XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) XVII. Le regne personnel de Louis XIV (1661-1715) Louis XIV exerce le pouvoir personnellement ä partir de 1661, il s'attache notamment ä renforcer ľautorité royale et ä réaliser ľunité religieuse. Sa volonte ďhégémonie en Europe ľentraine, á partir de 1672, dans des guerres quasi continuelles qui compromettent ľceuvre de redressement financier et économique entreprise par Colbert. Mais écrivains et artistes classiques assurent ä son régne un grand éclat. XVII. LE REGNE PERSONNEL DE LOUIS XIV............................................................. XVII. A. Le renforcement de ľautorité monarchique et les réalités économiques . XVII.aJ. Le roi et ses collaborateurs................................................................................. XVIIa.ii. Ľintendant en province....................................................................................... XVIIaJii. Colbert, les finances et ľéconomie................................................................... XVII.B. Les affaires religieuses..................................................................................... XVII.b.i. Gallicanisme et jansenisme................................................................................. XVII.b.ii. La revocation de ľéditde Nantes........................................................................ XVII.b.iii. La reforme catholique...................................................................................... XVII.c. Louis XIV et l'Europe......................................................................................... XVII.c.i. Les buts et les moyens de la politique de Louis XIV............................................. XVII.c.ii. Les guerres de Hollande et de laLigue d'Augsbourg........................................... XVII.c.iii. La guerre de Succession dEspagne................................................................. XVII.D. Le siECLE de Louis XIV........................................................................................ XVII.di. Le roi et ľidéal classique.................................................................................... XVII.dii. Versailles............................................................................................................ XVII.diii. L'envers du Grand Siede................................................................................. 1 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) XVII. a. Le renforcement de V autorite monarchiaue et les réalités économiaues XVII.a.i. Le roi et ses collaborateurs. Děs le lendemain de la mort de Mazarin, le 9 mars 1661, Louis XIV, qui a alors vingt-deux ans, annonce sa volonte de gouverner désormais par lui-méme, sans Premier ministře. Son goüt pour le « metier de roi », son application au travail, son intelligence sont malheureusement gates par un orgueil qui trouve son origine et sa justification dans la théorie de la monarchie de droit divin et qui ne fera que croTtre avec ľäge. Profondément imbu de la dignité royale et des droits et devoirs qu'elle implique, Louis XIV se considěre véritablement comme le « lieutenant de Dieu sur la terre » : il prend le soleil pour embléme, Nee pluribus impar pour devise, et fait de la cour le cadre d'un veritable culte rendu au souverain par une noblesse domestiquée et ainsi réduite á ľimpuissance. S'il gouverne et decide seul, il ne peut évidemment se passer de collaborateurs. H prend soin de les choisir non dans la famille royale, le haut clergé ou la haute noblesse, sauf rares exceptions, mais parmi des robins fraichement anoblis qui lui seront d'autant plus attaches qu'ils lui devront tout. De ľéquipe que lui a léguée Mazarin, il conserve Lionne, Michel Le Tellier et son fils Louvois, Jean-Baptiste Colbert, mais se débarrasse, děs septembre 1661, de Nicolas Fouquet, dont le luxe et le succěs lui portent ombrage et qui va payer pour les malversations de Mazarin plus que pour les siennes propres. Colbert, grand artisan de la perte du surintendant, le remplace et devient contrôleur general des Finances, charge créée pour lui en 1665. A ce titre, il dirige jusqu'á sa mort, en 1683, non seulement l'administration financiere, mais toute ľactivité économique du pays, d'autant plus qu'il est en méme temps secretaire d'Etat á la Marine, secretaire d'Etat á la Maison du roi et surintendant des Bätiments, Arts et Manufactures. Voué entiěrement au service du roi et de l'Etat, Colbert n'en assure pas moins avec avidité sa propre fortune et celie de sa famille, comme l'avaient fait Richelieu, Mazarin et Fouquet. Apres lui et