France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 1 III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE.......................................................................................................................... 1 III.A. ĽHERITAGE DE LA VE REPUBLIQUE ................................................................................................................................ 1 III.a.1. La Ve République. Un régime singulier ................................................................................................................. 1 III.a.2. Le moteur de ľexécutif .................................................................................................................................... 2 III.a.3. Une République de citoyens................................................................................................................................... 2 III.a.4. Une République représentative.............................................................................................................................. 3 III.a.5. Les différentes élections politiques........................................................................................................................ 3 III.B. UNE REPUBLIQUE DECENTRALISEE DANS ĽEUROPE....................................................................................................... 5 III.C. LES LOGIQUES INSTITUTIONNELLES DE LA CONSTITUTION.............................................................................................. 6 III.c.1. Un régime parlementaire....................................................................................................................................... 6 III.c.2. Un exécutif bicéphale ............................................................................................................................................ 7 III.c.3. Un Parlement amoindri ......................................................................................................................................... 9 III.c.4. Le Conseil constitutionnel ................................................................................................................................... 11 III.D. UNE VIE POLITIQUE SOUS INFLUENCE INSTITUTIONNELLE ............................................................................................. 12 * République française s'ancre dans une histoire institutionnelle longue et mouvementée. * La Révolution de 1789 s'est avérée incapable de doter la France ďinstitutions en adéquation avec les principes proclamés, - notamment par la Déclaration des droits du 26 aot 1789 qui fait par exemple de la séparation des pouvoirs la base de tout projet constitutionnel. - Elle a expérimenté de nombreux régimes, de la monarchie parlementaire la Ire République conventionnelle et la dictature napoléonienne devenue monarchie impériale, qui tenteront en vain de s'implanter au XIXe sicle. Il a fallu attendre le dernier tiers du XIXe sicle pour que la République s'enracine dans un régime parlementaire marqué par la toute puissance des assemblées. - Ce régime, malgré ľeffondrement de 1940, fut reconstitué ľidentique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. * La IVe République, caractérisée par une grande instabilité institutionnelle, n'ayant pas survécu aux guerres coloniales (Indochine, Algérie), la France s'est dotée en 1958 ďune Constitution qui n'est dépassée en longévité que par les lois constitutionnelles de la IIIe République. * Sous ľimpulsion du général de Gaulle, la Ve République a refondé le régime parlementaire en rééquilibrant les institutions, afin de donner ľÉtat les moyens ďune action long terme qui résiste aux contingences politiques. La Ve République est donc ľhéritire de la tradition républicaine tout en tentant la synthse entre les régimes qui se sont succédé en deux sicles. III.a. Ľhéritage de la Ve République III.a.1. La Ve République. Un régime singulier Ľhistorienne Michelle Perrot souligne qu'en France depuis la IIIe République [1870-1940], la femme est admise [dans la vie politique] comme symbole mais sans présence réelle . Avec pour la premire fois une femme ďun grand parti prétendant la présidence de la République Ségolne ROYAL pour le Parti socialiste - Marianne entre enfin dans ľarne , ajoute-t-elle. France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 2 Voulue par le général de Gaulle, la Ve République, fondée en 1958, apparaît comme une exception dans le paysage des démocraties modernes, empruntant la fois au modle parlementaire et au modle présidentiel. Le régime français est ainsi souvent qualifié de semi-présidentiel. Succédant aux IIIe et IVe Républiques, marquées par la faiblesse du Président (héritage ďune méfiance envers le pouvoir personnel depuis la monarchie et ľempire napoléonien), ľinstabilité gouvernementale et la suprématie du Parlement, la Constitution de 1958 confre au président de la République des pouvoirs sans précédent et un rôle prééminent dans le fonctionnement institutionnel. Élu au suffrage universel direct par le peuple français, partir de 1962, le Président est ľhomme de la nation, gardien des institutions, garant de ľintégrité du territoire et de la continuité de ľÉtat ; il se situe ainsi au-dessus des partis et peut faire appel directement au peuple en organisant, par exemple, un référendum. Mais il est aussi le chef de ľexécutif, qui donne les grandes orientations de la politique mise en oeuvre par le gouvernement et le Premier ministre, qu'il choisit traditionnellement au sein du groupe majoritaire au Parlement. S'il peut dissoudre ľAssemblée nationale, celle-ci ne peut pas le renverser, mais seulement censurer le gouvernement, qui maîtrise ľagenda