LA Ve RÉPUBLIQUE - LA PRÉSIDENCE DE CHARLES DE GAULLE (1958-1969) Le 28 septembre 1958, les Français approuvent par référendum une nouvelle Constitution. Par leur vote, ils acceptent le retour du général Charles de Gaulle au pouvoir, avec l'espoir d'en finir avec la guerre d'Algérie. De plus, la France semble être séduite par une république à un pouvoir exécutif fort. Le référendum est organisé dans l’ensemble de l’empire colonial français qui est transformé en Communauté française créée sur le modèle britannique. En 1958, seule, la Guinée rejette la Communauté. Elle devient indépendante. Charles de Gaulle était depuis toujours partisan d’un empire colonial. Or il se rend compte qu’il n’est plus possible d’étouffer les mouvements d’auto-détermination. De plus, il croit que la France devrait se débarrasser du problème colonial pour pouvoir mener une politique étrangère indépendante partout dans le monde. Il ne pose pas d’entraves au processus de décolonisation. La plupart des colonies africaines choisissent l’indépendance 2 ans plus tard – c’est pourquoi l'année 1960 est appelée l’Année de l’Afrique. La France ne conserve que l’Algérie qui devient indépendante en 1962 et le Djibouti et les Comores qui ne quittent l’Empire que dans les années 1970. Le caractère de la V^e république La nouvelle Constitution met fin à l'instabilité gouvernementale qui caractérisait le régime de la IV^e République. La V^e République est un régime semi-présidentiel. La nouvelle Constitution confie le pouvoir législatif à deux chambres, l'Assemblée nationale et le Sénat qui, ensemble, composent le Parlement. Le président nomme le Premier ministre et, sur proposition de celui-ci, les autres membres du gouvernement. Mais le Premier ministre doit toujours engager sa responsabilité devant l'Assemblée nationale. Le président de la République peut prendre l'initiative d'un référendum - Charles de Gaulle renoue avec la tradition bonapartiste de consulter directement le peuple pour raffermir l’autorité du chef d’État. Toute réforme importante de l’organisation des institutions de la République doit être adoptée également par la voie d’un référendum. Par exemple, en 1962, Charles de Gaulle fait organiser un référendum sur l’élection au suffrage universel du président de la République. La majorité absolue des Français acceptent cette révision constitutionnelle, le premier vote au suffrage universel direct a lieu en 1965. C’est l’apogée du pouvoir de Charles de Gaulle qui devient gagnant des premières présidentielles face au candidat de l’opposition François Mitterrand (soutenu par tous les partis de gauche – socialistes, radicaux, communistes, etc.) La politique étrangère Le président de la République formule les objectifs de la politique étrangère du pays. Charles de Gaulle veut que la France redevienne une grande puissance mondiale. Il mène une politique indépendante. Même si la France reste ancrée dans le bloc occidental, elle ne veut plus suivre la politique des États-Unis – on parle de la politique tous azimuts – Charles de Gaulle veut en finir avec le système bipolaire. C’est pourquoi il reconnaît la République Populaire de Chine en 1965. En 1966, il se rend en URSS (Union soviétique). En 1967, il entreprend un déplacement en Pologne, en 1968 il est en Roumanie. On préparait également son voyage en Tchécoslovaquie dont la réalisation a été empêchée par les évènements de 1968. De Gaulle parle de l’Europe de l’Atlantique à l’Oural - une Europe qui coopère et qui devrait être indépendante des États-Unis. Il communique avec les régimes communistes qu’il considère comme abominables, mais de courte durée. Par contre, en 1966, la France quitte la structure militaire de l’OTAN pour que les armées françaises ne soient pas soumises au commandement intégré. Il veut échapper à l’influence états-unienne. La France se réintègre dans le commandement en 2009 sous Nicolas Sarkozy. Pour renforcer la position de la France, de Gaulle donne l’ordre d’expérimenter l’arme nucléaire. La France se dote de sa force de dissuasion nucléaire en 1960 après le premier essai d’une bombe atomique. La France se range parmi les puissances nucléaires. La France devient enfant terrible de l’Occident - son président critique les États-Unis et leurs politique (la guerre de Viêt-Nam par exemple), parfois il commet des provocations calculées - comme c’était le cas de son déplacement au Québec en 1967. À la fin d’un discours public à Montréal, il lance Vive le Québec libre pour apporter son soutien au mouvement indépendantiste québécois face au gouvernement canadien, proche de la politique des États-Unis et du Royaume-Uni. De Gaulle veut préserver la domination française au sein des institutions européennes, c’est pourquoi il a opposé deux fois son veto à l’adhésion de la Grande-Bretagne à la Communauté économique européenne (CCE). De plus, il affirme que le Royaume-Uni est trop lié à son ancien empire colonial et trop dépendant de la politique américaine. Parallèlement, il ne veut pas renforcer le caractère supranational de la CEE. Il s’oppose à toute réforme qui aille contre ses desseins, par exemple à l’instauration de la politique agricole commune (ce qui a mené à la politique de la chaise vide – la France a suspendu sa participation aux réunions du Conseil des ministres, bloquant toute prise de décision en 1965-1966). Suite à un compromis négocié avec ses partenaires européens, la France finit par accepter la fusion de la CECA, de la CEE et de l’Euratom en Communautés européennes en 1967. Crise de 1968 La France prospère durant la présidence de Charles de Gaulle (les Trente glorieuses, 1945-1974). Or sur le plan intérieur, une crise sociale se prépare. La société subit des modifications profondes (elle se modernise, la jeunesse nombreuse ne veut plus vivre au sein d’une société traditionnelle, elle réclame plus de libertés), mais le gouvernement gaulliste sous-estime cette évolution et ne répond pas aux exigences d’une société en voie de transformation. C’est le cas du domaine de l’enseignement. Les universités accueillent de plus en plus d’étudiants sans qu’elles obtiennent assez de moyens pour assurer leur fonctionnement normal. Les étudiants, largement inspirés par les idées gauchistes et pacifistes en vogue à la fin des années 1960, sont déçus par la politique du gouvernement conservateur. L’atmosphère devient révolutionnaire, la révolte éclate en mai 1968. Les étudiants occupent les universités, les affrontements avec la police inspirent le monde ouvrier, insatisfait de la politique sociale des gaullistes, à apporter son soutien aux étudiants. La France est secouée par une vague de grèves. Même si la droite gaulliste menée par Georges Pompidou profite de la peur du peuple suscité par l’atmosphère révolutionnaire (on craint un changement de régime selon le modèle du Coup de Prague par exemple) et gagne les élections législatives en été 1968, la popularité du président de la République est mise en doute. Charles de Gaulle recourt à son instrument politique préféré pour s’assurer qu’il est toujours soutenu par la majorité des Français et lance un nouveau référendum. Du point de vue formel, le référendum de 1969 porte sur la réforme du Sénat, mais en réalité, les Français décident du sort du général de Gaulle. La réforme proposée par de Gaulle est rejetée, celui-ci comprend qu’il vient de perdre la confiance des citoyens. Il démissionne peu après et se meurt en 1970.