Madeleine Ouellette-Michalska LA MAISON TRESTLER OU LE 8eJOUR D'AMÉRIC/j; roman QUÉBEC AMÉRIQUE \!<\ Le ŕutur est en avant et en arriere et vers les côtés. Clarice LlSPECTOR I I |e ne sais plus comment cette histoire a commence. Peut-étre dans la vieille maison accrochée au rocher nu bordant la route de Gaspé. Peut-étre dans l'impatience de pere lorsqu'on ľarrachait á son journal, á ses conversations avec les touristes américains qu'il hébergeait en été. U était néä Lowell, Massachusetts. Dans ma tete, Son of a gun, son of n bitch a d'abord été une comptine. Et l'Amérique, une caravane blanche tirée par une Cadillac décapotable qui pétaradait* sous le soleil. L'Amérique, c'était aussi les cameras de luxe, les boites de chocolats, les usines de textile, les souliers blancs. Tout ce: qui reluisait. Tout ce qui faisait riche. Tout ce qui ressemblait, de pres ou de loin, ä la parenté des Etats. La France était discrete. Elle ne débarquait jamais chez nous. Elle me parlaitj par les livres ďhistoire. Elle se racontait par la bouche de' ma mere les jours de pluie: la bataille de Saint-Cloud, Charlemagne, saint Louis, Francois Ier, Marie-Antoinette, Versailles, le chateau de Chambord. Je retenais des dates, des lieux, une absence frappéeide_ <"*ialgie. Tante Antoinette, la sceur cadette de pere avai rai* ses humanités avant ďentrer au Carmel. Ses Iivres trainaient dans les vieilles malles du grenier Je les ouyrais et P^lpais les mots contenus entre les pages gaurrees par _ : ON TRESTlír 12 jz MfŕraiS les phases éclairées par la lucarne rhumul.tr lf.f^;rajcvan« laquelle *™*ssey^ *°uve. ,urplonibant la^O" . r„ne, émerve,■ fíaient. importe quel poim De. decouvertes ( ^ du désir fenaien, en que|ques duglobřetniinpo w éprouvais les passions, j'en capta,sl.5clarneurgran m0notonie du jour. Elle me La ÍSľlSÍ5'«n assouvissement possible par IW ren ľ v L était une succession ďaventures épuisées dans "économie de l'heure et du mouvement. Le réve un réci t qui Sit aux doigts. L'intngue, un art de v.vre et de ment.r, I art du temps divise en paragraph.es et en chapitres. Ma,s cette fascination, tôt devenue néressité. receipt un picge. Sitôt que je me levais et suspendais ma lecture, la magie cessait. Le monde retournait a lui-máme, aminci, lié au vouloir des gens qui le réduisaient ä leur usage. En bas, la famille s'affairait. J'étais une enfant douce. Personne ne savait que je jouais avec le feu. Personne ne me soupconnait de perpétrer des meurtres, de recomposer des paysages, de preparer des fuites. Je l'ignorais aussi, mais ('habitude était prise. Je continuerais de lire comme une forcenée, et l'envie ďécrire suivrait, magique transformation du silence et de la sensation en paroles. J'entretiendrais le vertige. Les mots resteraient illusoires et généreux. I Un i0Ur' ,rente ans P»«* tard, cet incident. Ce reportage. ÄÄSla phr8raphie d'une maison de "-•interpelle" 0mme" ' S,eCle',étalée SUr W eolonneS' me„t3 dont ľéľraojľ Cn'Sme- Le titre évoque des événe- ^"ligne en rouge cert!"16 '""*■ ]e dévore ľartide et m'f de la metropole ľ^8"8"- L'""plantation á proxi- V faveur de la guerre 7^™'™ allem™* débarqué id ^ctionala Champs d'*^^ américaine, son 5Uu" infants. qUatre *«• d*Putes. ses deux manages, ses d Un -cond. el seulernenTdeü" F"* *> «^ í"*"» Jxsurv.vantsdechaquesexe. mu gvmétric me parait suspecte. Je scrute la facade du C '"° Vernč'-e laquelle j'imagine des drames, des couloirs **ifll j'ombre* des chambres aux rideaux fanés. J'imagine friere laquelle j'imagine des drames, des couloirs átifSre, des ch. 8 j r de ma propre imagination. Car je sais les bruits í'imp ľ* entendre, le noir des nuits que je veux distiller. Je ^'p^oiirtant cettc habitation rnlossale et sombre alertc řorps sans dél.er les mots. indice apparent ne justirie un intérét aussi subit. AuCje chercher á quelles hantises renvoie cette maison InUt|'on dit hantée. J'ignore á quel passé tenu secret, á quels e řixe' ^'appliquant ä j6Phirfrer des signes, cherchant á saisir des sens imper-tibles au regard. Comme si quelque sens primordial, lUe-iá demeuré obscur, pouvait brusquement surgir de [aits et de mots oubliés qui eussent attendu de traverser la rétine et d'investir la memoire pour livrer ä la conscience leurpoids d'effroi et de fascination. I! est trois heures du matin. Je quitte mon fauteuil et marche vers ma table de travail oú j'écarte les papiers accumulés durant ces derniers jours. )e glisse la découpure de presse dans une chemise vierge, au centre de laquelle j'inscris en lettres gothiques, sur un rectangle blane liséré de rouge, la maison Trestler. Puis je place ce dossier sur cclui, plus volumineux, étiqueté Visite de Monsieur ß. Steřan a vu le rai de lumiěre sous la porte du bureau. II saměne, ľceil inquiet, faussement interrogateur. Poussée par l'mstinct de culpabilité qui monte du fond des entrailles fľ>! mére' 'e ret°urne au lit sagement, remettant ä plus dl'approfondissement des voix, des formes, des énigmes ^u'sollicitent l'imaginaire dont elles attendent leur resolution. sais Pas qu'ä ľaube un réve me tiendra lieu de signal. sousPcPÍLée á la rampe d'un escalier, je descends dans un Tand mide en tenant une chandelle ce la main droite. subite, qUe meS pieds eřřleurent les marches vermoulues, goutte"1^ Un POint lumineux s'allume devant moi et une dirigp | ] san8 suinte du mur poreux vers lequel je me pein* me • du bout de ľong,e et la leche goulüment. A ' 5UlHe séché les lévres qu'une femme approche. LA MAISON TREST/.E| ,iäfP File me fixe Ionguement,puis — ďune,bUľcgorn en'ni U mode ď.mploi d unľ c£ remel Un, Hr nom ne Vest pas livré. J'hésite a 5oulever -denne dont lénom ne ^ ^ ^^ une ^.