II.b. L’économie française depuis un demi-siecle Depuis plus de vingt ans, les aléas de la conjoncture frappent l’Europe et la France, comme ils touchent les États-Unis, mais les phases de baisse du chômage sont toujours plus breves et moins intenses que celles ou il augmente. La croissance est `a l’avenant, toujours plus faible en France et en Europe qu’aux États-Unis (graphique 1). Y a-t-il l`a une fatalité européenne ? L’examen de l’histoire récente fournit-elle quelques explications ? II.b.1. 1945-1973 : des Trente Glorieuses `a la montée du chômage Apres la Seconde Guerre mondiale, le monde développé connaît une phase de croissance forte et prolongée (tableau 1). La production de masse et les innovations technologiques sont nombreuses, et la productivité du travail des États-Unis, l’économie dominante, est de 2,5 % par an. L’Europe et la France profitent de cette vague d’innovations `a laquelle s’ajoutent deux phénomenes spécifiques : la reconstruction suite aux dommages de la guerre sur les biens productifs ou résidentiels et le rattrapage technologique sur les États-Unis. Ce double effort d’investissement en capital et en technologie engendre une croissance de la productivité du travail de l’ordre de 5 % par an. Durant cette période, la production par individu, et donc la richesse, a pratiquement quadruplé ! L’industrialisation progressive des sociétés européennes a pour conséquence une modification profonde de la société : la population agricole vient accroître les effectifs de l’industrie. En France, la part de l’emploi agricole passe de 20 % dans les années soixante `a un peu plus de 10 % en 1970. L’industrialisation va de pair avec l’urbanisation et l’exode rural. Ce bouleversement de la société française s’accompagne du développement rapide d’un solide systeme de protection sociale, qui devient de moins en moins corporatiste et de plus en plus universel. Assurance chômage, retraite, santé, famille mais aussi éducation sont le socle d’une économie non marchande, administrée, financée par des transferts. II.b.2. Les chocs pétroliers, le ralentissement de la productivité La fin du systeme monétaire de Bretton Woods en 1971, et le premier choc pétrolier `a la suite du conflit israélo-arabe de 1973 marquent le terme de ce cycle d’expansion. Les tensions apparues `a la fin des années soixante se sont traduites par de l’inflation (autour de 6 % en France et en Europe en 1968, 4 % aux États-Unis) et expliquent la décision d’abandonner la convertibilité du dollar. L’année 1975 est marquée par une récession (en France, le PIB diminue de 0,3 %, aux États-Unis de 0,4 %). En moyenne de 1973 `a 1979, la croissance retombe `a un rythme nettement inférieur `a 3 % l’an. L’Europe connaît de grands désordres monétaires et le chômage augmente de pratiquement cinq points en une décennie ; alors qu’il fluctuait autour de 3 % dans les années soixante, il atteint plus de 8 % en 1983. La fin de cette période de forte croissance, appelée les Trente Glorieuses, se traduit aussi par un net ralentissement de la croissance de la productivité. En France, au cours des années soixante-dix, la croissance de la productivité du travail est divisée par deux passant de 5 % par an `a 2,6 %. Les économies développées traversent une crise profonde. La trajectoire française est tres liée `a celle de l’Europe, que ce soit en termes de croissance du PIB, d’inflation ou de chômage. L’ébauche de l’union monétaire, avec le Serpent monétaire créé en 1972, puis le Systeme monétaire européen (SME), entérine et renforce la liaison des conjonctures européennes. En 1979, le second choc pétrolier frappe `a nouveau l’économie mondiale et relance l’inflation. Tableau 1. - Croissance du PIB et de la productivité du travail (en %) +--------------------------------------------------------------------------------------------+ |Croissance du PIB |1950-1973|1973-1979|1979-1990|1990-1997|1997-2000|2000-2002*| |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |France |5,0 |2,8 |2,2 |1,4 |3,6 |1,4 | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |Union européenne |4,8 |2,4 |2,3 |1,7 |3,1 |1,1 | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |États-Unis |3,6 |2,6 |2,6 |2,3 |4,2 |1,3 | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |Croissance de la productivité |1950-1973|1973-1979|1979-1990|1990-1997|1997-2000|2000-2002*| |du travail | | | | | | | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |France |5,0 |2,6 |2,1 |1,3 |1,4 |0,0 | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |Union européenne |4,5 |2,7 |1,9 |0,9 |1,1 |0,1 | |-------------------------------+---------+---------+---------+---------+---------+----------| |États-Unis |2,5 |0,7 |1,1 |1,4 |2,9 |0,9 | +--------------------------------------------------------------------------------------------+ * Chiffres provisoires pour 2001 et prévisions OFCE pour 2002. Source : OCDE, MEI economic outlook, no 73, 2003 et Dynamic Forces in Capitalist Development, Angus Maddison. II.b.3. La construction européenne, l’inflation vaincue Les situations économiques américaine et européenne s’écartent singulierement des le début des années quatre-vingt. L’inflation aux États-Unis diminue plus tôt qu’en Europe, la croissance peut alors reprendre durant la deuxieme moitié des années quatre-vingt aux États-Unis et le chômage baisse. Le retour de la croissance est plus tardif en Europe, probablement enclenché par le contre- choc pétrolier de 1986, et l’écart de chômage avec les États- Unis se creuse, meme s’il semble se réduire en 1986. En France, le gouvernement engage une politique de lutte contre l’inflation : la désinflation compétitive `a partir de 1983. Elle consiste `a rompre l’indexation entre les salaires et les prix, `a ancrer le franc sur le deutschemark (le " franc fort ") et `a libéraliser l’économie par les privatisations et la déréglementation. Les années quatre-vingt-dix confirment les divergences entre l’Europe et les États-Unis. La guerre du Golfe (1990), puis la réunification allemande (1991) plongent l’Europe dans une récession en 1993. La réunification stimule initialement les économies européennes, mais engendre des tensions inflationnistes fortes en Allemagne. De la réunification jusqu’en 1998, la politique économique a pour objectif principal la monnaie unique et le respect des criteres de convergence prévus par le traité de Maastricht. L’inflation, le déficit public, la dette publique doivent atteindre des criteres précis. En conséquence des politiques menées, la croissance est faible et le chômage augmente tandis que l’inflation et les déficits publics sont contrôlés. L’ancrage sur le deutschemark - c’est-`a-dire la politique du franc fort - explique une grande partie de l’écart de chômage qui s’accentue entre la France et l’Europe. Le chômage est ainsi supérieur d’environ un point en France par rapport `a la moyenne de la future zone euro alors que l’inflation y est environ inférieure d’un point. La croissance " molle " de l’Europe contraste cependant avec le dynamisme américain et alors que l’Europe rattrapait les États-Unis durant les années soixante, les niveaux de vie ont cru beaucoup plus vite aux États-Unis qu’en Europe pendant les années quatre-vingt-dix. II.b.4. Le retour (temporaire) de la croissance De 1997 `a 2001, l’Europe a connu un cycle de croissance. Le chômage a amorcé une décrue des le milieu de l’année 1997. Le cycle de croissance a été alimenté par le rattrapage du retard d’investissement accumulé pendant le début de la décennie quatre-vingt-dix. Mais la reprise de la croissance de la productivité du travail aux États-Unis a été depuis 1995 importante, laissant espérer une vague de croissance portée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Aux États-Unis, la productivité croissait `a la fin des années quatre-vingt-dix `a un rythme comparable `a celui qu’elle avait pendant les Trente Glorieuses (tableau 1). L’écart avec l’Europe se creuse, mais une diffusion de cette vague de croissance permettrait `a l’Europe de retrouver une croissance vigoureuse, en reproduisant le rattrapage sur l’économie dominante. Jusqu’`a maintenant, pourtant, la productivité européenne n’affiche pas une rupture dans son rythme de croissance. La politique de l’emploi en France `a la fin des années quatre-vingt-dix a probablement contribué `a la bonne performance de l’emploi en France et `a la réduction de l’écart de chômage avec ses principaux partenaires. En 2000, alors que la France connaît une croissance comparable `a celle de la zone euro (3 %), le chômage se réduit deux fois plus (1,5 point en France contre 0,7 point en Europe). L’avenement de l’euro a été marqué par une phase de croissance forte. Il y a l`a les dividendes de la convergence européenne et de la lutte contre l’inflation. Cependant, la vague de croissance s’est brusquement interrompue depuis le début de l’année 2001 et quelques failles sont apparues dans le modele de croissance technologique : surcapacités dues `a des anticipations par trop volontaristes ; rentabilité décevante de certains projets, scandales financiers spectaculaires. C’est dans cette conjoncture dégradée que la monnaie