Actualité Économie Dépenses publiques : Bercy veut annuler 1,5 milliard de crédits gelés Le ministère cherche à financer une partie des mesures accordées aux Gilets jaunes en puisant dans les crédits en réserve des ministères. Par Marc Vignaud Publié le 21/02/2019 à 16:33 | Le Point.fr C'est une petite consolation pour Gérald Darmanin. Le ministre des Comptes publics, qui se bat contre les moulins à vent pour contenir les dépenses publiques et continuer à réduire le déficit après les quelque 14 milliards accordés afin de calmer la colère des Gilets jaunes, a annoncé mercredi que l'effort des collectivités locales pour réduire leurs dépenses de fonctionnement l'année dernière avait été plus important que prévu. Elles ne devraient progresser que de 0,7 %, bien en dessous de l'objectif fixé de 1,2 %. Le rétablissement d'un jour de carence pour les fonctionnaires, ainsi que le gel du point d'indice, « a beaucoup » joué, s'est félicité le ministre. Cette bonne nouvelle intervient après une autre annoncée il y a quelques semaines : le déficit de l'État sera de 3,8 milliards (près de 0,2 point de PIB) inférieur dans le budget rectificatif de fin d'année 2018. L'espoir est donc grand de parvenir à un déficit public inférieur à l'objectif de 2,7 % que le gouvernement s'est fixé. Le déficit pourrait même atteindre 2,5 %. Voilà qui aiderait à repartir sur une base plus saine en 2019 : financer les mesures censées calmer le mouvement des Gilets jaunes sans – trop – creuser le déficit. Reste toutefois à connaître l'état exact des comptes des collectivités locales (notamment des dépenses d'investissement), mais aussi ceux de la Sécurité sociale pour connaître le niveau précis du trou entre les recettes et les dépenses publiques atteint l'année dernière. Le déficit public ne sera donc pas connu avant fin mars. Augmentation des dépenses de l'État de 2,8 milliards d'euros Le ministre a rappelé lors d'une audition devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale que l'évolution des dépenses de l'État ont été conformes aux prévisions du projet de loi de finances initial voté à l'automne 2017. Et ce malgré une hausse de la charge de la dette et de la participation de la France au budget de l'Union européenne par rapport aux prévisions – deux postes indépendants de la volonté du gouvernement et qui avaient systématiquement permis de réaliser des économies inattendues en cours de l'exécution budgétaire ces dernières années. La dépense dite « pilotable » a ainsi été inférieure de 1,4 milliard d'euros à ce qui avait été prévu en novembre dernier. Au total, les dépenses de l'État ont augmenté de seulement 2,8 milliards d'euros par rapport à celles de 2017. Je ne peux pas vous garantir que cet effort sera tenu tout le quinquennat Gérald Darmanin a insisté sur ses efforts pour présenter des comptes sincères dès la loi de finances, c'est-à-dire avec le moins possible de sous-évaluations de dépenses par rapport à la réalité constatée en cours d'année. Pour la première fois depuis trente ans, le gouvernement n'a pas eu besoin de recourir à des « décrets d'avance », c'est-à-dire à l'ouverture exceptionnelle de crédits en cours d'année pour faire face à une dépense imprévue, s'est réjoui Gérald Darmanin. Reste à savoir si les objectifs de maîtrise des dépenses publiques seront tenus le reste du mandat, comme l'a demandé le président LR de la commission des Finances, Éric Woerth. « On est parfois un peu seul dans le désert à prêcher la tenue de la dépense puisqu'on a souvent le mauvais rôle. Et donc je ne peux pas vous garantir que cet effort sera tenu tout le quinquennat puisqu'il faut tous les jours mettre la pierre à l'ouvrage », a répondu le ministre des Comptes publics. Anxiété des ministères Dès 2019, le gouvernement a promis 1,5 milliard d'économies de dépenses supplémentaires par rapport à la loi de finances votée à la fin 2018 dans un projet de loi de finances rectificative qui devrait être présenté en mai prochain, afin de compenser en partie les hausses de dépenses (prime d'activité) et les baisses d'impôts annoncées par Emmanuel Macron le 10 décembre pour calmer la colère des Gilets jaunes. Selon nos informations, le ministère des Comptes publics veut en fait annuler une partie des 3 % de crédits mis en réserve en début d'exercice comme chaque année pour faire face aux dépenses imprévues (catastrophes, etc.) en puisant principalement sur des crédits d'investissement ou des dépenses reportables à 2020. « Les ministères attendent en ce moment même dans la plus grande anxiété la répartition de ces 1,5 milliard », apprend-on de bonne source. Bercy espère notamment pouvoir imposer 100 millions d'annulations de crédits au ministère du Travail, 70 millions au Logement. Le ministère de la Transition écologique figurerait aussi parmi les plus mis à contribution. L'effort du ministère de la Culture pourrait atteindre 50 millions d'euros. Mais ces chiffres doivent encore être discutés avec les ministères, et, évidemment, avec les parlementaires lors de l'examen du projet de loi.