Jean-Arthur Rimbaud (1854 - 1891) Ma bohème (Fantaisie)[UsW1] Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées ; Mon paletot aussi devenait idéal ; J'allais sous le ciel, Muse, et j'étais ton féal ; Oh ! là là ! que d'amours splendides j'ai rêvées ! Mon unique culotte avait un large trou. Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse. Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou Et je les écoutais, assis au bord des routes, Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ; Où, rimant au milieu des ombres fantastiques, Comme des lyres, je tirais les élastiques De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur ! Ma bohème 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 1. Je m'en allais, / les poings // dans mes po/ches crevées ; 12 4/2//[DEL: 4 :DEL] [INS: 3 :INS] /[INS: 3 :INS] [DEL: 2 :DEL] a F I S V 2. Mon paleto/t aussi /devenai/t idéal ; 12 4/2//3/3 b M H R C 3 J'allais /sous le ciel, // Muse, / et j'étais ton féal ; 12 2/3//1/6 b M H R C 4. Oh ! là là ! /que d'amours splendi[INS: / :INS] des[DEL: / :DEL] j'ai rêvées ! 12 3/[INS: 5 :INS] 6/[INS: 4 :INS] [DEL: 3 :DEL] a F I S V 5. Mon uni/que culotte/ avait un lar/ge trou. 12 3/3//4/2 c M H S V 6. Petit-Poucet / rêveur, // j'égrenais dans ma cour/se 12 4/2//5/1 d F I R C 7. Des ri[DEL: m :DEL] [INS: //m :INS] es.[DEL: // :DEL] Mon auberge/ était à la Gran/de-Ourse. 12 2//[INS: 4 :INS] [DEL: 3 :DEL] /[INS: 4 :INS] [DEL: 5 :DEL] /2 d F I R C 8. Mes étoiles / au ciel //avaient un doux /frou-frou 12 4/2//4/2 c M H S V 9. Et je les[INS: / :INS] écoutais, // assis au bord / des routes, 12 [INS: 3 :INS] [DEL: 5 :DEL] /[INS: 3 :INS] [DEL: 1 :DEL] //4/2 e F I S C 10. Ces bons soirs /de septem//bre où je sentais /des gouttes 1[INS: 2 :INS] [DEL: 3 :DEL] 3/3//[DEL: 5 :DEL] [INS: 4 :INS] /2 e F I S C 11. De rosée /à mon front, //comme un vin/ de vigueur ; 12 3/3//3/3 f M H S C 12. Où, // rimant au milieu / des om[INS: / :INS] bres fantas/tiques, 12 1//5/[INS: 2 :INS] [DEL: 5 :DEL] /[INS: 4 :INS] [DEL: 1 :DEL] g F I R C 13. Comme des ly/[INS: / :INS] res,[DEL: // :DEL] je tirais[INS: // :INS] les élas/tiques 12 4/[INS: / :INS] [DEL: 1//6 :DEL] [INS: 4/ :INS] /[INS: 4 :INS] [INS: [UsW2] :INS] [DEL: 1 :DEL] g F I R C 14. De mes souliers/ blessés, // un pied /près de mon cœur ! 12 4/2//2/4 f M H S C Introduction Aujourd´hui [UsW3] nous allons analyser le poème Ma bohème de Jean-Arthur Rimbaud. C´est un poète français, jeune quand il écrivait – toutes ses ouevres viennent de l´époque entre ses 15 et 19 ans et il a mené une vie aventureuse. Il a écrit Ma bohème [DEL: lorsque :DEL] [INS: lorsqu’ :INS] il avait 16 ans pendant l´une de ses fuites de la maison. Dans cette analyse on va d´abord étudier la forme externe du poème à l´aide du tableau que nous avons préparé et ensuite nous regarderons sa forme interne. Forme externe Ma bohème est un poème à forme fixe, plus précisément un sonnet. Il est composé de 14 vers répartis en deux quatrains et deux tercets. Comme nous pouvons [INS: le :INS] voir dans la première colonne du tableau, ce sonnet est écrit en alexandrins. En général l´hémistiche est au milieu du vers après la sixième syllabe, mais comme nous le montre la deuxième colonne Rimbaud ne respecte pas toujours cette règle. Dans les vers 3 et 13 l´hémistiche se trouve après cinquième syllabe, dans les vers 7 et 12 elle est au début du vers, après la deuxième et première syllabe respectivement et dans le vers 4 il n´y a pas d´hémistiche et le vers est divisé en trois parties donc c´est un vers trimètre. [UsW4] La troisième colonne nous aide à mieux voir la répartition des rimes. Dans les quatrains on observe des rimes embrassées ABBA et CDDC. Dans les tercets il y a une rime plate au début suivie par une rime embrassée. Cette répartition EEF GGF de rimes dans les tercets nous montre que ce poème est un sonnet italien. Rimbaud respecte l´alternance des rimes masculines (M) et féminines (F) et il est évident qu´il y a une relation entre la colonne 3 et colonne 4 car la répartition des rimes masculines et féminines suit la répartition des rimes. La relation entre la colonne 4 et la cinquième colonne, qui nous montre si les rimes sont isométriques (I) ou hétérométriques (H), est aussi visible car la cinquième colonne suit le même schéma. Toutes les rimes féminines sont isométriques et les rimes masculines sont hétérométriques. La sixième colonne montre la répartition des rimes suffisantes (S) et les rimes riches (R). Cette colonne paraît être reliée à la troisième colonne car tous les rimes embrassées suivent le schéma SRRS. La dernière colonne nous montre si le vers finit par une voyelle (V) ou une consonne (C). Strophes Ce sonnet italien est composé comme nous l´avons déjà mentionné de quatre strophes dont deux quatrains et deux tercets. 1. Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées ; 2. Mon paletot aussi devenait idéal ; 3. J'allais sous le ciel, Muse, et j'étais ton féal ; 4. Oh ! là là ! que d'amours splendides j'ai rêvées ! 5. Mon unique culotte avait un large trou. 6. Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course 7. Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse. 8. Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou Les deux quatrains créent l´image d´un voyage. Il n´y a pas de différence thématique entre les deux. Dès le début, le voyage est montré par la répétition du verbe aller : je m´en allais (vers 1) et j´allais (vers 3) et à cette répétition s´ajoute le champ lexical du voyage visible partout dans le poème : allais (vers 1 et 3), course (vers 6), routes (vers 9). D´abord le regard du lecteur suit un axe horizontal, il ne voit que la route sous les pieds du voyageur et ensuite dans la deuxième moitié des quatrains l´image s´élargit par la mention du ciel et les étoiles: sous le ciel (vers 3), à la Grande-Ourse (vers 7), étoiles au ciel (vers 8). [DEL: Puis s :DEL] [INS: S :INS] uivent les tercets. 9. Et je les écoutais, assis au bord des routes, 10. Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes 11. De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ; 12. Où, rimant au milieu des ombres fantastiques, 13. Comme des lyres, je tirais les élastiques 14. De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur ! À la différence des sonnets traditionnels, ici il n´y a pas de rupture nette entre les quatrains et les tercets. En fait à partir du vers 8 jusqu´au vers 14 le poème constitue une longue phrase. La seule différence est que tandis que dans les quatrains le voyageur bouge et voyage activement, dans les tercets il s´arrête: assis au bord des routes (vers 9) et nous donne plus de détails sur son entourage. Analyse thématique Comme ce poème entier forme une image nous sommes obligés de l´analyser comme un ensemble. Tout d´abord, nous voyons que le voyageur est pauvre. Sa pauvreté est visible à travers ses vêtements usés, il a les poches crevées (vers 1), souliers blessés (vers 14) son unique culotte avait un large trou (vers 5) ce qui indique qu´il ne possède que ce qu´il porte sur lui. Et l´expression Mon paletot aussi devenait idéal dans le vers 2 où le manteau de l´auteur devient une idée, donc quelque chose d´immatériel souligne son usure complète. Cependant, l´auteur ne semble pas s´en soucier car on peut noter l´absence totale du vocabulaire péjoratif. À la place il parle des amours splendides (vers 4). En fait, tout son voyage est un vagabondage heureux et insouciant. Cela est suggéré dès le titre du poème. Ma bohème signifie l´ensemble des artistes qui sont connus pour mener une vie insouciante au jour le jour ou directement un mode de vie errante, vagabonde, hors des conventions sociales. Le voyageur est libre de faire ce qu´il veut. Nous pouvons ensuite voir l´absence des précisions de temps et de lieu. Nous savons seulement qu´il fait presque nuit grâce aux expressions étoiles (vers 8) et ces bons soirs de septembre (vers 10) et en ce qui concerne le lieu nos seuls indices sont auberge à la Grande-Ourse (verse 7), au bord des routes (vers 9), et au milieu des ombres fantastiques (vers 12) et de cela, il est impossible de localiser un endroit précis. L´expression des ombres fantastiques (vers 12) souligne l´insouciance et absence de peur de l´auteur. Les ombres qui en général évoquent la peur sont pour lui, selon la définition de l´adjectif fantastiques que nous décidons d´adopter, soit imaginaires et donc inexistantes en vrai[INS: e :INS] vie, soit merveilleuses, ou encore qu´elles appartiennent au monde fantastique donc rempli des êtres imaginaires et surnaturels. Un monde comme cela servirait d´inspiration pour le jeune poète. En plus, le deuxième titre du poème La Fantaisie accentue le ton léger et insouciant du poème. L´auteur utilise aussi la métaphore de Petit-Poucet qui est un personnage de conte de fée qui marquait son trajet avec des cailloux ou des morceaux du pain. Ici, l´auteur se compare à ce personnage mais à la place des cailloux il égrène des rimes. Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course Des rimes. (vers 6-7). Le fait qu´il a choisi de parler d´un conte de fée souligne sa jeunesse. On peut aussi noter l´utilisation d´un enjambement. Par cette métaphore l´auteur se transforme d´un vagabond en poète et nous donne l´impression que le voyage est inséparable de la poésie. Il met en relief ce rapprochement entre le voyage et la poésie aussi dans le dernier tercet en utilisant un autre enjambement et une comparaison. 12. Où, rimant au milieu des ombres fantastiques, 13. Comme des lyres, je tirais les élastiques 14. De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur ! D´abord, il y a le verbe rimant et ensuite la comparaison des élastiques ses souliers blessés à des cordes de lyres. C´est de nouveau une image où il montre le voyageur comme inséparable de la poésie. Le voyageur passe beaucoup de son temps libre à faire la poésie peu importe s´il marche comme nous l´a montré la métaphore du Petit-Poucet rêveur dans les vers 6-7 ou s´il se repose comme nous venons de voir dans le dernier tercet. Et l´auteur est aussi soumis à une divinité inspiratrice : Muse, et j´étais ton féal (vers 3). Enfin, le mot pied dans le vers 14 peut être compris et classé dans les deux domaines. Soit nous pouvons le comprendre comme une unité de mesure ancienne, soit on peut le comprendre comme allusion à l´unité rythmique utilisée en poésie. Il faut aussi remarquer que l´auteur utilise beaucoup de pronoms possessifs. Dès le titre Ma bohème, puis par exemple mes poches (vers 1), mon paletot (vers 2), mon auberge (vers 7), mes étoiles (vers 8), mon front (vers 11), mon coeur (vers 14). Ce sont surtout les pronoms possessifs devant les noms [INS: associés :INS] [DEL: connectés :DEL] [INS: à :INS] [DEL: avec :DEL] la nature, qui est d´ailleurs omniprésente dans tout le poème, qui attirent l´attention. Car il est attendu que les vêtements sont les siens, mais les pronoms devant les étoiles et l´auberge à la Grande-Ourse, donc à la belle étoile, évoquent la familiarité et montrent une relation étroite et chaleureuse entre le voyageur-poète et la nature. Il s´y sent comme chez lui, la nuit dans la nature ne l´effraye pas, et les étoiles sont pour lui des amies qui lui parlent : Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou Et je les écoutais (vers 8-9). Ensuite, la rosée qui tombe le soir lui donne la force : Je sentais des gouttes De rosée à mon front, comme un vin de vigueur (vers 10-11). Et le fait que Rimbaud finit ce poème avec le mot coeur peut nous indiquer que tout cela, le voyage sans but, sans argent, au milieu de la nature, sous les étoiles... est pour lui le bonheur. Pour finir regardons de plus près le titre ou les titres du poème: Ma bohème comme la Fantaisie évoquent, avec l´ensemble du poème, un fort sentiment de liberté. La bohème qui, comme nous l´avons déjà constaté, montre un vagabondage insouciant, est précédé du pronom possessif ma. Cela fait de ce poème l´expérience personnelle de l´auteur. Son désir de pouvoir errer dans la nature sans l´obligation d´avoir une excuse pour cette errance sans but peut être en rapport avec la vie de l´auteur car Rimbaud s´est enfui à plusieurs reprises de sa maison pour échapper à la surveillance stricte de sa mère. Ensuite la Fantaisie est non seulement celle du contenu du poème, mais, comme nous pouvons le voir grâce au tableau que nous avons préparé, aussi celle de la forme du poème. Dans le tableau nous pouvons voir que l´auteur a pris de libertés et a choisi de ne pas respecter les règles de l´écriture de l´époque. Conclusion Le poème Ma Bohème de Rimbaud est une oeuvre fantastique, qui nous fait sentir la jeunesse et le goût de l´aventure de l´auteur et le sentiment de la liberté. Ce poème que nous pouvons considérer comme autobiographique à cause des fréquents pronoms possessifs employés par Rimbaud nous permet de vivre avec le poète-voyageur son vagabondage insouciant et libre. Lenka Furdíková 498576 [DEL: :DEL] [DEL: :DEL] [DEL: :DEL] [DEL: :DEL] [DEL: :DEL] ________________________________ [UsW1]Excellent travail, attention à l’analyse de la versification. [UsW2]trimètre [UsW3]???? [UsW4]Voir mes annotations ci-dessus.