Deuxiéme Partie FUNCTIONS Ghapitre V SUJET Relevez et expliquez les cas ďinversion du sujet dans le texte suivant: 1 II se tut encore quelques instants, comme désireux de plonger plus avant, puis reprit: « Tu ťétonnes que je me sois crevé les yeux ; et je m'en étonne moi-méme. Mais, dans ce geste, inconsidéré, cruel, peut-ětre y eut-il » 5 encore autre chose : je ne sais quel secret besoin de pousser ä bout ma fortune, de rengréner sur ma douleur et ďaccomplir une héroique des-tinée. Peut-étre ai-je pressend vaguement ce qu'avait ďauguste et de * rédempteur la souffrance ; aussi bien répugne á s'y refuser le héros. Je * crois que c'est lá que s'afíirme surtout sa grandeur et qu'il n'est nulle 10 part plus valeureux que lorsqu'il tombe en victime, forfant ainsi la reconnaissance celeste et désarmant la vengeance des dieux. Quoi qu'il en soit, et si déplorables que puissent avoir été mes erreurs, ľétat de * félicité suprasensible oú j'ai pu parvenir, recompense amplement aujourd'hui tous les maux que j'ai du souffrir, et sans lesquels je n'y 15 serais sans doute point parvenu. «— Cher (Edipe, lui dis-je quand j'eus compns qu'il avait cessé de parier, je ne puis que te louer de cette sorte de sagesse surhumaine que tu professes. Mais ma pensée, sur cette route, ne saurait accompagner la tienne. Je reste enfant de cette terre et crois que ľhomme, quel qu'il 20 soit et si tare que tu le juges, doit faire jeu des cartes qu'il a. Sans doute as-tu su faire bon usage de ton infortune tněme et tirer parti d'elle pour ■' en obtenir un contact plus intime avec ce que tu nommes le divin. Au surplus, je me persuade volontiers qu'une sorte de benediction est attachée á ta personne et qu'elle se reportéra, selon ce qu'ont dit les * 25 oracles, sur la terre oú pour toujours tu reposeras. » André Gide, Thésée (1946), © Editions Gallimard. PREALABLES Connaissances requises Lecture: G.M.F., chap. V: «Les structures de la phrase», § 4.3.4.3., «Les sujets inverses», p. 133-139. Dans la phrase de base, le sujet est antéposé au verbe. La notion d'inversion du sujet rend compte de touš les cas oú cet ordre canonique est modifié, ä ľexception des modifications dues á des operations de topicalisation ou de thématisation. Trois types ďinversions peuvent étre distingués: ľinversion pronominale consiste en la postposition au verbe du pronom personnel sujet, ľinversion nominale en la postposition au verbe ďun groupe nominal ou ďun pronom n'appartenant pas á la caté-gorie des pronoms personnels et enfin ľinversion dite complexe qui correspond ä une reprise du sujet en position canonique par un pronom personnel postposé au verbe1. Ľinversion du sujet est plus ou moins fréquente selon le type de phrase considéré. A cet égard, le type interrogatif, oú eile est trěs fréquente et presque touj ours obligatoire2, se distingue nettement de touš les autres types de phrases, oú ľinversion du sujet se rencontre plus rarement soit parce qu'elle n'a qu'une valeur stylistique, soit parce qu'elle est conditionnée par un agencement particulier de la phrase. Dans la phrase assertive, ľinversion du sujet a parfois un role syntaxique ou énonciatif. Elle est en effet susceptible d'apparaitre comme le seul indice du caractěre subordonné d'une proposition (Pleuvait-il, il ne sortait plus). En outre, dans les incises et propositions incidentes, eile signále un décrochage syntaxique et énonciatif. Enfin, nous rappellerons qu'elle est favorisée á des degrés divers par certains types de subordonnées (relatives, temporelles, finales, concessi-ves, comparatives). 1. Et dans laquelle, par consequent, le sujet nominal lui-měme n'est pas inverse. 