1.7. Les institutions belges La Belgique est un pays petit mais `a l’organisation politique tres compliquée : l’image qui revient souvent est celle du labyrinthe Ainsi un des ouvrages de référence sur la question (La Belgique pour débutants) a pour sous-titre Le labyrinthe politique belge. Politiciens et journalistes belges qualifient, eux-memes, volontiers la Belgique de « pays surréaliste ». Tout d'abord, parlons du type de régime en Belgique. L`a, rien de tres compliqué : la Belgique est une monarchie constitutionnelle. Cette expression signifie que c'est une monarchie (donc avec une dynastie, un Roi et une Reine, des princes etc.) mais ou le Roi ne dispose d'aucun pouvoir personnel, les seuls pouvoirs qu’il a (pouvoirs souvent symboliques `a l’heure actuelle) sont ceux que lui attribue la Constitution. Ensuite, ça se complique : il faut bien se rendre compte qu'`a l'extreme opposé de certains États tels que la France, ou la centralisation est extreme, la Belgique est (depuis 1970 en pratique, depuis 1980 en théorie) un État fédéral, ou les pouvoirs sont multiples et extremement ventilés. Ce qui signifie qu'en Belgique il n'y a pas qu'un seul pouvoir politique (le pouvoir de l'Etat belge) mais qu'au contraire il y a de multiples autres subdivisions dans le pays, celles-ci se superposant les unes aux autres. La Belgique est composée de : § trois communautés : la communauté francophone, la communauté néerlandophone, la communauté germanophone § trois régions : la région flamande, la région wallonne, la région Bruxelles-Capitale § dix provinces : Flandre orientale, Flandre occidentale, Anvers, Limbourg, Liege, Namur, Hainaut, Luxembourg, Brabant wallon et Brabant flamand. § 549 communes État unitaire et centralisé des sa naissance en 1830, la Belgique a fortement évolué dans ses structures `a partir de 1970. La célebre déclaration du premier ministre de l’époque, Eyskens […] (« L’État unitaire, tel que les lois le régissent encore dans ses structures et dans son fonctionnement, est dépassé par les faits ») devait constituer un virage décisif ; l’expression traduisait une formule plus lapidaire qu’il aurait utilisée quelques mois auparavant : « La Belgique de papa a vécu ! ». La reconnaissance des communautés et des régions (disposition constitutionnelle du 24 décembre 1970) matérialisait le début d’une évolution majeure. La réécriture de l’article Ier de la Constitution en 1993 a sanctionné officiellement la nouvelle réalité de l’Etat belge, et donc la perception qu’il convenait d’en avoir. En 1831, cet article Ier était libellé comme suit : « La Belgique est divisée en provinces ». Depuis la disposition constitutionnelle du 5 mai 1993, la formulation est substantiellement modifiée : La Belgique est un Etat fédéral qui se compose des Communautés et des Régions. […] Désormais, la Constitution structure clairement l’Etait : la Belgique comprend trois communautés, trois régions, quatre régions linguistiques. Le fédéralisme belge La structure de la Belgique est organisée sur la base d'institutions qui relevent de l'État fédéral, des Communautés et des Régions, des provinces et des communes. La Belgique est une monarchie constitutionnelle et une démocratie parlementaire ou conformément `a la Constitution s'exercent trois pouvoirs: l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Diverses modifications de la Constitution ainsi que les lois de réformes institutionnelles ont fondamentalement modifié l'organisation des pouvoirs exécutif et législatif. A. La Belgique est un État fédéral. Un État fédéral se compose de différentes parties autonomes pour s'organiser et prendre des décisions le concernant. Pour la Belgique, ces parties sont d'une part les Communautés et, d'autre part, les Régions. Chaque Région correspond `a un territoire et chaque communauté `a une "zone linguistique". B. L’autorité fédérale Elle n’a de compétences que dans les matieres que lui attribuent formellement la Constitution et les lois votées en vertu de celle-ci. Toutes les autres compétences sont attribuées, « par défaut », aux communautés et régions. C’est le principe dit « de subsidiarité », qui veut que les compétences restent au niveau de pouvoir le plus proche du citoyen. Compétences: la défense, l’ordre public, la sécurité sociale, les relations internationales et le droit du travail, la politique des prix et des revenus, le droit commercial et le droit des sociétés, la politique financiere et monétaire, les impôts fédéraux. Le pouvoir législatif fédéral est exercé collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat. Cfr