v i France ■ Solaire chinois Economie Achats d'occasion, achats groupes et surtout locations entre particuliers... Les Francais consomment moins et differemment. Nee sur internet, cette nouvelle economie collaborative, qui fait la part belle au recyelage, prospere avec l'austerite M athieu n'a pas de velo. Pourtant tons ses depla-cements en ville se font ä bicyclette, en Velib". D n'a ni voiture rules moyensde recourir ä un sen/ice de location traditionnellc. Ce week-end, il panira done ä la Campagne avec 1'auto d'une denommee Genevieve, contactee sur un site de location entre particuliers, unevoitu-realuLier.com. Mathieu possede peu de biens, mais il a appris ä utiliser tousceuxqui sont auiourd'hui mis en coramun. Soit par les municipalites, soit par ies sites internet qui ereent des reseaux entre particuliers, sou-cieux de partager produits, savoirs, services... La« consummation collaborative » est en train de s'imposer. Et ce n'esc pas qu'un phenomene de crise, memesicdle-ci lasiimule. A quoi bon acheter quand on peut louer ? Tous les produits ou presque sont concernes. Le sac de marque quon ne pourrait s'offrir et que le site sacdeluxe.com met a disposition pour une duree determines. Le petit plat mitonne qu'on va chercher chez la voisine inscritc sur le site super-ma rmite.com. La poussette commanded sur zilok.com pour n'avoir pas ä trimballer la sienne en displacement...Aujoiud^ui,on conuememe ä un inconnu les cles de sa voiture, moyennant bien sür quelques euros sonnants et trebuchants, Mais ä des tarifs inferieurs de 40% ä ceux du marchetraditionnel. Une palanquee de sites C to C (consommateur ä consommateurl surf en t sur ce cre-neau, Uvop, Cityzencar, Deways, Voiturelib' se le dispurem dans le sillagedesgrandsdefricheurs, Relay-Rides auxEtats-Unis et Drivemycar-rentals en Australie. Lademandeest la, estime Vincent Saint-Martin. II y a quatre mois, ce jeune entrepreneur de 28 ans a cree unevoiturealouer.com, convaincu que «les gens sont de plus en plus consclentsdel'aberratloneconomlque deposscderunvehiculequeronn'uti-lise que 10%du temps ».Lamonteeen puissance du covoiturage participe de ce constat. La flambee des prix du petrole, entre 2007 et 2008, a fait de cette « utopie ecolo » un mode de transport alternatif credible. Pas moins de 200 sites mettant en relation conducteurs et passagers, pour partager le cout d'un trajet. out ete "Les gens recenses par le ministere de l'Eco-sont de plus logie. A lui seul, covoiturage.fr en plus regroupc 1,3 million de personnes. conscients de L'emergence ['aberration de I'autopartage economique Dans les grandes villes, le succesdes de posseder Velib'et autresv&osenlibre-se-rvice un vehicule out ouvert la voie a I'autopartage. que I'on Voici done Autolib'. Son lancement n'utilise que est prevu en decembre dans la capi-10% du tale. II est tres attendu : pour pres temps." d'une personne sur deux, e'est« un deplacement d'avenir ». C'est aussi une sacree evolution. Aurait-on pu imaginer, il y a quclques annees, comme le fait remarquer Robert Rochefort, que« tesymboledelareus-site maierielle des Trente Glorieuses deviendrait un simple vecteur de mobillte.facturealademi-ltetire ?» Certes, la rentabilite de ces dirfe-rentes formules n'est pas encore demontree. Mais les invesiisseurs ont l'air de croire a leur potentiel. Bien qu'en deficit, Zipcar (plus de 400 000 abonnes) a ete valorise a 1,2 milliard de dollars sur le marche americain. La recette ? « II faut atleindreun nombrede tmnsaaions tres importantpouretre rentable. Les sites se remunerent au pourcentage. Et celui-ci est evidemment bien plus faible pour une location que pour une vente », explique Marc Simoncini. Le fondateur du sitede rencontre Meetic a investi 2 millions d'euros dans Zilok. Malgré ses 145 000 membres, ses 300 000 visiteurs mensuelset ses 200 000 objets en location, oil les voiturcs cötoient tondeuses et décol-leuses de papier, cette plateforme ďéchanges créée il y a quatre ans n'est parvenue ä 1'équilibre qu'au debut de 2011. * Comme personne ne fern 50 kilomětres pourloueruneper-ceuse elect riqueäun Inconnu, ilfaut faire croitre au méme rythme l'qffre