2. Voir, ici méme, le chapitre consacré á ľinterrogation. Repérage des occurrences Dans cet exercice, le repérage des occurrences est parfaitement evident. L'on remarque ďemblée que sur l'ensemble des huit occurrences relevées, seul le type de phrase assertif est représenté. Nous adopterons un classement fonde sur la nature de ľélément qui déclenche ou favorise ľinversion. ANALYSE PROPOSÉE 1. Inversion causée par un adverbe de modalite en position préverbale Le texte contient quatre occurrences appartenant á cette premiere catégorie : — Mais, dans ce geste inconsidéré, cruel, peut-étre y eut-il encore autre chose (1. 4-5). — Peut-étre ai-je ressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffiance (1. 7-8). — Sans doute as-tu su faire bon usage de ton infortune merne... (1. 20-21). — aussi bien, répugne á s'y refuser le héros (1. 8). Dans les trois premiers cas, ľinversion pronominale est visible-ment due á la presence, en position préverbale1, des adverbes peut-étre et sans doute. D'une part, en eŕľet, cette inversion devient incompatible avec le type assertif si l'on efface les adverbes modalisateurs : *Mais, dans ce geste inconsidéré, cruel, y eut-il encore autre chose - *lAi-je ressenti vaguement ce qu'avait ďauguste et de rédempteur la souffiance - * As-tu su faire bon usage de ton infortune merne. Ces trois phrases ne sont grammati-cales que si elles sont interprétées comme des interrogatives. D'autre part, ľinversion devient impossible si les adverbes sont places en 1. La premiére de ces quatre occurrences montre bien que la position qui com-mande ľinversion du sujet est bien la position préverbale et non la position en tete de phrase. position postverbale : *Mais, dans ce geste inconsidéré, cruel, y eut-il peut-etre encore autre chose1 - *ai-je peut-étre ressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffrance - *as-tu sans doute su faire bon usage de ton infortune merne1. En outre, lorsque ľadverbe est en position préverbale, l'inversion est plus naturelleJ : ? Mais, dans ce geste inconsidéré, cruel, peut-étre il y eut encore autre chose - ? peut-étre j'ai ressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffrance - ? sans doute tu as su faire bon usage de ton infortune méme4. Le rétablissement de la position canonique du sujet sans modification de la position préverbale de ľadverbe modalisateur requiert ľintroduction du subordonnant que: peut-étre qu'ily eut... -peut-étre que j'ai pressenti... -sans doute que tu as su faire bon usage... Or, de telies constructions ont une affinité evidente avec les phrases complexes á principále5 modalisante (il est probable qu'ily eut..., etc.), qui marquent par l'hypotaxe la distinction entre le niveau de ľénoncé et le niveau de ľénonciation. L'inversion du sujet due á la presence en position préverbale d'un adverbe modalisateur semble done avoir pour fonction ďindiquer ce merne décalage énonciatif. Et puisque la presence du modalisateur implique une suspension de la valeur de vérité6, l'inversion du sujet aurait ici une fonction comparable ä celie qu'elle a dans les phrases de type interrogatif7. 1. Nous constatons au passage que ľantéposition du GP introduit par dans ne suffit pas pour déclencher l'inversion du sujet. 2. Inversement, on notera que la position postverbale de ľadverbe modalisateur est possible si le sujet occupe la position canonique : Mats, dans ce geste inconsidéré, cruel, ily eut peut-etre encore autre chose; j'ai peut-étre ressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffiance ; tu as sans doute sufaire bon usage de ton infortune menu [...]. 3. Cette obligation semble s'etre imposee assez tardivement. Chateaubriand écrit encore (mais on connait son gout pour l'archaisme) : Peut-étre Sanson et Simon étaient specta-teurs des joies de la famílie royale (cite par Chevalier et at, Grammaire du frangais contemporam, Larousse). 4. Ľacceptabilité peut étre dans ce cas favorisée par un niveau de langue autre que soutenu et par un détachement de sans doute en těte de phrase marqué par une virgule. 5. Principále du strict point de vue syntaxique. 