SyiNTlHESE V. L'ORdiNATEUR, INTERNET ET U CLOTURE Tente i Catherine Tasca renonce ä la taxe sur les ordinateurs Le debat sur la remuneration des droits d'auteur n'est pas clos pour autant. Les develop- pements de la Neteconomie ouvrent une voie facile au piratage ou ä des systemes d'echange gratuits sur Internet, comme Napster qui menacent l'industrie de la creation ♦ voii.a une taxe dont la durée de vie n'aura pas été longue. Evoqué lundi 15 Janvier 2001 par Catherine Tasca, au detour d'un entretien dans Le Figaro, le projet de taxe sur les ordinateurs a été enterré le lendemain, mardi, sous la pres-sion de Bercy et de Matignon, par la méme Mme Tasca, qui y a gagné au passage le sobriquet de « Mme Taxa ». Gaffe de la ministře de la Culture ? I 'affaire est un pen plus complexe... ♦ A suivre le film des événe-ments, 1'histoire semhle, certes. transparente. Lundi, Mme Tasca sort du bois pour cvoquer une possible reformě qui n'a jamais été discutée au sein du gou\ er-ncment (Le Monde du 17 Janvier). Déplorant que les nouvelles technologies aient « fait naitre la mythologie de Faeces gratuit aux deux bouts de la chaine de la production » ct faisant valoir qu'« aucune économie de la culture n 'est envisageable s 'il n 'existe pas de remuneration des artistes », elle se prononce en faveur « d'une taxation des ordinateurs, disques ditrs, consoles de jeux, décodeurs, en href tout support pcrmettatit ďenregistrer des anivres ». ♦ La ministře de la Culture a de bonnes raisons de dire cela. La loi de 1985 sur les droits de 1'auteur a institue unc commission ad hoc. la Commission dc la copie privéc. composée ďin-dustriels, d'auleurs et de consommateurs, qui est chargée de fixer le montant des redevan-ces ä prélever sur les supports, le gouvernement n'ayant que le pouvoir de promulguer ou non ses decisions. Or. cetle commission indépendante, aprěs avoir decide ďétendre. ä compter du 22 Janvier, a tons les supports « souples » (CD, DVD. et CD-Rom) la redevance jusque-la en vigueur sur les cassettes vierges. a decide ďici au mois de mars ďélargir le champ de sa reflexion : ne faut-il pas étendre également aux disques durs des ordinateurs les dispositions applicables aux supports souples? Mmc Tasca ne fait done qu'appuyer cette suggestion. MATIGNON IRRITÉ ♦ Seulemenl voila ! Sa sortie, manifestement ciblée pour le Midcm (le Marché International du disque el de 1'edition musicale), qui se tient ä Cannes du 19 au 27 Janvier, tombe mal dans 1'agenda gouvernemental. Lionel Jospin chcrche depuis des mois ä démontrer qu'il est attache ä développer les nouvel-les technologies. II vcut aussi assurer l'opinion de sa determi- nation á baisser les impots. Cest par exemple dans cette logique qu'a été réeemment supprimée la vignette automobile. Au moment precis ou ua impot est supprimé, est-il opportun de suggérer la creation ďun autre ? ♦ Děs mardi matin, le ministře des Finances, Laurent Fabius, fait savoir tout le maj qu'il en pense. « M""' Tasca a donné son avis. Cest son sentiment, ce n 'est pas celui du gouvernement », láche-t-il sčehement. « Notrephilosophie generate, ce n 'est pas de créer des taxes á tons les coins de rue. » A Fhótcl Matignon, Fir-ritation est la méme. On observe qu'il n'\ a aucune logique. contrairement aux apparences, á vouloir faire subir lc měme sort aux supports souples el durs. Dans un cas et dans I'au-tre, « Facte de consommation ». si I'on peut dire, n'est pas k méme: quand un consommateur fait Facquisition du CD-Rom vierge, e'est tres probablement parcc qu'il veut copier des ueuvres; mais quand il achěte un ordinateur, ce n'est pas néces-sairement sa premiere determination... ♦ 11 est done rapidement decide de demander a la ministře de la Culture de se dédire. Ce qu'elle fait mardi, en debut d'apres-midi, ä nationale: « Le g ne taxe pas les o. n'a pas i intention se repent-elle. ♦ Le debat n'est autant. pour le gc D'abord, les devel la « neteconomie la part belle au pin systemes de d'echange, tres di qui s'en L'immense succe fornien Napster, s les echanges de f caux sur Internet, toutes les memoir les geants mondi; se sont divises. Ui ou EMI ont port