Joělle GARDES-TAMINE Knihovna FF MU Brno 2570701462 La Grammaire 2 • Syntaxe Troisiéme edition revue et augmentée ARMAND COLIN 2570701462 ■ p-. M?Sa'ykova univerzita vTrřtě ^H2!icka fakU|ta, úsfedn, Knihln. Pri ix Sign HQJLilL W+jt? Touš droits de traduction, ďadaptation et de reproduction par tous precedes reserves pour tous pays. Toute reproduction ou representation integrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le present ouvrage, faite sans ľautorisation de ľéditeur, est illicite et constitue une contrefacon. Seules sont autorisées, d'une part, les reproductions strictement réservées ä ľusage privé du copiste et non destinées a une utilisation collective et, d'autre part, les courtes citations justifíées par le caractěre scientifique ou ďinformation de ľauvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L.122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propnete intellectuelle). © Armand Colin, Paris. 2006, pour la présente impression © Armand Colin/SEJER, 2004 © Armand Colin/Masson, Paris, 1990, 1998 ISBN : 2-200-26734-7 Armand Colin • 21 rue du Montparnasse • 75006 Paris Introduction ..................................... 5 Chapitre 1. Quelques généralités ..................... 7 Chapitre 2. La phrase ............................. 31 Chapitre 3. Le verbe .............................. 83 Chapitre 4. Le syntagme nominal .................... 121 LES UTILITAIRES Testez vos connaissances .......................... 181 Glossaire ....................................... 186 Bibliographie sommaire.............................. 190 Index des notions essentielles ......................... 191 Introduction Dans ce tome 2 de La grammaire, consacré ä la syntaxe, on s'est évidemment appuyé sur les mémes principes que ceux qui Commandern le tome 1. II ne s'agit done toujours pas ďune grammaire prescriptive, mais essentiellement descriptive. Pour la terminologie, on a dans ľensemble suivi la nomenclature officielle sans pour autant s'interdire la perspective critique que ne peut s'em- pěcher ď avoir celui qui a longtemps pratique la Hnguistique, La syntaxe étant un domaine plus complexe que la phonologic la morphologie et la lexicologie abordées précédemment, il a fallu procéder ä bien des simplifications. II est clair que l'on ne trouvera ici que ľ analyse de questions jugées fundamentales et, surtout, un cadre general ou replacer le cas échéant tel ou tel probléme rencontre. Deux hypotheses sous-tendent ainsi ce travail. La premiere, c'est que, méme si un grand nombre de phénoměnes ne s'expliquent que si l'on sort de la syntaxe elle-měme pour prendre en consideration les conditions de production de ľénoncé (pragmatique et psycholinguistique) et l'insertion du locuteur dans tel ou tel groupe socioculturel (sociolinguistique). les phrases, indépendamment de la situation oil elles ont été émises, sont dotées de propriétés et de régularités descriptibles sur lesquelles peuvent s'entendre tous les locuteurs d'un groupe hnguistique donné, Ce sont ces régularités que ľon a cherché ä mettre en evidence. Depuis la premiére edition de ce manuel, se sont multipľiées les grammaires de texte, qui cherchent ä déceler et ä analyser les relations entre phrases ä ľintérieur ďun texte. La perspective adoptée ici s est pourtant résolument celie d'une grammaire de phrase. Ce n'est pas que ■o soient ignores les apports de la grammaire de texte, mais ils n'ont d'intérét que f si ľon maítrise d'abord la grammaire des phénoměnes internes ä la phrase. <° Dans ce jeu de construction qu'est la langue, on organise les sons en m morphemes, les morphemes en mots, les mots en propositions, les proposi- 2 tions en phrases, et c'est alors seulement que ľon construit le texte. On s'est ™ done contenté de prendre en consideration ľétape qui fait passer des mots aux c phrases, renvoyant ä plus tard celle qui conduit des phrases au texte. g. La deuxiěme hypothěse, c'est que tous les faits ne sont pas sur le méme s plan et qu'il existe entre