^ J, '"■"" "ormre cherchant au re»«"- »»•= '««nt qu ^veľaľ e vi age sombre dont je discerne mal les trag S ne s en ľrouvc ,ucunP dans ce redu.t que ,e souhai,, quitter. Au réveil. mon corps tranquille ne laisse transparaitre n, étonnemen. ni stupeur. je me tourne vers Stefan. H don, ,!longé sur ie dos, le visage découvert. Lorsqu ,1 ouvre les yeux je lui raconte ce réve qu'il trouve inquetant. Sa reaction me parait justifiée. Le réve est avec ľécriture. le plus haut des cris. Le plus puissant obstacle a ľaveuglement. til* — Tu m'accompagneras á Dorion demain ? — Pour quoi faire ? — Pour visiter la maison Trestler. — On verra. Lorsque enfin nous roulons sur la route deserte, radio ŕermée, je lui avoue avoir déjá rédigé vingt pages sur la fille ainée Trestler, Madeleine, enfant calme á qui j'ai d'abord cru ressembler. J'ai déchiré ce texte avant de montér en voiture. Je construirai plutôt le roman autour de sa soeur Catherine, rebelle qui déŕía son pere á cause d'un homme et lui intenta un proces afin de récupérer la part d'héritage maternel dont il voulait la spolier. Noi ««*^MiA^nd^co»wrt d'-ne lumiére er Pf+***. un batternem > °eUX Mon^gnes. Sur le le* Prices consorts. I Z°T ^ Steřan déteste K»" II.Pat comprendre mon nľ^8"6 á ««trecoeur. II dit °rd,na,reS' *' ^' ^ villa*. Rue Vaudreuil. rue Valois, rue Galt. J'ai déj. . , ' ailleurs, autrement, je ne sais trop 0u e n P*ľces coloniales sont si encombrées dW*^ qUand' Us L gouverneurs, qu'elles dérouterľ ľ *nts' d'of^ ,OIlde„t Imagination. De ceS réciutifs mLln ^V' f°nI ľ^ur une enfance tenace et lointaine ľľi rptľ ' eche" SSU d« rois, des chateaux, des «£%££ je5tins. lei, des hommes de paiile qui se battaient pour de mollis a vent. — Tu exagěres. _ Cest toujours comme ca quand on pense. Et plus tard, ä une intersection, ces mots inattendus tandis qu'ils hésitaient, ne sachant quelle direction prendre. — L'Amérique a été découverte par hasard. — Qa me paraít un geste manqué qui a réussi. — Si ľon veut. Aprés tout, pourquoi pas. Elle pensait: réussir comme on réussit en affaires, mais eile se tut. Cette phrase lui paraissait inappropriée. Elle seule savait ä quel point ľécriture lui tenait lieu de conversation. Nous longeons ľancien Chemin du Roy. Stefan hésite avant de s'engager sur la rue de la Commune découpée a flancde forét. Une pente douce débouche sur un cul-de-sac. F>n de la civilisation. Ici commence la splendeur du monde. Ic. s'entend un silence total, une mesure de temps parŕaite. Sous le froid de fin de saison, une douceur inattendue te*Pěre ľair. Les derniers mois ďhiver m'ont toujour un soulagement. Nous descendons de voiture en "tenant a P°^re. Devant nous, le lac gelé, des arbre* gris trouant^un r<^- Ce paysage éveille en moi une emotion m wJJJ ťr-e les yeux, m efforcant de reconst.tuer une «a| I o tentant d'aviv TRŕ de řamiliarité liée qui ne a ie e ________________pressioi^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ ou íes"jubilations doni j'aurais perdu le souvenir m„,s~ seraient restées présentes au corps, ancrees au lieu de p|Uj grande vulnérabílité. Je dois me souvenir. Oú ai-je déjá soutenu 1'éclat du pesant sur mes paupiěres tandis que je m'affamais ďu terre opiniátre qui prenait ä la gorge ? Oú ai-je cru pOUr i premiére rois qu'il suífisait de se réřugier dans un espaced paix pour jouir ďune certitude jusqu'ä ľextase ? Était-ce le dimanche aprés Ia messe, aprěs le déjeuner plus copieux qUe ďhabitude, le thé servi aux grandes personnes, et les gáteaux blonds, découpés et consommes devant la fenétre ouverte lorsqu'une accalmie favorisait ma fuite ? J'ai oublié le thé et ies gáteaux ďhiver. Y en avait-il ? Je ne saurais 1'ařřírmer. Mais le dimanche, pendant la saison chaude je quittais la maison, vétue ďune robe de coton clair, et je traversais la route conduisant au cap reserve á de rares excursions familiales. f'avais řranchi les limites du quotidien J'avais quitté le nécessaire. Je pouvais m'ofŕnr 1'indispensable Je courais entre les pierres et les failles poreuses oú je SES a T ™néraIes' déni^hais des mousses crénelée , recommence pôu ieplaisľÍeUr' ""ľ» '"déŕm.ment -e soúlais ďodeu s t i COľpS- Pendaní deS heure^ Ü finalement, ventre au sol tTementS' de VerHgeS- PuiS tremblante moulure d t ľ .f"^'11 deS heures la souhaitais me fondre Ä dim- h°rÍZOn * •*!«««* íe d7^ ie prolonged ,X'.:SSOUPie-et cependant en état ^scendre. Lä-jfau,"j t"ent •"""^ '* m0m'n« 'oppres^nf-. __ . ' r %ressentais moins __________*____ ľa«í„* Proximité des rh^ T""" MU" ^"mi eux "avanfc ou vers ľ_;A__d** ch^s uhles qui t.ra.ent v que pármi eux charalV Vers 'arriére un *r»Z>l T ľ qUI hr^^t vers H L 'e, 17 I Ui *« J" ' en' pcrtlu dans ses propres souvp i íms ses propres paysages. Une odeur tenJÍ 5'éKar( gip> deserts. La séve a déja prise sur iľgd%monte d«» cn!., et ľhiver sera termine. " gel' Enc<>re deux moi*' __ Regarde, dit Stefan, un ancien chenal. cur le róté sud du domaine, un sentier d* „„ i dcscend vers 1. lac En face, une entrée de^ur'Sr Iľľe fondriěres debouche a son extremitě, vers la fiaurhp une habitation massive. Je la reconnais. Cest eile * closes, volets fermés, et son haut toit á larrnier. 