4.5. La succession de Charlemagne A la mort de Charlemagne en 814, son fils unique, Louis le Pieux, lui succede. Il se fait sacrer et fait passer l’habitude de compléter le couronnement laic par un sacre religieux. En 817, Louis le Pieux établit un document qui regle de son vivant sa succession : seul son fils aîné pourra lui succéder. D’un premier mariage Louis le Pieux a trois fils : Lothaire, Pépin et Louis. Lothaire devient empereur « associé » déj`a du vivant de son pere. Pépin et Louis, l’un roi d’Aquitaine et l’autre de Baviere, sont sous l’autorité de leur pere et de leur frere. De son second mariage, Louis a un fils : Charles le Chauve. La mere de ce dernier réclame pour son fils la plus grande part des territoires en dépit du texte de 817. En 843, Charles le Chauve, Lothaire et Louis se partagent l’empire en trois (Pépin est mort) lors du traité de Verdun. Quelques 120 commissaires – 40 pour chaque frere – afin d’établir un inventaire des biens `a partager, plus d’un an de négociations, plusieurs réunions entre les trois protagonistes : le traité de Verdun est né d’un accouchement difficile… Finalement, Charles obtient la Francie occidentale (partie francophone), Louis le Germanique, la Francie orientale (partie germanophone), et Lothaire la Lotharingie (Francie médiane). Lothaire reçoit également le titre impérial. Apres sa mort, la Lotharingie s'affaiblit rapidement et ses freres esperent s'approprier son royaume. Apres une longue navette entre la Francie occidentale et la Francie orientale, une grande partie du territoire est rattachée en 925 au royaume oriental. La frontiere entre l'ouest et l'est est désormais marquée par l'Escaut. Les territoires occidentaux de la Belgique actuelle appartiennent donc `a la Francie occidentale, la future France, les régions orientales sont rattachées `a la Francie orientale, le futur "Saint empire romain germanique". Le roi de Francie orientale reçoit le titre d'Empereur. La frontiere de 843 subsistera en droit jusqu’au XVIeme siecle. Elle fait de nos régions un enjeu, une zone-frontiere ou la France et le Saint-Empire rivaliseront d’influence. Autre élément important : les deux parties de la Belgique actuelle, de part et d’autre de l’Escaut, sont toutes deux bilingues (la frontiere linguistique, en effet, court d’ouest en est), et excentrées par rapport au pouvoir dont elles dépendent. Ces caractéristiques communes déterminent un certain particularisme, qu’on retrouve chez les habitants "de l’Est" comme "de l’Ouest". Les dissensions internes mettent l'empire `a la merci des invasions. Parcourue de voies d’eau facilement navigables, la Belgique actuelle subit des cette époque les assauts des Vikings qui, avec leurs drakkars `a fond plat, remontent les cours d’eau en vue de ramener des objets de valeur. Ceux-ci se trouvent en général dans les monasteres qui sont la principale cible des pillages. Ils ne sont définitivement repoussés qu’en aout 891. Devant l'affaiblissement du pouvoir central, les seigneurs locaux prennent en mains la protection de la population. On construit forteresses, donjons et autres fortifications. En échange de leur protection, les nobles locaux prennent une partie des libertés de leurs protégés, renforcent leur propre pouvoir et s'émancipent ainsi vis-`a-vis de leur souverain : le monde féodal est né. 4.6. L’espace « luxembourgeois » Qu’en est-il de l’espace « luxembourgeois » ? Le territoire qui correspond aujourd’hui au Luxembourg fut d’abord occupé par les Gaulois et les Germains. Sous les Romains, il fit partie de la province de Belgica Prima. Il fut ensuite intégré au royaume franc d’Austrasie C’est probablement des le IIIeme siecle que les Francs sont présents dans l’espace « luxembourgeois » alors intégré `a la Belgica Prima. L’intensité de cette présence augmente cependant considérablement des le Veme siecle. Peu `a peu la présence romaine s’efface. Parallelement `a l’implantation franque, progresse la christianisation, surtout apres le bapteme de Clovis. Ce sont d’ailleurs les éveques qui assurent l’administration des ciuitates en attendant que des comtes les assistent ou completent leur action politique[1]. Les Francs vont d’installer dans les régions fertiles du Gutland et de la Moselle. A l’avenement de la dynastie carolingienne, l’espace « luxembourgeois » va etre intégré `a l’empire de Pépin puis de Charlemagne. Notons que l’abbaye d’Echternach, bien dotée par la royauté carolingienne et l’aristocratie régionale, connaît deux périodes fastes qui la font figurer parmi les grands centres spirituels et artistiques du haut Moyen Age. Une premiere au début du VIIIeme