unique a joué un rôle discret mais déterminant. La tentation aurait été grande dans certains pays de recourir `a des dévaluations (en Italie, en Espagne par exemple) pour limiter les effets négatifs du ralentissement général et du renchérissement de l’euro. En 1993, ces dévaluations avaient déréglé le SME et contribué `a la remontée des taux d’intérets. La zone euro entre 2001 et 2003 aura été plus solidaire. Cependant, les perspectives de la zone euro sont moroses. Si la croissance aux États-Unis est vigoureuse, l’assainissement des déficits publics européen pese sur la croissance et réduit les marges de manœuvre budgétaire, répétant en 2003 le choix des années quatre-vingt-dix de la stabilité `a la place de la croissance. L’observation des vingt dernieres années livre cependant un enseignement solide : les périodes de recul du chômage ont toutes été des périodes de retour de la croissance `a un rythme soutenu. II.b.5. La position de la France en Europe Pour comparer l’efficacité des économies, on peut utiliser l’évolution du niveau de vie des habitants, mesuré par le produit intérieur brut par habitant. Cette mesure est imparfaite, puisqu’elle définit la richesse comme matérielle et qu’elle ne prend pas en compte ni les conséquences négatives que le développement économique peut engendrer, ni des éléments sur la sécurité dont bénéficient les habitants d’un pays, ni sur les inégalités de revenus ni sur les nuisances d’une pollution ou la dégradation de l’environnement. Cet indicateur quantitatif permet pourtant des comparaisons internationales. II.b.5.i. Une moindre croissance relative de la France Selon Eurostat, organisme officiel statistique européen, dans la version de 2002, le classement de la France en PIB par tete se serait détérioré par rapport aux autres pays européens de 1992 `a 2000. Meme si ce type de mesure est fragile, car sensible au calcul des parités de pouvoir d’achat, il attire l’attention sur la dégradation de la situation de la France de 1992 `a 2000, et essentiellement de 1992 `a 1997. Depuis, sa position a plutôt tendance `a s’améliorer. Les différences de croissance démographique entre les pays sont suffisamment faibles pour etre négligées et les taux de croissance relatifs du PIB confirment l’érosion de la position de la France. Sur la période 1992-2000, l’accroissement du PIB allemand et français a été inférieur de pres de deux points `a la moyenne européenne. Cet écart s’est creusé essentiellement durant la période 1992- 1997. Contrairement `a l’Allemagne, la France a compensé une partie de son retard, avec une croissance supérieure d’un point `a la moyenne européenne entre 1998 et 2000. L’Italie a connu également une croissance inférieure `a la moyenne européenne et les deux tiers de cette perte relative de croissance ont eu lieu entre 1998 et 2000. En revanche, de 1992 `a 2000, le Royaume-Uni, dispensé de la convergence vers les criteres de Maastricht, a eu une croissance forte et a amélioré sa position relative. II.b.5.ii. Une politique économique peu contraignante Cet appauvrissement relatif de la France et de l’Allemagne résulte principalement de la politique économique conduite depuis le début des années quatre-vingt-dix. Le choc de la réunification a provoqué une résurgence de l’inflation qui a été combattue en Allemagne. En France, la priorité a été donnée `a la désinflation compétitive et `a l’ancrage sur le mark allemand. La lutte contre l’inflation a ainsi pesé lourdement sur la croissance française en lui imposant une rigueur justifiée par l’ancrage sur la politique allemande. De 1990 `a 1997, les taux d’intéret réels ont été supérieurs `a la croissance. La convergence préparatoire `a l’introduction de la monnaie unique a contraint la politique budgétaire des pays membres jusqu’en 1997. Le désendettement public a nécessité d’augmenter les prélevements obligatoires amputant la croissance du PIB. Les marges de manœuvre budgétaires perdues ont en partie porté leurs fruits par la suite. Ainsi, la prime de risque sur les taux d’intéret a été réduite, allégeant les finances publiques et réduisant le cout du capital pour les entreprises. De 1997 `a 2000, la France a enregistré la plus faible inflation des grands pays d’Europe, la plus forte croissance et, en meme temps, le plus important excédent de la balance courante. De 1998 `a 2000, la politique spécifique de soutien de l’activité et de l’emploi menée en France a stimulé la croissance et a réduit l’écart avec ses partenaires. L’objectif fixé au sommet de Lisbonne en mars 2000, c’est-`a-dire l’augmentation du taux d’emploi jusqu’`a 70 % en 2010, pourrait permettre `a la France de réduire encore l’écart en diminuant le ratio de dépendance économique (rapport de l’ensemble de la population inoccupée - moins de 20 ans, plus de 60 ans, chômeurs - `a la population des actifs occupés). II.b.6. L’économie française : quelques éléments de structure II.b.6. i. Une économie marquée par le chômage Le chômage a profondément marqué l’économie française mais le taux de chômage n’est pas la seule mesure et la durée des périodes de chômage doit etre prise en compte. Ainsi, la montée du chômage s’est accompagnée d’une augmentation tres nette de la durée moyenne du chômage (tableau 2). Elle a pratiquement doublé en trente ans. Ce constat se retrouve aux États-Unis ou la durée moyenne de chômage est passée d’un mois en 2000 `a plus de quatre mois en 2002 pour un taux de chômage qui a augmenté de 4 % `a 5,8 %. Tableau 2. - Quelques indicateurs de chômage +------------------------------------------------------------------------+ | |1970|1980|1990|1997|2000|2001|2002| |-------------------------------------+----+----+----+----+----+----+----| |Taux de chômage (%, sens BIT) |2,5 |6,3 |8,9 |12,4|10,0|8,8 |8,9 | |-------------------------------------+----+----+----+----+----+----+----| |Durée moyenne du chômage (mois) |9 |12 |15 |16 |15,9|14,5|12,8| |-------------------------------------+----+----+----+----+----+----+----| |Chômeurs de plus d’un an (% du total)|21 |32 |40 |43 |40,1|35,3|30,2| |-------------------------------------+----+----+----+----+----+----+----| |Chômeurs indemnisés (% du total) | |72 |73 |65 |82 |89,8|92 | +------------------------------------------------------------------------+ Source : enquetes Emploi 2002 - séries longues, INSEE. Tableau 3. - Structure par âge du chômage en 2002 +----------------------------------------------------------------------+ | |15-24 ans|25-49 ans|50 ans et +| |--------------------------------------+---------+---------+-----------| |Durée moyenne du chômage (mois) |6,7 |12,2 |22,3 | |--------------------------------------+---------+---------+-----------| |Taux de chômage (au sens du BIT) |20,2 |8,3 |6,3 | |--------------------------------------+---------+---------+-----------| |Chômeurs de plus d’un an ( % du total)|15,6 |31,1 |53,5 | +----------------------------------------------------------------------+ Source : enquete Emploi 2002, INSEE. Le chômage touche de façon `a peu pres équivalente les hommes et les femmes, celui des jeunes est élevé, mais correspond `a des épisodes assez courts. Il est aussi associé `a un taux d’activité relativement faible (environ 40 %), les jeunes étant majoritairement scolarisés. Ce n’est donc pas un jeune sur cinq qui cherche du travail, mais un sur douze. La durée est tres variable suivant les chômeurs. Certains d’entre eux sortent du chômage assez rapidement, alors qu’un noyau dur y reste tres longtemps. Ainsi, les chômeurs âgés ont une durée moyenne de pres de deux ans (tableau 3), alors que les 15-24 ans connaissent des épisodes de chômage d’environ sept mois, inférieurs de moitié `a la moyenne. La part des chômeurs de longue durée (plus d’un an) a doublé en trente ans. Depuis 1997, cette part diminue retrouvant son niveau de la fin des années soixante-dix. Le chômeur de longue durée est plutôt âgé et a un niveau d’éducation inférieur `a la moyenne. Le dualisme du chômage est tres marqué et s’est largement accentué avec la montée du taux de chômage. II.b.6. ii. Les mutations de l’emploi Les Trente Glorieuses ont été marquées par un développement rapide de l’industrie. Les ressources en main-d’œuvre ont été puisées dans le secteur agricole qui a connu d’importants gains de productivité. Plus récemment, c’est le secteur tertiaire qui s’est développé. Ce phénomene est général dans les pays avancés ou la part de l’industrie s’est nettement réduite. En France, l’industrie ne représente plus qu’un peu plus d’un emploi sur six, alors qu’elle en représente encore un pour quatre en Allemagne. Tableau 4. - Structure de l’emploi (en %) 1960 1980 2001 Agriculture 22,0 9,4 5,2 Industrie 29,1 24,8 17,7 Services marchands (y. c. BTP) 35,3 43,5 49 Services administrés 13,6 22,3 28,2 Source : INSEE, comptes nationaux base 1995. Les chiffres de 1960 sont tirés de comptes nationaux plus anciens, pour lesquels les nomenclatures ne correspondent pas tout `a fait. Le développement des services s’est fait `a la fois dans le secteur marchand, avec une tres forte progression des services aux entreprises et aux personnes, et dans le secteur des services administrés (éducation, administration, santé et action sociale notamment). Dans cette derniere catégorie, les secteurs de la santé et de l’éducation ont connu une évolution spectaculaire au cours des vingt dernieres années (tableau 4). Ainsi, depuis les années soixante, la part de l’emploi dans les services administrés a progressé comme l’emploi dans les services marchands, y compris la construction, le commerce et les transports. Parallelement `a un volant d’emplois administrés plus important, la précarité et la flexibilité dans le secteur marchand se sont largement répandues. En vingt ans, la part des emplois précaires ou flexibles a ainsi triplé, le nombre des contrats précaires (contrats `a durée déterminée, intérim, stages) est passé de 2,8 % en 1982 `a 9,9 % en 2002. Plus de 90 % des salariés jouissent d’un statut garanti, tant que leur entreprise est pérenne. De plus, l’emploi non salarié s’est nettement réduit (10 % de l’ensemble de l’emploi en l’an 2001 contre 16 % il y a vingt ans). II.b.6. iii. Les cotisations sociales La protection sociale est plus développée en France que dans d’autres pays. Ainsi, un systeme de cotisations obligatoires couvre les principaux risques : santé, chômage, famille et vieillesse. La France se situe ainsi nettement au-dessus de la moyenne européenne et les cotisations y sont plus de deux fois supérieures `a celles obligatoires aux États-Unis (tableau 5). Depuis le début des années quatre-vingt-dix, le cout du travail, et en particulier celui des salaires les plus bas a été réduit. Le financement de la protection sociale n’est ainsi assuré qu’`a 66 % par les cotisations sur les salaires. Le reste provient des ressources transférées du budget général ou des impôts et taxes spécifiques affectés `a la protection sociale (par exemple les taxes sur le tabac ou la contribution sociale généralisée). Tableau 5. - Recette de cotisations sociales employeurs et salariés (en % du PIB) +--------------------------+ | |1990|2000| |----------------+----+----| |^2France |18,9|16,4| |----------------+----+----| |Union européenne|12,8|12,4| |----------------+----+----| |États-Unis |6,8 |6,8 | +--------------------------+ Source : Statistiques des recettes publiques 2001. II.b.6. iv. Le salaire minimum La réduction du cout du travail pour les salaires les moins élevés vise `a réduire le cout du travail au niveau du salaire minimum. Le salaire minimum est en France relativement élevé, particulierement depuis le passage `a 35 heures. La différence est nette lorsqu’on compare le niveau du SMIC `a celui du salaire minimum au Royaume-Uni ou aux États-Unis (tableau 6). Le salaire minimum en Allemagne est supérieur de plus de 30 % au SMIC. Cela tient en partie `a la surévaluation du mark lors de l’entrée dans l’euro mais aussi `a une prédominance de l’industrie dans l’économie allemande par rapport `a l’économie française. Si on rapporte le SMIC au salaire médian, qui integre alors les effets de structure et les différences de productivité entre pays, la France se situe dans une position extreme : le SMIC est égal `a 60 % du salaire médian alors qu’il est de 50 % en Allemagne ou 40 % aux États-Unis. La baisse de charges sur les bas salaires réduit ce ratio et la situation française est comparable `a celle de l’Allemagne en terme de cout. Tableau 6. - Le SMIC dans différents pays (en euros) +--------------------------------------------------------------------------------------------+ | |SMIC mensuel (euros |Salaire mensuel|SMIC/salaire médian|Cout/salaire médian| | |1997) |médian | | | |-----------+------------------------+---------------+-------------------+-------------------| |Allemagne |1 244 |2 539 |0,49 |0,49 | |-----------+------------------------+---------------+-------------------+-------------------| |France |991 |1 680 |0,59 |0,52 | |-----------+------------------------+---------------+-------------------+-------------------| |Royaume-Uni|864 |1 964 |0,44 |0,41 | |-----------+------------------------+---------------+-------------------+-------------------| |États-Unis |746 |1 913 |0,39 |0,39 | +--------------------------------------------------------------------------------------------+ Source : Minima sociaux, entre protection et insertion, La Documentation française, 1997. II.b.6. v. Les dépenses de santé Au cours des quarante dernieres années, le secteur de la santé a connu une croissance tres rapide (tableau 7). La part de la santé dans le PIB a plus que doublé et la dépense par tete a été multipliée par sept, `a pouvoir d’achat constant. Elle atteint aujourd’hui environ 2 300 euros par tete. La dépense de santé a connu des évolutions comparables dans les pays développés. La regle semble etre que plus un pays est riche, plus la dépense de santé est grande. Ce n’est pourtant pas la part importante des dépenses de santé dans le PIB qui caractérise la France, mais plutôt la forte socialisation de son systeme de santé. La différence avec les États-Unis est flagrante (tableau 7), puisque la part prise en charge par le systeme public est de plus de 75 % en France contre moins de 45 % aux États-Unis. Le systeme français est assez proche de la moyenne européenne, comme le suggere la comparaison avec l’Allemagne. Il est assez difficile de relier dépenses de santé et indicateurs de la santé. Des facteurs autres que la dépense influent fortement sur les indicateurs de santé - par exemple les habitudes alimentaires ou le climat. Par ailleurs, les dépenses de santé peuvent etre décidées en fonction d’autres criteres que l’amélioration de la durée de vie, et viser, en particulier, `a augmenter le confort. Tableau 7. - Dépenses de santé totales +----------------------------------------------------------------+ |Dépense de santé ( % du PIB) |1960 |1990 |2000 | |------------------------------------+------+----------+---------| |France |4,2 |8,6 |9,5 | |------------------------------------+------+----------+---------| |États-Unis |5,1 |11,9 |13,0 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Allemagne |- |8,7 |10,6 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Union européenne |- |7,4 |10,6 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Financement de la dépense de santé |France|États-Unis|Allemagne| |------------------------------------+------+----------+---------| |État |3,9 |30,1 |7,1 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Sécurité sociale |72,5 |14,5 |69,8 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Ménages |10,3 |17,7 |11,9 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Assurances privées et mutuelles |12,2 |33,2 |6,9 | |------------------------------------+------+----------+---------| |Autres sources (dont reste du monde)|1,1 |4,5 |4,3 | +----------------------------------------------------------------+ Source : OECD Health data 2002. II.b.6. vi. La tertiarisation de l’économie française Depuis trente ans, la part de l’industrie dans l’économie française a tendance `a se réduire, elle ne représente plus qu’1/5 contre presque1/4 en 1980. La valeur ajoutée de l’industrie est plus volatile que par le passé : plus soumise aux fluctuations extérieures, plus exposée `a la concurrence internationale, elle est au cœur des changements de l’économie mondiale. La France est, par ailleurs, l’un des pays de l’Union européenne ou le secteur manufacturier est le moins développé, apres la Grece, le Luxembourg et le Danemark. Cette répartition sectorielle de l’activité a des conséquences sur les enchaînements conjoncturels. En 1997, par exemple, la France a été beaucoup moins touchée que ses partenaires par la crise asiatique et ses prolongements en Russie et en Europe de l’Est. Cette crise a ralenti les échanges mondiaux de produits manufacturés, dont l’impact direct est moindre en France qu’en Allemagne et en Italie. II.b.6. vii. Une économie ouverte De 1991 `a 1997, le solde extérieur n’a cessé de s’améliorer. Il était devenu excédentaire en 1992, atteignant un niveau record en 1997 (pres de 2,4 % du PIB), résultat qui témoignait de la bonne compétitivité des entreprises, suffisamment solides pour résister `a la crise dans les pays émergents. En fin de période, l’amélioration du solde était aussi liée `a un décalage conjoncturel : alors que les exportations étaient soutenues par une forte croissance mondiale, la demande intérieure n’était, quant `a elle, pas suffisante pour entraîner les importations. A partir de 1998, l’excédent commercial de la France s’est amenuisé sous l’effet des crises asiatique et russe et du recul du dollar. En 2002, le solde des échanges de biens et services FAB-FAB a connu une nette progression en s’établissant `a pres de 30 milliards d’euros apres 25,1 milliards en 2001 et 18,9 milliards en 2000 (graphique 4). A l’instar de celui enregistré en 2001, l’excédent commercial en 2002 s’est réalisé dans un contexte de fort ralentissement des échanges commerciaux : le redressement du solde extérieur résulte d’un repli plus marqué des importations (0,2 % en 2002 et 0,8 % en 2001 contre 15 % en 2000) que des exportations (0,6 % et 1,5 % contre 13,6 %). Le commerce extérieur de la France représente 28 % du PIB en 2000 contre 20 % en 1980. La France est