jusqu'á la fin de l'Ancien Regime, le contrôleur general des Finances reste le ministře le plus important, au detriment du chancelier. A leurs côtés, les quatre secretaires d'Etat possědent désormais des attributions precises : Affaires étrangěres, Guerre, Marine, Maison du roi. La lente evolution du Conseil du roi s'est poursuivie et aboutit, sous Louis XIV, á la division du Conseil en quatre sections spécialisées : le Conseil d'en haut, ou étroit, ou des affaires, ou le roi convoque quelques collaborateurs de confiance, dits « ministres d'Etat», et ou se traitent les grandes affaires intérieures ou extérieures ; le Conseil des dépéches ; le Conseil royal des finances, créé en septembre 1661 á la place de la surintendance ; enfin le Conseil přivé, ou des parties, veritable assemblée qui est composée de magistrats professionnels, XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) conseillers d'Etat et maítres des requětes, et qui a competence administrative, legislative et surtoutjudiciaire. XVII.a.ii. L'intendant en province. Děs sa prise du pouvoir, Louis XIV, aide de Colbert, s'applique á l'ceuvre de restauration de l'ordre et de ľautorité monarchique, amorcée par Mazarin au lendemain de la Fronde. Les grands corps de l'Etat, clergé, noblesse, parlements, sont étroitement surveillés. Les gouverneurs de province, tous grands seigneurs, sont invites á résider á la cour. Les états provinciaux, lá oú ils existent, et les municipalités doivent accepter les interventions constantes de l'intendant. En effet, dans toutes les provinces, celui-ci détient désormais la realitě du pouvoir. Commissaire choisi le plus souvent parmi les maítres des requětes, l'intendant de justice, police et finances a des pouvoirs enormes qui en font vraiment « le roi present dans la province ». Toutefois, il ne faut pas se laisser abuser. Le pouvoir du roi, absolu et centralise en théorie, continue á se heurter en fait aux multiples privileges, libertés et franchises des provinces, des ordres, des parlements, des différents corps et communautés, privileges qu'il faut bien tolérer, au mieux grignoter patiemment, puisqu'il ne serait pas possible de s'en débarrasser avec éclat sans remettre en cause ľédifice politique et social hérité d'un lointain passé. XVII.a.iii. Colbert, les finances et ľéconomie. En matiěre financiere et économique, le programme ambitieux de Colbert se heurte aussi aux réalités. Certes, profitant de plus de douze années de paix (1660-1672), le ministře réussit á assurer ľéquilibre du budget grace á une diminution des charges de l'Etat et á une augmentation des recettes ; celle-ci est obtenue par un meilleur rendement de ľimpôt, un peu mieux réparti, allege pour les plus pauvres, et mieux percu. Mais, děs 1672, la reprise de la guerre extérieure entraíne des difficultés financiěres qui ne vont cesser de croítre jusqu'á la fin du rěgne. Le deficit budgétaire devient la regie, en dépit de l'augmentation constante des impôts, de la creation ďimpôts nouveaux (capitation et dixiěme) et de l'institution de la ferme generale, en dépit surtout du recours aux expedients traditionnels que sont, entre autres, les ventes d'offices et les emprunts. En 1715, la dette publique est de l'ordre de 2 milliards de livres et l'Etat est au bord de la banqueroute Entiěrement gagné aux idées mercantilistes, Colbert entreprend de diriger toute ľéconomie francaise. II réglemente étroitement la production afin de développer les manufactures, surtout celieš travaillant pour ľexportation ; il protege ľindustrie francaise par des tarifs douaniers frappant lourdement les produits étrangers entrant en France ; il favorise la 3 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) construction návale et la creation de compagnies de commerce ; il place sous l'administration de la couronne les territoires coloniaux, du Canada et des Antilles. Mais ses efforts se heurtent á la redoutable concurrence des Hollandais et des Anglais et á la prudence excessive de la bourgeoisie francaise, qui préfěre frileusement acheter des terres, des rentes ou des offices plutôt que d'investir dans les affaires industrielles ou commerciales. Pourtant, malgré les crises de 1661-1662 et de 1693-1694, malgré les difficultés croissantes aprés la mort de Colbert, ľéconomie francaise est, au temps de Louis XIV, dans une situation qui est globalement meilleure que cinquante ans plus tot et qui prepare, á bien des égards, la prosperite du 18e siěcle. XVII. b. Les affaires relisieuses XVII.b.i. Gallicanisme et jansenisme. Roi Trés Chretien, « fils ainé de l'Église », Louis XIV n'en est pas moins fort jaloux de ses droits sur