parlementaire. III.a.2. Le moteur de ľexécutif Avec Charles de GAULLE, puis Georges POMPIDOU, Valéry Giscard ĎESTAING, François MITTERRAND ou Jacques CHIRAC, le président de la République est devenu le véritable moteur du pouvoir exécutif. Seules les périodes de cohabitation avec une Assemblée dominée par ľopposition (1986-88 et 1993-95 sous la présidence de François Mitterrand, 1997-2002 sous la présidence de Jacques Chirac) voient son influence réduite et la direction de ľexécutif confiée au Premier ministre issue ďune majorité opposée son camp. Sur la scne internationale, le Président incarne la France, dont il est le plus haut représentant. Il négocie, ratifie et veille au respect des traités. C'est le principal responsable de la défense et de la diplomatie (son domaine réservé ), en coordination avec le gouvernement. C'est lui qui nomme les ambassadeurs de France ľétranger et accrédite leurs homologues étrangers en France. Il est le chef des armées et le seul responsable de ľarme nucléaire. Ainsi, le régime actuel (contesté ces dernires années par certains qui appellent la fondation ďune VIe République mieux équilibrée) penche nettement en faveur de ľexécutif et rompt avec des décennies de régime ďassemblée . Constitué de ľAssemblée nationale (577 députés élus au suffrage universel direct) et du Sénat (321 sénateurs élus par un collge de grands électeurs représentant les collectivités locales et les Français de ľétranger), il reste au Parlement la mission de voter les lois, ďapprouver les budgets de ľÉtat et de la Sécurité sociale1 , et de contrôler ľaction du gouvernement ( travers des missions ďinformation ou des commissions ďenqute notamment), avec qui il partage ľinitiative de la loi. Les textes sont examinés et discutés par les deux chambres, tour de rôle. Ils peuvent tre modifiés (amendés) et ne sont adoptés que lorsqu'ils obtiennent une majorité de voix dans chacune des deux assemblées. Florence Raynal Journaliste III.a.3. Une République de citoyens Les hommes naissent libres et égaux en droit . La liberté et ľégalité des citoyens sont les deux principes essentiels de la citoyenneté républicaine, auxquels s'est adjoint celui de fraternité . Ils impliquent - la protection des droits individuels fondamentaux, (déj étendus ds 1789, mais dont la garantie effective devra souvent attendre), 1 Systme national ďassurances (maladie, vieillesse, accidents du travail...). France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 3 - mais aussi collectifs (qui ont été garantis partir de la IIIe République pour les droits civiques, et proclamés en 1946 pour les droits sociaux et économiques). - Ils comprennent également le principe fondamental ďégalité des citoyens devant la loi sans distinction ďorigine, de race ou de religion. Ce principe implique le refus de toute discrimination, mme positive, la seule entorse étant le principe de parité hommes-femmes pour les élections politiques. - Il est ďautant plus essentiel que ľaccs la citoyenneté est fondé sur la nationalité, acquise librement par le droit du sol. Depuis 1992, la citoyenneté française se double ďune citoyenneté européenne, qui donne aux citoyens de ľUnion européenne le droit de participer aux élections européennes et municipales. - La garantie de ces principes a été renforcée par le contrôle de constitutionnalité (ces principes étant intégrés la Constitution et donc au droit constitutionnel positif) des lois (Conseil constitutionnel) et des actes administratifs (Conseil ďÉtat). III.a.4. Une République représentative La souveraineté nationale appartient au peuple qui ľexerce par ses représentants et par la voie du référendum (article 3 de la Constitution). Si le principe de la souveraineté nationale implique la possibilité pour les citoyens de ratifier les textes constitutionnels - Constitution et révisions - et législatifs (dans un domaine trs limité : organisation des pouvoirs publics, traités ayant une incidence institutionnelle, réformes économiques et sociales) par voie de référendum (huit seulement depuis ľentrée en vigueur de la Constitution), c'est essentiellement la nature représentative des institutions qui s'est imposée en 1958 comme sous les Républiques précédentes. - La nation agit travers ses représentants, le Parlement mais aussi le président de la République. - Depuis 1958, le lien de responsabilité entre les élus et leurs électeurs s'est accru grâce au principe majoritaire aux élections, renforçant la démocratie gouvernante. - Le vote majoritaire de ľélectorat définit ľorientation politique des pouvoirs publics, et la dissolution parlementaire fait du peuple ľarbitre des conflits entre ľexécutif et le législatif. III.a.5. Les différentes élections politiques * Élections locales : o les élections municipales permettent ďélire les conseils municipaux tous les six ans ; o les élections cantonales, afin ďélire les conseillers généraux ont lieu tous les six ans. Le conseil général renouvelable par moitié tous les trois ans gre le département ; o les élections régionales qui désignent les membres du conseil régional pour six ans. * Élections nationales : o ľélection présidentielle, qui a lieu désormais tous les cinq ans ; o les élections législatives permettant ľélection des députés pour cinq ans ; o les élections sénatoriales qui ont la particularité de se dérouler au scrutin universel indirect ; un collge de " grands électeurs ", élit les sénateurs pour neuf ans. * Élections européennes : o les citoyens et les ressortissants ďun État de ľUnion européenne résidant en France élisent les députés du Parlement européen tous les cinq ans. * Référendum : o Il en existe également deux types : le référendum législatif : prévu ľarticle 11 de la Constitution, il permet au président de la