donc une économie de plus en plus ouverte qui dépend de l’extérieur. Tableau 8. - Le commerce extérieur français en biens et services par produits (en milliards d’euros, année 2002) +-----------------------------------------------------------------------------+ | |Exportations|Part (%)|Importations|Part (%)|Solde| |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Total des biens |363,5 |90,0 |341,1 |90,9 |22,4 | |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Agriculture |11,1 |2,7 |8,5 |2,3 |2,6 | |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Industries agroalimentaires|26,7 |6,6 |21,2 |5,7 |5,5 | |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Énergie |6,9 |1,7 |18,6 |5,0 |-11,7| |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Industries manufacturieres |318,8 |79,0 |292,8 |78,0 |26,0 | |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Services |40,2 |10,0 |34,1 |9,1 |6,1 | |---------------------------+------------+--------+------------+--------+-----| |Total des biens et services|403,7 | |375,2 | |28,5 | +-----------------------------------------------------------------------------+ Source : Comptes nationaux, INSEE, CAB-FAB. II.b.6. viii. Orientation sectorielle La France doit importer un certain nombre de ressources naturelles non disponibles sur son territoire. Ainsi, les produits énergétiques représentent 5 % des importations et sont principalement des hydrocarbures (tableau 8). Malgré la forte baisse de la part des importations énergétiques de la France dans ses importations de marchandises (28 % en 1970, puis 10 % en 1990 et 5 % en 2002), le déficit de la branche énergie, qui s’était réduit en 1998 `a la suite de l’effondrement des cours, s’est considérablement alourdi depuis. Apres avoir atteint 9,5 milliards d’euros en 1998, le déficit de la branche énergétique s’est stabilisé aux alentours de 22 milliards depuis l’année 2000, niveau jamais égalé depuis le contre-choc pétrolier de 1986. Contrairement `a la flambée des cours du pétrole intervenue au deuxieme trimestre 1999 qui a pesé lourdement sur les achats énergétiques, l’impact de la hausse du prix du pétrole intervenue `a la fin 2001 a été amorti par l’appréciation de l’euro. Tableau 9. - Le commerce extérieur industriel civil français par région (en milliards d’euros, année 2002) +------------------------------------------------------------------+ | |Exportations|Importations|Solde|Part * ( %)| |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Union européenne `a 15|203 |196 |6,9 |61 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Allemagne |47,4 |56,5 |-9,1 |16 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Italie |29,5 |29,7 |-0,2 |9 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Royaume-Uni |33,7 |24,1 |9,6 |9 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |OCDE hors UE `a 15 |63,1 |65,1 |-2 |20 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |États-Unis |26 |25,9 |0,1 |8 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Japon |5,5 |10,5 |-4,9 |2 | |----------------------+------------+------------+-----+-----------| |Monde |328,6 |321 |7,6 |100 | +------------------------------------------------------------------+ * La part est calculée comme la somme des imports et des exports de la zone rapportée `a la somme des imports et des exports en biens de la France. Source : Douanes, SESSI, hors énergie, matériel militaire et produits de la récupération. II.b.6. ix. Orientation géographique L’industrie française est tres ouverte, en particulier sur l’Europe. L’industrie au sens large (en incluant l’agroalimentaire) représente plus des 3/4 du commerce extérieur français et les échanges industriels sont réalisés `a plus de 60 % avec les voisins européens (tableau 9). Le solde de ces activités est positif. II.b.6. x. Maintien d’une bonne compétitivité-prix De 1991 `a 1997, la France a bénéficié d’une bonne compétitivité-prix, grâce notamment `a un taux de change favorable, mais les dépréciations des monnaies asiatiques et surtout celle du dollar au second semestre 1998 ont amputé cet avantage. Cette détérioration n’a cependant pas conduit `a dégrader durablement la compétitivité française. En effet, au sein de l’Union européenne, la mise en place définitive de l’euro fige les taux de change et la compétitivité, au moins `a court terme. Par ailleurs, la spécialisation géographique et sectorielle de l’économie française, plutôt orientée dans des produits `a forte valeur ajoutée, apporte une bonne protection contre les chocs sur la demande extérieure. La spécialisation internationale est certes moins marquée en France qu’en Allemagne, mais tres nette dans certaines filieres comme la mécanique, la chimie, la construction automobile et l’agroalimentaire. Au cours des années 1999 et 2001, la faiblesse de l’euro associée `a la modération salariale, liée principalement aux 35 heures, a permis aux entreprises françaises de regagner en compétitivité face `a la concurrence internationale et de maintenir ses parts de marché en volume. En 2002 et en 2003, l’appréciation de l’euro, notamment, a annulé une partie des gains de compétitivité-prix de la France obtenus au cours de la derniere décennie. Les évolutions du taux de change pesent lourdement sur les conditions de marges d’une industrie exposée `a l’émergence de nouveaux compétiteurs, comme la Chine. II.b.6. xi. Libéralisation et internationalisation des entreprises ? L’essentiel du commerce extérieur français est le fait d’un petit nombre d’entreprises. En effet, aussi bien `a l’export qu’`a l’import, seulement 5 % des 120 000 opérateurs enregistrent un volume d’échanges supérieur `a 4,5 millions d’euros et sont `a l’origine de plus de 4/5 des flux. Cette extreme concentration est encore accentuée lorsque la question est approchée sous l’angle des groupes, soit l’ensemble des entreprises détenues par une seule autre. La part du commerce extérieur effectuée par les vingt premiers groupes opérateurs est alors supérieure `a 20 % et dépasse meme les 30 % `a l’export : ceci représente pres de 61 millions d’euros `a l’import et plus de 76 millions `a l’export ; ces entités présentent un excédent supérieur `a 30 millions, acquis notamment par les industries automobile et aéronautique. Les services n’étant pas comptabilisés dans le cadre de la balance commerciale, les groupes de services sont absents de ce palmares et laissent la part belle aux grands ensembles industriels et énergétiques. Les premiers groupes de la grande distribution n’apparaissent qu’aux alentours de la 30e place. Tableau 10. - Le palmares des groupes suivant leur volume d’échanges en 2002 +----------------------------------------------------------------------------------+ | |Import | |Export | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |1 |TotalFinaElf France |1 |Renault SAS | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |2 |Renault SAS |2 |Automobiles Peugeot | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |3 |Gaz de France |3 |SOC AVSA | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |4 |Peugeot Citroën Automobile SA |4 |Airbus | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |5 |Airbus France |5 |Automobiles Citroën | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |6 |Groupe Volkswagen France SA |6 |Électricité de France | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |7 |Esso Société Anonyme Française |7 |Peugeot Citroën Automobile SA | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |8 |Société des Pétroles Shell |8 |Snecma Moteurs | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |9 |Société Air France |9 |Atofina | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |10|Daimler Chrysler France |10|Schneider Electric Industries Sas | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |11|BP France |11|Renault VI | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |12|Hewlett-Packard Centre Compétence France|12|Sanofi Winthrop Industrie | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |13|SEITA |13|SGS Thomson Micrœlectonics NV| |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |14|Philips France |14|Dassault Aviation | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |15|Laboratoire Glaxosmithkline |15|Philips France | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |16|General Motors France |16|Hewlett-Packard Europe B-V | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |17|Ford France Automobiles |17|Michelin | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |18|CIE IBM France |18|Peugeot Motor Company PLC | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |19|Snecma Moteurs |19|TotalFinaElf France | |--+----------------------------------------+--+-----------------------------------| |20|BMW France |20|GE Energy Products France SNC | +----------------------------------------------------------------------------------+ Source : Douanes. Meme si les groupes français sont les plus nombreux dans ce palmares, les groupes étrangers occupent une place non négligeable puisque neuf d’entre eux sont présents dans le classement `a l’import et trois parmi les plus gros exportateurs. Les groupes