l'Église de France, ce qui ľaméne á entrer en conflit avec le pape Innocent XI á partir de 1673. II s'appuie sur les traditions gallicanes de l'administration royale et du clergé francais, résumées en 1682 dans une « declaration des quatre articles », et affirme son indépendance á ľégard de Rome. Toutefois, merne aprés que le pape eut condamné la declaration de 1682, il se garde bien ďaller jusqu'á la rupture et, au lendemain de la mort d'Innocent XI en 1689, se réconcilie avec son successeur. En merne temps, á ľintérieur du royaume, il travaille á maintenir ou á rétablir ľunité de foi, indispensable á ľunité du royaume. II s'applique ďabord, selon ses propres termes, « á détruire le jansenisme et á dissiper les communautés oú se fomentait cet esprit de nouveauté ». En 1669, une tréve provisoire est enregistrée. Mais la querelle rebondit á la fin du siěcle avec la publication des Reflexions morales du janséniste Quesnel. En 1709, Louis XIV fait disperser les religieuses de Port-Royal-des-Champs et détruire le monastére, et, en 1713, il obtient du pape la condamnation des Reflexions morales par la bulle Unigenitus, mais une quinzaine ďévéques refusent ďaccepter celle-ci. XVII.b.ii. La revocation de ľédit de Nantes Quant á ses sujets de la RPR (religion prétendue réformée), il entend bien, děs 1661, les « réduire peu á peu ». Pour cela, il préconise une application restrictive de ľédit de Nantes : tout ce qui n'est pas autorisé á la lettre est interdit. En merne temps, le clergé catholique s'efforce, sans grand succěs, ďobtenir des conversions. A partir de 1679, ľattitude du roi se durcit. Toute une série ďarréts attaque ľédit de Nantes et le vide peu á peu de son contenu : 4 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) suppression des chambres mi-parties, exclusion des huguenots des offices et de la plupart des professions liberales, interdiction des manages mixtes, conversion des enfants autorisée děs l'äge de sept ans. A cette violence legale s'ajoute bientôt la violence militaire des dragonnades. Usant d'un procédé de politique traditionnel consistant á imposer une garnison de gens de guerre aux sujets indociles ou mauvais payeurs, certains intendants logent des dragons chez les huguenots, celui de Poitiers děs 1681, puis ceux du Sud-Ouest en 1685. Sürs de ľimpunité, ces « missionnaires bottés » se déchainent et bientôt, á la seule annonce de leur arrivée, les conversions se multiplient. En fait, Louis XIV n'ignore ni dans quelles conditions ces conversions sont obtenues, ni qu'il subsiste encore des protestants. Pourtant, le 18 octobre 1685, il signe 1'édit de Fontaine-bleau révoquant celui de Nantes. Les pasteurs ont quinze jours pour quitter le royaume, mais ľémigration est interdite aux autres réformés, sous les peines les plus graves. 200000 d'entre eux n'en quittent pas moins la France pour se réfugier dans les pays de l'Europe protestante (Hollande, Angleterre, Brandebourg). Leurs coreligionnaires restés dans le royaume et qui tous sont officiellement des NC (nouveaux catholiques) opposent une resistance passive et s'efforcent de pratiquer clandestinement leur culte en se réunissant au « desert », c'est-á-dire dans des lieux écartés. En 1702, á l'appel de predicants et de prophětes, les paysans protestants des Cévennes - les camisards - se soulěvent et, pour en venir á bout, il faut envoyer contre eux 20 000 hommes, en pleine guerre de Succession d'Espagne. En aoüt 1715, le pasteur Antoine Court tient, pres de Nimes, une reunion clandestine regroupant des pasteurs et de nombreux fiděles : l'Eglise réformée est « replantée », la politique ďunité religieuse a échoué. XVII.b.iii. La reforme catholique. En revanche, entre 1661 et 1715, la reforme catholique se diffuse et s'enracine. La multiplication des séminaires en est l'un des aspects les plus importants. Vers 1700, il y a un séminaire dans la plupart des cent trente dioceses du royaume. Un clergé désormais mieux prepare peut se consacrer á une meilleure instruction des fiděles. Catéchismes, retraites, missions intérieures, confréries constituent autant de formes de pastorales dont les effets sont incontestables : vers 1700-1720, la pratique quasi unanime recouvre une piété plus profonde et mieux comprise qu'un siěcle plus tôt, en dépit de la survivance de certaines croyances ou pratiques populaires que le clergé juge superstitieuses, mais qu'il échoue á extirper complětement. 