6. Dans la phrase Peut-étre ai-je pressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffrance, le fait que le personnage ait pressenti vaguement telle ou telle idée ne peut étre declare ni vrai ni faux, mais seulement possiblement vrai (i.e. vrai dans au moins un monde possible). 7. D'oú ľéquivalence: Peut-étre aiye pressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffrance <-> ai-je pressenti vaguement ce qu'avait d'auguste et de rédempteur la souffrance ? Peut-étre. La quatriěme occurrence se distingue assez nettement de celieš que nous venons ďétudier. Tout d'abord, il s'agit d'une inversion nominale qui ne semble pas obligatoire (aussi bien, le héros répugne á s'y refuser) et qui pourrait fort bien alterner avec une inversion complexe (aussi bien, le héros répugne-t-il á s'y refuser). D'autre part, ľadverbe joue ici le role d'un connecteur argumentatif1, ce qui, ä la difference des cas precedents, lui interdit la position postverbale (*le héros répugne aussi bien á s'y refuser)1. Mais surtout, cette inversion sur-prend par son audace : en principe, seules les inversions pronominale et complexe sont acceptables lorsqu'une inversion du sujet est seulement entrainée par la presence d'un connecteur argumentatif en téte de phrase. On accepte Encore devra-t-il deviner la suite et Encore le lecteur devra-t-il deviner la suite mais pas *Encore devra le lecteur deviner la suite. Dans le texte, le rejet du sujet en fin de phrase se justifie assez aisément sur le plan stylistique, puisque, créant un effet d'attente, cette position entraine bien sür une mise en valeur du sujet. Du point de vue syntaxique, on ne trouve en revanche de justification pour cette inversion ni dans le volume du sujet, ni dans un processus anaphorique ou il serait impliqué. Le seul facteur décisif semble ici la pronominalisation de la souffrance, qui autorise l'inversion du sujet en libérant la position postverbale. II n'en demeure pas moins que cette phrase de Gide se situe clairement aux frontiěres de la grammaticalité. 2. Inversion favorisée par un adverbe de lieu en téte de proposition (dans la phrase source) Dans la phrase Je crois que c'est la que s'affirme surtout sa grandeur (1. 9), l'inversion du sujet est due á la presence de ľadverbe la. En effet, puisque le méme type d'inversion apparait dans la proposition indépendante lá s'affirme surtout sa grandeur, c'est bien que ni la subordination (completive dependant du verbe croire) ni l'extraction 1. Comparable aux connecteurs de ľargument excédentaire d'ailleurs, du reste, etc. 2. Sauf ä changer le sens de la phrase en faisant de aussi hen un modificateur du verbe répugner. de ľadverbe ne jouent á cet égard le moindre role. Plus précisément, c'est la presence de cet adverbe en tete de proposition dans la phrase source (c'est-á-dire avant ľemphase par extraction) qui est á ľorigine de ľinversion du sujet. II est aisé de verifier que la presence de ľadverbe lá est nécessaire ä ľinversion {*s'affirme surtout sa grandeur)1 et ceci seulement pour la position en tete de proposition (*s'affirme surtout lá sa grandeur -*s'qffirme surtout sa grandeur lá). Toutefois, cette inversion ne présente pas un caractěre obligatoire : la phrase lá, sa grandeur s'qffirme surtout est une phrase parfaitement acceptable2. Nous préciserons enfin que la possibilité de ľinversion du sujet est ici liée á la valence du verbe : si ľinversion est possible, c'est aussi parce que le verbe s'affirmer est intransitif. Un verbe transitif la récuserait [lá, sa grandeur occulte sa modestie —> *lá occulte sa modestie sa grandeur). Nous constatons ainsi que ľinversion du sujet requiert la liberation de la position postverbale, au sens oú cette position ne doit pas étre occupée par un constituant saturant la valence du verbe. 3. Inversion en proposition incise La phrase Cher (Edipe, lui dis-je quandj'eus compris qu'il avait cessé de parier, je ne puis que te louer... (1. 