République, sur proposition du gouvernement, de soumettre au peuple un projet de loi, qui peut porter sur différents sujets (les pouvoirs publics, la politique France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 4 économique et sociale de la nation et les services publics y concourant, ou autorisant la ratification de traités internationaux). Si la réponse est positive, la loi est adoptée ; le référendum constituant : prévu ľarticle 89 de la Constitution, il permet sa révision. Le référendum intervient aprs le vote, dans les mmes termes, par les deux assemblées, du texte de révision proposé. Si la réponse est positive, la révision est adoptée. Le seul référendum ayant eu lieu selon cette procédure est celui qui a porté sur la réduction du mandat du président de la République cinq ans en septembre 2000. (Source : ďaprs vie-publique.fr) France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 5 25/10/2007 III.b. Une République décentralisée dans ľEurope Conçues pour restaurer ľautorité de ľÉtat, les institutions de la Ve République instaurent un pouvoir étatique fort s'appuyant sur une administration centralisée. Prs ďun demi-sicle aprs ľentrée en vigueur de la Constitution, le cadre territorial de ces institutions est totalement bouleversé. * Ďabord au niveau international, dans la mesure o la République française a tiré toutes les conséquences de la reconnaissance, en 1946, du principe de la supériorité des engagements internationaux, sous réserve de réciprocité, sur le droit national. Ce principe a servi de base la participation de la France la construction européenne. o La France s'est intégrée, ds 1952, dans un ensemble européen de six États (RFA, Italie, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, France), les Communautés européennes, qui s'est progressivement élargi (passant quinze États membres en 1995, puis vingt-cinq en 2004) et renforcé, par traités successifs, entraînant des transferts de compétences croissants (notamment la libre circulation des personnes et des biens, ľespace juridique uniforme et la monnaie unique) des États membres vers la Communauté, qui est devenue Union européenne en 1992 avec le traité de Maastricht. La République française est désormais intégrée dans une union ďÉtats qui ont volontairement limité leur souveraineté, mais dont le systme de décision est resté essentiellement intergouvernemental. * Par ailleurs, ľÉtat s'est doté progressivement ďune nouvelle organisation territoriale. Au lendemain de la décolonisation (1960-1962), la France s'est trouvée réduite la métropole et aux départements (Guyane, Réunion, Guadeloupe, Martinique) et territoires (Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Wallis-etFutuna, Saint-Pierre et Miquelon, Mayotte) ďoutre-mer. * Le systme centralisé, articulé o sur ľadministration déconcentrée de ľÉtat, représentée par le préfet, et o sur les collectivités territoriales atomisées (36 700 communes, 100 départements), héritées de la Révolution (départements), voire de ľAncien Régime (les communes ayant ľassiette territoriale des paroisses), * a connu un profond bouleversement partir des lois de décentralisation de 1982. * Le transfert de compétences et de ressources vers les collectivités territoriales, y compris les régions, créées par le législateur, la suppression de la tutelle de ľÉtat sur celles-ci, et son remplacement par un contrôle juridictionnel de légalité et de gestion ont été les premires étapes. Elles ont été suivies par ľautonomie croissante des territoires ďoutre-mer. * Dans les années quatre-vingt-dix, le législateur a fortement incité, avec succs, les communes mutualiser leurs compétences dans des structures fédératives, comme les communautés de communes, ďagglomération ou urbaines, afin de pallier leur atomisation qui rendait inutilisables les nouveaux pouvoirs transférés des collectivités dont la majorité n'a pas 1000 habitants. o Cette évolution, conduite par la voie législative, restait fragile. La consécration constitutionnelle de ce changement ďorganisation a été effectuée par la révision de la Constitution, en mars 2003. Elle consacre le principe selon lequel la République française est décentralisée, ainsi qu'une série de rgles qui fondent cette décentralisation : la libre administration des collectivités territoriales, leur autonomie financire (et la garantie de leurs ressources), leur solidarité (péréquation), Collaboration dans la lutte contre la fraude entre ľOLAF (Office européen de lutte antifraude) et les services ďinvestigation des Etats membres. La coopération entre Etats membres de ľUnion européenne concerne de plus en plus de domaines qui touchent France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 6 leur pouvoir réglementaire et leur droit ľexpérimentation. La Constitution fait également référence au principe de subsidiarité2 , tiré du droit européen, et la démocratie locale (référendum). Enfin le principe ďuniformité, qui contraignait les collectivités de mme rang au mme statut et aux mmes pouvoirs, quelle que soit leur taille, et qui avait déj été battu en brche outre-mer (statut ad hoc de Nouvelle-Calédonie) et en métropole (notamment pour Paris, ville-département, et pour la Corse, aux statuts sui generis successifs) a été abandonné. La révision de 2003 a également confirmé ľévolution de ľoutre-mer en permettant pour les départements-régions, et pour les territoires, la possibilité de se doter de statuts sur mesure. C'est donc ľensemble de ľorganisation de ľÉtat qui a été remodelée, ouvrant la voie des évolutions futures qui accentueront la diversification institutionnelle et administrative du territoire. Ľintégration européenne et les autonomies locales sont donc deux mouvements parallles qui se rejoignent pour