s. et la seconde au IXeme s. Son scriptorium réalise des enluminures célebres et fastueuses. Elle resta célebre pour sa production d’art livresque médiéval. Une autre abbaye tres importante pour l’époque est celle de Saint-Maximin de Treves. Les terres de cette derniere et du monastere d’Echternach constituent la base du futur comté de Luxembourg. Apres le traité de Verdun, le territoire du Luxembourg va se retrouver en Francie médiane, ou Lotharinigie. En 925, cette derniere passe entre les mains du roi de Francie orientale. Cependant, comme nous venons de le dire, l’emprise croissante des grandes familles nobles constitue le facteur le plus important de recomposition du paysage politique. Peu `a peu les ducs, les comtes ou encore les abbés laiques[2] s’approprient des terres aux dépens du fisc ou des abbayes. Ainsi naît au XIeme s., en rupture avec les structures politico-administratives carolingiennes, le comté de Luxembourg. L’espace occupé des le XIeme s. le comté, puis le duché du Luxembourg équivaut plus ou moins `a la région située entre la Meuse et la Moselle. Située de part et d’autre de la frontiere linguistique, ce pays tres divers est en fait un foyer culturel et politique de grande importance : une grande activité commerciale s’y développe ; la région est riche de terres impériales ou les empereurs viennent chasser ou se reposer[3] et de domaines abbatiaux détenant de vastes domaines. V. La Belgique féodale 5.1.Le morcellement du territoire En France comme en Lotharingie, profitant des luttes dynastiques qui tourmentent le pouvoir et des désordres dus aux invasions normandes, certains comtes veulent se soustraire de l’autorité royale et étendre leur pouvoir au détriment de leurs voisins en soumettant des populations qu’ils protegent. Ainsi, des la fin du IXeme s., le comte Baudouin II profite des difficultés du roi de France pour étendre son territoire. Cette politique d’expansion est poursuivie par ses successeurs durant deux siecles et aboutit `a la création d’un vaste comté de Flandre. Celui-ci va comprendre de grandes régions du nord de la France ainsi que des territoires qui étaient sous l’autorité de l’empereur d’Allemagne. Le comte va y exercer des pouvoirs presque royaux : il rend la justice, il leve des troupes[4], il frappe monnaie… A l’ouest de l’Escaut, seule la ville de Tournai ne sera pas intégrée au comté et restera libre, dépendant directement du roi de France. Entre le IXeme et Xeme s., on assiste `a un morcellement du territoire : les principales entités sont le comté de Flandre, le comté de Looz, le comté de Hainaut, le comté de Namur et le comté de Luxembourg, ainsi que les duchés du Brabant et de Limbourg, la seigneurie de Malines et la principauté de Stavelot. La principauté épiscopale de Liege est indépendante. Ces différentes entités luttent ou collaborent selon les circonstances politiques et économiques, au gré des alliances et des guerres. Celles qui se trouvent `a l’est de l’Escaut sont sous l’influence du Saint Empire Romain Germanique, tandis que celles qui sont `a l’ouest relevent de la France. Au départ, l’empereur de Lotharingie va essayer de garder son autorité en mettant au point le systeme de l’Église impériale. Cela signifie que l’empereur va confier la direction du territoire de Lotharingie `a des éveques d’origine allemande fideles et dévoués, comme par exemple le prince-éveque Notger de Liege (Xeme s.). Mais l’autorité de l’empereur va s’affaiblir peu `a peu notamment `a cause du conflit avec le pape (que l’on appelle la querelle des investitures[5]) et finalement son territoire va se morceler en ces principautés autonomes dont on vient de parler. Le territoire couvert par ces principautés est plus large que le territoire actuel de la Belgique et, surtout, il n’y a aucune homogénéité linguistique : le flamand domine en Flandre, au Brabant, `a Malines et au Limbourg et les parlers romans[6] dominent ailleurs. Les princes s’entourent de vassaux, seigneurs et châtelains. Cette noblesse qui détient les terres domine une population essentiellement rurale. Jusqu’au XIeme s., l’agriculture constitue l’activité principale. Apres l’an mil, en raison d’une augmentation de la population, les domaines s’agrandissent. En outre, on commence `a défricher de nouveaux territoires autour des villes et des monasteres et on aménage la région proche de la mer (digues, drainage de terrains marécageux…) : c’est la naissance des polders. Ce phénomene se poursuit aux XIIeme et XIIIeme s. La production agricole augmente sensiblement en raison de la multiplication des terres cultivées mais aussi en raison de l’amélioration des techniques agricoles (remplacement du bœuf par le cheval, amélioration de la charrue…). 