tableau tiré de Dans quel État vivons-nous?, p. 12 § La Chambre des représentants : 150 députés élus au suffrage universel direct qui peuvent faire des propositions de loi → ils exercent un contrôle de l’action politique du gouvernement fédéral (motion de confiance, de méfiance). !!!!! La Chambre est seule compétente en matiere budgétaire. § Le Sénat se compose de 71 sénateurs, 40 élus directement (25 par les néerlandophones, 15 par les francophones), 21 désignés par les conseils communautaires (10 néerlandophones, 10 francophones, 1 germanophone), et 10 cooptés par les 61 précédents (6 par les néerlandophones, et 4 par les francophones). Les sénateurs cooptés peuvent etre issus de la société civile, c’est-`a-dire ne pas etre des hommes politiques. Les sénateurs peuvent faire des propositions de loi. Dans la plupart des matieres, le Sénat a les memes compétences que la Chambre (bicaméralisme parfait), mais c’est alors toujours cette derniere qui a le dernier mot. Le Sénat est avant tout conçu comme un organe de réflexion. Le pouvoir exécutif fédéral appartient en principe au Roi (art. 37), qui nomme et révoque ses ministres. § En fait, le Roi « regne mais ne gouverne pas ». Il n’a aucun pouvoir exécutif sans le concours des ministres du gouvernement fédéral. Le Conseil des ministres compte au maximum 15 membres, et le Premier ministre éventuellement excepté, autant de ministres d’expression française que d’expression néerlandaise. § Le Premier ministre, en cas de querelle communautaire, reste au-dessus de la melée, il est familierement appelé « asexué linguistique ». Les secrétaires d’Etat fédéraux, adjoints `a un ministre, font partie du gouvernement mais pas du Conseil des ministres. Le Roi sanctionne et promulgue les lois (les signe et veille `a ce qu’elles paraissent au Moniteur, le recueil des textes de loi). Le pouvoir judiciaire est une compétence exclusivement fédérale. Il est exercé par les cours et tribunaux. Les arrets et jugements sont exécutés au nom du Roi. C. Les compétences des communautés. Les communautés disposent d’une assemblée délibérante, le conseil, et d’un organe exécutif, le gouvernement. Le Conseil de la Communauté flamande (Vlaamse Raad) compte 124 membres (118 élus dans la Région flamande et 6 par les néerlandophones de Bruxelles). Le gouvernement flamand compte 11 membres. Il faut noter que dans la partie flamande du pays, l’unicité a été réalisée entre la Communauté et la Région. Il y a un seul Conseil et un seul gouvernement, qui exercent en meme temps les compétences communautaires et régionales. Fete : le 11 juillet (victoire de la bataille des Éperons d'Or en 1302 contre les Français) Le Conseil de la Communauté française compte 94 membres (75 membres du Conseil de la Région wallonne et 19 membres élus par les francophones de Bruxelles). Le gouvernement de la Communauté française compte 4 membres. Fete: le 27 septembre (commémoration de la fuite des soldats hollandais face aux Belges) Le Conseil de la Communauté germanophone se compose de 25 membres élus directs. Le gouvernement de la Communauté germanophone compte 3 membres. Le Conseil et le gouvernement ont leur siege `a Eupen. Fete : 15 novembre (jour de la fete du roi) Les communautés sont compétentes dans les matieres suivantes : § La culture (beaux-arts, patrimoine, presse, loisirs…) § L’enseignement (de l’école maternelle aux universités) § L’emploi des langues § Les matieres dites « personnalisables » (qui sont étroitement liées aux personnes dans leur épanouissement personnel et social. Exemple : une partie de la politique de santé et de l’aide aux personnes). § Les relations internationales dans les domaines précités. → Il s’agit plutôt de compétences culturelles. D. Les Régions — En Flandre: les compétences régionales sont exercées par le Conseil et le gouvernement de la Communauté flamande (fusion des instances législatives et exécutives). La capitale de la Région et de la Communauté flamande est Bruxelles. La Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale disposent d’organes qui leur sont propres. — Région wallonne Le Conseil régional wallon compte 75 membres élus directement par les électeurs de la Région wallonne. Le gouvernement wallon se compose de 7 membres. La capitale de la Région wallonne est Namur. Fete : troisieme dimanche de septembre. — Région de Bruxelles Capitale Le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale est composé de 75 membres élus directement par les électeurs des 19 communes bruxelloises. Le gouvernement bruxellois