'Cw ll maison Trestler. Une image devenue realite. Du courage de ľobstination, du solide. Une elaboration patiente coulee dans la pierre au mortier retouché, de teinte plus päle, qui trahit Ies renovations récentes. En Amérique, les maisons vieillissent mal. Et pourtant, j'ai toujours cherché des traces anciennes sur les poignées des portes, au íond des placards, dans les greniers des demeures traversées. J'ai toujours construit des romans sur les lambeaux de papier peint couvrant les vieilles armoires et les murs effrités. J'ai toujours convoqué les mots autour ďun portique éteint, d'une piece condamnée, d'un couloir secret dont j'ignorais l'histoire et ľusage. J'examine la masse architecturale fermant ľéchancrure du lac. J'en détaille la facade, les lurarnes étroites, la porte Tudor, les fenétres symétriques. Je compte les arbres centenaires qui l'entourent. Tant de profondeur et ďépais-seurde temps exerce sur moi une fascination dévoratnce. Le souvenir, peut-étre, des longs hivers á grelotter dans un rez-de-chaussée ourlé de frimas oú résonnaient les voix. «Des clous cassent», disait ma soeur, en tendant YoreiWe, comme si cela pouvait résumer la totalite présente et ruturt de notre situation. Refusant de me satisfaire a ce jeu I'effacais ses paroles d'un geste distrait, préférant le nsqu de ľindétermir.ation. Est-ce reminiscence ou premonition ? J'ai ''imj^ j* * connaitre cette maison. En approchant de ses murs, » heurte á son austérité et je frémirai, j'en suis sur , ^ [ttlrai grincer ses porte, et craquer ses parque . Iß touŕfe de branches mortes pend á |'une tJes ramifications du regard, surlenoir bistre d!ľ nu. surprends en train de filer |a te**..J*? C'était déjä ainsi. Le anciennes. L'était aeja ainsi. Le sommei! , ľ." solitude, apaisait ies sens sans tuer l'imaginati0n 8a Jc m'éveillais, cherrharrt le blanc rassuram o u ,L .,,. -------- -- .. ,a«urant H m afŕoiant de ne plus trouver les contours du lit JI 7s s, tétus, paísibles. Je connaissais la mélod r' étais avant que la peur ne commence ä rě ^ L : ä mes oreilles. Le vent du nord ŕouettait la 0nnt des serviettes giacées se balancaient dans°| souřflait á ľétage des chambres, il gémissait aux poe V'd" ía bouche, entre les mains repliées sous la gorge II ^'^ la hantise des departs. Un jour, je m'évaderais^r^' tj'irais m'installer dans une ville chaude et peupľ ° .'°ür> gens parlent et s occusent ä toute heure Cette défľ* -rafŕermissait ľéquilibre du désir. Inventer iWenľ'^ mots gardait intact ľaigu de la perception. P3F e vvre, c'était prévoir Et má C°mPrendre< «tait ruser. Sur- eulplaisir aueUI e(;r,ture m<^droite, et pour mor »PPrise sanX *' ^^s de "**** «rande H.s.oire Peut-étre déjá contP ľ "\aitres' dont le premier chapitre éiait maison Trestler re«?" "S C,e roman kmilial oubliédontb -■ ressuscta.t des bribes. jpS :&-m^..... •' rWuZpuľ Gn"'"/ť " f*«**« '« 5« '•>»», ; »Riviére-Ou n 1492 ,fl's toujour* IIH. '"'"'xfaitti tonhnUei ■i triangle France-Québec-USA, rendant cepeup,e tendre d'oreille, capable de frémir ä toute evocation je francitude, susceptible de vibrer á toute voix le situant dans I'espace inŕini des gloires posthumes. U s'autorise de leur ferveur pour aborder un sujet délicat, rctique, ce grand Koweit blanc gorge d'uranium et ďélectricité qui attise la convoitise des siens. II repete «la France», prenant garde d'abimer I'image du pere prodigue sous l'oei! incestueux des journalistes qui cherchent les mamelles de la mere patrie sous son plastron de dignitaire. Ses lévres modulent les inflexions suscitées par le charisme de l'alliance. Mais voilä qu'un rate s'introduit dans la machine. Une hesitation lézarde son debit. II dit -et de sa...»,puis halěte, laissant en suspens une phrase bancale ou sexhibe ľhorreur ce ľinachevé. Ä distance, on le regarde. n 'beulte. Ses secondes sont comptées. Des commences mfamants stigmatiseront cette défaillance de part et strede l'Atlantique. "H est trés important de trouver les mots precis, has^e-t-ilgauchernent. ŕ n'avo"0níant la regle h ,aciueile >' devrait satisfaire, il rage de dont "V" articuler cette phrase que son homologue local env'e la faconde et ['arrogance iuvenile, vient - ON T*EST, d'avancer; -La tentation est gründe, bnqu'on vit Werne domestique aussi grave, de s en ouvrir á ceux qUe^ ent en .innlif S'en ouvrir? Comment pourrait-il succomber á H fjiblesse sans encourir le ridicule. Sa maladrpsse fait ^Ľ* ďhuile. II sent montér de »'assistance un grouillernent t qui se déploie dans une sorte de reptation sourn' Maudissant son inconfort, il raidit les máchoires, esp'°S forcer les mots. L'obstruction persiste. II est piégé. Da ^ pays ä double Iangue et á double face, il le pertpoit mainte il se sait observe par un monštre bicéphale dont la tét dissocie au-delá de ľapparente unification du corps I Tiraillé entre deux continents, partagé entre deux cul tures, deux histoires, deux modes de pensée qu'il ne n clairement identifier ou circonscrire, le voilá coincé enT' deux factions étrangěres, ou merne rivales, qui attendem 'impair. II se voit, invite somnambulique, presse ďexécutPr le numero de I'ex-colonisateur en visitě. Ä quel rameau rattacher son homelie ? You speak French, Sir ? ou je pa le toujours comme nos ancétres les Gaulois ? 'e six Sete/L56 !0,t/ait attendre «»Porte peu. cľtte longue habits "^ ^ ParÍS' U P^ience est sa plus Vou: ISSave*ce que Le Figaro a ecrit? - Quoi ? //«' ;' *"ra Pas de déba ''" Saint-Laurm. ~ Que le diabl e '«s empörte. u Belle Province. 23 ébe< H____________ ^ll,t de Mirabel perce ľétendue sauvage étalée ä L^érodrom , gt ju Nouveau Monde tirée de l'une des liiere tí'une He Chateaubriand. Monsieur B apercoit les J... belles pag^s, Ľ" uui ořřert. i>elle9 Online de montagnes rápées, la plus vieille du 3urentideS' L_t-on dit. Une eruption minerále insignifiante .ntipentlul a"_ „„„(pment souliener ľimmensité du vide non seulement souiigner 'immensité du vide semfie "—■ -^ ^ais p^duire ä 2éro la moindre de ses .1 i ^OH ' & ter ainsi vers le Nord lui fait éprouver la vanité Dem°rľrises humaines. Comme si cette partie du globe |e? entrep ^ nettement qu'ailleurs la précarité de la culture nlí'qUalt natientes edifications. En ce lieu, la planéte Terre et Sp fune étoile de grandeur moyenne, le Soleil froid et 1 n renvoie á ďautres systcmcs planétaires, ä ďautres ľľxľes comptant des milliards d'étoiles