5.2. Les institutions féodales La terre étant au début de l’époque féodale la seule source de richesse, les rois prennent l’habitude de céder, en reconnaissance de services rendus, une partie de leur domaine. Au cours du temps, les bénéficiaires gardent pour leurs descendants les terres reçues, appelées fiefs. Ils récompensent `a leur tour les hommes d’armes en leur donnant une parcelle de cette terre. Ainsi se crée une échelle de pouvoir entre vassaux (seigneurs protégés) et suzerains (seigneurs protecteurs), dont les terres sont emboîtées les unes dans les autres. Avant de prendre possession de son fief[7], le vassal doit jurer fidélité `a son suzerain lors d’une cérémonie symbolique. Chaque seigneur administre librement son domaine, appelé seigneurie. Il vit dans un château-fort situé sur une butte et entouré d’un fossé rempli d’eau. De l`a, il défend la communauté de paysans et d’artisans qui vit sur son domaine (ils peuvent se réfugier dans l’enceinte du château en cas de probleme), mais en échange, celle-ci pourvoit `a ses besoins matériels. Les demi-libres peuvent cultiver la terre du seigneur en échange d’un loyer (le cens) en nature (produit de leur travail) et en services `a l’égard de leur seigneur (travail sur les propres terres de ce dernier). Les serfs, héréditairement attachés `a la terre, ne sont pas libres, mais ils ne sont cependant pas considérés comme des objets, au contraire des esclaves antiques : ils ont des droits, notamment celui de fonder une famille. Les serfs ont des obligations bien plus importantes `a l’égard du seigneur : ils travaillent énormément pour le compte de ce dernier. 5.3. L’art roman Dans les années 1000, comme nous venons de le voir, la population s’accroît. L’Église veut faire face `a cette augmentation de chrétiens : tout l’Occident va se couvrir d’églises qui vont etre construite en style roman. Ce style possede diverses caractéristiques : l’église est en forme de croix latine, et les plafonds ne sont plus en bois mais en pierres. Pour ce faire, on va utiliser la technique de la voute en berceau (ronde). Comme ces voutes sont lourdes (`a cause de la pierre), les murs des églises sont épais, la hauteur limitée et les ouvertures réduites : il y fait donc sombre et l’atmosphere en devient mystérieuse, propice `a la priere… 5.4. L’essor des villes L’augmentation démographique et l’accroissement des cultures agricoles favorisent non seulement le commerce et donc l’économie mais également le développement des villes. A partir du XIeme s., la Belgique devient un pays de villes. Les villes sont souvent situées le long de cours d’eau ou de la côte, dans des endroits d’acces aisé. A l’ouest, Bruges, Gand, Ypres, Tournai deviennent des centres urbains. En pays mosan, Huy, Namur, Dinant et Liege se développent `a partir de leur noyau datant de l’époque carolingienne. L’urbanisation de la Moyenne-Belgique est plus lente, seule Nivelles présente au Xeme s. un caractere urbain. Ce développement de villes est aussi lié `a la renaissance économique de l’Europe du Nord et `a l’essor des industries des régions de la Meuse et de la Flandre. En effet, au XIeme s., la région mosane[8] développe ses industries de métallurgie du fer, du cuivre et de fabrication de draps. Au XIIeme s., la Flandre devient la grande région industrielle. C’est l’industrie de la draperie qui va surtout s’y développer. Les toiles sont fabriquées en grande partie pour l’exportation. Un commerce international de grande ampleur va s’organiser `a partir de ces régions. Désormais, Mosans et Flamands se déplacent eux-memes `a l’étranger pour vendre leurs produits et acheter leur matiere premiere, et ce, dans toute l’Europe occidentale. Les marchands flamands et mosans forment bientôt des colonies dans les grandes villes européennes de l’époque et se regroupent en guildes (association de marchands venant d’une meme ville) ou hanses (rassemblement de guildes de plusieurs villes). Les étrangers viennent quant `a eux en Flandre pour participer `a des foires commerciales[9]. Au XIeme s., les échanges avec l’Angleterre sont les plus importants. Bruges domine le commerce avec l’Angleterre et va dominer la Hanse de Londres qui rassemble les guildes de nombreuses villes flamandes. Les Flamands exportent non seulement leurs tissus mais également des vins qu’ils achetent dans les foires de Gascogne. Par ailleurs, ils font vivre le marché anglais en achetant l`a les laines qui sont acheminées `a Bruges. De ce fait, le port de cette ville devient tres important et le restera jusqu’au