eux des hierarchies, particuliérement importantes ^ pour qui s'intéresse ä la pédagogie de la langue, car il ne sert ä rien de 5 presenter des faits mineurs et compliqués ou des exceptions si les lineaments s essentiels n'ont pas été mis en place, et c'est précisément ce que ľon a voulu 0 faire ici. Pour mettre en evidence cette ossature de la langue, on s'est géné-2 ralement appuyé comme dans le premier tome sur des exemples fabriqués 1 pour leur simplicité et leur valeur illustrative. Le recours ä des énoncés relevés 6 dans des textes écrits est rare, bien qu'on ľait pratique chaque fois que cela i • La Grammaire sermettait une meilleure approche, en particulier pour tout ce qui touche la iaison de la grammaire et de la stylistique. Les linguistes et grammairiens oscillent dans ľ analyse syntaxique entre ieux positions opposées : selon la premiere, il convient de partir des notions sour examiner comment elles sont exprimées dans la langue. Selon la seconde, 1 convient de partir au contraire des faits depression. Cest plutôt cette seconde perspective qui a été adoptée ici, bien qu'on ne se soit pas ä ľ occasion interdit de recourir ä la premiere. Elles sont en réalité complémentaires. 3n a tout simplement pensé que prendre appui sur la forme se justifiait péda-»ogiquement dans un manuel élémentaire. Cest également pour cela que ľ on a adopté une terminologie simple, alors méme que les etudes ne manquent pas qui en proposent de plus adéquates : elles sont également plus compliquées. On peut espérer que nul ne taxera d'ignorance ce qui correspond ä une volonte iélibérée de simplification. Ce precis est organise comme le tome precedent: exposes suivis d'exer-:ices corrigés, et brěve recapitulation ä la fin de chaque chapitre. Les exercices ant un double but. D'une part, ils permettent de completer ľinformation iiécessairement lacunaire des exposes, étant donne les dimensions du livre. D'autre part, ils devraient permettre ä qui se donne la peine de les faire de s'entraíner ä ľ analyse grammaticale et linguistique : observation et classement des données, mise en evidence de regies et de leur domaine ď application. Les unites syntaxiques, ä la difference de celieš des domaines précédem-ment analyses, ne formant pas des ensembles clos et facilement délimitables, leur presentation se trouve répartie dans plusieurs chapitres : un index, qui était inutile dans le precedent tome, permet de pallier cette inevitable dispersion. Je remercie Y Information grammaticale qui a bien voulu me laisser reprendre et remanier les articles de syntaxe que j'ai publiés depuis 1983 dans la chronique Initiation linguistique. Je remercie également pour leurs remarques Josette Gardes et Lucien Victor qui ont relu ce tome, comme le precedent. Cette version a été revue sur des points de detail en fonction des apports récents des disciplines qui s'occupent du langage. Elle a surtout été augmentée de cinq exercices corrigés integres au sein des precedents, ďun glossaire de 68 entrees, et d'une rubrique nouvelle, Testez vos connaissances, que ľ on a jugée necessaire pour permettre aux etudiants de premiére année de DEUG ďévaluer leurs lacunes. Les etudiants plus avancés se dispenseront de la consulter. Chapitre 1 Quelques généralités MMA 1. La grammaire............................. ° 2. Definitions............................... 9 2.1. Énoncé et énonciation...............•...... 9 2.2. La phrase............................... 1° 2.3. Les unites inférieures ä la phrase............... ^ 3. Les operations utilisées dans ľ analyse syntaxique . 13 3.1. La substitution ou commutation ...........■ • • • 13 3.2. L* insertion ď elements...................... 14 3.3. Le déplacement.......................... 14 4. Les propriétés syntaxiques.................... 15 5. Les symboles utilises........................ 16 6. Organisation de ľ etude...................... 