redimensionner les fonctions et les pouvoirs de ľÉtat en construisant une nouvelle architecture institutionnelle, o ľÉtat traditionnel n'est plus qu'un échelon, le principal certes, ďun systme plusieurs niveaux. III.c. Les logiques institutionnelles de la Constitution III.c.1. Un régime parlementaire La Constitution de 1958, telle qu'elle est conçue par ses inspirateurs lors de son entrée en vigueur, est celle ďun régime parlementaire rééquilibré. * Pour la premire fois, face un Parlement nouveau bicaméral, du fait de la réévaluation du Sénat, apparaît un véritable pouvoir gouvernemental. * Celui-ci est également bicéphale, et comprend o le titulaire du pouvoir ďÉtat - le président de la République - et o le gouvernement, dirigé par le Premier ministre. * Par rapport aux Constitutions de 1875 et 1946, la Constitution du 4 octobre 1958 opre un double rééquilibrage, en faveur du chef de ľÉtat mais aussi, et c'est peut-tre la nouveauté principale - en faveur du Premier ministre. o Si le Président détient ľautorité de ľÉtat et o en assure la continuité grâce ses pouvoirs de crise (article 16 lui donnant les pleins pouvoirs et article 12 lui permettant de dissoudre ľAssemblée nationale), o s'il peut en appeler au peuple par voie de référendum, ľensemble de ces pouvoirs étant exercés sans contreseing, o s'il est le garant de la Constitution, de ľindépendance nationale et des engagements de la France, o ces pouvoirs relvent du domaine suprme de ľÉtat et n'interfrent pas avec le second domaine, celui de la gestion politique quotidienne qui est régi par les rgles du parlementarisme. * Le régime parlementaire se présente en 1958 sous la forme ďun équilibre entre le gouvernement, et non ľexécutif, qui détermine la politique de la nation (art. 20) et le Parlement devant lequel il est responsable. * Le modle parlementaire est cette fois britannique : o le pouvoir réglementaire3 est élargi par la limitation du domaine de la loi (art. 34) et surtout 2 Principe de subsidiarité, qui limite les pouvoirs de la Communauté européenne considérés comme subsidiaires (1o ) par rapport ceux des États membres et des régions. France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 7 o les rgles dites du parlementarisme rationalisé qui, brisant la tradition du régime ďassemblée, font du gouvernement le maître du jeu parlementaire avec la maîtrise de ľordre du jour, le contrôle du droit ďamendement, la limitation de ľinitiative parlementaire notamment en matire financire. o Cette autorité du gouvernement est garantie par une série de mécanismes politiques : la Constitution inverse la conception mme de la responsabilité gouvernementale devant le Parlement puisque désormais le gouvernement est présumé disposer de la confiance des députés. o C'est eux de faire la preuve (art. 49) qu'elle n'existe pas, la motion de censure4 ne recensant que les votes hostiles. * Par ailleurs, ľAssemblée nationale vit sous la menace de la dissolution, épée de Damocls, désormais dispensée de tout contreseing5 et laissée ľappréciation souveraine du président de la République. * Enfin, la Constitution de 1958 innove en créant le Conseil constitutionnel. Cette institution, qui n'est ľorigine qu'une pâle copie des cours constitutionnelles allemande et italienne, est instaurée dans un but précis : veiller maintenir le Parlement dans son domaine législatif travers le contrôle de constitutionnalité des lois. * Ľéconomie de la Constitution est donc originale : ľancien régime parlementaire est bouleversé du fait de ľamputation du pouvoir ďÉtat confié au président de la République et du rééquilibrage du domaine parlementaire au profit du gouvernement. Cette modification fondamentale ľencontre des traditions politiques nécessite une série ďajustements entre les différents pouvoirs : Président et gouvernement, Sénat et Assemblée, gouvernement et Parlement, qui ne pourront venir que de la pratique, c'est--dire des acteurs politiques et des rapports de force qui s'établiront entre eux. III.c.2. Un exécutif bicéphale Le président de la République et le Premier ministre, chef du gouvernement, constituent, sous la Ve République, un tandem original. ( Sous les Républiques précédentes, ľexécutif était déj bicéphale mais au Président, représentant symbolique de ľÉtat, dépourvu de pouvoirs réels, faisait pendant un président du Conseil chef de ľexécutif mais bridé dans ses fonctions par la toute-puissance du Parlement. ) Cette fois, la Constitution de 1958 a renforcé les pouvoirs des deux organes : * le terme mme ďexécutif disparaît au profit de gouvernement, afin de bien marquer ľautonomie par rapport au Parlement : * chef de ľÉtat et gouvernement disposent chacun ďun domaine propre, le premier le pouvoir ďÉtat, le second le pouvoir gouvernemental. * Le pouvoir ďÉtat comprend o le respect de la Constitution, o la garantie de ľindépendance nationale et o du respect des engagements internationaux, o la défense de la continuité de ľÉtat et o ľarbitrage au-dessus des contingences politiques (art. 5) ; * le pouvoir gouvernemental consiste o déterminer et conduire la politique de la nation (art. 20) travers ľimpulsion de la législation, et o son exécution par les administrations civiles et militaire ; mais ces deux pouvoirs sont étroitement imbriqués pour deux raisons : 3 nařizovací moc 4 Dr. constit. Motion de censure : proposition par laquelle ľAssemblée nationale met en cause la responsabilité du gouvernement (cf. Question* de confiance). Voter, déposer une motion de censure. 