XIVeme s. La Flandre entretient des relations commerciales avec les ports de la mer Baltique via une autre hanse importante, la Hanse Teutonique (ou ligue hanséatique), qui rassemble toutes les cités qui bordent la mer Baltique. Au XIIeme s., la premiere croisade se met en route vers Jérusalem. La noblesse belge y participe en masse. Un nouveau débouché commercial est des lors créé en Asie Mineure. Les Flamands poussent vers le Sud et nouent des contacts commerciaux avec les Italiens. Les villes vont vraiment connaître une explosion démographique. Par exemple, vers le XIVeme s., Gand — qui a développé un commerce avec la Rhénanie et l’Angleterre — compte entre 56 000 et 64 000 habitants : c’est la deuxieme ville d’Europe la plus peuplée, la premiere place revenant `a Paris ! Bruxelles, Nivelles, Malines voient également leurs populations augmenter. Peu `a peu les villes cherchent `a échapper `a l’autorité des princes. Elles obtiennent des franchises ou privileges. D’abord accordées oralement, ces libertés s’officialiseront dans des chartes : la plus ancienne date de 1066 (charte de la ville de Huy). Les villes vont progressivement devenir des communes autonomes meme si le prince garde un contrôle par l’intermédiaire d’un fonctionnaire qui le représente. Les privileges sont tres différents d’une ville `a l’autre : suppression des redevances seigneuriales, permission d’organiser une milice communale, tribunaux locaux (et non plus princiers), gestion de la ville laissée aux bourgeois. Devenues en quelque sorte des personnes morales, les communes se dotent d’une banniere ornée de leurs « armes », d’un beffroi muni d’une grosse cloche, d’un tocsin servant `a alerter ou convoquer les bourgeois, d’un hôtel de ville ou siegent les échevins qui apparaissent `a cette époque et qui sont les administrateurs des villes, de halles pour entreposer les marchandises, des milices et enfin d’un sceau, symbole de puissance. Jusqu’au XIIIeme s., les fonctions communales sont monopolisées par l’aristocratie industrielle des villes. Mais les associations d’artisans ou corporations[10] vont se révolter. 5.5. Les crises du XIVeme siecle Des la moitié du XIIIeme s., les artisans du textile de Gand se soulevent contre les marchands-drapiers qui les dominent politiquement — les échevins viennent tous de la classe des marchands — et économiquement — ils sont les fournisseurs de matiere premiere et acheteurs du produit fini. A la meme période, les artisans de Liege se révoltent contre l’éveque et les échevins mais ils sont écrasés. Les luttes vont se durcir et vont continuer au XIVeme siecle. Finalement, les bourgeois marchands vont consentir `a partager les charges échevinales avec les artisans voire `a les céder comme `a Liege. Ces conflits internes se superposent aux conflits externes notamment en Flandre ou le roi de France essaie de reprendre le pouvoir au comte, Gui de Dampierre. Ce dernier a en effet conclu une alliance avec l’Angleterre contre l’avis de son suzerain, Philippe le Bel. Le roi de France va alors décider d’annexer la Flandre au royaume de France — avec le soutien de la bourgeoisie — mais cela va provoquer de nombreuses révoltes en Flandre dont les Matines Brugeoises le 18 mai 1302 (massacre des troupes françaises). Le roi de France va alors envoyer des troupes pour reprendre le contrôle de la Flandre sous le commandement de Robert d’Artois. Le 13 juillet 1302, les troupes atteignent Courtrai : elles sont accueillies par une armée composée de paysans et d’ouvriers dirigés par des seigneurs restés fideles au comte de Flandre. Malgré l’infériorité en nombre et en force des troupes flamandes, ce sont elles qui remporteront la victoire sur les Français. Les vainqueurs ramasseront 700 éperons[11] dorés sur le champ de bataille : c’est pour cela que cette célebre bataille est appelée la Bataille des Éperons d’or. Elle va permettre la libération de la Flandre et l’instauration d’un régime démocratique dans les grandes villes du comté. Elle va devenir un symbole pour les Flamands meme si le roi de France aura rapidement sa revanche en 1304 `a Mons-en-Pévele. Mais malgré cette défaite, l’autonomie de la Flandre est sauve… Des le XIIIeme s., pour contrer les prétentions du roi de France, le comté de Flandre amorce un rapprochement avec l’Angleterre, ce qui est conforme aux intérets de l’industrie drapiere. Au début de la Guerre de Cent Ans[12] (1337), le roi de France sollicite l’assistance de son vassal, le comte de Flandre, contre le roi d’Angleterre. L’intéret des villes flamandes est au contraire de garder de bonnes relations avec l’Angleterre : sans laine