américains sont les plus nombreux avec Hewlett-Packard, Ford, Exxon et General Motors ; viennent ensuite les groupes néerlandais avec Philips, Shell et SGS-Thomson Microelectronics NV. Les constructeurs automobiles allemands Volkswagen et Daimler-Chrysler, ainsi que l’italien Fiat completent l’ensemble des groupes d’origine étrangere. La pénétration des groupes étrangers sur le marché français, conséquence de l’intégration dans le commerce international, est aussi une source de débouchés pour l’économie française puisque l’américain Hewlett-Packard et le néerlandais Philips présentent un taux de couverture (ratio entre ventes et achats `a l’étranger) proche de l’unité, signe de leur forte implantation sur le territoire. Par ailleurs, neuf groupes se retrouvent dans les deux classements et, `a quelques rares exceptions pres, les lauréats pour un flux engendrent aussi des échanges importants dans l’autre sens ; d’autre part, Airbus Industrie acquiert une part non négligeable des importations du groupe Aérospatiale-Matra. Autre aspect de la mondialisation de l’économie, les importants mouvements de concentration, que ce soit dans les secteurs de l’automobile, - avec notamment la fusion de Daimler-Benz et de Chrysler, les rachats de Nissan par Renault, de Volvo par Ford -, de la chimie, - création d’Aventis, rachat d’Elf-Aquitaine par TotalFina - ou encore dans le secteur de l’aéronautique - avec la création de EADS qui détiendra 80 % d’Airbus Industrie -, devraient modifier de façon notable les prochains palmares. Il en résulte un poids encore plus important des groupes dans l’ensemble des opérateurs du commerce extérieur. Outre un commerce extérieur de plus en plus important, la France s’est engagée récemment dans le processus de mondialisation. La fin d’une doctrine industrielle publique, qui a été `a l’origine de quelques fleurons et a connu quelques échecs, les privatisations et la libéralisation de certains secteurs comme les télécoms ou le transport aérien ont modifié profondément la façon dont les entreprises françaises sont placées dans le monde. Les stocks d’investissement direct `a l’étranger illustrent ce mouvement de mondialisation. En 1985, la France était dans une position atypique pour un pays développé. Son stock entrant était équivalent `a son stock sortant (4,4 % entrant, 4,9 % sortant). Depuis la situation a évolué fortement, et la France connaît un profil de stock d’investissement direct plus comparable `a l’Allemagne (3,8 % entrant, 6,2 % sortant pour la France en 1999, respectivement 4,7 % et 8,8 % pour l’Allemagne). La différence reste cependant nette avec les États-Unis (22,8 % et 23,7 %), économie de taille plus importante et le Royaume-Uni (8,3 % et 13,9 %) ou l’importance de la place financiere de Londres trouve ici une illustration. Ce phénomene d’ouverture s’est accéléré et les opérations de fusions acquisitions et en particulier les achats opérés par des entreprises françaises représentent, en part, plus de deux fois ce qu’elles étaient en 1995. En 2000, suite aux retournements des marchés financiers, les opérations de fusion acquisitions ont connu un ralentissement sensible, mais on peut noter la tendance `a l’accélération de ce type d’opérations sur les dix dernieres années. II.b.7. Les grands secteurs économiques II.b.7. i. L’agriculture et l’industrie agroalimentaire La France est la premiere puissance agricole de l’Union européenne, devant l’Allemagne. Elle est aussi le second exportateur mondial de produits agroalimentaires, derriere les États-Unis, et l’excédent de ses échanges extérieurs s’éleve `a 9,8 milliards d’euros en 2002. Bien qu’elle n’emploie plus que 6 % des actifs et n’assure que 2 % du produit intérieur brut national, l’agriculture constitue l’une des activités les plus dynamiques du pays. Elle a connu depuis trois décennies une modernisation remarquable qui a permis des gains spectaculaires de productivité grâce `a des rendements en tres forte progression. En revanche la peche française connaît des difficultés. L’industrie agroalimentaire est le premier client de l’agriculture. Point fort de l’économie française, elle pese `a elle seule un chiffre d’affaires de quelque 122 milliards d’euros en 2002. Avec pres de 400 000 salariés en 2001, le secteur agroalimentaire est le troisieme employeur de l’industrie française. L’industrie agroalimentaire est, en outre, un marché tres ouvert `a l’exportation, qui a dégagé en 2002 un excédent commercial de 6,8 milliards d’euros. Les ventes de vins et de spiritueux viennent en tete des produits les plus exportés enregistrant un excédent commercial de 7,7 milliards d’euros en 2002 ; suivent les produits laitiers avec un solde excédentaire de 2,2 milliards d’euros et les céréales 1,4 milliard d’euros. II.b.7. ii. L’énergie Bien qu’elle ne dispose que de faibles ressources, la France parvient néanmoins `a assurer 50 % de ses besoins énergétiques contre 25,3 % en 1973. Ce résultat traduit une indépendance comparable `a celle de l’Allemagne et tres supérieure `a celle de l’Italie et du Japon. L’amélioration de la situation énergétique tient surtout `a l’essor de la production d’électricité d’origine nucléaire qui place aujourd’hui la France au second rang mondial pour ce type d’énergie, derriere les États-Unis. La France est encore tres dépendante des hydrocarbures. La production de pétrole, assurée par les gisements des Landes et de la Brie, a atteint seulement 1,6 million de tonnes en 2002, quand les importations s’élevaient `a 72,4 millions de tonnes de pétrole brut, auxquelles s’ajoutent 25 millions de tonnes de produits raffinés. La dépendance française en gaz naturel est quasi-totale (96 % en 2001). La production électrique française a été pratiquement multipliée par plus de 10 en 47 ans : elle atteignait 533 TWh (térawatts/heure) en 2002 contre 50 en 1955. Elle couvre ainsi plus de 40 % des besoins énergétiques totaux du pays. Électricité de France (EDF) est devenue l’une des premieres compagnies mondiales d’électricité. Elle a exporté 94 milliards de kWh (kilowatt/heure) en 2002. L’électricité nucléaire représente aujourd’hui 78 % de la production électrique totale. Les centrales thermiques classiques n’assurent plus que 10 % de la production électrique. Quant aux centrales hydrauliques, elles fournissent 12 % de la production électrique nationale contre 55,7 % en 1960. Le charbon ne représente plus que 4,6 % de la consommation d’énergie primaire nationale, contre 15,5 % en 1973. Apres avoir culminé `a 60 millions de tonnes en 1958, la production n’a cessé de décliner pour atteindre 2,1 millions en 2002, auxquels s’ajoutent 12 000 tonnes de lignite. Toutes les mines seront fermées d’ici 2005. En matiere d’énergies renouvelables, la France dispose de plusieurs atouts : des ressources hydroélectriques importantes, une des premieres forets d’Europe, un tres bon gisement éolien, de vastes zones, notamment dans les départements d’outre-mer, ou certaines énergies renouvelables sont moins cheres `a produire que l’électricité, et une technique reconnue en matiere d’énergie solaire photovoltaique ou thermique. De fait, la France est le premier producteur européen d’énergies renouvelables devant la Suede et l’Italie, avec plus de 20 % du total de la production européenne. Les énergies renouvelables assurent 12 % de la consommation énergétique, elles sont une composante `a part entiere de la politique énergétique française et sont appelées `a se développer. II.b.7. iii. L’industrie L’industrie française est la seconde d’Europe et la quatrieme du monde, derriere celles des États- Unis, du Japon et de l’Allemagne. Le secteur secondaire assure 22 % des emplois, 40 % des investissements et pres de 80 % des exportations françaises. Toutefois, bien que l’industrie ait vu sa production quadrupler depuis 1950, elle a perdu pres de 1,5 million d’emplois au cours des vingt-cinq dernieres années. L’industrie française a connu une concentration accélérée de ses entreprises et un essor rapide de ses investissements directs `a l’étranger. En 2000, les entreprises françaises et leurs 19 200 filiales hors de l’hexagone employaient 3,5 millions de personnes. Les entreprises françaises contrôlées par des groupes étrangers (majoritairement originaires des États-Unis, d’Allemagne, des Pays-Bas et du Royaume-Uni) employaient 30 % des salariés et réalisaient 33 % du chiffre d’affaires de l’industrie française en 2000. La France se place au troisieme rang mondial, derriere les États-Unis et le Royaume-Uni, pour l’accueil des investissements étrangers. Ces derniers sont surtout présents dans l’informatique, la pharmacie, la machine-outil et les instruments de précision. L’ensemble de l’industrie manufacturiere dégage un confortable excédent commercial depuis quelques années. Ce résultat traduit le savoir-faire français dans différents secteurs des industries traditionnelles comme la construction automobile, le matériel ferroviaire, la haute couture et les industries agroalimentaires, mais aussi le succes des technologies de pointe telles la filiere électronucléaire ou la construction aéronautique et spatiale. La sidérurgie, avec une production