et la demands, de maniére géographi-quement homogene. Et cela prend du temps », ajoute Marion Carette, la fondatrice de Zilok. Le pari de la confiance Du temps et une bonne dose de confiance. Le vandalisme a fait bon-dir les coüts d'entretien des vélos parisiens Vélib'. La ville a dü accepter de renégocier ses primes avec son prestataire JCDecaux. L'avenir díra si les futures Autolib' de Vincent Bolloré sont mieux traitées. Tous les sites sont confrontés ä la měme pro-blématique. « On a mis deux ans ä obtenir des assureurs traditionnels un control qui soit adapté á la nou-veauté de ces echa nges entre particuliers », note Marion Carette. Donner des garanties au consommateur est évidemment la clé du succěs. Les systěmes de notation ou de comme ntaires leur permettent de sélec-tionner eux-mémes les personnes les plus (iables. Mais pour évtter de plomber leur marché, certains ont abandonee les notes negatives.« Le probléme majem est done de savolrd qui on hue, estime Nicolas I lerpln, sociologue au CNRS. Aux Etats-Unis, le citoyen a une conscience trěs forte de la reputation, et il accepte de livrer des données personnelles. En France, cesi moins evident, * Et c'est peut-étre paradoxal mais, remarque la fondar.ricu du Zilok, « les consoui-mateurs confiettt plusfacilement leur maison que leur perceuse » ! D'oü 1'essor spectaculaire de la location de maisons entre particuliers. Les sites qui en font leur beurre se sont multiplies comme des petits pains. Certains sont méme devenus des géants comme 1'américain AirBnB, valorise cet été á plus de 1,2 milliard de dollars (soit 50 fois son chiffre d'affaires), ou son challenger alle-mandWimdu. ••• Economie ••• Une tendance de fond La crise de 2008 a fait germer de nou-velles strategies de consommation ; celle ďaujourďhui devrait les installer. Dans une periodě de rigiieur, le systéme D fait ftores. La location en profite mais aussi la vented'occasion sur le site leboncoin.com, PriceMi-nister et, bier) sur, eBay qu'on ne pré-sente plus. On s'eehange ties sendees plus ou moins gracieusemcnt et on se rassemble sur Groupon ou sur tout autre site ďachats groupés. De l'avis de nombreux écono-mistes, on assiste lá á un veritable tournant dans la maniěre de consom-mer.« Depuisdenombreuses années, on constate que le consommateur délaisse - de maniěre contrainte ou volontaire - la possession des objets au profit de leur utilisation », explique ainsi Robert Rochefort, fondateur du tout nouvel Observatoire Société et Consommation (Obsoco). Un mou-vement durable, selon Téconomiste Philippe Moati, car«la consommation collaborative est Vexpression d'une defiance accrue á 1'égard de la Cycliste parisien surconsommation, dugaspittage etdu en Vélib' devant systéme marchand traditionnel ». les voitures Marc Simoncini lui prědit méme un électriques de avenir briliant,« quand ity aura une la station Autolib' prise de conscience collective que Von ne petit plus consommer comme on Va fait durant les quarante-cinq derniěres années ». Dans son livre á succěs «l'Age de 1'accěs », le célěbre économiste amé-ricain Jeremy Rifkin avait, d'une cer-taine maniěre, anticipé le phéno-méne lorsqu'il ácrivait en 2005 :« La notion ďaccěs va se substiiuer á celle de proprietě. » Robeit Rochefort i magi ne en effet un avenir dans lequel les industriels, qui sont censés vendre leurs produits, proposent eux-m ernes des systemes alte mat it's : * Cest déjá íe cas pour les photoco-pieurs. Pourquoi pas pour les machines á laverá domicile, quipour-raientětrefacturéesau temps d'utili-sation ? » Les constmcteurs automobiles testent le concept: Citroen annonce 1'ouverture d'un sendee de location entre particuliers pour debut 2012. Quant á Peugeot, il se place carrément en concurrence avec lui-méme, en incitant les urbains á laisser leur voiture au garage et á pri-vilégierson service de location Muby Peugeot. Pour Robert Rochefort, cette nouvelle économie de services pourrait avoir des effets sur la conception nieme de ces biens:« En passant de main en main, les objets loués ou revendus auront tout intérét á ětre plus solides. » Plus durables. Qui s'en plaindra ? DONALD HEBERT