5 Dr. Deuxime signature destinée authentifier la signature principale, ou marquer un engagement solidaire ( contresigner) Hôtel de Matignon, Résidence du Premier ministre, Paris. Présidence de la République France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 8 la premire est la codécision sur presque tous les domaines : si ľon excepte le recours aux pouvoirs de crise de ľarticle 16 et la dissolution de ľAssemblée, les décisions du Président nécessitent, soit une proposition préalable du Premier ministre (référendum, révision), soit son contreseing. A ľinverse, les principales décisions gouvernementales étant prises en Conseil des ministres, le président de la République, qui le préside, approuve donc son ordre du jour, ce qui lui donne un droit de veto, il signe les décrets et ordonnances qui y sont délibérés, ce qui le fait participer au pouvoir gouvernemental ; la seconde est ďordre politique : le président de la République nomme le Premier ministre et cette nomination présente un contenu politique évident lorsque le Président et ľAssemblée nationale ont été élus par la mme majorité électorale, ce qui a été le cas le plus souvent depuis 1958. o La codécision institutionnelle est alors doublée ďune codécision politique qui peut tre plus ou moins étroite suivant que les deux personnages appartiennent ou non au mme parti. * Principe de Cohabitation o Les sommets de ľÉtat ont donc leur tte un pouvoir bicéphale, chacun des deux organes a une fonction spécifique, mais qui nécessite une coordination défaut ďune connivence. Cela explique les difficultés qui ont pu se produire chaque fois que, du fait de la non-concidence des majorités présidentielle et parlementaire (1986-1988, 1993-1995, 1997-2002), Président et Premier ministre ont défendu des orientations opposées. Les deux pratiques possibles des institutions ont donc dépendu de la nature des rapports Président/Premier ministre, ľautorité institutionnelle et politique du premier sur le second s'imposant en cas de concidence des majorités et conduisant une pratique présidentialiste, la suprématie de fait du second s'imposant en cas de non-concidence et permettant une pratique parlementaire. A partir des prérogatives6 institutionnelles qui lui sont données par la Constitution, les textes législatifs et réglementaires ou le protocole, le chef de ľÉtat peut se trouver dans des rôles trs différents. 1. Le premier est celui du président tout-puissant, la fois autorité constitutionnelle et autorité politique. Cette toute-puissance se produit lorsque le Président dispose non seulement ďune majorité qui le soutient ľAssemblée mais également du contrôle total du parti majoritaire. Ce fut le cas pour le général de GAULLE, qui pouvait compter sur la fidélité inconditionnelle de ses partisans, puisqu'il était le chef charismatique et le fondateur du mouvement gaulliste. Ce fut le cas également de Georges POMPIDOU, patron incontesté de la nouvelle génération de gaullistes arrivés ľAssemblée la suite des élections législatives de 1968. On retrouvera cette situation lors de la premire législature sous François MITTERRAND (1981-1986). La situation s'est reproduite au profit de Jacques CHIRAC en 1995-1997 et depuis 2002. (Dans ce cas le Président dispose ďun double circuit de pouvoir : celui de ľÉtat et celui du parti majoritaire, pouvant jouer tantôt sur ľun, tantôt sur ľautre. Dans une telle situation, les pouvoirs du Premier ministre, qui n'a pas ďautorité politique propre sur le parti et ses élus, sont singulirement amoindris. ) 2. Le deuxime est celui du président qui dispose du soutien ďune majorité parlementaire mais qui ne la contrôle pas totalement sur le plan politique. Ce fut le cas, en 1974, de Valéry Giscard ĎESTAING, qui, faute ďavoir dissous ľAssemblée au lendemain de son élection, voit ses partisans minoritaires au sein de celle-ci et va devoir composer avec la formation gaulliste reprise en main par Jacques Chirac. Si cette situation n'amoindrit nullement le pouvoir présidentiel, elle gne considérablement celui du Premier ministre, qui peut de facto tre contesté dans ses fonctions de chef de la majorité parlementaire (ce dont se plaindront successivement J. Chirac, en butte aux giscardiens, puis Raymond Barre, aux prises avec ľopposition des 6 Výsada, přednostní právo France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 9 chiraquiens) et doit user des dispositions constitutionnelles, faute de pouvoir se reposer sur des relais politiques srs. On retrouve cette situation sous le second septennat de F. Mitterrand : outre ľabsence de majorité absolue au profit des socialistes ľAssemblée, qui donne au Premier ministre une marge de manoeuvre pour nouer des alliances de conjoncture, le Président n'a pu utiliser cette fois le relais du Parti socialiste (PS), ses partisans en ayant perdu le contrôle ds le lendemain de sa réélection. Le double circuit de décision de 1981-1986 n'a pas pu se reconstituer et la prise de distance critique du Président (vis--vis de son Premier ministre, Michel Rocard, en 1988-1991, et de son parti, jusqu'en 1995) a amoindri ses relais politiques et dans ľopinion. 3. Le troisime est celui du président qui ne dispose pas de majorité parlementaire (régime dit, selon la formule théorisée par Édouard Balladur ds 1983, de " COHABITATION ") mais garde les moyens de défendre ses prérogatives institutionnelles. Ce fut le cas de F. Mitterrand de 1986 1988. Disposant ďun " pré-carré constitutionnel ", qu'il avait défini ľavance (diplomatie, défense, droit de veto sur les signatures et nominations en Conseil des ministres), F. Mitterrand a ďautant mieux défendu ses pouvoirs qu'il disposait ďun puissant relais ľAssemblée (avec le groupe parlementaire socialiste sauvé par la représentation proportionnelle), au Conseil constitutionnel (dont la majorité des membres ne lui était pas hostile, en raison de leur nomination) et dans ľopinion du fait de sa candidature un second mandat. Le Président s'est ainsi forgé un statut politique original : ďune