de l’ordre de 19 millions de tonnes d’acier brut en 2001, se classe au douzieme rang mondial et au quatrieme rang européen. La production a diminué de plus d’un tiers depuis 1974 et la main-d’œuvre de 70 % sous les effets conjugués de la crise, de la concurrence d’autres produits et de l’apparition de nouveaux grands concurrents, comme les pays de l’Est, le Brésil et la Corée du Sud. La production, marquée par l’essor de l’acier `a l’oxygene, est dominée par le groupe Arcelor (ex-Usinor-Sacilor), qui se classe au quatrieme rang mondial. Péchiney domine le secteur de la métallurgie de l’aluminium et figure au troisieme rang mondial de la branche. Parmi les industries de premiere génération, celles du textile et de l’habillement emploient encore 254 000 personnes et totalisent plus de 26 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Bien qu’elles exportent le tiers de leur production, ces industries enregistrent un déficit commercial de 6,9 milliards d’euros en 2002 et surtout, elles ont perdu plus de 300 000 emplois depuis 1974. Elles souffrent de la faible progression de la demande intérieure et, plus encore, d’une concurrence internationale de plus en plus pressante. A l’amont, l’industrie textile proprement dite, notamment vouée `a la filature, au tissage, `a l’impression et `a la fabrication de tapis et de moquettes, est dominée par de grandes entreprises comme Chargeurs-Textiles, premier groupe mondial pour le commerce de la laine, et DMC, spécialisée dans le coton. En aval, l’habillement demeure en revanche une industrie de main- d’œuvre, morcelée entre de nombreuses PME, plus ou moins spécialisées. Pour améliorer leur compétitivité, les entreprises ont de plus en plus recours `a des techniques de pointe comme le tracé des pieces de tissu par ordinateur et la découpe des tissus par laser ou jet d’eau `a haute pression, mais elles multiplient aussi les délocalisations ou s’appuient sur des circuits courts, adaptés aux changements rapides de la mode. Le bâtiment et les travaux publics emploient directement 1,2 million de personnes et fournissent presque autant d’emplois induits. Excellent barometre de la conjoncture économique, ce secteur a connu ces dernieres années de nombreuses pertes d’emplois, mais il enregistre cependant une légere reprise. Il représente un chiffre d’affaires de plus de 130 milliards d’euros. Les travaux publics constituent le domaine privilégié des grandes entreprises qui ont connu un ample mouvement de concentration depuis deux décennies. Les plus importantes sont Bouygues, Vinci, Eiffage et Spie-Batignolles. Ces sociétés s’appuient sur des techniques de plus en plus sophistiquées. Elles operent dans le cadre national pour la construction des autoroutes, du Stade de France, du viaduc de Millau qui sera le pont le plus haut du monde... Elles sont également tres actives hors de France ou elles se heurtent cependant `a la concurrence de groupes étrangers, notamment ceux des nouveaux pays industrialisés. Le bâtiment, au contraire, présente une structure tres morcelée, avec 30 000 petites et moyennes entreprises (PME). L’activité de ce secteur est étroitement liée aux mesures publiques adoptées en faveur de la construction de logements, sous formes d’aides diverses et de prets bonifiés, pour un total de quelque 18 milliards d’euros par an. Depuis 1999, le nombre de logements mis en chantier chaque année a toujours dépassé les 300 000 unités. La maison individuelle représente le secteur le plus porteur, avec 63 % des mises en chantier en 2002. Au cours de la période 1997-2001, l’industrie automobile joue un rôle moteur dans la croissance industrielle : en volume, la production s’accroît en moyenne de 11,5 % par an, la valeur ajoutée de 8,8 %. Les constructeurs concentrent de plus en plus leurs activités sur la conception et l’assemblage, et sous-traitent une grande part des autres fonctions. Ce dynamisme de l’industrie automobile se traduit par 25 000 créations d’emplois dans les entreprises du secteur entre 1999 et 2001, auxquelles il faut ajouter un appel accru au travail intérimaire correspondant `a 7 000 équivalents temps plein. Il a aussi un effet d’entraînement sur les branches productrices de biens intermédiaires (acier, plastiques, verre...), qui lui fournissent 30 % de ses consommations intermédiaires, ainsi que sur la production d’équipements mécaniques (machine-outil), mais aussi sur les branches de services (transport de véhicules et pieces, intérim). Entre 1997 et 2001, le nombre de véhicules neufs immatriculés chaque année en France, tous types confondus (voitures particulieres, véhicules utilitaires, cars et bus), a progressé d’un tiers pour atteindre plus de 2 750 000 unités (contre 2 070 000 en 1997). Le solde du commerce extérieur s’établit `a 11 milliards d’euros pour 2002, alors que les échanges sont équilibrés pour l’ensemble des autres industries manufacturieres. Les échanges au sein de l’Union européenne représentent 80 % du commerce extérieur de l’industrie automobile française. La chimie (y compris la pharmacie) place la France au cinquieme rang dans le monde apres les États-Unis, le Japon, l’Allemagne et tres récemment la Chine. La France est le troisieme exportateur mondial de produits chimiques et pharmaceutiques avec 61,4 % de ventes réalisées, en 2002, `a destination des marchés étrangers. Son chiffre d’affaires annuel dépasse les 84 milliards d’euros (2002) et elle emploie 237 000 personnes. Son excédent commercial atteint 11 milliards d’euros. Les industries de pointe assurent 20 % des emplois industriels et des exportations, et la France constitue l’un des pays les plus performants dans la construction aéronautique et spatiale ainsi que dans les industries de l’armement. Pour faire face `a une concurrence internationale accrue et réduire les couts de recherche et de production, les entreprises françaises se sont rapprochées de leurs homologues. Ainsi, le programme Airbus est issu d’une coopération entre la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne. L’industrie aérospatiale emploie pres de 100 000 personnes et exporte pres de la moitié de sa production. Elle comprend de nombreuses entreprises comme Aérospatiale Matra et la Snecma. Alors qu’Airbus et ATR fournissent des avions civils, Dassault- Industrie est spécialisée dans la fourniture d’appareils militaires, tels les Mirage et le Rafale, et d’avions d’affaires comme le Falcon. La Snecma, associée `a l’Américain General Electric, livre des réacteurs et des moteurs. L’industrie spatiale s’est également développée dans le cadre d’une coopération internationale regroupant une quinzaine d’États. C’est notamment le fait du programme Arianespace qui dispose d’un plan de charge tres dense pour les prochaines années, avec Ariane 5, qui permet de placer en orbite une charge de six tonnes, contre quatre tonnes pour Ariane 4. La France est également présente dans le domaine des satellites de télécommunications et d’observation, tel SPOT ou Hélios. Ces satellites sont construits par Aérospatiale Matra et Alcatel Espace. Les industries électriques et électroniques sont caractérisées par une large diversité des productions. Elles sont aussi dominées par de grandes entreprises et dépendent largement des commandes publiques. Alcatel, qui a réalisé de nombreuses acquisitions depuis dix ans, demeure leader dans les télécommunications. Alstom, associé `a la société britannique GEC, est, outre le matériel ferroviaire (TGV), spécialisée dans les équipements pour centrales électriques. Elle occupe ainsi le premier rang mondial pour les générateurs de turbines `a cycle combiné. Thomson couvre une large gamme de productions, de l’électronique appliquée `a la défense. Legrand est le leader mondial de l’appareillage électrique. Si la France est bien placée dans les télécommunications, notamment avec France Télécom, elle dépend largement de l’étranger pour la fabrication des micro-processeurs, souffrant de la concurrence des États-Unis et du Japon. Les industries d’armement placent la France au cinquieme rang mondial des exportateurs et l’excédent commercial dépasse en moyenne les 4,5 milliards d’euros. Il s’agit d’une industrie stratégique, de haute technologie et dépendant largement de l’État qui décide des programmes d’équipement par le biais de la Délégation générale `a l’armement et contrôle les exportations. Les grandes entreprises dominent la production (GIAT- Industries, Dassault, Aérospatiale Matra...), se regroupent et multiplient les accords avec leurs homologues européennes, comme Eurocopter pour la production d’un hélicoptere de combat. Les bio-industries constituent un enjeu de taille. Que ce soit dans le domaine des fermentations, des arômes, du génie génétique utilisé notamment en agriculture pour la mise au point de nouvelles semences, la France est bien placée. Les activités sont tres variées et touchent bien des branches économiques : l’innovation pharmaceutique, le secteur agroalimentaire, l’énergie et les industries de l’environnement... Ainsi, les entreprises industrielles opérant sur le " marché vert " ou éco- industries enregistrent un chiffre d’affaires de 4,5 milliards