compte 5 membres (1 Ministre-Président, 2 ministres francophones et 2 ministres néerlandophones). Bruxelles est sa propre capitale… Fete : 8 mai. Les régions sont compétentes dans les matieres suivantes : § L’aménagement du territoire § L’environnement et la politique de l’eau § La rénovation rurale et la conservation de la nature § Une part de la politique économique § Une part de la politique de l’emploi § Les travaux publics et les transports § Les relations internationales dans les domaines précités. → Il s’agit plutôt de compétences économiques. E. Dix provinces et 549 communes Les communes et les provinces ne peuvent pas édicter de normes législatives. Elles peuvent prendre uniquement des reglements, qui se situent dans la hiérarchie des normes juridiques plus bas que les normes législatives (lois, décrets, ordonnances). Les communes et les provinces ont deux types de compétences: — pouvoir de régler tout ce qui est d'intéret communal ou provincial — mission confiée par une autorité supérieure: les autres niveaux de compétence (autorité fédérale, communautés, régions) peuvent attribuer d'autres compétences aux communes et aux provinces. Les communes `a facilité La Belgique comprend quatre régions linguistiques : région de langue française, région de langue flamande, Bruxelles-Capitale bilingue et la région de langue allemande. Toute commune du royaume fait partie d'une de celles-ci. Les régions linguistiques ne sont pas dotées d'organes ou institutions politiques comme le sont la Région flamande, la Région wallonne, par exemple. Elles sont de simples circonscriptions administratives ou s'appliquent les regles sur l'emploi des langues dans l'administration, l'enseignement, la justice et l'armée, ainsi que dans les relations entre employeurs et travailleurs. En 1932, les facilités linguistiques sont instaurées afin d'assurer la protection des minorités linguistiques (au moins 30% des habitants dans une meme commune). C'est ainsi qu'il existe des communes néerlandophones avec des facilités pour les francophones, des communes francophones avec des facilités pour le néerlandophones, des communes germanophones avec des facilités pour les francophones, et des communes francophones avec des facilités pour les germanophones. Exemple : si un habitant francophone de Fourons se rend `a la maison communale pour déclarer une naissance, le fonctionnaire de la commune de Fourons devra, si l’intéressé le demande, parler français, bien que la commune de Fourons soit située en région de langue néerlandaise. Les 19 communes situées en région bilingue de Bruxelles-Capitale sont des communes bilingues et doivent offrir un traitement équivalent aux deux communautés linguistiques. Parmi les communes `a facilités, citons : § en région de langue française : Mouscron, Comines-Warneton, Flobecq, Enghien, qui comptent une minorité de néerlandophone; § en région de langue flamande : Renaix et les Fourons, cette derniere comptant cependant une majorité de francophones § dans la périphérie bruxelloise : Rhode-Saint-Genese, Linkebeek, Drogenbos, Wemmel, Kraainem, Wezembeek-Oppem (plusieurs d'entre elles comptant elles aussi des francophones) § Les communes malmédiennes qui sont contiguës `a la région de langue allemande. Le probleme des Fourons (néerlandais : Voeren, limbourgeois : Voere) Les Fourons forment une commune belge de 4.312 habitants et d’une superficie de 50 km^2 situe au nord-est de la Province de Liege, faisant partie de la province de Limbourg, mais n’ayant aucune frontiere commune avec celle-ci. Cette commune a été rattachée `a la province flamande du Limbourg, suite `a la fixation définitive de la frontiere linguistique en Belgique. Ceci malgré la volonté de la majorité de ses habitants de rester dans la province de Liege. La commune est une commune `a facilités linguistiques néerlandophone avec facilités pour les francophones. La question de la politique belge, de par sa complexité, intrigue toujours ses voisins directs mais aussi la classe politique internationale[1], 1.8. La « question communautaire » Tres vite, des problemes communautaires vont apparaître. Le probleme remonte aux origines de la Belgique : la révolution de 1830 est une simple émeute, elle n’est pas le résultat d’une lutte nationale de longue haleine, le succes est facile, soutenu artificiellement par les puissances étrangeres, en particulier la France et la Grande Bretagne. Cfr l’article du livre de Beaufils, L’éternelle querelle entre Flamands et Wallons fragilise l’État belge. Au début de l’existence de la Belgique, le