5 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) XVII. c. Louis XIV et ľ Europe XVII.c.i. Les buts et les moyens de la politique de Louis XIV Évoquant la situation en 1661, Louis XIV écrit dans ses Memoir es : « La paix était établie avec mes voisins, vraisemblablement pour aussi longtemps que je le voudrais moi-méme. » On ne saurait mieux exprimer le role d'arbitre auquel peut prétendre le roi de France au lendemain des traités de Westphalie et des Pyrenees, mais aussi sa responsabilité dans la rupture de la paix européenne á partir de 1672. Ľhistoire des rapports de Louis XIV et de I'Europe est celie de l'opposition timide, puis acharnée, que la plupart des pays vont opposer aux menaces que font peser sur eux les pretentions du Roi-Soleil á ľhégémonie. Celui-ci appuie son ambition sur une diplomatic active et surtout sur une armée permanente dont Michel Le Tellier et Louvois, secretaires d'Etat á la Guerre, ont su faire la plus nombreuse et la meilleure d'Europe. Par ailleurs, Vauban assure la protection du royaume grace á une redoutable ceinture de forteresses. La marine royale, enfin, est réorganisée par Colbert. XVII.c.ii. Les guerres de Hollande et de la Ligue d'Augsbourg. La mort de Philippe IV d'Espagne en 1665 fournit ľoccasion á Louis XIV de réclamer, au nom de la reine Marie-Thérěse, une partie de ľhéritage espagnol. II pénětre aux Pays-Bas, mais, devant la vive reaction de la Hollande, signe la paix avec l'Espagne en 1668 en se contentant de l'annexion de quelques places fortes, notamment Lille. II songe aussitôt á tirer vengeance des Hollandais, poussé par Colbert, qui est persuade que seule une guerre victorieuse contre les marchands d'Amsterdam permettra de se débarrasser de redoutables concurrents commerciaux. En fait, la guerre de Hollande, déclenchée par Louis XIV en 1672, se révěle beaucoup plus longue, beaucoup plus difficile et beaucoup plus coüteuse pour le royaume que le roi et son ministře ne ľont escompté. En effet, Guillaume d'Orange, stathouder de Hollande, anime la resistance de ses compatriotes accrochés á leur pays volontairement inondé. De plus, calviniste convaincu, il devient ľadversaire le plus acharné du roi de France et suscite contre lui une coalition européenne regroupant, notamment, ľempereur Leopold et le roi d'Espagne Charles II. Cest ce dernier qui fait les frais de la guerre, marquee par les derniěres campagnes de Condé et de Turenne, puisqu'il doit céder á la France, lors des traités de Niměgue (1678-1679), la Franche-Comté et de nouvelles places aux Pays-Bas. Louis XIV, qui n'a pu écraser la Hollande mais a résisté victorieusement á une puissante coalition européenne, est alors á ľapogée de sa puissance. Mais, loin de s'en tenir lá, il se lance dans une politique aventureuse d'annexions en pleine paix (notamment Strasbourg en 1683) et de provocations de toutes sortes qui, en moins de dix ans, aboutissent á une nouvelle coalition 6 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) ďune grande partie de l'Europe. Aux principaux princes allemands et á ľempereur regroupés děs 1686 dans une ligue defensive dite « d'Augsbourg », se joignent l'Espagne, la Suede, puis la Hollande et l'Angleterre aprěs la revolution de 1688-1689, á Tissue de laquelle Guillaume d'Orange devient roi d'Angleterre. La guerre de la Ligue d'Augsbourg, qui s'ouvre děs octobre 1688, est longue, indécise et bientôt épuisante financiěrement pour touš les belligérants. Aprěs ľéchec naval de La Hougue (juin 1692), Louis XIV abandonne l'espoir d'envahir l'Angleterre et de détrôner Guillaume, mais ses troupes s'opposent aux Pays-Bas aux tentatives de ce dernier pour envahir la France. En 1697, les traités de Ryswick, qui laissent au royaume ses frontiěres de 1679, plus Strasbourg, marquent le premier arret dans la politique conquérante du Roi-Soleil, mais ce n'est qu'une tréve. XVII.c.iii. La guerre de Succession d'Espagne En effet, en 1701, le roi accepte le testament de Charles II d'Espagne, qui laisse sa couronne et la totalite de ses possessions au due Philippe d'Anjou, petit-fils de Louis XIV. Ľempereur Leopold, frustré de ľhéritage qu'il escomptait pour son second fils, l'Angleterre et la Hollande, menacées dans leurs intéréts économiques par l'ouverture du marché hispano-américain aux marchands francais, et, dans leur sillage, d'autres puissances européennes se regroupent au sein de la Grande Alliance de La Haye, á l'initiative de Guillaume d'Orange, et, en 1702, déclarent la guerre á la France et á l'Espagne. Cette fois, Louis XIV est á deux doigts du désastre, á la suite de plusieurs défaites militaires et surtout á cause de ľépuisement du royaume. Heureusement, une ultime tentative des coalisés pour marcher sur Paris échoue á Denain le 24 juillet 1712, ce qui permet au roi ďobtenir la paix, á Utrecht (1713) et á Rastadt (1714), á des conditions