieces, et le recours contre sa décision est examiné contradictoirement. La convention de Bruxelles n'étant pas `a l'origine applicable `a la faillite, l'article 25 du reglement insolvabilité en a élargi le domaine d'application. Or, depuis le 1er mars 2002, elle est remplacée par le reglement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matiere civile et commerciale. Si l'on se réfere : - `a l'article 1er du reglement n° 44/2000 qui dispose que les faillites, concordats et autres procédures analogues sont exclus de son application ; - `a son article 67 qui dispose qu'il ne préjuge pas de l'application des dispositions qui, dans des matieres particulieres, reglent la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions et qui sont contenues dans les actes communautaires ou dans les législations nationales harmonisées en exécution de ces actes ; - `a son article 68 qui dispose que toute référence faite `a la convention de Bruxelles s'entend comme faite `a lui-meme « dans la mesure ou [il] remplace entre les Etats membres [cette] convention » ; - ainsi qu'`a son considérant 24 qui précise qu'un souci de cohérence commande qu'il n'affecte pas les regles sur la compétence et la reconnaissance des décisions contenues dans des instruments communautaires spécifiques, il apparaît conforme aux principes d'interprétation des regles communautaires de continuer `a appliquer la lettre du reglement n° 1346/2000 (art. 25) en ce qu'il se réfere `a la convention du 27 septembre 1968. Celle-ci se trouve désormais applicable en cette matiere, sous les réserves ci-apres mentionnées. Les articles 31 `a 51 de la convention de Bruxelles concernent la procédure de la demande d'exequatur. L'article 34, § 2, expressément écarté en matiere d'insolvabilité, concerne les motifs pour lesquels le juge peut refuser l'exequatur de la décision étrangere. Cette exclusion ne signifie pas que le juge n'a aucun pouvoir d'appréciation, elle implique au contraire simplement que les criteres d'acceptation ou de rejet de la demande sont ceux issus du droit commun - qui est jurisprudentiel en la matiere - et de l'aricle 25 du reglement. Toutefois, le nouveau reglement sur l'insolvabilité entend incontestablement faciliter l'exécution des décisions étrangeres. 5.1. La procédure tendant `a faire reconnaître ou exécuter dans un Etat une décision étrangere selon la convention de Bruxelles La décision du juge sera l'apposition de la formule exécutoire sur la décision étrangere. Le juge compétent est le président du tribunal de grande instance du domicile de la partie contre laquelle l'exécution est demandée s'il est situé dans l'Etat requis. Dans le cas contraire le juge compétent est celui du lieu d'exécution. Le requérant doit fournir une expédition de la décision étrangere réunissant les conditions nécessaires `a son authenticité et, si la décision a été rendue par défaut, l'original ou une copie certifiée conforme du document établissant que le défendeur a été assigné. En outre si le requérant demande la force exécutoire (et non seulement la reconnaissance de la décision) tout document de nature `a établir que la décision est exécutoire et a été signifiée. Seule la partie contre laquelle l'exécution est demandée peut former un recours devant la cour d'appel contre la décision du président du tribunal de grande instance l'ayant autorisée, dans le délai d'un mois si elle est domiciliée dans l'Etat ou l'autorisation a été rendue, ou dans le délai de deux mois dans les autres cas. Pendant le délai de recours, des mesures provisoires ou conservatoires peuvent etre prises sur les biens du défendeur. 5.2. Les pouvoirs du juge saisi d'une demande de certificat de force exécutoire selon les dispositions du reglement n° 1346/2000 Selon la jurisprudence, l'exequatur d'une décision rendue en matiere de faillite doit etre accordé si les conditions suivantes sont réunies : - le juge étranger était compétent ; - la loi qu'il a appliquée était compétente selon la regle française de conflit de lois ; - la décision est conforme `a la conception française de l'ordre public international ; - aucune fraude n'est décelable ; - la procédure a respecté les droits de la défense ; - aucune procédure d'insolvabilité n'est ouverte en France. Les articles 25, § 3, et 26 du reglement simplifient ces conditions. En effet, ils accordent aux Etats membres la faculté de refuser de reconnaître ou d'exécuter un jugement étranger lorsque la reconnaissance ou l'exécution produirait des effets manifestement contraires `a son ordre public, en particulier `a ses principes fondamentaux ou aux droits et aux libertés individuelles garantis par sa Constitution (art. 26). A titre d'illustration, les Etats se voient reconnaître la faculté de ne pas reconnaître ou exécuter une décision étrangere qui aurait pour effet de limiter la liberté individuelle ou le secret postal (art. 25, § 3). Il n'en résulte pas que le juge saisi d'une demande d'exequatur doive désormais renoncer `a faire porter son contrôle sur les autres points fixés par la jurisprudence. Il convient toutefois, désormais, de tenir compte de l'objectif du nouveau reglement qui est de permettre dans tous les Etats la poursuite immédiate d'une procédure régulierement ouverte dans l'Etat du siege du débiteur. Dans ces conditions, le contrôle effectué par les juridictions saisies d'une demande d'exequatur d'une décision étrangere pourrait etre réduit aux points suivants : - le contrôle de la compétence de la juridiction étrangere, fondée sur le critere du siege du débiteur. En effet, seule une procédure principale produit ses effets dans les autres Etats. Si la décision d'ouverture n'est pas motivée sur ce point, le juge saisi d'une demande d'exequatur s'attachera `a vérifier qu'elle a été rendue par une juridiction compétente du chef du siege du débiteur. En revanche, le contrôle de la loi appliquée par le jugement d'ouverture paraît superflu puisque, selon le reglement, il s'agit toujours de la loi de l'Etat d'ouverture ; - le contrôle de l'absence de fraude et du respect des droits de la défense. La conception française de l'ordre public international suppose en effet que le débiteur ait été appelé avant l'ouverture de la procédure `a son égard. La fraude ne saurait etre constituée par l'atteinte portée aux intérets immédiats des créanciers du fait de l'ouverture de la procédure ; - l'absence d'ouverture antérieure d'une procédure principale en France. En effet, dans ce cas, la décision étrangere serait secondaire et elle ne pourrait produire effet en France (art. 17, § 1). Seules des mesures de coordination et de coopération des syndics sont alors possibles. * * * Vous voudrez bien me faire part des difficultés que l'application de la présente circulaire pourrait soulever, notamment en me rendant compte des procédures significatives ouvertes dans votre ressort ayant conduit `a l'application du reglement qui en est l'objet et de leur déroulement. Vous etes invité, si des questions particulieres se posent `a vous, `a consulter mes services afin qu'ils vous apportent leur concours (direction des affaires civiles et du sceau, bureau du droit de l'économie des entreprises). Pour le ministre et par délégation : Le directeur des affaires civiles et du sceau, M. Guillaume