dont chacune veut •íre le soleil de quelqu'un. Ému par ľampleur de sa reflexion, le digniraire croit toucher les franges ďune dangereuse utopie. Ce réve de conquéte qui poussa l'Europe de la Renaissance ä chercher vers l'Ouest le plus court chemin pouratteindre l'Est, la route des Indes. II ne peut s'empécher de sourire en pensant aux ana-thémes proférés par les puristes qui refusent toujours ďadmettre que ces gens puissent continuer, dans leurs lexiques, a préférer le blé ďlnde au maís. Blé : Par extension se dit hgraminées distinctes du froment, Blé noir. Blé maudit. Voir Sarrazin. Blécornu. Voir seigle, (ergotél. Cétait bien eux. Racistes jusque dans un champ de céréales ! Jusque dans un dictionnaire ! Ils nechangeraient jamais malgré leurs pompeuses declarations. En vocabulaire, tout était litote. En histoire, tout était lapsus. la f a,rrjchant ä son indignation, Monsieur B se dii ige vers desľr h* Ú entend leS CrÍS d'acclamat'On I! suit la levée ä j- ™S,ans l'air glacial, et cette chaleur humaine le ramene que ľ"8lement de la gloire. Cest bien íui que ľon aime. Lui insane aCCyeiile Par cette ovation nourrie du lien de ^néral nn,te qUÍ le Pripite dans les foulées du défunt evinceH *'* S°n *me' i,s ľidoiatrent encore. Régner, ■ P^triaahe. Tuer le pere, c'est en consommer u .....í*, rttcSZtfS, ■Jí bey-l«-I^ur„:;ande fám«««' _ Le general ? Oh, rien. u'il vous avait done fait, le généra| „ A*«* la měře patric Ce Parisien Ä le plat de lentiUes d'Esau et Jacot, Le recours á ['Histoire Sainte ľindiŕférait J'invoquai alors des motifs plus raisonnables. L'ceuf de Colomb ä ['horizontale, parlez et multipiiez-vous, eau qui roule n'amasse pas mousse, seules les pierres ont des oreilles. II me coupa la parole, ne pouvant rater ('occasion de m'exposer la quadrature du cercle, les grandes orgues raciniennes, le cogito cartésien, la Petite Madeleine prous-tienne, tout ce qui vous fait une belle gueule. Au bout du compte, personne ne sut qui de nous deux I'emporta. novation est ä son paroxysme. Elle jaillit des mains, des bouches, des repiis de ľaír, des fractures du sol. Elle échte An iSeí latt?916 ,eVÍSSUS CapiIlaireS' CreUSe * fléchir A ôoontí - "mířications du sang. II se sent W Montmanrľ^TereS de Paris' i] se sen* plus Fran< ' d ba'nt-Cloud. Bouleversé A to j i í1'' s'enivrer dé |eur m7Stmains en direction des corps ah"n L?£Pleurde,'enfIureaH«nnemenl cha™*l. II veut i ■ / lER voré des livres ne ľaide en ripn i 25 ,,.,rd. n=,ns L( "'' ce »»ť«-'*: Vous f011rn , , 5ieur b savait-i que ^s «rrespondants metropolian Sebtat des articles a 1 hotel Mendien, propriété d'Air France, sans descendre dans la rue ? . Son of a bitch!. aurait jit mon pere. Sur h route de Gaspé, une maison juchée sur un precipice resiste aux tornades, aux intempéries, aux brülures solaires. Le chef de famille a vécu dix-sept ans á Lowell. II aime parier anglais avec les touristes américains. En été, ils ralentissent, puis s'incrustent. Aprěs avoir parqué leur caravane derriěre la maison, ils font des photos. Les petites filles blondes accroupies dans les champs de fraises et íes garcons maigres juchés sur des charrettes de foin les fascinent. - What's your name darling ? • Je m'appelle Rachel, Madeleine, Solange ou Anne-Marie, peu importe, tous ces prénoms résonnent de la méme maniere ä vos oreilles. Paul, Réal et Jean s'approchent. lis reniflent le convoi. Quand ils seront grands, ils iront aux Etats et se pavaneront dans des Cadillac et des Oldsmobile aussi pétaradantes. Moi, je me fiche des caravanes des Etats. Je youdrais seulement voir les photos promises, mais elles n'arnvent ia™is. En Afrique du Nord, trente ans plus tard, je braquerai mon appareil photo sur des caravanes de dromadaires, des attroupements d'änes, de femmes, d'enfants. Roumia Kou-m]a! le retiendrai la vehemence des cris, mais ÍO"Wiera. »j* *es promesses. Des pauvretés resistent. Un jour ■*««. c'était je crois aux Antilles, ä Marie-Galan'e»e « ; approchée d'ur quai d'oü j'ai dú déguerpir en »»«J f*W noir a mor tré le poing. II ref usait d'etre le negre q gera»tdans ma téte de riche. LA MAISON ecoitdespoim--- r la p.pe ™ ™F"* , en 0ffr, d'apporter une allum* v ^ de enerosites. En ^ „ois. L'élégance est k fenétres de la cuisine et qüe lfis lorsque le ^/^i enVahissen^ les chambres je trace des« champignons de g ďallumettes épargnes. On ne m'oblig etdeS^TeCío"^ SaIUt VÍendra Par ľalphabet- - Cétait ľannée de la typhoide ou de la grippe espagnole ? - Ľannée de la grippe espagnole. Des filles vétues de noir descendent un long escalier en retenant leurs pas. Apres ľensevelissement besogneux ďune enfant, elles s'affaissent dans un lourd sornmeil. Lune d'elles, ma mere, restera une jeune fille triste. Mais au dehors, quand méme, la chaude moiteur du jardin et le piaillement des oiseaux. La remontée du temps conduit toujours au piěge de la reminiscence. II faudrait pourtant savoir oublier. II faudrait savoir s'épargner les blessures de la memoire, détourner ces flux et reflux d'images qui grouillent dans les replis d'une consciente distraite et en menacent la tranquillité. Cette femme adorait 1'histoire de France. Les jours de mauvais tempS/ elle profitait de ,,a,lě nt de sa besogne des dľteľZlT'V deS paSSa«es- Ä h"it ans, je connaissa.s tirades lé nľ éPisodes. Je pouvais reciter certaines comrnandľrľjlľjľrv ,a VOÍX des *rands Pommes qu. le üest»n des peuples. ?tSp'-tqaUüe:°tre »V est b, h cha'eurdu Cttur. ncore- cest que le fro.d n'empfche p» 27 i : li ■• pris les tics des habitants du pays „ C1. . e en gu.se de saiutation, Le cLl <£ '* t«*7/Hon bat dans sa mam largement étalée at. rJľ lU»'01 , ...i. ... rt^rř«J n,r K ______ <*U-deSSU< "" %e deplace, porté par la rumeur convulsive?5 ř0^ maintenant en contre-plongee, les visages échdppan ^ " du corps, malS les mains et les bouches 1 wlľ au* lignes toujou r5 avec avi jite. ies i appelant je* Alors U succombe á la dévoration. II réagit au magnetisme radiations hypnotisantesqm .inciter* ä se rapprocher des lie"* du festin. II avance. II cede á ľélan qui le pousse vers ,e5Iévres et les bras nourrissant son propre désir de fusion Leurs frustrations mutuelles s'apaisent. lis oublient le long sevrage. II se repose de la froideur désabusée des siens, ráleurs pedants et víndicatifs qui l'accablent de leurs griefs et revendications. Monsieur B a :>ougé. II fronce les sourcils. Son hôte vient de lui faire une suggestion outrageante qui ne passera pas la rampe. Cherchant la formule qui porterait jusqu'á Paris, il lance ďune voix de gorge :« Vivent les Francis du Québec!» Les bras retornbent. Les visages se défont. La stupeur le gagne. II a provoqué la fin de ľextase. Dans la foule, quelqu'un maugrée : - Maudit Fran^ais !» — Et $a, dans ĽExpress, vous avez lu ? — Montrez. — U Canada n disloquera-t-il 1 ĽEumpe nauraii rien áygagner. Hisloriqument, les États-Unis nt constitute centre l'Europe, aim k Canada s'esl cré elk. Sur les billets de banáne, le portrait t'llisahtúi 11, ľune des derniéres n »»* <"*'''"' mvp ~- La monarchie leur manque. Attcune de ces affirmations n'éveiUait ma fureur icono-Ciaste- Je m'étonnais de ne ressentir ni chagrin m colére. * MAIS' A la foule, loin de la cohue, des cris, de la boUSCu, 1'éMi-t de a toul*■, ma|entendu. Dans ľlnfini ,UH, deŕľtľ ľAtlantiCue les détournements de ^ ce cote-c. ae■ i . dépjt amoureux. Nous deVP, Í^SÄSSÄSÍ gr-ndíur déchue. Nous ain^ iTnouiexistionsäPeine.Ilstnompha.ent. ions fant qu en - Moins 37° depuis un rnois, lance l'agent de bord relevant son col. Nouvelle piste d'atterrissage. Ancienne-Lorette. Monsieur B déroule son foulard de cachemire sur son ne? et quitte avec inquietude le DC 8 de la République francaise. La concentration d'Indiens refoulés dans cette municipalitě agglutinée á ľancienne capitale pourrait lui attirer une manifestation ďautochtones. Devant lui, ni plume^ tomahawks, mais une brochette de partisans fédéralistesqui agitent mollement des drapeaux unifoliés. A peine a-t-il soupiré ďaise qu'un vent glacial venu du nord lui rabat le souffle dans les poumons. Ici, le froid Iacěre. Ici, le froid décape. Qui vit et meurt dans ce pays devrait mériter la Légiou d'honneur, pense-t-il en s'engouffrant dans la limousine qui le conduira en ville. Ils roulent dans ľencaissement ereusé dans un amoncel-lement de dunes, d'arétes et de replats qui encombrent ia voie de ceinture. Au fur et á mesure qu'íls contournent la baie, il suit dans ce paysage lunaire marqué de ľempreinte glaciale, la poussée des stalactites qui pendent aux pylôr. haute tension, aux tabliers des ponts, aux piliers des waducs, aux portiqucs des hauts buildings. II tourne la téte, cen tous cotes par de gigantesques bancs de neige sculptés, t« encastres, que I'Académie francaise s'entéte ä appeler o Un latimsme périmé. Les demi-teinres et les dem>-mesure> Propices aux climats tempérés. Ä son retour, .1 sug**« rafraichir I expression. Car il est clair que toute cette b et la langue qui en decouie, est figée dans ľétau de ' congelation. e ■ -O» 29 Lue des dents. Les dim uologues ont sans dom Ä, au* 14* et 18' -des les points culmin°ř ľ" ;; terrestres. Monsieur B est súr quels ľl " !;l>i; 'J „, de nouveau ľhémisphére nord. lŮT de ffc9 53Í2nionde habitab,e- s'n restait'cet hiver ie *«£5 iľextrémité ďun promontoire, |d capitale surgit cou pr„ďunelumiére blanche f.Itree par des milliards ďannées- Se. Cette v.lle degage une eternite de bas-relief Sobtíit« stupéfiante pour qui a vécu en pays tropica, ^ Cuement du paysage tranche avec ľagitation baroque du f,rnaval ďhiver. A prox.m.te du parlement. des bonhommes ie neige coiffés de tuques rouges montent la garde devant le Palais des glaces ou de graciles duchesses, vétues de longs manteaux ďhermine. exécutent la danse dune saison en enter pour un groupe He touristes américains. Ä peine distrait par ce ballet de sylphides qui, sous des cieux plus dements, éveilleraient son désir, le dignitaire vomit les scribes qui se gargarisent d'icebergs et de banquises sans avoir jamais éprouvé la moindre engelure, la moindre morsure du froid. Autrefois, lorsqu'il trouvait entre les pages de ses livres d'aventure des Vikings congelés portant l'habit de cour, les bras croisés sur la poitrine, le visage tourné vers le ciel, il ambitionnait la relěve. Plus tard, il irait explorer les regions boréales sur un traineau tiré par des chiens sauvages. Plus tard, il chasserait le phoque, l'ours, la baleine, se nourrirait de viande crue et dormirait dans un igloo. Plus tard, il serait un héros. Plus tard est le temps de l'enfance. Aujourďhui, tout neroisme ľa quitté. II ne réve plus que de ľindispensable. Unechambre chauffée, un double scotch et des pantouřles. Ue '«our au Quai d'Orsay, lorsqu'il se sera détaché de jjvenement et se remémorera ce voyage, la rigueur du matl leur familiarité dans la réte, il comprendra pourquo. ParPna,ys re8°rgeait d'horloges et de calendriers. Pourquo. la Praľia yé,'alt rare avant dix-huit heures. Pourquoi l'on y qUait' hospitalité plutôt que la sociabilil ^^^M ^^M ^^m 30 mm/1/sontrestuj, Bien calée dans mon fauteuil, je regardais sur mon écran de television le convoi ministerial remonter \a Oande-Allée et dans ma memoire, une enfant se souyenait. El e aVait A neu pres le méme age que ie jeune Monsieur B. E le coura,, au bord de la route sur les champs durcis, redoutant |a bassine ďeau glacée dans laquelle on plongera.t ses pieds nUs děs qu'elle franchirait la porte. On l3 ferait asseoir et