16-17) contient une inversion du sujet (inversion pronominale) en contexte de proposition incise. Ľinversion dans l'incise est obligatoire en francais standard (*Cher (Edipe, je lui dis...). Elle peut étre nominale ou pronominale, mais ce type de contexte recuse ľinversion complexe (*Cher (Edipe, cet komme lui répon- 1. Nous considérons comme acceptable la phrase obtenue par effacement de ľadverbe lá et sans inversion du sujet (sa grandeur s'qffirme surtout), cet effacement entrai-nant seulement une modification de la portée de ľadverbe surtout. 2. La modification de la place du sujet aflecte ľorganisation thématique de la phrase par le biais de la portée de ľadverbe surtout. En effet, si ľon compare : 1 / la, s'qffirme surtout sa grandeur, et 2 / lá, sa grandeur s'qffirme surtout, il apparait que ľadverbe surtout porte prioritairement, dans la phrase 1 /, sur le GN qui le suit, sa grandeur (d'oú le sens «lá, c'est surtout sa grandeur qui s'aflirme » et ľenchainement possible avec quant ä son héroisme, c'est ailleurs qu'il s'qffirme), tandis qu'il tend á porter sur le verbe dans la phrase 2 / (ďoú le sens «lá, ce qui se produit surtout au sujet de sa grandeur, c'est le fait qu'elle s'affirme », et ľenchainement possible avec et c'est ailleurs qu'elle se développe). Mais il ne s'agit lá que de tendances. Dans un contexte adéquat, ľadverbe surtout peut fort bien porter sur ľensemble GN + GV, quelle que soit la position du sujet. dit-il...). On notera toutefois qu'ä ľoral ou en registre familier, il est possible de faire ľéconomie de ľinversion (Pierre, je lui réponds, ilfaudra bien que tu t'y fasses) ou de compenser son absence par un que subor-donnant {Pierre, que je lui réponds, ilfaudra bien..). Comme dans le cas de ľinversion liée á la presence ďun modalisateur en tete de phrase, cette derniěre construction peut étre considérée comme un mar-quage explicite du décrochage syntaxique et énonciatif signifié par ľincise et normalement indiqué par ľinversion du sujet. 4. Inversion en proposition subordonnée Le texte contient enfin trois cas ďinversion du sujet liés ä des faits de subordination, deux en relative substantive (Peut-étre ai-je pressenti vaguement ce qu'avait ďauguste et de rédempteur la souf-france (1. 7-8) - sehn ce qu'ont dit les oracles (1. 24-25)), le troisiěme en subordonnée concessive (si déplorables que puissent avoir été mes erreurs (1. 12)). Ces trois inversions sont facultatives (Peut-étre ai-je pressenti vaguement ce que la souffiance avait ďauguste et de rédempteur - sehn ce que les oracles ont dit - si déplorables que mes erreurs puissent avoir été). Dans les relatives substantives, le rejet du sujet en fin de phrase possěde visiblement une valeur stylistique : la position finale crée un effet ďattente du sujet, et par consequent participe á sa mise en valeur1. On notera ďailleurs que, dans la premiere occurrence du texte, ľinversion du sujet n'entraine pas nécessairement la position finale : Peut-étre ai-je pressenti vaguement ce qu'avait la souffrance ď auguste et de rédempteur. Finalement, puisque ľinversion est en outre facultative, nous constatons que ce type de construction se caractérise par une remarquable souplesse syntaxique. Cette relative substantive peut étre analysée comme resultant de la relativisation d'une proposition comportant une variable qui demeure insaturée (d'oú ľabsence ďantécédent) : h, souffrance a X ďauguste et de rédempteur. Or, il arrive que la presence d'un pseudo- 1. Ceci vaut pour toute relative (substantive ou non) á pronom relatif C.O.D. Encore une fois, r'est la liberation de la position postverbale (due á la relativisation) qui autorise ľinversion du sujet. 