16 Lt>u Entraínez-vous: 1. Le superlatif relatif (17) — 2. Les emplois de beaucoup (18) — 3. Ľacceptabilité (20) — 4. CeluU celie, ceux (21) — 5. Le test ď insertion (23) — 6. Quelques adverbes de degré (25) __7. Ľ organisation ďun texte en phrases (27). DE CO Apres ľ etude de ce chapitre, ľétudiant doit pouvoir : a comprendre la demarche grammaticale, ses objectifs et ses principes; a connaítre les notions fundamentales de ľ analyse grammaticale (énoncé, énonciation, phrase, proposition, syntagme, mot); a manier les operations de ľanalyse grammaticale (commutation, effacement, insertion, déplacement). 8 • La Crammaire Le premier tome de ce precis traitait essentiellement du mot, ä ľexception peut-étre du chapitre sur les relations entre le lexique et la syntaxe : nous allons ici envisager la phrase et la facon dont les mots s'y enchainent et s'y combinent. On peut envisager la syntaxe soit comme un procédé de decomposition de la phrase en mots, ou méme en morphemes, soit comme un procédé de composition des mots ou morphemes en phrases. Nous ne choisi-rons pas entre ces deux facons de voir, et adopterons un va-et-vient entre le mot et la phrase. 1. La grammaire II s'agira ici de presenter la grammaire de la phrase : on cherchera ä mettre en evidence les regies qui régissent la formation des phrases soumises ä ľanalyse. Elles seront en majorite empruntées au francais standard, ce qui n'interdira pas le recours ä d'autres niveaux de langue, car ici, comme en phonologie, la variation des usages est trěs largement representee. Ľanalyse syntaxique doit comprendre deux demarches complémentaires : séparer les phrases jugées naturelles de celieš qui ne le sont pas et proposer des regies qui rendent compte de la correction de ces phrases. Sur le premier point, il convient de dire quelques mots des notions d'ac-ceptabilité et de grammaticalité. Comparons les phrases suivantes : 1. Moi vouloir toi. 2. Le chat noir est noir, le chat blanc est blanc. 3. Pour Helene se conjurent les sěves ornementales dans les ombres vierges et les clartés impossibles dans le silence astral. (Rimbaud) 4. A quelle propriété géométrique de sa courbe representative correspond le fait que la fonction inverse est égale ä sa fonction réciproque? 5. Ľéquipe de France de volley-ball s'est qualifiée hier, pour la premiere fois de son histoire, pour les Jeux Olympiques. A ľexception de la premiére, elles sont toutes bien formées syntaxiquement et ľon dira done qu'elles sont grammaticales. Cependant toutes ne sont pas également interprétables ou en tout cas ne le sont pas dans les meines conditions. 2 est tautologique et n'apporte aucune information, 4 est immédiatement comprehensible pour qui fait des mathématiques mais ne ľ est pas autrement, 3 nécessite tout un travail ď analyse et ne se comprend pas en dehors de l'oeuvre du poete. Seule 5, extraite d'un quotidien, s'interpréte en dehors de toute reference ä une situation ou ä un type de discours particuliers. Si la grammaticalité est relativement facile ä établir, il n'en va pas de méme de ľacceptabilité qui, liée ä ľénonciation, variera en fonction de chacun de nous. Nous aurons besoin de ľune et ľautre notion mais pour pallier la diffi-culté liée ä la relativite de ľacceptabilité, nous les utiliserons de facon différentielle : de deux phrases, quelle est la plus acceptable? De toute facon, le recours ä ces notions n'est pas un but en soi: les differences retenues permettront seulement de specifier des fonctionnements. Quelques généralités • 9 Quant ä la mise en evidence des regies, eile doit obéir ä quelques impéra-tifs. Les regies que ľon dégage doivent étre opératoires, c'est-ä-dire permettre de fabriquer des phrases autres que celieš sur lesquelles a porté ľanalyse et qui soient conformes ä ľintuition grammaticale, ce qui suppose que ces regies soient explicites et ne laissent pas dans ľ ombre ď elements importants. 2. Definitions Avant d'entrer dans le detail des analyses, il convient de préciser la definition d'un certain nombre de notions fondamentales. 