on baignerait les extrémités blanchies. Elle sentirait des aiguilles traverser les chairs et, avant qu'elle ait enfilé les longs bas de laine, on la persua-derait d'aller courir sur la neige pour apaiser la douleur. Obsrinee, eile refuserait. Elle se cramponnerait á sa chaise, repoussant l'horreur du mal, de tout mal, ces malheurs et lamités de la mauvaise saison : la mort des réves, la mort es fleurs, des gens, des betes. Plus tard, un jeune Francais sur le point ďépouser sa soeur serait trouvé gelé sur la route de Gaspé, au lendemain ďune effroyable tempete de neige. Elle y penserait longtemps, oublierait le dráme cíassé pármi les faits divers du journal local, puis eile en tirerait finalement un roman qui ne ressusciterait personne. Monsieur B entre au Colisee oü l'attend une foule agitée. II pense je suis ici pour regier une affaire de famille, une histoire ennuyeuse et compliquée comme Ie sont toutes les histoires de famille. De nouveau il devra emouvoir, promettre, rassurer. De nouveau il devra ruser avec ses phrases, jongler avec des expressions intraduisibles. Sous le- tropiques, les mots ŕondaient sur les lěvres avant d'etre prononcés. Ici, & se petnrienr sous la langue. Cherchant les liens qui puissent ZZJZ Cdren,Ce' P°liticlues e* linguistiques aux écarts de ľrľndľľ'eil ientend répéter: -Nous constituons une fiance . '* ^ aPPOrte ,e Salut b*'™1 de U WiTTlX*?1"' «.-'^ndonne i la JubUation empérer les exces So Senj,mentS dom il ^ ensU'ie exces. Somme de s'expliquer, prie de rati 31 symb je pas ,u de br«. ,orCÄ la derníére conference de presse, i| declare: «Ä <■" de bravoure. Comme ultime prouesse, il sauve . 5ymbioSe, II ne peut que blesser, se fourvoyer •%le pas w« absence de quatre siécles et dem, pa,' L--.tr.inrp i ommp ultimo r»*-.-,..,.,.^- -i ÍUia , diner d'adieu servi dans le Jardin d'hiver du >de Québec, il porte un toast ä leur parenté spirituelle r%neWe- " ne Peut enřremdre ou nier ^ loi du sang. Mais , nuitte sans appuyer leurs pretentions autonomistes ' 1 descendance bátarde peut l'aimer. Elle ne peut le Straindre.nisurtoutľélire. — Et qu'est-ce qu'en dit Le Figaro ? — // n'y a jamais eu de Royaume du Québec. Les Québécois sont des quétt ďauteur. -Son of a bitch! Eva est calme. Benjamin n'ajoute rien. Stefan se demande oil je veux en venir. II a lu tous ces journaux sans s'étonner ous'indigner. Dans la voiture, plus tard, il force l'attaque. — Je n'ai jamais compris pourquoi vous les considérez comme vos pires ennemis. — Comme des parents. Cest encore plus traitre. lis viennent jouer au monarque aprěs nous avoir abandonnes. — Abandonnes ? Le mot est un peu fort. - Et la canne ä sucre des Antilles préférée ä nos peaux de castor ? -La •Tu canne ď sucre, c'était le pétrole de 1 epoque er> paries aisément. Cest pas ton histoire. >e Wrestler, i| dit: «C'était un boche>. Pour le reste il ** í objectivité histonque. Celle que j'endosse quand \e "J Pas concernée. Celle qui me ŕit défaut un jour, en eioupe, lorsqu'un chauffeur de taxi prop« me urďune route oú se ttouvait, rn'assurau- 'vec J'avalai de la poussiere pendant vi Finalement ia voiture stoppa. 32 LA MA1SON TRtsj ■ on, une plaque commemorative du Québec. J'acceptai empressement. Nous existions puisque cette terre per farouchement exotique, nous reconnaissait. ngt longues minutes — Voilá ! dit-il en pointant du doígt. Je descendis. Une plaque rongée de vert de gris, datée de 1763, énoncait la clause du traité de Paris stípulant U preference de la France pour les Antilles et sa cession du Canada ä 1'Angleterre, Ma colěre montait. Cétaít pousser un peu loin la désinvolture. M'avisant qu'il ne savait peut-etre pas lire, je lui demandai de me déposer plus loin. Une cinquantaine de metres au-delá, un écriteau ařřichait Kébec. — Venez, dit-il en jubilant. Nous longeämes une bande de terre brülee, et il m'indiqua, sur la gauche, une bicoque surmontée d'une créte de coq. -Cest lá N Un compatriote, installé lä-bas depuis quatre ou cinq ans, organisait chaque dimanche des combats de coqs dont rafŕolaient les Guadeloupéens. A propos de ľarticle du Figaro, il m'eüt été facile de donner le change. Hors des livres, il m'était parfois apparu que les Francais étaient des auteurs qui se prenaient pour des personnages. Cela m'eüt été une piětre consolation. Derniers hentiers d'une langue morte, nous avions été řloués par Inistoire. Ici, i] n'y avait pas de genealogie, mais des generations. Pas de territoire, mais des terres. Pas de pa mais des paysages, des saísons, quatre prétendaient les ancien* manuels de géographie. re,tLparJÍSÍ.te de Monsieur B ne changerait rien. Nous nuerTonľJľ5 "TT™*5 de la francophonie. Nous con* oXSrt roU!er ,e rocher de Sisyphe heureux de m consacrer a un destin sublime, opiniítres dans notre re eekaHeL^Ěs Ll lansue J(> ľAmér'que. .... end, popping et parking du^ayg mér^quj amfe^. uIendemain,j'étaisáľEIysée. , -Jos appuyé au siege anachronique qui, de l'absolutisme iní regime répubhcam, avaU^garde la měrné cambrure je eux braqués sur les tapisseries des Gobelins afin f m'imprégner de i'atmosphere cérémonieuse des lieux. ,in de notre Assemblée nationale ou l'absence de protocole ľunecertaine bonhomie autorisent le laisser-aller, je pensais ?efais lache tlans le decor, la France c'est luujours Louis XIV et son amour de la dorure, le Québec Iui importe autant qu'une puce sur le dos dun elephant. Cette ambiance compassée sentait la rombiére et l'archiduc. Tout cela me rappelait les minauderies des précieuses, les roucoulades des petits marquis entrevus dans les vieux livres du grenier. Je devais vite étre saisie ďune evidence. A Montreal, nous mimions ľemphase métropolitaine et les bouches en cul-de-poule, mais un jour dans la Ville lumiere