2. La variable ne peut étre saturée que par un morpheme indéfini de genre neutře comme quelque chose (la souffrance a quelque chose ďauguste et de rédempteur). complement (ici d'auguste et de rédempteur) soit incompatible avec ľinversion du sujet. Par exemple, on admettra ľinversion dans la phrase Je pense ä ce que Pierre a fait (—> J« pense ä ce qu'afait Pierre) mais pas dans une phrase comme Je pense ä ce que Pierre a fait de bien (—> *Je pense ä ce qu'afait Pierre de bien - *Je pense ä ce qu'afait de bien Pierre), qui correspond au méme type de relativisation que la phrase du texte {Pierre a fait X de bien). La possibilité de ľinversion du sujet semble done, dans le texte, étroitement conditionnée par un emploi trěs par-ticulier du verbe avoir, assimilable ä une construction attributive modalisée (la souffrance a X d'auguste et de rédempteur — la souffřance est [+ Mod.] auguste et rédemptricé). La seconde occurrence ďinversion du sujet en relative substantive est plus canonique. Elle correspond á la relativisation de la proposition les oracles ont dit X. Puisque le C.O.D. du verbe dire est repré-senté par le pronom relatif en téte de proposition, la position postverbale est libérée et peut done admettre le sujet inverse. Si cette condition n'était pas respectée, par exemple dans le cas de la relativisation de ľun des complements d'un verbe á double complementation (surtout du complement indirect), ľinversion du sujet ne pour-rait avoir lieu (Ce que les oracles ont dit ä Qídipe —> ?? ce qu'ont dit ä Qidipe les oracles - Ceux ä qui les oracles ont donne une réponse —> *Ceux á qui ont donne une réponse les oraclešf. Dans la subordonnée concessive, ľinversion est en vérité moins liée au sens concessif qu'au fait que la cause inopérante soit presentee sous une forme gradable. Aussi, une concessive non correlative permet-elle plus difhcilement ľinversion du sujet: bien que mes erreurs aient été déplorables —> ?bien que déplorables aient été mes erreurs; méme si mes erreurs ont été déplorables —> ? méme si déplorables ont été mes erreurs. Or la construction concessive en si... que entraine, sur la realisation du GV, la méme consequence que dans le cas des relatives substantives : la pronominalisation ďun constituant du GV (ici, un attribut) liběre, du fait de ľantéposition du pronom, la position postverbale. Dans la proposition si déplorables que puissent avoir été mes erreurs, le mot que peut en effet étre considéré comme un relatif pronominalisant 1. Si ľagrammaticalité n'est que douteuse dans le cas de la pronominalisation du C.O.D., e'est parce que la presence de la preposition dans le complement indirect inter-dit la confusion avec le GN sujet inverse. l'attribut du sujet déplorables1. Dans une construction qui ne laisserait pas vacante la position á droite du verbe attributif, ľinversion ne serait done pas acceptable (II est possible que mes erreurs aient été déplora-bles —> *Il est possible qu'aient été déplorables mes erreurs). On notera enfin, d'une facon plus generale, que la langue littéraire tolěre fort bien ľinversion des positions du sujet et de l'attribut adjectival dans les phrases attributives {grandefiit ma surprise - déplorables ont été mes erreurs). Dans l'ensemble du texte, comme nous l'avons constate, certai-nes inversions du sujet sont obligatoires, d'autres facultatives. En fait, á ľexception d'un seul cas2, Gide choisit toujours, lorsqu'il a le choix, la solution du sujet inverse. Mieux encore, il lui arrive d'adopter cette solution dans des constructions oú ľinversion est presque agrammaticale3. Cet évitement quasi systématique de ľordre habituel suj et-verbe confere au texte une dynamique particuliěre fondée sur les eífets ďattente du sujet. Mais eile lui donne aussi un caractěre tortueux, alambiqué, qui n'est pas sans rapport avec la solennité qui se dégage de ľextrait. 1. Sur ce point, voir G.M.F., XIII: 4., p. 488-489 et VII: 1.5.2., p. 234. 2. II s'agit du sujet de est attachée dans la phrase Je me persuade volontiers qu'une sorte de benediction est attachée ä ta personne. Ce sujet aurait trěs bien pu étre postposé au verbe : Je me persuade volontiers qu'est attachée ä ta personne une sorte de benediction. 3. Voir supra, l'analyse de aussi bun répugne ä s'y refuser le hems.