français est privilégié. Le sentiment national flamand apparaît `a la fin du XIX^eme siecle, jusque l`a, ce sentiment national s’était confondu avec le sentiment national belge qui se méfiait de son voisin français, le vrai belge veillait `a se distancer du « fransquillon » et son identité passait par la revendication d’une identité flamande. A peu pres au meme moment, Jules Destrée défend, des la fin du XIX^eme siecle, l’égalité historique et culturelle de fait des Wallons et des Flamands, et la nécessité de leur maintenir une meme attention dans le cadre de l’Etat (il s’agit `a l’époque surtout de redresser les injustices dont souffraient légalement les Flamands). Il est important de comprendre que Destrée reste attaché `a la Belgique : ce qui l’anime, c’est le souci de voir la Belgique se maintenir malgré l’originalité de ses composantes. Ce qu’il rejette, c’est le nationalisme belge, la notion d’ « âme belge ». Il songe déj`a `a une forme de fédéralisme, il dit qu’ « une Belgique faite de l’Union de deux peuples indépendants et libres, accordés précisément `a cause de cette indépendance réciproque, ne serait-elle pas un Etat infiniment plus robuste qu’une Belgique dont la moitié se croirait opprimée par l’autre moitié ? ». Il est intéressant de remarquer que le projet de Destrée annonce pres d’un siecle auparavant, les résultats (actuels) du processus de fédéralisation. Mais le cheminement fut assez lent et parfois difficile. Au cours du XX^eme siecle, les équilibres économiques se sont inversés. Au XIX^eme siecle et dans la premiere moitié du XX^eme, l’économie de la Wallonie, l’industrie (mines de charbon, acier, laine, verre) était particulierement florissante alors que la Flandre, restée agricole était moins favorisée. Apres la guerre, la tendance s’inverse : les industries wallonnes ont vieilli, le charbon est supplanté par le pétrole, la Wallonie tarde `a s’adapter aux nouvelles réalités et connaît la crise, les greves, les fermetures, le chômage. La Flandre, au contraire, s’adapte `a la nouvelle donne et développe le secteur du plastique (fabriqué `a partir du pétrole), la chimie (notamment la fabrication des médicaments), le port d’Anvers contribue `a cet essor économique. Cette situation économique défavorable de la Wallonie pesera, par la suite, dans le conflit communautaire : comme le suggere le texte, dans les discours de certains politiciens flamands, « [cette situation génere] des tensions comparables `a celles qui naissent dans les familles ou l’un des membres vit aux crochets des autres. S’ils dépassent certaines limites et se prolongent trop longtemps, ils seront de moins en moins acceptés par l’opinion flamande, qui fera pression pour que l’on mette fin au systeme ». Un probleme épineux : Bruxelles qui est également un point de ralliement Francophones et Flamands Bruxelles compte plus de 80 % de francophones (logique du droit des personnes) mais est, historiquement, une ville flamande (le dialecte bruxellois est un dialecte flamand), par ailleurs, elle constitue une enclave dans le territoire flamand (logique du droit du sol). Les solutions simples sont donc exclues. Dans le texte, on voit que les Flamands et les Wallons proposent deux types de solutions. 1.9. Les partis politiques de Belgique Partis néerlandophones o Gauche o sp.a-spirit + Sociaal Progressief Alternatief (sp.a) + Spirit (Sociaal, progressief, internationaal, regionalistisch, integraal-democratisch en toekomstgericht) o Groen ! (anciennement AGALEV) o Centre o B-U-B + Belgische Unie – Union belge (B-U-B) o Droite o CD&V/N-VA + Christen-Democratisch en Vlaams (CD&V) + Nieuw Vlaams Alliantie (N-VA) o Vlaamse liberalen en democraten (VLD) o Extreme droite o Vlaams Belang (VB, ex-Vlaams Blok) Partis francophones o Gauche o Partir Socialiste (PS) o Ecolo (Écologistes confédérés pour l'organisation de luttes originales) o Centre o Centre démocrate humaniste (CDH) (ancien Parti social chrétien (PSC) o Union Belge - Belgische Unie (B-U-B) (Parti centriste pour l'union nationale) o Droite o Mouvement réformateur (MR) + Front démocrate des francophones(FDF) + Mouvement des citoyens pour le changement (MCC) Parti réformateur libéral (PRL) o Extreme droite o Mouvement NATION (NATION) o Front national (FN) o Cartel présent régionalement o Union des francophones (UF) ------------------------------- [1] L’année passée, un hebdomadaire français, Le Courrier international, a consacré un dossier `a la Belgique et ses problemes communautaires. Voir http://www.courrierinternational.com/gabarits/html/default_online.asp