DOCUMENT  IV.b.

   

                   L'empereur Claude propose l'entrée de Gaulois au Sénat de Rome

   

   

   1. Extrait d'une inscription gravée sur une plaque de bronze et trouvée `a Lyon :

   

   >> Assurément c'est par une innovation que le divin Auguste, mon grand-oncle, et mon oncle
   Tibere César ont voulu que toute la fleur des colonies et des municipes -j'entends des hommes
   distingués et fortunés - se trouvât dans cette curie. [...]

   >> C'est avec timidité, sénateurs, que j'ai franchi les bornes des provinces qui vous sont
   habituelles et familieres, mais il me faut maintenant plaider ouvertement la cause de la Gaule
   chevelue. Si quelqu'un considere qu'ils ont mis `a l'épreuve le divin César par une guerre de
   dix années, que le meme homme mette en regard cent ans d'une fidélité sans faille et une
   obéissance immuable au milieu de bien de nos troubles, dont mon tres illustre pere Drusus a
   fait plus que l'épreuve lorsqu'il soumettait la Germanie : ils lui garantirent alors, sur ses
   arrieres, une paix profonde et assurée par leur propre tranquillité. <<

   

                                                     Corpus des inscriptions latines, XI II, 1668

                                                             (d'apres L. Lerat, La Gaule romaine,

                                                             Paris, A. Colin, 1977. pp. 189-190).

   

   2. Extrait des Annales de Tacite :

   

   >> " |...| Pourtant, si l'on passe en revue toutes les guerres, il n'en est aucune qui ait été
   liquidée en moins de temps que celle que nous avons faite aux Gaulois. Depuis lors, la paix a
   été continue et confiante. Désormais melés aux nôtres par les moeurs, les métiers, les
   alliances, qu'ils nous infusent leur or et leurs richesses au lieu de les posséder séparément
   ! Sénateurs, tout usage qui est aujourd'hui considéré comme remontant `a la plus haute
   antiquité a été nouveau un jour : les plébéiens sont devenus magistrats apres les patriciens,
   les Latins apres les plébéiens, les autres peuples d'Italie apres les Latins. Notre mesure
   d'aujourd'hui vieillira elle aussi, et ce que nous défendons `a présent par des exemples
   servira d'exemple `a son tour. "

   >> En vertu du sénatus-consulte qui suivit le discours du prince, les Éduens reçurent les
   premiers le droit de siéger au Sénat de Rome. Ce don leur fut fait en raison de l'ancienneté
   de leur alliance et du titre de freres du peuple romain qu'ils sont les seuls `a posséder en
   Gaule. <<

   

                                                                        Tacite, Annales, XI, 2425

                                                           (d'apres L. Lerat, ibid., p. 187-188).

   

   

   En 48 up. J.-C., l'empereur Claude prononça un discours au Sénat de Rome `a la suite d'une
   requete des notables gaulois qui souhaitaient avoir acces aux magistratures romaines et ainsi
   au Sénat. Exceptionnellement, ce discours nous est connu par deux documents : la transcription
   qu'en fit Tacite, historien romain (55-120 ap. J.-C.), et une inscription gravée sur une
   plaque de bronze, découverte `a Lyon en 1528. Apres avoir flatté l'élément italien du Sénat,
   Claude montre tous les avantages que Rome pourrait tirer de l'entrée des notables gaulois au
   Sénat. Le Sénat accepta d'abord pour les Éduens, dont les relations avec Rome étaient tres
   anciennes, et dut finir par donner son accord pour les autres peuples, ce qui explique
   l'affichage du document `a Lyon. Ces deux extraits offrent un précieux témoignage de la
   politique menée par Rome dans les provinces et de l'intégration de la noblesse gauloise apres
   un siecle d'occupation romaine.