sinon satisfaisantes, du moins honorables : la France preserve ľinté-grité de son territoire national et impose le maintien de Philippe V sur le tróne de Madrid, mais eile abandonne á l'Angleterre Terre-Neuve, l'Acadie et la baie d'Hudson, ainsi que tous les avantages commerciaux qu'elle avait elle-méme obtenus aprěs 1701 dans l'Amérique espagnole. XVII. d. Le siede de Louis XIV XVII.d.i. Le roi et ľidéal classique « Non seulement il s'est fait de grandes choses sous son rěgne, mais e'est lui qui les faisait. » Que Voltaire se soit laissé empörter par son admiration pour Louis XIV en éerivant une telle phrase ou méme en donnant le nom du roi au siěcle oú il a vécu, il n'en est pas moins 7 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) incontestable que le long regne du Roi-Soleil correspond á ľune des périodes les plus glorieuses de ľhistoire de la France et que la personne du souverain n'y est pas étrangěre. Entendant bien faire servir la littérature, les arts, les sciences á la glorification de son rěgne, témoignant, de surcroTt, ďun goüt sür et éclairé, Louis XIV encourage, pensionne, fait travailler écrivains, artistes et savants. Aidě de Colbert, il crée des Academies qui assurent au mouvement littéraire, artistique, scientifique ľunité de direction nécessaire. II favorise ainsi le triomphe de ľidéal classique caractérisé par le souci de l'ordre et de la rigueur, le respect des regies et l'imitation des Anciens, la recherche du grandiose et du majestueux. Dans les années 1660-1685, une pléiade ďécrivains, usant de ľadmirable outil qu'est devenue la langue francaise, brillent dans les genres les plus divers et deviennent des moděles pour toute l'Europe : Racine, Moliěre, Bossuet, Pascal, La Fontaine, pour ne citer que les plus grands. XVILd.ii. Versailles En méme temps, le roi demande aux meilleurs artistes de son temps de lui construire une residence digne de lui : de 1662 á 1702, Versailles est un immense chantier ou travaillent les architectes Louis Le Vau, puis Jules Hardouin-Mansart et Robert de Cotte, le peintre Charles Le Brun, le jardinier André Le Notre. En 1682, la cour s'installe définitivement dans ce cadre incomparable. Majesté, symetrie, mesure, telies sont les caractéristiques d'un ensemble ou tout concourt á la gloire du souverain. Bätiments et jardins s'ordonnent autour ďun grand axe qui part de la statue du roi dans la cour ďaccěs, passe par sa chambre au centre du palais et se prolonge par le Tapis vert et le Grand Canal. Ľimmense facade du chateau, du côté des jardins, est ďune ordonnance toute classique, avec ses trois étages, ses hautes fenétres encadrées de pilastres, ses toits en terrasse limités par une balustrade. Les jardins sont, autant que le palais ou la chapelle, le theatre des fétes profanes et religieuses qui constituent la grande occupation des courtisans et dans lesquelles la musique joue un role de premier plan. En dépit de certaines survivances de ľesthétique baroque dans le décor éphéměre des fétes et dans bien des elements de la decoration des intérieurs ou des jardins, Versailles est la plus grande manifestation de l'art classique. Toutefois, cette éclatante réussite ne doit pas éclipser les grandes constructions parisiennes de la méme époque, places royales des Victoires et Louis-le-Grand (aujourďhui Vendôme), college des Quatre-Nations (aujourd'hui Institut), hotel des Invalides. XVII.d.iii. L'envers du Grand Siěcle Les splendeurs du « grand art monarchique » ne peuvent faire oublier, pour autant, ce que l'on a pu appeler ľ« envers du Grand Siěcle » : ľaggravation du sort du plus grand nombre, 8 XVII. Le Rěgne personnel de Louis XIV (1661-1715) á la fin du rěgne, du fait des guerres continuelles et de la pression fiscale qu'elles entraínent ; les défaites militaires de la guerre de Succession d'Espagne ; intolerance et la brutalite de la politique antiprotestante ; la remise en cause par quelques-uns, á partir des années 1680, des grandes valeurs de ľordre établi, au nom du rationalisme cartésien. De plus, les derniěres années du rěgne sont endeuillées par une série de décěs prematures dans la famille royale : en 1711, le fils unique du roi, Louis, dit le Grand Dauphin ; en 1712, le fils aíné de celui-ci, le due de Bourgogne, son épouse et leur fils aíné ; en 1714, le due de Berry, dernier fils du Grand Dauphin. Lorsqu'il meurt, le Ier septembre 1715, ägé de soixante-dix-sept ans, aprěs soixante-douze ans de rěgne et cinquante-quatre ans de gouvernement personnel, le Roi-Soleil, qui a supporte ces épreuves avec une grande dignitě, ne laisse pour lui succéder que son arriěre-petit-fils ägé de cinq ans. 9