2.1. Énoncé et énonciation Ľénoncé est un événement de parole concret et individuel. II s'agit d'un discours (ou ď une partie de discours), tenu par une personne, qui est precede et suivi d'un silence, et qui n'est pas nécessairement descriptible ou organise. Un énoncé peut done eoineider en étendue avec le discours lui-méme comme avec une partie de mot, un son isolé, une onomatopée, une bribe de phrase interrompue, etc. A proprement parier, méme si deux personnes prononcent la méme phrase, il s'agira de deux événements différents car un énoncé est un fragment de vécu, enraciné dans une situation particuliere. Ce n'est pas une unite de langue, abstraite, mais de parole, concrete, pour reprendre une opposition célěbre en linguistique. Les énoncés n'intéressent done pas le grammairien, car, dans ce domaine comme ailleurs, il n'y a de science que du general. Ou, en tout cas, ils ne ľintéressent que dans la mesure ou ils peuvent étre ramenés ä des unites linguistiques, c'est-ä-dire oü ils sont analysables en phrases. ^ Ľénoncé ressortit ä ľénonciation. Celle-ci est un acte de parole pris en 1 charge par un sujet parlant, le locuteur, dans une situation precise, acte de I parole qui aboutit ä la production d'un énoncé. Ainsi ľénoncé de presque trois 1 pages que constitue ľavant-propos des Mémoires ď'Outre-Tombe est-il le | résultat ďune énonciation de Chateaubriand, dans un temps, le 14 avril 1846, s et dans un lieu, Paris, bien precis. Bien que ľénonciation soit individuelle, le <° grammairien doit en tenir compte car e'est eile seule qui permet d'expliquer g un grand nombre de phénoměnes situés pourtant ä ľintérieur de la phrase. II ■i. s'agit alors ď en tirer des considerations générales, et non plus individuelles. 8 On peut done définir ľénonciation en disant que tout énoncé suppose un ■S anerage pragmatique, c'est-ä-dire une insertion dans la realite extralinguis- 2 tique. Tout énoncé est produit par un sujet linguistique (celui qui ditje) ä un s moment particulier, qui constitue son present, et dans un lieu donne, main-8 tenant et ici. Cette situation, ces coordonnées spatio-temporelles, que l'on z appelle deixis. imposent parfois leur marque ä ľénoncé. Par exemple, l'em-1 ploi des temps ne se comprend pas sans reference au present du locuteur par o rapport auquel il définit des époques passées et futures. Les elements que ľon 10 • La Grammaire appelle déictiques sont précisément ceux qui renvoient aux circonstances de ľénonciation : certains démonstratifs, adverbes de lieu et de temps, etc. De plus, l'ancrage situationnel se marque par les appreciations que le locuteur porte sur les événements qu'il relate {il viendra certainement, je souhaite que vous veniez, etc.) et qui constituent les modalités. On ne peut done dans une description syntaxique faire totalement ľéconomie de considerations sur ľénonciation. Cependant, il existe un noyau syntaxique, comme par exemple les fone-tions sujet ou complement direct ďobjet, ľ existence de différents types de verbes, ľenchaínement des propositions, etc., qui se définissent indépendam-ment de ľénonciation. et c'est ce noyau que ľon s'attachera ä décrire en priorite, sans pour autant s'interdire de recourir ä ľénonciation, lorsque cela s'avérera indispensable. On prendra done soin de distinguer le contexte de ľ element ä analyser, qui constitue son entourage linguistique, et la situation, qui est du domaine extralinguistique. 2.2. La phrase A la difference de ľénoncé, la phrase représente ľunité de description gram-maticale. C'est, en ľ etat actuel des connaissances grammaticales, la plus grande unite, celle qui inclut les autres, sans étre elle-méme incluse dans une unite supérieure. Les phrases s'enchainent bien pour bätir le discours, mais il n'existe aucune procedure linguistique de segmentation d'un discours en phrases, ni de combinaison de phrases en discours. En particulier, entre les différentes phrases ďun texte ou d'un discours oral, s'il existe des contraintes, elles ne sont pas d'ordre syntaxique. Elles sont logico-sémantiques