Oui, les agrégées souffrent aussi du sexisme Les femmes agrégées sont plus souvent que leurs homologues masculins, affectées dans les collèges plutôt que les lycées, constate la Société des agrégés de l’université. Le collège,affectation souvent contrainte pour les agrégés? Pour les femmes surtout ! (PPL Image/Sipa) En principe, l’agrégation permet à ceux qui l’ont décrochée d’enseigner en lycée ou dans les classes préparatoires. Dans les faits, les choses en sont pas aussi simples : le numéro hivernal de la revue "L’Agrégation" révèle que, selon les calculs de la Société des agrégés de l’université, presque 25% des agrégés exerçant dans le seconde degré sont affectés au collège. Une affectation, c'est un euphémisme de le dire, très rarement appréciée par les agrégés, lauréats de ce très sélectif concours. Exercer auprès d’élèves de 5e ou 4e que le système scolaire français n’a pas encore répartis les éléments entre les éléments plus (lycée général) ou moins (lycée technique et professionnel) scolaires n'est pas tout à fait ce dont la plupart rêvent. Echelons prestigieux... pour les hommes Cerise sur le gâteau : la Société des agrégés de l’université vient de rendre publique une étude révélant que cette affectation au collège désavantage largement les femmes. Celles-ci composent ainsi pas moins de 60% des agrégés exerçant au collège, "ceci alors même que l’on compte presque autant de femmes que d’hommes lauréats de l’agrégation", précise Blanche Lochmann, présidente de la Société. Pour le dire autrement, les femmes sont 23% à atterrir au collège, contre 17% de leurs homologues masculins. Six point d'écart, ce n'est pas négligeable. On savait déjà, grâce à une étude du syndicat enseignant Snes, qu'en classe préparatoire - le fin du fin pour les agrégés - cette proportion estexactement inverse ! Les hommes y représentent 60% du personnel enseignant... et 70% de ceux qui occupent les "chaires supérieures'', l'échelon le plus prestigieux. Affreux machos Mais comment expliquer cette différence ? "Je me refuse à croire qu’il y ait un sexisme à l’œuvre dans la sélection", estime Blanche Lochmann. Mais elle précise toutefois : "Force est de constater que dès que les procédures sortent de l’anonymat et des concours, les femmes sont désavantagées. Dans l’Education nationale comme ailleurs, il existe un plafond de verre réel pour les femmes." Cela ne revient pas à dire que les commissions chargées d'affecter les titulaires de l'agreg' sont truffées d'affreux machos. Mais le fait est qu'elles connaissent l'identité, donc le sexe, des postulants. Et qu'elles peuvent, en vertu d'un système d'affectation tout à fait opaque, décider de se passer des barèmes professionnels (le "nombre de points" du notamment aux nombre d'années d'enseignements) pour nommer comme bon leur semble ceux qui postulent. Sexisme ordinaire Le sexisme ordinaire, qui fait des ravages dans tous les secteurs de l'activité humaine, épargnerait-il miraculeusement les agrégés? "Jusqu'ici, aucune enquête n'a prouvé que le sexisme est à l'oeuvre dans les commissions", se borne à noter Blanche Lochmann, qui rappelle quand même que la Société des agrégés appelle à plus de transparence dans les procédures... La présidente de la Société des agrégés avance une autre hypothèse dans ce deux poids-deux mesures : "On le sait, les femmes sont davantage astreintes aux tâches domestiques et familiales. Souvent, elles sont donc amenées à privilégier des critères de proximité dans leurs vœux et renoncer au lycée, pour être certaines d’obtenir l’établissement le moins éloigné de leur domicile.'' Tandis que ces messieurs accepteraient plus volontiers d'aller travailler loin de chez eux. Diplômes ou pas, l'égalité des sexes est encore un idéal à conquérir... Arnaud Gonzague - Le Nouvel Observateur http://tempsreel.nouvelobs.com/scripts/stats.php?mod=read&key=1350515&media=nobstr