part président constitutionnel, mais de ľautre chef de ľopposition au gouvernement. Face lui, le Premier ministre, chef du gouvernement et chef de la majorité parlementaire, dispose des pouvoirs ďun chef de gouvernement parlementaire mais doit composer avec un président qui utilise contre lui ses pouvoirs constitutionnels, au risque de la paralysie de ľexécutif. Cette situation s'est reproduite entre 1997 et 2002 mais dans une situation plus complexe pour J. Chirac, alors président de la République, dans la mesure o la cohabitation a duré cinq ans. 4. Le quatrime est celui ďun président réduit aux acquts7 des textes constitutionnels, ce qui fut le cas de F. Mitterrand de 1993 1995. Ne disposant plus de ľarme psychologique de la candidature un nouveau mandat (il finissait le second septennat, amoindri physiquement par la maladie), ne pouvant compter sur des relais parlementaires (le groupe socialiste avait été laminé par le systme majoritaire) ou politique (perte de contrôle du PS) et ayant face lui un Premier ministre tout-puissant (car la tte ďune majorité parlementaire pléthorique), le Président a d opter pour une lecture minimaliste de ses prérogatives constitutionnelles (" partageant " ses pouvoirs diplomatiques et de défense, ne résistant gure lors des révisions constitutionnelles) et rendant au Premier ministre ľintégralité des pouvoirs gouvernementaux. Les rapports président-gouvernement sont donc étroitement tributaires8 des rapports de force politiques tels que les élections présidentielles, et surtout législatives les dessinent. Fort de la légitimité que lui donne ľélection populaire, le Président peut exercer en toute situation ses prérogatives constitutionnelles. Il a également la possibilité - par la dissolution ou le calendrier électoral, comme en 2002 - de façonner une majorité parlementaire qui lui donnera un gouvernement appliquant sa politique. III.c.3. Un Parlement amoindri Le constituant de 1958 a opéré une réduction radicale de ľinfluence du Parlement, centre de la vie politique et unique source de la légitimité dans les régimes parlementaires antérieurs. Significativement, la 7 Společné jmění 8 Závislý, odkázaný, poplatný Séance de ľAssemblée nationale. Les séances sont présidées par le président de ľAssemblée nationale ou par ľun de ses six vice-présidents élus chaque année et qui représentent pour ľensemble des groupes politiques. Le public y assiste dans les tribunes. F. de La Mure / M.A.E. France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 10 Constitution le ramne au troisime rang des organes constitutionnels, aprs le président de la République et le gouvernement. Cette perte de prestige est le reflet ďune série de transferts de pouvoirs, la fois constitutionnels et politiques, mais aussi ďun affaiblissement de la fonction parlementaire qui n'est pas spécifique la France, mme si elle y est plus prononcée qu'ailleurs. Quatre phénomnes ont contribué au déclin du Parlement depuis 1958. 1) Le premier est lié sa fonction représentative : le Parlement n'est plus ľunique expression politique de la nation. a. Outre la concurrence victorieuse de ľélection présidentielle, o le taux de participation est nettement plus élevé, b. le Parlement doit tenir compte de la mesure régulire de ľélectorat par les consultations qui se succdent et relativisent les élections législatives. c. Surtout, la mesure de ľopinion publique, réelle ou supposée, travers les sondages sur les sujets ďactualité et la popularité du personnel politique a ôté au Parlement cette dimension. d. Les élections législatives donnent la possibilité, grâce au scrutin majoritaire, de dégager une majorité politique pour gouverner, elles ne figent pas pour cinq ans ľétat de ľopinion : celui-ci a changé ds le lendemain des élections, et les sondages permettent désormais de suivre quotidiennement son évolution. 2) Le deuxime est lié sa fonction politique : a. la décision politique n'est plus prise au Parlement mais dans la sphre exécutive, soit sous ľégide du Président, soit sous celle du Premier ministre. C'est l que s'élaborent, se négocient et sont entérinées les grandes politiques, mais aussi celles qui réclament une décision rapide, ce que le Parlement, ľheure de ľinformatique, n'est pas en mesure de réaliser. b. Il n'est pas étonnant que les groupes ďintért se soient transférés du Parlement vers les cabinets ministériels, n'intervenant auprs des Chambres que de façon résiduelle. 3) Le troisime est lié sa fonction normative. a. Le Parlement a vu le domaine de la loi amputé par la Constitution (art. 37) au profit du rglement ; mais cette amputation, plus fictive que réelle, est moins grave que b. le transfert de ľinitiative législative au gouvernement : la trs grande majorité des lois est ďorigine gouvernementale et le gouvernement a désormais les moyens ďimposer au Parlement le vote de ces textes en ľétat, les parlementaires étant réduits négocier des amendements. Par ailleurs, le domaine de la loi est limité par les transferts de compétence ľUnion européenne, qui concerne désormais la majorité du domaine législatif, o les décisions sont prises dans des instances intergouvernementales, avec un contrôle limité du Parlement européen et quasisymbolique des parlements nationaux. 