exclusive -ment, relations de succession, de causalité, d'implication. Par exemple, si le texte suivant: Le petit garcon se mit ä pleurer. II se fit mal au genou. II tomba de velo. est peu coherent au regard du suivant: Le petit garcon tomba de velo. II se fit mal au genou. II se mit ä pleurer. il est pourtant forme de phrases parfaitement grammaticales. On peut caractériser une phrase par un certain nombre de traits : a. Des caractéristiques prosodiques, telies que ľintonation et la pause. Ainsi, une phrase affirmative se caractérise par une intonation montante suivie ď une intonation descendante conclusive, puis d'une pause. Ces facteurs correspondent sur le plan graphique ä la presence d'une ponctuation forte comme le point. b. Des caractéristiques sémantiques : on dit généralement qu'une phrase constitue une unite de sens. Ainsi ľénoncé : Lamer, la mer... ne formant pas une unite de sens immédiatement comprehensible sans recours ä la situation extralinguistique, ne pourra pas étre ramene ä une phrase. Mais Quelques généralités «11 ce facteur est trěs difficile ä manier. Par exemple, combien verra-t-on de phrases dans cette premiere strophe des Colchiques ď Apollinaire, poéme sans ponctuation : Le pre est vénéneux mais joli en automne Les vaches y paissant Lentement s'empoisonnent Le colchique couleur de cerne et de lilas Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-lä Violätres comme leur cerne et comme cet automne Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne. Et d'autre part, on hésitera ä analyser comme une phrase ľénoncé : Zut! qui forme bien pourtant une unite de sens. c. Des caractéristiques purement syntaxiques : de ce point de vue, une phrase est une unite autonome, ce qui signifie qu'elle n'entretient pas de relation de dépendance avec son entourage. Ainsi dans : Le petit garcon qui pleure est tombé de velo. qui pleure ne saurait constituer une phrase, car il depend de le petit garcon, tandis que ľensemble forme un tout qui ne depend de rien. Une phrase est ainsi la concatenation ď unites linguistiques d'un rang — ou d'un niveau — inférieur, liées entre elles par des contraintes, telies que l'accord ou l'ordre. Dans la phrase : Ľ enfant joue au ballon. il existe des contraintes d'accord qui s'exercent entre enfant et l'article, entre ľ enfant et joue et des contraintes d'ordre qui font que l'article precede obli-gatoirement le substantif et le groupe sujet, le verbe. Les elements qui composent une phrase se combinent en effet selon des schémas regies, en nombre fini (phrase simple, phrase complexe formée de plusieurs propositions et classées selon la nature de ces propositions). Ces Schemas sont des suites de places : Sujet Verbe , .,, Sujet Verbe Attribut , . Sujet Verbe Complement Sujet Verbe Que Sujet Verbe, etc. qui sont ensuite remplies par des elements du lexique qui permettent ď en faire des énoncés. C'est parce que ces schémas sont descriptibles et en nombre fini que la phrase peut étre considérée comme une unite de la description linguistique. 12 • La Grammaire 2.3. Les unites inférieures ä la phrase II s'agit ďabord de la proposition. On n'en donnera pas une definition logique, selon laquelle eile exprime un jugement associant ä un theme, ce dont on parle, un prédicat, ce qu'on en dit. On adoptera une definition exclusive-ment syntaxique : la proposition, qui est une partie de phrase, ou toute une phrase, si eile est seule, est constituée ďun verbe ä un mode personnel accom-pagné des elements qui lui sont lies, sujet, complements, et qui constituent sa valence. Une phrase peut ne consister qu'en une proposition, appelée alors indépendante : L'enfant joue dans le jardin. ou en plusieurs propositions liées entre dies par des relations diverses : juxtaposition : II pleut, je ne sortirai pas. coordination : II pleut, done je ne sortirai pas. subordination : Comme il pleut. je ne sortirai pas. correlation : II pleut si fort que je ne sortirai pas. Plus il pleut, moins j'ai envie