sufŕisait á síigmatiser nos insuffisances. Ä Paris, je rougissais ďun rien, J'avais honte de transporter ma petite république de neige, mon slip en nylon rose et mon attaché-case en similiter dans un pays oú les faux ont du style, et la petitesse de la ; grandeur. Confondue par mon insignifiance, je m'abimais J dans ľhumilité. Je pratiquais les vertus de la sobriété. )e cultivais le suspense de ľinédit. Mais le parti pris du silence s'avéra '"•enable. Ne pas avoir la langue bien pendue, Cétail s'nterdire la gastronomie, renoncer á la fine champagne, au °*gras truffé, aux parfums Dior, aux foulards Hermes. *»*» de la tour Eiffel, aux gloires du Pantheon a afaud OŮ rnontěrent Louis XVI et Marie-Antoinette. U f ?n řran?aiSe me paraissait ^ussi dangereusement !la bo"che que la fleur de lotus I'est aux yogis,ie to« lent, nepensez-vou!,K«M- -7----------y a,ra^tre qu'une diplomatie trop attentive... pardon... t iste, qui scmble jouer sur deux tableaux ? 34 -..... - HCl - Monsieur le Premier ministře pardon Mons«*,, president, ne pensez-vous pa* W*}*^*™ **«** *^ chose attentiste, qi _ Vous venez ďavoir la visito du Premier ministře, c;a -ous dispense d'avoir la réponse du president. Le cceur me cogne aux poignets et dans les oreilles. Toc Le president vient de désamorcer la bombe mtroduire danS la grande salle des Fetes du palais de 1 Elysee. II a séparé en deux phrases distinctes deux řonctions qu un lapsus avait, par maJadresse et non sans une certaine impertinence, confondues. La representante d'un obscur journal d'outre-mer ne ľaccablera pas de ses doléances villageoises le jouroú il convoqiie une ronřérence de presse sur les Affair« étrangěres. Quelques jours plus tôt, tandis que son Premier ministře faisait lá-bas ses classes de neige, il se trouvait en Afriqueoü il Iui était apparu que. de toutes les négritudes, la noire était la seule redoutable et la seule authentique. II reconnaissait trop, dans la these des négres blancs d'Amérique défendue par certains fanatiques montréalais, 1'atavisme inclinant á la paranoia et á la megalomanie. Aujourd'hui, il devait clore ľépopée burlesque reproduce á la television francaise, son Premier ministře arpentant le pays de Maria Chapdelaine, coifŕé d'un chapeau k la Davy Crockett. La France avait besoin d'alliés puissants, non de cousins plaintifs et revanchards. Les sommers franco-québécois avaient tous abouti au bas de laine. Cette terre maudite n'avait jamais rapporté á l'État ľor sacré des Incas et ruaS' DéS le premier 'our< la France avait fait fausse route. Elle avait découvert une fausse Amérique, une toundra ande dont on ne cessait de lui infliger la desolation. ré,Íu?UébeC nétait ?aS un Prieme universel. II était le es.cu dune 0jre coIon.a|eř Ie caj!lou trouant |e bas sanPuinVreS ,ent qui 3va,t dú copper ce reflux de con- uaľd t n» ľ' ' PlaqUaÍt ^«tre-Adantique sur les bra, loníarLt?^?8 ChaUdS le «*W*»«tnt Le capitate*" M deVant trois Guards ďařfamé*. et la France _^H TRESTLER \ eile seulc deux millions de chôm 35 furs qui réda- ,";««,;; pain, du pétro.e et du v* Onn^'3 ibarrjsser l**? ,, haie des Ha-Ha étaient des onomaton""' „ľ^a" |a baie des % „eceoraux. omatopées, non des .Cessez de pleurer, m a lance un jour dans un séminaire n jeune philosophe Suisse habille d un tee shirt balafré du mot Esprit, votre histoire, c'est une histoire de colons qui se Kattcnt contre d'autres colons.» Mourir en public est un art difficile. Je regarde mes collěgues, visages aigus, la dialectique cartesienne en poche, je parle done je suis. Un malaise ancien me taraude ľéchine. ĽAmérique précolombienne me sort par touš les pores de la peau. Je ne serai jamais des leurs, quoi que je^ dise ou que je fasse. On me répétera toujours vous avez un accent ou bien vous n'avez pas d'accent, celui du Sud parfois á la finale, non je dirais plutôt le Nord, la Bretagne ou la Normandie. Le Berri peut-étre, oui, absolument quand vous attaquez une phrase, c'est pareil. Le méme son de cloche. Le méme timbre félé de la scéne primitive. II était une fois un roi riche et puissant qui souhaitait copuler avec des sauvagesses. »On vous prendrait pourtant pour une Suédoise, m'a lancé hier un pätissier du boulevard Saint-Michel, une race pure, ca. Des sang-mélé ga se voit á l'ceil, noir comme du jais, vous avez déjá respire un Arabe ?» Au Belvedere d'Annaba, ils dansaient le charleston comme d*grands oiseaux de mer. La peau mürie d'odeurs d'eucalyp-tus, ils révaient á voix haute. Ils disaient: T'es pas Franchise, c'est quoi alors?* lis s'interdisaient de répéter la leccm apprise á l'école, nos ancétres les Gaulois, mais au-de a de la ^Jterranée, le monde leur échappait. lis s'approchaient yWar' Samir ou Mohammed. Ils m'entraínaient dans un 0vv< et nous nous abandonnions á la musique. °es eclairs frappaient la baie ou les vagues «mfljg^ Lairbrulait. Nous engloutissions de grands verres de Keb. 36 MM"SONTR rose en bravant I'indicible. Nous reřoulions |a mo empires coloniaux dans la memoire des livres pUe d*s pouvait durer. La nuit galopait. Bientôt la mer réapn ^ et claquait ses eaux sous un pan de ciel frangé de cit Laube nous trouvait écrasés autour de tables brľT' humant I'air salin, reniŕlant l'odeur du caŕe servi d" s tasses made in France. '«ns d H UR 37 Aujourďhui, par contraste, ce blane de ľhiver. Et ce soleil voilé. Dans la salle á manger de la maison Trestler, une cheminée en pierre des champs, couverte d'une larcc corniche, occupe presque tout le mur du fond. Ľätre, creusé au centre, trahit un usage quotidien. Eva en déduit que nous sommes dans l'ancienne cuisine. Elle contourne la longue table de réŕectoire entourée de chaises de pin, depose des fruits dans un plateau, s'affaire comme si eile avait toujours