4) Le quatrime est consécutif la régression du droit parlementaire. a. Alors qu'avant 1958 les Chambres étaient maîtresses de leurs rglements qui codifiaient leur droit interne, mais aussi ľessentiel de la procédure législative, au point de les utiliser parfois contre le texte constitutionnel, X la Constitution de 1958 a introduit un triple verrouillage. i. Ďune part, la Constitution fixe elle-mme les principales rgles concernant ľorganisation du Parlement et la procédure législative, qui France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 11 constituent les principes de ce qu'on qualifie de " parlementarisme rationalisé ". ii. Ďautre part, la Constitution renvoie pour les modalités ďapplication de ces principes des lois organiques, adoptées sous forme ďordonnances par le gouvernement durant les quatre premiers mois qui ont suivi la promulgation de la Constitution (art. 92). Le Conseil constitutionnel a intégré ces lois organiques au bloc de constitutionnalité auquel le Parlement ne peut se soustraire. Enfin les rglements mmes des Assemblées ont été soumis au contrôle de constitutionnalité du Conseil constitutionnel avant leur entrée en vigueur, et ce contrôle n'a pas été de pure forme. Les tentatives de restauration ďun pouvoir ďinitiative résiduelle des années quatre-vingt-dix/deux mille ont surtout concerné le droit ďamendement. Ľautonomie parlementaire a donc été réduite. Faute ďespérer retrouver son rôle passé, le Parlement est la recherche de nouvelles fonctions, notamment de contrôle, que traduisent les efforts de rénovation entrepris ľAssemblée nationale et, un degré moindre, au Sénat, ainsi que la nouvelle loi organique relative aux lois de finances qui redistribue le pouvoir financier entre le gouvernement et le Parlement, et donne ce dernier un droit de regard et ľassocie ľexécution du budget. III.c.4. Le Conseil constitutionnel Jusqu'en 1958, le contrôle de constitutionnalité des lois n'existait pas en France. Contraire la tradition de souveraineté de la loi, le principe mme de ce contrôle était étranger la conception républicaine des institutions. S'il s'est progressivement imposé, c'est qu'il a pu bénéficier de ľopportunité de la création du Conseil constitutionnel, organe créé ľorigine pour veiller ce que le Parlement ne sorte pas du domaine qui lui avait été attribué ( ľexemple du Sénat contrôlant la constitutionnalité des lois votées par le Corps législatif sous les empires napoléoniens), mais aussi de ľémancipation progressive de cette instance, dont ľévolution rappelle, avec plus de rapidité, celle du Conseil ďÉtat : lui aussi, formé au départ de légistes, conseillers juridiques de ľexécutif, il s'était progressivement transformé en juridiction et avait assis son indépendance travers le développement du contrôle de légalité des actes administratifs. Ce contrôle s'est étendu en référence des " principes généraux du droit " dégagés de façon prétorienne par la jurisprudence du Conseil ďÉtat depuis 1913 (arrt Roubeau) et il a connu dans les décennies ďaprs-guerre, et jusque dans les premires années de la Ve République, un développement considérable. Les premires années du Conseil constitutionnel - qui concident avec la présidence de Charles de Gaulle - ont été marquées par une grande discrétion et ľalignement du Conseil sur la vision gaullienne des institutions : mise au pas des velléités ďindépendance des assemblées par une censure stricte sur leurs rglements, passivité face ľutilisation extensive de ľarticle 16 (au-del de la durée nécessaire) ou ľutilisation de ľarticle 11 lors de la révision constitutionnelle de 1962. Il a fallu attendre la présidence Pompidou pour que ľémancipation se produise, marquée par la décision - juridiquement et politiquement capitale - du 16 juillet 1971, censurant une loi ďorigine gouvernementale qui limitait la liberté ďassociation par le contrôle préalable de ľautorité administrative lors de leur constitution. Cette décision, qui censurait en fait le gouvernement sur un sujet symbolique, faisait référence une conception élargie de la Constitution intégrant le Préambule de celle-ci dans le droit constitutionnel positif. Le Conseil s'est ainsi donné les moyens ďun contrôle de constitutionnalité élargi, s'appuyant sur un ensemble de principes tirés de la Déclaration des droits de ľhomme et du citoyen de 1789, du Préambule de la Constitution de 1946, et notamment les " principes fondamentaux reconnus par les lois de la République " visés par le Préambule, adaptation des " principes généraux du droit " élaborés par le Conseil ďÉtat. France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 12 Cette évolution a été renforcée par la révision constitutionnelle de 1974 qui, en ouvrant la saisine9 aux parlementaires, et en fait ľopposition parlementaire, a rendu la saisine du Conseil systématique, faisant de celui-ci ľinstance ďappel contre la législation élaborée par la majorité et transférant la bataille politique sur le terrain du droit. Ľévolution était risquée pour le Conseil constitutionnel ; mais celui-ci, tout en tirant parti de ce pouvoir accru pour s'affirmer comme le régulateur de la vie politique en contraignant les gouvernants successifs, notamment lors des alternances des années quatre-vingt, respecter les principes politico-juridiques contenus dans la Constitution (par exemple lors de la controverse sur les nationalisations ou les privatisations dans les années 1981-1988), a réussi éviter de devenir une " troisime Chambre " tranchant les conflits politiques entre majorité et opposition. III.d. Une vie politique sous influence institutionnelle * Ľun des principaux effets de ľinstauration de la Ve République a été le bouleversement de la vie politique traditionnelle. * Ľobjectif du général de GAULLE était de réduire ľinfluence des partis travers ce qu'il pensait tre ľinstrument de leur action : le Parlement, mais le systme de partis a été bien plus bouleversé par ďautres innovations institutionnelles ou politiques. * Ainsi, les années 1958-1974 ont été marquées par ľadaptation des partis aux nouvelles institutions, et notamment la primauté présidentielle, consacrée par ľélection du Président au suffrage universel. * Les partis se sont divisés entre eux, et en leur propre sein, sur le