d’euros. Le traitement de l’eau constitue le premier domaine d’intervention, suivent le traitement de l’air et les déchets. De nombreux organismes spécialisés sont impliqués dans la recherche, tels l’INSERM, l’INRA et l’Institut Pasteur, mais aussi des groupes industriels : des entreprises de l’agroalimentaire comme Danone, chimiques comme Rhône- Poulenc et Lafarge- Coppée, pétrolieres telles Total, ou encore pharmaceutiques comme Roussel-UCLAF. II.b.7. iv. Le commerce Les secteurs commerciaux et de l’artisanat commercial (boulangeries, pâtisseries et charcuteries) réalisent un chiffre d’affaires supérieur `a 1 000 milliards d’euros qui se répartit entre le commerce de détail, y compris l’artisanat commercial, (36 %), le commerce de gros, (48 %) et le commerce et réparation automobile (16 %). Les ventes de marchandises génerent 180 milliards d’euros de marges commerciales. La production de services, que les entreprises commerciales ne cessent de développer, atteint 60 milliards d’euros. La production de biens, qui est essentiellement le fait de l’artisanat commercial et du commerce de gros, est de 20 milliards d’euros. Le commerce est l’activité principale de 610 000 entreprises : 61 % relevent du commerce de détail, 26 % du commerce de gros et 13 % du commerce et réparation automobile. Dans le commerce de détail et le commerce et réparation automobile, plus de quatre salariés sur dix travaillent dans une entreprise comptant moins de dix salariés. Il s’est créé, en 2002, 68 000 entreprises. Ce nombre se stabilise, alors qu’il avait tendance `a diminuer depuis 1994. En 2002, le chiffre d’affaires de l’ensem- ble du commerce de détail et de l’artisanat `a caractere commercial s’est élevé `a 384 milliards d’euros. II.b.7. v. Les services Le secteur tertiaire fournit désormais 75 % du PIB et 70 % des emplois. Qu’il s’agisse des services non marchands assurés par l’administration, la santé ou les agents des collectivités locales, ou encore des services marchands, comme l’hôtellerie, la restauration, le commerce ou les banques, le secteur reste le grand pourvoyeur d’emplois. Au cours des dernieres années, la production des services marchands a augmenté plus rapidement que celle des autres branches (2,8 % en moyenne par an entre 1990 et 2002 contre 2,2 % pour l’en- semble des branches). Cet écart s’explique en grande partie par le dynamisme des services aux entreprises, surtout ceux liés aux nouvelles technologies. Selon l’agence de régulation des télécommunications (ART), au 31 décembre 2002, le parc de clientele de la téléphonie mobile s’élevait `a 38,6 millions d’abonnements (+ 4,3 %). En outre, l’Association française des fournisseurs d’acces (AFA) dénombre 8,9 millions de comptes individuels d’acces `a internet, dont 1,7 million aux communications " haut débit " (+183 %). II.b.7. vi. Les banques et les assurances Le systeme bancaire occupe une place importante dans l’économie française. Les activités bancaires contribuent pour pres de 4 % au PIB. Les principaux groupes bancaires comptent parmi les plus grandes entreprises françaises par les effectifs qu’ils emploient (400 000 salariés) ou par leur capitalisation boursiere. Le développement du systeme bancaire s’apprécie également par le nombre total des banques et établissements de crédit (quelque 1 500) et par celui des guichets bancaires de plein exercice installés en France, soit 25 500 environ, non compris les 17 000 bureaux du réseau de La Poste. Le secteur bancaire a connu de grands bouleversements depuis le début des années soixante. L’opposition classique entre banques de dépôts et banques d’affaires s’est estompée `a la suite des investissements des premieres dans le monde industriel et de la possibilité pour les secondes de mettre en place un réseau d’agences. Les banques ont enregistré une internationalisation croissante de leurs activités `a la faveur de la mondialisation des échanges, de la volonté de la France de renforcer le poids financier de Paris et de la libre circulation des capitaux au sein de la Communauté européenne. La période récente a été marquée par une accélération des concentrations et des rapprochements (BNP/Paribas, Crédit Lyonnais/Crédit agricole, CIC/Crédit mutuel...). Dans le cadre de l’Union économique et monétaire, la France dispose d’une banque centrale indépendante. Créée en 1800, `a l’initiative de Napoléon Bonaparte, la Banque de France est devenue indépendante en 1993. Jusqu’alors, elle avait le rôle de banque de l’État. Désormais, son statut d’indépendance lui interdit formellement d’autoriser des découverts ou d’accorder tout autre type de crédit au Trésor public ou `a tout autre organisme ou entreprise publics ; elle continue `a tenir le compte courant du Trésor public, `a participer `a la gestion de la dette publique, `a tenir les comptes courants de bons du Trésor. Elle établit également la balance des paiements pour le compte de l’État. La place financiere de Paris est un marché unifié des capitaux, allant du jour le jour au plus long terme et accessible `a tous les émetteurs. Le marché des actions et le marché obligataire figurent parmi les premiers marchés du monde. La place de Paris est dotée d’un marché actif de produits dérivés, tant sur le gré `a gré que sur les marchés organisés : le MATIF (Marché `a terme international de France) et le MONEP (Marché des options négociables `a Paris). Elle ne connaît aucun obstacle technique, fiscal ou réglementaire, aux mouvements internationaux de titres et de capitaux et s’est considérablement modernisée ces dernieres années. La place de Paris se situe au cinquieme rang mondial, derriere celles de New York, de Tokyo, de Londres et de Francfort pour la capitalisation boursiere (1 047 milliards d’euros en 2002). La cote de la Bourse de Paris reflete la structure de l’économie française dans sa diversité sectorielle et géographique. Les quarante principales capitalisations boursieres composent l’indice CAC 40, la Bourse de Paris ayant aussi développé de nouveaux indices plus larges, incluant des valeurs moyennes. Le marché obligataire est le premier compartiment du marché financier français et il se classe au troisieme rang mondial. En 2000, la place de Paris et celles d’Amsterdam et de Bruxelles ont fusionné au sein d’Euronext, cinquieme place dans le monde en terme de capitalisation boursiere. L’assurance française se situe au quatrieme rang mondial avec un chiffre d’affaires dépassant les 160 milliards d’euros en 2002. Le secteur de l’assurance compte pres de 600 entreprises françaises et emploie 146 000 personnes. La branche est dominée par de grandes compagnies comme Groupama, les AGF et AXA. S’y ajoutent de nombreuses mutuelles telles que la GMF (Garantie mutuelle des fonctionnaires), la MAIF (Mutuelle assurances des instituteurs de France), les MMA (Mutuelles du Mans assurances). Les compagnies d’assurances, propriétaires de nombreux biens immobiliers, diversifient leurs activités pour améliorer leur rentabilité. Les concentrations s’accélerent, qu’elles se fassent dans le cadre national ou dans le cadre européen, et les accords de distribution ou de coopération se multiplient (La Mondiale/Macif, MAIF/MGEN (Mutuelle générale de l’Éducation nationale). II.b.7. vii. Les grandes surfaces et les petits commerces La distribution, qui emploie plus de 2,5 millions de personnes, a connu depuis trente ans un grand bouleversement de ses circuits et de ses méthodes de vente, avec l’essor du commerce intégré. Avec 1 120 hypermarchés (soit un pour 52 000 habitants) et 7 600 supermarchés, la France est l’un des pays du monde ou le grand commerce est le plus développé. Il assure aujourd’hui plus de 60 % de la distribution des produits alimentaires et 30 % de celle des produits non alimentaires. Des groupes spécialisés tels Carrefour, Auchan et Promodes dominent le secteur, aux côtés des centres Leclerc. Ils s’implantent `a l’étranger, comme Carrefour et Auchan en Espagne, en Asie, en Amérique latine, en Europe centrale, et Promodes en Allemagne. Les magasins `a grande surface ont diversifié leur offre, vers d’autres secteurs (billetterie de spectacle, agences de voyages...). Des commerces spécialisés sont apparus (hi-fi et électroménager avec Darty, bricolage avec Castorama ou Leroy Merlin). Exigeant de vastes espaces, les hypermarchés sont implantés `a la périphérie des grandes agglomérations ou dans les centres commerciaux. Ces centres regroupent des commerces spécialisés et de nombreux services : cinémas, pharmacie, La Poste... Les petits commerces connaissent en revanche une baisse rapide de leur activité. Tres touchés en milieu rural, ils résistent mieux dans les villes, surtout lorsqu’ils sont spécialisés ou lorsqu’ils jouent le rôle de commerces de dépannage. D’autres formes de distribution se sont développées, comme la vente par correspondance. Quelques groupes dominent ce secteur tres concentré : La Redoute, la CAMIF et les Trois Suisses. II.b.7. viii. Le tourisme Enfin, la France est une destination phare pour les touristes. Premier pays récepteur dans le monde, la France a accueilli 76,5 millions de touristes en 2001, soit 10,8 % du total mondial. Sa part dans