de sortir. Lorsque la phrase ne comprend qu'une proposition, on parle de phrase simple; dans les autres cas, on parle de phrase complexe. Les propositions elles-mémes se décomposent en groupes ou syntagmes, qui y jouent le role d'un mot. Ainsi, dans : Mon ami lit le journal, le syntagme mon ami joue le méme role que Paul, et lit le journal que lit. Les elements d'un syntagme sont lies entre eux par des relations syntaxiques descriptibles. Par consequent, on ne peut appeler syntagme n'importe quelle partie de la proposition, comme lit le. Par ailleurs un syntagme n'est pas equivalent ä lui tout seul ä une proposition. II existe bien des propositions composées d'un seul syntagme comme celles qui présentent un verbe ä ľimpératif: Avance! mais le statut de ľ unite est different. Et ceci est un cas trěs rare, car s'il existe de nombreux énoncés composes d'un seul syntagme, comme la réponse ä une question : Qu'est-ce que tu lis? — Un roman policier. Quelques généralités «13 ou les titres : Le lys dans la vallée. méme s'il s'agit ďunités completes sémantiquement, rien n'autorise ä leur donner statut de proposition sur le plan syntaxique. lis représentent soit une sequence incomplete dérivée d'une proposition : Qu'est-ce que tu lis? — (Je lis) un roman policier. soit des sequences particuliěres dont on ne peut rendre compte qu'en faisant intervenir des types de discours et des conditions ďénonciation. Les syntagmes peuvent étre plus ou moins complexes. La limite inférieure est representee par les cas oü il se confond avec un mot: Nous partirons demain. et la limite supérieure par ceux oü il a la forme ď une proposition subordonnée : Nous partirons děs que nous serons préts. 3. Les operations utilisées dans ľanalyse syntaxique II s'agit des procedures, des manipulations utilisées pour segmenter les unites de la phrase et de la proposition et pour les analyser. Ce sont des procedures de découverte (on parle de procedures heuristiques) extérieures ä la syntaxe, dont certaines ont déjä été presentees en phonologie et en morphologie, et qui se retrouvent dans les différentes doctrines grammaticales. 3.1. La substitution ou commutation ■g Rappelons que e'est ľopération qui permet de remplacer un element par un I autre : a Mon fils lit une bande dessinée. .a Jean lit une bande dessinée. 1 Mon fils dessine. CO § Elle permet la segmentation des unites : ainsi mon fils et Jean, qui commutent, .2 peuvent étre dissociés de lit une bande dessinée, ce que confirme la commu- 8 tation de lit une bande dessinée avec dessine. Elle permet également de mettre o en evidence des classes ďéquivalence, c'est-ä-dire des classes qui regroupent 0 des elements, qui, si différents qu'ils puíssent étre formellement, n'en jouent 2 pas moins un role identique dans la proposition. Ainsi dans la proposition d suivante : o 5 '«-. Je viendrai demain. 1 aprěs le repas. © quandj'aurai fini. 14 • La Grammaire demain, apres le repas, quand j'aurai fini, ont beau étre différents de nature, ils n'en font pas moins partie ďune méme classe ď equivalence. La suppression, appelée plutôt en syntaxe ľeffacement, n'est qu'un cas particulier de substitution. Ainsi, ce test fait apparaítre que dans ľexemple suivant: Jean tient ä son travail pour de multiples raisons. les deux syntagmes ä son travail et pour de multiples raisons, bien que prepo-sitionnels ľun et l'autre, n'ont pas le méme statut par rapport au verbe, le second seul pouvant étre supprimé sans que le verbe change de sens : Jean tient ä son travail. *Jean tient pour de multiples raisons. *Jean tient. 3.2. Ľinsertion ďéléments Ce test consiste ä essayer d'insérer des elements nouveaux ä ľintérieur d'une phrase, d'une proposition ou d'un syntagme, ce qui permet de mesurer le degré de cohesion des groupes. De cette f agon on pourra opposer : II tient ä son travail. II tient vraiment ä son travail. ä : *II tient ä vraiment son travail. *II tient ä son vraiment travail. ce qui montre que á son travail forme un groupe cohésif, distinct du verbe. 