anglaise, l’industrie drapiere flamande s’arrete, et c’est la ruine. C’est ce point de vue que fait triompher Jacques van Artevelde, un riche marchand flamand, qui devient un chef politique important, un véritable contre-pouvoir en Flandre. Dans les premieres années de la guerre, la Flandre prendra le parti de l’Angleterre, par intéret commercial; ensuite, elle restera neutre. Dans l’ancienne Lotharingie, l’autonomie des principautés n’est pas remise en cause par l’Allemagne qui est alors affaiblie. Par contre, le pouvoir des princes est limité par les exigences des privilégiés (nobles, bourgeois, membres du clergé). Au XIVeme s., les ducs de Brabant vont devoir accepter plusieurs chartes qui donnaient une part de plus en plus active aux villes dans l’administration du duché. En effet, les ducs continuellement en manque d’argent devaient si souvent faire appel aux bourgeois que ceux-ci finirent par réclamer des constitutions matérialisant certains avantages. Et en 1356, la duchesse Jeanne et son mari Wenceslas doivent preter serment `a la Joyeuse Entrée. La constitution brabançonne, qui restera en vigueur jusqu’en 1794, stipulait notamment le partage du gouvernement entre le duc et le commun pays (délégués de la bourgeoisie, de la noblesse et du clergé). Désormais, le duc ne pourra rien entreprendre sans en référer aux trois ordres, les futurs États du Brabant. A Liege, les pouvoirs du prince-éveque sont limités des le XIVeme siecle, théoriquement au profit des groupes les plus favorisés. Mais les ruraux qui constituent la majorité de la population ne feront jamais partie des états. On le voit, les villes jouent un rôle non seulement au niveau économique mais aussi politique : elles luttent contre l’absolutisme des princes ; habituées `a s’administrer elles-memes, elles sont des creusets de particularisme. Parallelement, on voit apparaître un sentiment communautaire au sein de chaque principauté : les populations prennent conscience d’appartenir `a un groupe spécifique. ------------------------------- [1] Ce n’est qu’au Vieme s. que les prélats francs prennent définitivement la place des éveques pour cette fonction. [2] Les abbayes, tout comme les comtés étaient cédés en fiefs par les rois et les empereurs, qui se forgeaient ainsi une clientele. Ces abbés laiques laissaient le soin des affaires religieuses `a des prévôts religieux. [3] Notamment au palais impérial de Thionville, `a mi-distance de Metz et de la ville de Luxemboug [4] C’est-`a-dire qu’il forme des armées pour mener des combats de son côté. [5] Conflit qui, aux XIeme et XIIeme s., opposa le pape avec les empereurs allemands au sujet de la nomination des éveques et des abbés. En effet `a partir du IXeme s., les rois et les puissants suzerains (pour la définition du terme, voir ci-dessous) avaient pris l’habitude de nommer les abbés (= dirigeants des monasteres) et les éveques, en leur confiant l’autorité temporelle (= sur des biens matériels) mais aussi spirituelle, par la crosse et l’anneau, symboles de la juridiction sur les âmes. Cette pratique entraîna la décadence morale de l’Église aux IXeme et Xeme s. En 1075, cette pratique est condamnée par le pape Grégoire VII. Les empereurs allemands s’opposerent violemment `a ce décret : en effet, l’Église allemande était tres féodalisée. Une lutte entre empereurs allemands et papes commença… Ce n’est qu’en 1122 que la querelle s’apaisa grâce au concordat de Worms. Selon ce concordat, l'Église avait le droit d'élire les éveques, et l'investiture par l'anneau et la crosse serait effectuée par le clergé. Cependant, les élections se dérouleraient en présence de l'empereur, qui conférerait les terres et revenus attachés `a l'éveché `a travers l'investiture par le sceptre, symbole sans connotation spirituelle. [6] Proches du français. [7] Terre que le vassal reçoit de son suzerain [8] C’est-`a-dire de la Meuse [9] Des le XIeme s., la ville de Gand organise une foire tres importante. Quant `a Bruges, sa foire de mai contribue `a sa prospérité au XIIIeme s. [10] Les corporations vont apparaître vers les XIIeme-XIIIeme siecles. Il ne faut pas les confondre avec les guildes. Elles ont été créées apres ces dernieres et regroupent les artisans par corps de métiers. [11] Piece de métal, composée de deux branches, fixée au talon du cavalier et terminée par une roue `a pointes, qui sert `a aiguillonner le cheval en lui piquant les flancs. [12] Nom donné `a la période de campagnes militaires, entrecoupées de treves et de traités de paix, qui ont opposé l’Angleterre et la France, les deux grandes puissances européennes de la fin du Moyen Âge, entre 1337 et 1453.