occupe et administré cette piece. J'imagine les demoiselles Trestler assises a cette table, propres, un peu guindées. Une odeur ranee monte de la iaiterie ou ils viennent ďécrémer le lait. Madeleine se pince les narines, attendant que le liquide mousseux ait refroidi dans la tasse. D'une voix ferme, le pere interdit de poser les coudes sur la table et de laisser des restes sur l'assiette. Ils sont quatre á lui obéir. Deux filles aux mains blanches, le tablier étalé de chaque core des cuisses. Deux garcons aux poignets rougis et aux cheveux aplatis sur les tempes. Madame Trestler apporte le hachis de pommes de terre et distribue les tranches de pore fumé que le chef de ŕamille aécoupe avec la precision ďun Chirurgien. Sa fourchette se d'nge vers les fils, servis par rang ďáge, avant de passer aux hIIf?s. La main du pere s'allonge vers le moutardier de Porcclaine. Catherine voudrait étre le moutardier. Elle VOudrai* étre désirée par cette main qui approche, touche, se &£ EIle feint' race a Impossible amour, le jeu de la fro.de ndiffé------..... ___ ■■ ■■■- ■-__■ al,p voudra ___ eint, face á I'impossible amour, lejeu rence. Mais eile sait déjá que plus tard eile vou W/ rRE 38 tantôtprendre,tantôtétrepí ■»«" que hen neso.t Sa,. en pure pert^^^^^^^^^^^^^^^ Cette strategic lui coúte. Une boule dure se f0rme sa gorge Ľappétit la quitre. Elle se cramponne á sa el)'"» "our ne pas bľsculer. Hébétée, eile les regarde, ép^g» gestes mesurés, suivant le va-et-v.ent des pojg > dessus de la nappe, le heurt des gobelets, le bruit " couteaux sur ľassiette. Elle ne supporte plus cet ďennui et de repetition dans 1 absence. Les poursuivar,, I sa dévorante exigence, eile guette la venue du désir dans leu-regard, la montée de salives chaudes sur leurs bouches E|i. soupire, ŕortifiée par ľintensité de ľattente. Mais le repas s eternise, et rien n'arrive des passions révées. J.J. Trestler parle. Personne ne l'interrompt. Personnene s'introduit dans la conversation sans étre interpellé. II essi/ ses lévres sur sa serviette, englobe la table du regard et pos ses mains de chaque côté de son couvert. Des mains puissantes qui ne l'ont jamais touchée. Jamais aimée, jamais rejointe. Sur ľauriculaire gauche, une bague torsadéecouvre le doigt le plus démuni. Parfois, eile fixe cette bague jusqu'ä ľhypnose, souhaitant briser sa force arrogante, s'approprier son eclat. Ensuite eile porterait le bijou éclaté et berceraitá vie le cceur mis á nu á la pointe de son regard. períL'TJľ 8eSteS V'elle apprit á suspendre, celui-a vole den ^^ '* nuit de ,eurs Veu*- Mais ils ne ■au rr^n,,s disem vfaut-i,sdisent -ux dont eile doľt se méfľe" Par6ntS' '" genS ^ ** ce'te maison^ConsiTT " ^ SCS convoitises, ils gouvernent á la Perfection des ijp P, ,ents' ils 'mposenlleurrythme «»fit« remplie de fr,,, r , °Ur 5 P°tasse, les écuries, la "n|« sont leur c^Tm " *** 8arnis' les plaCards bie" W- Trestler, s'y C*™J.. Mane-Anne Curtius, épouse de Lehtľatin' e" déplľe L ľ ''ord°nnance des gestes. Au Íe ,es ^orps en"',6 T015? et'« habits, raba? les dr Satlsf-ctiondudevo"r8 "dlS- ,Le «*. eile se vautre dar ------------------- 'raccomph.Unetáchesansbavures.EH _ : 39 gne ,„, .;. ™, .. pUldger# ,a cave éteiidu sa mainm.se sur les enřants, |e c„™ gren,er- Elle a egné sur Li table, le potager, I terldu sa nKiinm.se sur les enřants poux.lesouci de sa fortune et dť 1 rePutation. jť iVpoux, le souci de sa fortune et dľT Ce* le bi*n- gouvent Catherine deserte la table et sp « dedans d'elle-meme. Provocante, fermée pIL / Ugie au~ sa ,,lis0n de vivre. Dans U grand-salle eile T S°U5lraiI elobe terrestre sur une page du dictionnaire 0Ú M?™*" k % ,a sphere coupée en deux parties egales, peUp £ £* grasps, d eaux po.ssonneuses, de corps ardent, H tľ ŕmagi„e la forme, lodeur, les mouvemems S Se JX ^ pied. Ici, eile ne voit rien de ľimmensitédu monde rien d" course des chemms dans l'infinie liberie de IVir »;~ ľ ,r5e aes cnenimb uans i mrime iiberté de ľair Rien d isfaction du désir et des besoins du r«„l- j__. . Ma a satis condamnent les erriportements. oins du cceur dont ils 11s la regardeiiL Aussitôt, sa bouche se tige. lis barrent ses mots, lui imposant la suite du récit. II était une fois, le lui a-t-on assez dit, eile se lest répété si souvent, déjá dans cette histoire tout avait été prévu, fixe, arrété. Ses frěres, futurs médecins, futurs officiers, se disputeraient les épées, les médailles, les fioles, les ordonnances. Ils poliraient la bouche des canons, refermeraient les ventres ouverts, répareraient les yeux crevés. Ils transvaseraient le sang, les liquides, les excretions des corps condamnés. Et sur tant de mort et ďhorreurs, ils aceumuleraient les titres, les propriétés, Ips relations utiles. Catherine entend leur cabriolet dévaler le Chemin du Roy. Les fils Trestler honorent leur pere. Ils connaissent les traits marquants de l'histoire de France, d'Allemagne et d'Angleterre. Cela s'étale sur troís pays, deux continents, plusieurs siěcles. Cela rejoint la langue, les livres, la memoire. Cela dicte les gestes qui s'accomplissent á cette table, commande les événements qui se déroulent dans cet e ma.son. Cela exige le retrait des filles, femme, qui vivron ailleurs, porteront un autre nom, formeront une autr famille. Les parents ignorent qu'une f*""™*^*. aouceatre ä laquelle ils les destinent. L apparent ^ ^ _ d* Catherine les confond. Elle rompt le pain, ■ 40 bougent au milieu dl n visage impaSS[h| l'assierte, et ses doigts s'ouvrent et s«. fe e convenu. Paraissantquéter leurappn ,n e\^?ni i Elle les scrute. Elle les voit, mains étalées si qu'ils sapproprient, dire f je», tomme sj |'0l- - vno, devenait la prolongation de leurs doigts, |a cm, k p°5séľ ongles. Ľt cela la révulse. Üre