3.3. Le déplacement Ce test consiste ä essayer de déplacer une unite dans la phrase ou la proposition. Ainsi le complement effacable pour de multiples raisons peut étre déplacé : Pour de multiples raisons. Jean tient ä son travail. alors que le complement non effacable a son travail ne le peut pas : *A son travail, Jean tient pour de multiples raisons. La permutation (qu'on distinguera bien de la commutation, située, eile, sur Faxe paradigmatique) est un cas particulier de déplacement oü deux elements échangent leur place : Tu as fini? As-tu fini? Substitution, insertion et déplacement ont done essentiellement pour effet de permettre ďapprécier le degré de cohesion des groupes et leur autonomie par rapport aux autres unites de la phrase, ainsi que leur equivalence avec des elements qui ne figurent pas dans la proposition, mais qui, dans le systéme, appartiennent ä la méme classe ďéquivalence, au méme paradigme. Quelques généralités «15 4. Les propriétés syntaxiques On appelle ainsi les caractéristiques syntaxiques des elements de la phrase. Ces propriétés peuvent étre mises en evidence par la consideration des relations que ľélément entretient avec le contexte dans lequel il est inséré. On parle alors de propriétés distributionnelles, puisque (cf. t. 1, p. 14) la distribution est précisément la place d'un element et la nature de son entourage. On prend dans ce cas en consideration les possibilités de combinatoire d'un element dans un cadre donné. Par exemple, un verbe est partiellement défini par le nombre de complements qu'il peut admettre : parier: deux complements : parier de quelque chose ä quelqu'un chanter: un complement : chanter quelque chose par le type de sujet qu'il recoit, animé ou non animé : chanter et parier admettent un sujet animé... Certaines de ces propriétés, comme celle-ci, sont ä la frontiére entre la syntaxe et la sémantique. Mais, puisqu'elles se traduisent par des comportements syntaxiques (ľanimé par exemple est repris par lui et qui est-ce qui, alors que ľinanimé l'est par y et qu'est-ce que), on en tient compte ici. D'autres propriétés concernent la relation que ľélément entretient avec un autre element dans une autre phrase ou proposition. On pourrait parier de propriétés interphrastiques, comme pour le passif : Les voleurs ont mis la maison ä sac. La maison a été mise ä sac par les voleurs. ou la pronominalisation : Jean est venu, il va mieux. Outre qu'elles permettent de définir le profil syntaxique des elements auxquels on s'intéresse, ces propriétés complětent les tests énumérés précédemment. La pronominalisation par exemple constitue un des tests syntaxiques auxquels on a recours le plus fréquemment. Elle permet entre autres de rapprocher des elements alors méme qu'ils different: je sais qu'il est venu l je le sais Je sais mon role l ou au contraire d'en séparer qui paraissaient pourtant semblables : je pense voir un ami je monte voir un ami je le pense *je le monte. 16 • La Grammaire 5. Les symboles utilises On en utilisera relativement peu. Mais lorsque cela simplifiera la presentation, on y aura malgré tout recours. Les principaux sont les suivants: V = verbe Vpp = verbe au participe passé SN = syntagme nominal N = nom Adj = adjectif Dét = determinant Prep = preposition Adv = adverbe CV = complement de verbe CP = complement de phrase P = proposition. Inf = infinitif. On utilisera éventuellement des indices numériques pour indiquer la position des elements dans la proposition. Ainsi la sequence de symboles: SNI V SN2 est-elle constituée d'un premier syntagme nominal, le sujet, d'un verbe. et d'un second syntagme nominal, le complement. Ľastérisque devant une phrase signále qu'elle n'est pas possible, et le point ď interrogation, qu'elle est douteuse. 