ralliement ou non cette primauté. o A droite, les indépendants se divisent, et une partie ďentre eux conduits par Valéry Giscard ďEstaing se rallient la République présidentielle, les autres disparaîtront. o Le centre, qu'il soit démocrate-chrétien (MRP) ou lac (radicaux), est son tour marginalisé, faute de se rallier, y compris lors de situations favorables comme la candidature ďAlain Poher ľélection présidentielle de 1969. o A gauche, ľémergence de François Mitterrand la tte du Parti socialiste aprs ľélimination de ses rivaux successifs dans la gauche démocratique (Pierre Mends France, Guy Mollet, Gaston Defferre) est la conséquence directe ďune stratégie présidentielle bâtie méthodiquement partir de sa premire candidature o il affronte le général de Gaulle en 1965. A ľinverse, la candidature épisodique du Parti communiste (PC) cette élection, malgré le bon score de Jacques Duclos en 1969, contribuera rendre son électorat plus volatile. * Ľarchitecture constitutionnelle de la Ve République mne une simplification du jeu politique, avec la disparition des vieux partis parlementaires, et ľémergence de partis nouveaux ou totalement rénovés, qui font de la conqute du pouvoir présidentiel ľaxe de leur stratégie : gaullistes, socialistes, républicains indépendants, qui fusionnent avec ce qui subsiste du centre-droit pour constituer ľUDF en 1978, occupent le devant de la scne dans les années soixante-dix/quatre-vingt, flanqués des seuls communistes qui pallient leur faiblesse stratégique par ľutilisation de leurs relais sociaux (syndicats) et leur alliance avec les socialistes, jusqu' leur déclin parallle celui du monde communiste. * A ces facteurs institutionnels s'ajoutent ceux liés au mode de scrutin. o Le systme électoral majoritaire deux tours, durci en 1978 pour les élections législatives par la nécessité ďobtenir 12,5 % des inscrits10 au premier tour pour accéder au second, réduit de façon drastique le nombre des compétiteurs : gaullistes et giscardiens droite, socialistes et communistes gauche, puis socialistes et gaullistes partir des années quatre-vingt lors des élections législatives et présidentielle. 9 Prérogative, ouverte un organe ou une personne, de saisir un autre organe ou une autre personne afin de faire exercer ses droits. 10 Les inscrits. Pourcentage de votants par rapport aux inscrits (sur les listes électorales). France III. INSTITUTIONS ET VIE POLITIQUE Ministre des Affaires étrangres 13 o Le cumul des effets de ľélection présidentielle, qui réduit la compétition deux candidats au tour décisif, chacun devenant le leader de son camp, et o des élections législatives, o le duel est la rgle dans la plupart des circonscriptions au second tour, aboutit au résultat que souhaitait Michel DEBRE lorsqu'il proposait ľintroduction du systme électoral britannique (majoritaire uninominal un tour) pour réduire les termes de la compétition politique. * Si cette simplification, jusqu'alors inconnue en France, du systme de partis n'a pas totalement abouti, c'est que, durant les années quatre-vingt, les rgles du jeu électoral changent. o Alors que le systme était resté depuis 1958 de type majoritaire toutes les élections, la représentation proportionnelle fait progressivement son apparition. Introduite pour ľélection des députés français au Parlement européen en 1979, elle est étendue aux élections municipales, dans un systme mixte dominante majoritaire, en 1983, aux élections régionales et législatives (le temps ďun seul scrutin pour ces dernires) en 1986. Cette multiplication des élections - mme moindre enjeu - se déroule selon un systme qui favorise ľémiettement du vote, et de la représentation, et permet ľémergence de formations protestataires (le Front national, qui sort ľextrme droite de la marginalisation qui était son sort depuis la fin de la guerre ďAlgérie partir des élections européennes de 1984, et une nouvelle extrme gauche, souvent trotskiste, qui se développe sur les décombres du PC dans les années quatre-vingt-dix) ou " antisystme " (des écologistes aux chasseurs). o Elle va ainsi contrecarrer la tendance dominante la simplification et redistribuer en partie les cartes. o Ľusure des grands partis, qui ont réussi cependant assurer le renouvellement de leur leadership respectif, et le désintért ďune part croissante de ľélectorat ont accéléré la constitution ďune vie politique deux vitesses. Les grands partis monopolisent la compétition pour le pouvoir ďÉtat, alors que les formations antisystme se taillent une part croissante de la représentation aux élections moindre enjeu, régionales et européennes, et font parfois des incursions dans les " grandes " élections comme ľélection présidentielle de 2002 o Jean-Marie Le Pen, leader du Front national, accde au second tour en profitant de ľeffondrement du candidat socialiste, suite la dispersion des voix sur les autres candidats de gauche. * La Ve République approche du demi-sicle ďhistoire et son évolution a été considérable depuis son origine, sous ľeffet des mutations de son environnement international, de son assiette territoriale, de ľévolution des comportements des citoyens-électeurs et des acteurs politiques - partis et leaders. * Toutefois, ses caractéristiques essentielles demeurent, qu'il s'agisse du systme de représentation et de décision ou de la garantie des droits, ou surtout de sa grande facilité ďadaptation tous les contextes, résistant ainsi aux crises politiques et sociales comme aux alternances. * Considérée ľorigine comme taillée la mesure ďun personnage exceptionnel, le général de Gaulle, la Ve République lui a survécu en s'adaptant, mais aussi en diffusant en France une culture politique nouvelle qui réussit la synthse des régimes nombreux qui se sont succédé depuis la Révolution.