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VOLTAIRE
LE SIĚGLE DE LOUIS XIV (1751)
ANALYSE  ET EXTRAITS
II n'y a dans Vhistoire du monde que quatre siěcles qui comptent: le siěde de Périclés, le siěcle ďAuguste, le siěcle des Médicis et le siécle de Louis XIV. Voltaire entreprend done de peindre á la postérité non les actions ďun seul homme, mais l'esprit des hommes dans le siěcle le plus éclairé qui fut jamais. II ne s'aitardera pas aux événements militaires. II s'attachera á ce qui peut peindre le génie et les mceurs des hommes (Introduction).
II commence néanmoins par Vhistoire politique: la minoritě du roi (II á VI), son gou-vernement personnel (VII á XXIV), que jalonnent les traités ďAix-la-Chapelle (1(368), de Nimégue (1678), de Ryswick (1697), ď Utrecht (1713). Voltaire rapporte ainsi le fait ďarmes le plus célébre du siécle.
8. LE PASSAGE DU RHIN
Pour le commentaire. — Napoleon qualifiait le passage du Rhin par Louis XIV ď <t operation de quatriěme ordre ». Voltaire, dans son récit, dont on remarquera 1'aisance claire et la solidite, ramene déjá 1'aílaire á ses proportions véritables. On mesurera son effort ďhistorien en se repor-tant a la correspondance de Mme de Sévigné (juin 1672), á VÉpiire IV de Boileau, témoignages de renthousiasme démesuré des contemporains, que confirment un bas-relief de la porte Saint-Denis, un tableau de Le Brun dans la grande galerie de Versailles representant le Rhin láchant son gou-vernail, et le tableau de Van der Meulen, peintre officiel des batailles royales.
Toutesles places qui bordentle Rhin et 1'Issel 1 se rendirent. Quelques gouver-neurs envoyerent leurs clefs des qu'lls virent seulement passer de loin un ou deux escadrons francais : plusieurs officiers s'enfuirent des villes, oüils etaient en garni-son, avant que l'ennemi füt dans leur territoire ; la consternation etait generale. Le prince d'Orange 2 n'avait point encore assez de troupes3 pour paraitre en Campagne. Toute la Hollande s'attendait ä passer sous le joug des que le roi serait au defä du Rhin. Le prince d'Orange fit faire ä la häte des lignes au delä de ce fleuve, et, apres les avoir faites, il connut l'impuissance de les garder. II ne s'agissait plus que de savoir en quel endroit les Francais voudraient faire un pont de bateaux, et de s'opposer, si on pouvait, ä ce passage.
En eilet l'intention du roi etait de passer le fleuve sur un pont de ces petits bateaux inventes par Martinet4. Des gens du pays informerent alors le prince de Conde que la secheresse de la Saison avait forme un gue sur un bras du Rhin, aupres d'une vieille tourelle qui sert de bureau de peagc, qu'on nomme Tollhuys5, la maison du peage, dans laquelle il y avait dix-sept soldats6. Leroi fit sonder ce guc par le comte de Guiche 7 : il n'y avait qu'environ vingt pas ä nager au milieu de ce bras du fleuve, selon ce que dit dans ses lettres Pelisson 8, temoin oculaire, el er
1. Issel: bras du Rhin qui se jette dans le /uyderzée.
2. Le prince d'Orange: il avait vingt-deux ans. Voltaire dit de lui :
« Son humeur etait froide et severe : son génie actif et percant ; son courage, qui ne se rebutait jamais, fit supporter á son corps faible et languissant des fatigues au-dessus de ses forces. 11 était valeureux sans ostentation, ambitieux, mais ennemi du faste... enfin, presrme en tout, l'oppose de Louis XIV ».
3. Assez de troupes: comme la conquéte de la Franche-Comté, la conquete de la Hollande avait été montée par Louis XIV et Louvois puissani-ment et en secret. La surprise est done complete.
4. Martinet: offlcier de l'armee de Louis XIV qui organisa 1'infanterie en compagnies et ba-taillons, introduisit l'usage de la baionnette, et
crea des bateaux de cuivre et des pontons pour le passage des lleuves.
5. Tollhuys : sur la frontiere des Pays-Bas et da la Prusse, a 1'endroit oil le Rliin est aujourd'hul coupe par le chemin de fer de Cleves a Arnhem.
6. Dix-sept: precision d'une imperceplilile ironie.
7. De Guiche: Armand de Gramont, comic <!■ Guiche (1638-1676), avait ete maitre de caraj des gardes francaises, puis disgracie. II venail ile reprendre du service et mourut l'annee suivants i Kreuznach.
8. Pelisson: oil plutot Pellisson (1624-1898j auteur d'une Histoire de VAcademie franc" 1 (1653), fut commis de Fouquet, auquel il rr >it iidele dans sa disgrace, rentra en grace el del lllj historiographe du roi jusqu'au jour ou il Inl remplace par Boileau et Racine.
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LE SIEGLE DE LOUIS XIV
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....nKe du Rhin. (B. N. E.) - Sans doute est-ce Le Brun oui, en montrant sur les bords du Rhin 1 ouisXIV tenant la foudre en main, volant sur uncharde Victoire que pousse Hercule, etc., atteint le plus haul cloi,, 'mux Passage (1672); mais meme une estampe populaire anonyme comme celle-ci ne manque pas de irprf
......"'du Rhm. en bordure d'une representation voulueaussi exacte que possible delevenement et complM*
I une et dansl'autre.on cherchera «leslignesdu prince d'Orange... la vieille tourelle auisert de bureau de piuge . ■'I'llandats entrant dans la riviere pour faire semblant de combattre... ie pont de bateaux sur lequel Louis XIV passu aoec 1'infanterie, apris avoir dirige lui-meme toute la marche... etc. ».
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