"Tu as cinq minutes ?" : comment survivre aux collègues qui vous déconcentrent Sofiane Zaizoune Difficile de se concentrer sans interruption en open space. Comment survivre à des collègues qui débarquent à votre bureau en permanence ? Istock Se concentrer, être interrompu, recommencer, perdre du temps. Voici le lot de tout salarié en open space. Mais comment dire - poliment - à vos collègues qu'ils vous déconcentrent ? La coach Laurence Moryoussef nous donne ses conseils. Partager « T'as cinq minutes ? Je voulais ton avis avant de répondre à un client... », lance votre collègue sans vous laisser le temps de répondre. Bien sûr que vous avez cinq minutes, mais pas maintenant, pas comme ça et surtout pas juste après avoir déjà donné cinq minutes à quatre collaborateurs en une heure. Sans compter vos voisins d'open-space qui pensent à voix haute ou vous alpaguent toutes les cinq minutes. Pendant ce temps-là, l'heure tourne et vous n'avancez pas. Vous avez beau essayer de vous détendre et de répondre poliment et avec un grand sourire à chacun, vous sentez la pression monter. «Il faut 15 à 20 minutes pour retrouver le même niveau de concentration après une interruption», explique la coach Laurence Moryoussef, fondatrice du cabinet Manadoxe. Il est donc normal que vous soyez agacée en voyant votre collègue arriver. Reste à savoir comment lui dire. Pas question de rétorquer un «non, je suis occupée, désolée» glacial, ou même de décliner poliment sans proposer une solution. Il va falloir user de tact pour obtenir le calme dont vous avez besoin sans déclencher une guerre de tranchées dans l'open space. Considérez vos collègues Vos collègues sont persuadés d'avoir une excellente raison de venir vous interrompre et il est important de le reconnaître, sans quoi vous aurez l'air de manquer cruellement de considération. «Il faut faire attention aux messages implicites qu'on envoie, ce n'est pas du tout la même chose de dire "visiblement tu ne peux pas t'empêcher de m'interrompre" ou "manifestement tu as besoin qu'on se voie pour un dossier"», souligne notre coach. Personne - ou presque - ne dérange ses collaborateurs pour le plaisir. Gardez aussi en tête que, comme vous, vos collègues doivent composer avec l'organisation de l'entreprise. Certains vous interrompent tout simplement parce qu'ils ne peuvent pas faire autrement. «Il faut trouver le point d’équilibre entre ses besoins, ses ressentis, et les règles du jeu là où on se trouve et où on travaille, résume Laurence Moryoussef. Aussi désagréables soient-elles, certaines interruptions ne durent que trois minutes. Alors on règle le problème, on se débarrasse du sujet et on aura rendu service à son collègue au passage.» Variez les registres «Il est important de communiquer rapidement, de dire que, là, on a besoin de se concentrer», conseille Laurence Moryouseff. Soyez claire, sans être agressive : mieux vaut dire à votre collègue de vous laisser tranquille une heure que ruminer votre agacement. Si le message ne passe pas, explorez d'autres pistes pour trouver la bonne formule, pour le bon collègue. «Envoyer constamment le même message, sur le même registre, ne sert à rien, assure notre coach. Si un "ne me dérange pas" ferme ne fonctionne pas, proposez plutôt de définir un créneau horaire pendant lequel on peut vous interrompre, par exemple.» Méfiez-vous des réunions Interrompue par un collègue, vous êtes tentée de lui proposer une réunion deux heures plus tard. Un moyen de préserver votre concentration et de cadrer vos échanges avec vos collaborateurs, vous dites-vous. «Une erreur fondamentale, répond Laurence Moryoussef. À multiplier les réunions, une entreprise meurt. En programmer plusieurs pour être tranquille ne mènera à rien. Le problème est ailleurs : pourquoi on s’interrompt constamment ? Est-ce c’est parce qu’on en a besoin ? Est-ce qu’on peut faire différemment ? Il y a sûrement quelque chose à réguler dans ses interactions professionnelles, mais il est important de ne pas tomber systématiquement dans le registre du process, de la technique managériale.» Organisez-vous ! Le constat est clair : même si tous vos collègues vous laissaient tranquille, votre boîte mail et votre téléphone portable seraient toujours là pour vous décourager. «Sauf qu'il est bien plus facile de s'en prendre au collègue qui déboule qu'à soi-même parce qu'on surveille sa messagerie, même si le résultat est le même», sourit notre coach. En clair : admettez que travailler dans le calme sans interaction n'est plus la norme mais l'exception et abandonnez l'idée d'une journée de calme et de solitude. «C'est donc à celui qui a besoin de concentration de mettre en place une stratégie pour s'isoler et ne pas être dérangé», assure Laurence Moryoussef. Et toutes les méthodes se valent : s'installer dans une salle de réunion vide, rester travailler chez soi ou enfiler ostensiblement son casque anti-bruit. Et, au passage, mettre son téléphone en mode avion.