justice, aux Etat; que Bertelsmai alliance avec lui. sance publique, \> un peu de meme 1'expansion du W> le dos rond ou fat reglementation oi Le fin ♦ le modeli Ftnancement de cesse d'etre ebn vee du nu F expansion de la culturelle via L' opposition enti d'une economie englobe la gratuil reproduction des defenseurs des s; ques de remi 1 58 i CubuRE tateure prčcH ei mm at i c rzptócmcm der ä la mmrv de se déttre. arxfi cn débol ďaprěs-midi, ä 1'Assembléc nationale: « gauvernement ne taxe pas les ordinateurs et n 'a pas I'intention de le faire », se repent-elle. ♦ Le debat n'est pas clos pour autant. pour le gouvernement. D'abord, les développements de la « netéconomie » font parfois la part belle au piratage ou ä des systěmes de vente ou ďéehangc, trěs déréglementés, qui s'en rapprochent. L'immense succes du site cali-fornien Napster, specialise dans les échanges de fichiers musi-caux sur Internet, est ainsi dans toutes les mémoires. Face ä lui, les géants mondiaux du disque se sont divisés. Universal, Sony ou EMI ont porte I'affaire en justice, aux Etats-Unis. tandis que Bertelsmann a passe alliance avec lui. Pour la puissance publique, le dilemme est un peu de měme nature: face ä 1'expansion du Web. faut-il faire le dos rond ou faut-il adapter la réglemcntation ou la fiscalité? LA PART BELLE AUX LOBBIES ♦ Le gouvernement sait aussi que la Commission de la copie privee est seule juge dc son ordre du jour et va poursuivre ses reflexions sur le sujet des supports durs. La marge de manoeuvre de la puissance publique est done reduite. Elle peut. certes. pester contrc une procedure dc fixation de la rede-vance qui, avec le recul, lui parait totalcment absurde. Elle peut aussi faire valoir que cc Systeme fait la part belle aux lobbies et qu'il y a beaucoup de choses ä revoir, comme devrait I'etablir prochainement un nouveau rapport de la Cour consacre ä Tunc des societcs d'aulcurs, la Sacem. ♦ Mais concretemcnt, comme une reformc de la loi de 1 985 n'est pas envisagec, le gouvernement est dans une situation de relative impuissance. Sauf ä explorer, ä l'avenir. une nouvelle piste, celle que lui suggere. dans Le Monde, Jean-Paul Giraud, le P.-D.G. de la Fnac: « La protection des droits Texte 2 d'auteur est un vrai sujet. Mais la bonne facon de le trader n 'est pas de créer de nouvelles taxes. II fant au contraire baisser le taux de TV A sur les disques (19.6 %) pour la ramener au niveau de celle du livre (5,5 ck). Les prix des CD en France sont beaucoup trop éleves, cest cela qui favorise toutes les formes de copies et de piratage. » ♦ Cette solution aura-t-ellc la preference du ministře des Finances? Deux indices: le patron du groupe Pinault (PPR), propriétairc de la Fnac, est Serge Weinberg, ami intime et ancien collaborates dc M. Fabius: et le directeur dc cabinet du ministře, Bruno Crémel, est un ancien bras droit de M. Weinberg, ayant eu la charge de PPR Interactive, la holding Internet du groupe de Francois Pinault. Pascal Galinier et Laurent Mauduit Le Monde 16 Janvier 2001 Le financement de la culture mis ä mal par ľlnternet ♦ le modei.e 1'rancais du financement de la culture ne cesse d'etre ebranle par 1'arri-vee du numerique et 1'expansion de la consommation culturelle via I'lnternet. j L'opposition entre les partisans j d'une economie « libre ». qui j cnglobe la gratuite d'usage el dc ! reproduction des oeuvres. ct les \ defenscurs des syslemes classi-i ques de remuneration des artistes et de leurs producteurs trouve une nouvelle occasion de s'affirmer aprěs les atermoie-ments de Catherine Tasca. La ministře a confirrné. puis dementi, ['extension légalement programmče. notamment aprěs un avis émis par le Conseil d'Ftat en novembrc 2000. de la loi 85-660 dite « loi Lang » du 3 juillet 1985 sur les droits voisins, aux supports dits « fixes » (disques durs, deco-deurs...). ♦ La loi dc 1985 a instaure le principe d'une remuneration percue aupres des fabricanls et des importateurs sur les supports servant ä la copie privee. Pondees en 1986. la Socerop per^oit les droits pour la copie privee sonore (cassettes audio. CD-R audio...) et Copie France ceux de la copie 1 59