l’économie française s’établissait `a 6,7 % en 2002 (2,9 % pour l’agriculture) et l’excédent dégagé chaque année par le poste " voyages " au sein de la balance des paiements est important (15 milliards d’euros en 2002). Le secteur emploie pres d’un million d’actifs (2002), mais pres de 2 millions si l’on prend en compte l’ensemble des emplois directs, indirects et induits, liés `a l’activité touristique. On compte environ 180 000 entreprises, dont 89 000 restaurants, 51 000 cafés, 37 000 hôtels et autres hébergements collectifs et 3 600 agences de voyage. En termes d’offre d’hébergement, les campings occupaient au 1er janvier 2003 la premiere place avec 2,8 millions de lits (soit 15,9 %) sur un total de 17,3 millions, suivis des hôtels classés (7 %) et des meublés de tourisme (3,1 %). S’agissant de la fréquentation géographique de ces hébergements, elle est tres inégale `a la fois en termes régionaux (ou dominent largement la Provence-Alpes-Côte d’Azur : 14,3 % des 1,5 milliard de nuitées enregistrées en 2002, Rhône-Alpes : 11,3 %, l’Ile-de-France : 10,6 % et le Languedoc-Roussillon : 9,2 %) et en termes d’espaces (en 2002, le littoral a représenté 35,4 % des nuitées totales, devant la campagne : 28,7 %, les zones urbaines : 28,5 % et la montagne : 7,4 %). Avec 8,5 milliards d’euros en 2000, le secteur du tourisme se caractérise par d’importants investissements. Ceux-ci sont principalement consacrés `a l’hébergement-restauration (42 %) et aux équipements touristiques (12 %, dont les parcs récréatifs et les remontées mécaniques). Parmi les sites culturels les plus fréquentés, on trouve la cathédrale Notre-Dame de Paris (12 millions de visiteurs en 2001), la Tour Eiffel (6,1 millions), le Centre Georges-Pompidou (5,3 millions), le musée du Louvre (5,2 millions), la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre (5 millions) et Notre-Dame de Lourdes (5 millions). Dans le secteur des parcs de loisir, EuroDisney, avec 12 millions d’entrées en 2001, arrive nettement en tete. II.b.7. ix. Les transports La France bénéficie en ce domaine de l’un des réseaux les plus denses et les plus performants du monde, avec 146 km de route et 6,2 km de voies ferrées pour 100 km2. Les réseaux intérieurs et internationaux sont centrés sur Paris, renforçant ainsi le poids de la capitale dans l’organisation du territoire. Longtemps construits dans une perspective d’intégration nationale, les réseaux sont désormais conçus en fonction de l’espace européen. Concernant le chemin de fer, il bénéficie depuis deux décennies du développement spectaculaire des lignes `a grande vitesse, d’abord `a vocation intérieure (ex. TGV Atlantique, TGV Méditerranée), puis, de plus en plus, en interconnexion avec les réseaux des pays voisins (ex. Shuttle vers Londres). Parallelement, les collectivités locales ont mis en œuvre une politique des transports (TER) afin de maintenir un réseau local amputé par les nombreux abandons de lignes secondaires de la SNCF. Quant au transport aérien intérieur, son ouverture totale `a la concurrence européenne, `a compter de 1997, a abouti `a deux phénomenes : d’une part, le renforcement de la domination du groupe Air France ; d’autre part, l’émergence de compagnies `a bas prix (low cost) desservant un certain nombre de villes moyennes françaises `a partir de pays comme le Royaume-Uni. Air France est la premiere compagnie europé-enne, la troisieme compagnie aérienne mondiale pour le transport international de passagers, la quatrieme pour le transport international de fret et le deuxieme prestataire mondial d’entretien aéronautique. Elle a fusionné en 2003 avec KLM, le groupe Air France-KLM devenant ainsi le premier groupe européen et le troisieme groupe mondial en termes de trafic, et le premier groupe mondial en termes de chiffres d’affaires. Le trafic de voyageurs reste encore largement dominé par les aéroports d’Orly et de Roissy- Charles-de-Gaulle (respectivement, 38 % du trafic local de passagers et 76 % du trafic international en 2002), suivis de Nice. Tableau 12. - Données comparées : France, Europe et monde +--------------------------------------------------------------------------------------------+ |Démographie |France|UE |États-Unis|Monde |Années| |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Population (millions) |59,4 |306 |288 |6 200 |2002 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Densité (hab/km2) |105,7 |121,6 |28,7 |43,5 |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Croissance de la population (% annuel) |0,4 |0,2 |0,9 |1,2 |2002 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Taux de fécondité (enfants/femme) |1,9 |1,4 |2,1 |2,6 |2002 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Espérance de vie `a la naissance (années) |79,2 |78,2 |78,0 |66,7 |2002 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Cancer du sein (déces pour 100 000 femmes) |80 |- |98 |- |1995 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Mortalité infantile (déces avant 5 ans/1 000 |6,0 |6,2 |8,0 |70,8 |2002 | |naissances) | | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Population urbaine (part dans le total) |75,4 |77,8 |77,0 |46,5 |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Environnement | | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Surface (milliers de km2) |551 |2 472 |9 600 |133 900|2002 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |dont forets (en % de la surface totale) |27,3 |27,9 |22,3 |24,5 |1995 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Taux de déforestation (% forets détruites par an) |-1,1 |-0,3 |-0,3 |0,3 |1995 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Émission de CO2 (industrie, tonnes par tete) |6,5 |8,0 |19,9 |3,9 |1998 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Consommation d’énergie (éq. tonne pétrole par tete) |4,4 |3,8 |7,9 |1,7 |1998 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Consommation électrique (KWh) |6287 |5434 |11 925 |2079 |1998 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Économie | | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |PIB (milliards de dollars) |1 519 |6 986 |9 681 |34 076 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Croissance moyenne de 1990 `a 2001 |1,8 |2,1 |3,0 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Croissance en 2001 |1,8 |1,5 |0,3 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Inflation moyenne de 1990 `a 2001 |1,9 |2,9 |2,4 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Inflation en 2001 |1,4 |2,8 |2,5 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Agriculture (part de la VA dans le PIB en %) |2,9 |2,3 |1,6 |4,2 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Industrie (part de la VA dans le PIB en %) |25,6 |29,2 |24,9 |29,9 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Services (part de la VA dans le PIB en %) |71,5 |68,5 |73,3 |65,8 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Exports (% du PIB) |27,9 |36,6 |11,1 |29,3 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Imports (% du PIB) |26,3 |34,9 |12,8 |27,7 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Investissement total (% du PIB) |20,1 |20,8 |21,7 |22,4 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Marché du travail | | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Taux de chômage |8,6 |7,6 |4,8 |6,5 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Taux d’emploi |63,7 |65,5 |74,3 |64,4 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Non salariés (% de l’emploi total) |9,2 |17,4 |7,7 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Emploi public (% de l’emploi total) |24,5 |16,1 |15,1 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Finances publiques | | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Déficit public |1,4 |0,8 |-0,5 |1,0 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Impôts directs (% du PIB) |12,2 |12,8 |15,1 |- |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Impôts indirects (% du PIB) |16,0 |13,8 |7,7 |- |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Cotisations sociales (% du PIB) |18,5 |16,3 |7,1 |- |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Dépenses publiques (% du PIB) |48,6 |44,4 |30,4 |37,1 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Technologie et infrastructure (pour 1 000 personnes)| | | | | | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Téléphones fixes et mobiles |1178,8|1252,3|1117,9 |328,7 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Ordinateurs personnels |337 |287 |625 |86,2 |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Téléphones mobiles |605 |- |451 |- |2001 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Télévision câblée |23 |- |239 |- |1999 | |----------------------------------------------------+------+------+----------+-------+------| |Liaisons aériennes (départs par an) |12 |10 |29 |3 |1999 | +--------------------------------------------------------------------------------------------+ Sources : World Development Indicators database, http://www.worldbank.org/data/countrydata/countrydata.html, 2003, OCDE, MEI economic outlook, no 73, juillet 2003, calcul de l’auteur.