6. Organisation de ľétude Faire une etude de syntaxe suppose un va-et-vient constant de ľ analyse ä la synthese et la nécessité ď adopter tour ä tour chacun de ces points de vue. Par exemple, si ľon s'intéresse aux complements circonstanciels du verbe, on pourra tenter d'abord une analyse, qui, sur la base des commutations, fera appa-raitre que des elements dont la nature est fort diverse peuvent jouer ce role : Syntagme nominal: Je partirai aprěs le repas. Adverbe : Je partirai demain. Proposition : Je partirai děs que j'aurai fini. Mais ľon peut aussi, s'intéressant ä chacun de ces elements, voir comment ils se combinent avec le verbe pour former une phrase. En d'autres termes, il convient de distinguer la nature et la fonction des elements, des elements de méme nature pouvant avoir des fonctions différentes (un syntagme nominal peut par exemple étre sujet, attribut, complement, etc.) et une méme fonction pouvant étre exercée par des elements différents. II est done trěs difficile ď adopter un plan qui soit entiěrement satisfaisant: peut-on parier ďemblée des composantes de la proposition sans ľavoir définie? Mais peut-on ä ľin-verse analyser la proposition sans avoir au préalable étudié les elements qui la composent? On gardera ainsi en memoire que les deux approches sont en realite complémentaires, quel que soit le plan adopté. On a choisi ici de partir de ľunité la plus large, la phrase, pour ľanalyser en propositions, puis de decomposer ä son tour la proposition minimale en ses composants fondamentaux. On a done fonde le plan d'ensemble sur une procedure de decomposition. Quelques généralités • 17 Entratnez-vous 1. Le superlatif relatif* But de I'exercice: réfléchir sur les conditions que doit remplir une regle de grammaire pour étre efficace. (* Le superlatif relatif est généralement oppose au superlatif absolu precede de trěs, cf. p. 123.) On trouve dans une grammaire scolaire la description suivante du superlatif relatif: Le superlatif relatif est forme du comparatif de l'adjectif precede de Particle défini. Remarque 1. Le comparatif servant ä former le superlatif relatif peut étre place avant le nom; II peut également étre place aprés le mot auquel il se rapporte. Remarque 2. Ce comparatif est toujours precede de Particle défini sauf dans deux cas : - Quand il est precede de ľadjectif possessif. - Quand il est precede de la preposition de. Ä partir des phrases suivantes, dont certaines ne sont pas grammaticales, montrez: 1. Que ces regies ne sont pas opératoires. 2. Qu'elles sont incompletes: 1. C'est l'amile plus eher. 2. C'est le le plus eher ami. 3. C'est un le plus familier éeureuil. 4. C'est un éeureuil le plus familier. 5. C'est ľ ami mon plus eher. 6. C'est le mon plus eher ami. 7. C'est mon plus eher ami. 8. C'est le de plus eher ami. 9. C'est mon ami le plus eher. :.■-,"■■■ ' 10. Je n'ai jamais bu de plus mauvais vin. Correction II est evident que, pour faire cet exercice, il faut consentir ä jouer le jeu et ä ne pas faire intervenir de connaissances extérieures. Supposons que le lecteur de la regie soit naif, car de deux choses l'une, ou bien il l'est, et il a alors effec-tivement besoin d'une regie qui ne permette pas ľerreur, ou bien il ne l'est pas, et il n'a sans doute pas besoin d'une quelconque regie. Si done on accepte de se placer dans ce cas du lecteur naif, on constate que la regle permet de fabriquer toutes les phrases du corpus, alors que seules 1,7,9 et 10 sont grammaticales. 18 • La Grammaire II est clair qiťil f aut distinguer le cas ou le superlatif precede le substantif et le cas od il le suit, et qu'il ne s'agit pas lä d'une remarque secondaire. On constate en effet, que, dans le cas ou le superlatif precede le substantif, il ne peut y avoir qu'un determinant, lequel est le, comme le dit la regle, sauf si le substantif est déjä accompagné d'un possessif, comme en 7, ou de de, comme en 10. Par consequent sont exclues les combinaisons avec un quelconque autre determinant, comme Particle indéfini, ce que ne disait pas la regie qui, děs lors, autorisait 3. Ce que ne dit pas non plus la regie, c'est que le determinant ď est pas la marque du superlatif, mais est en fait lié au substantif, si bien que, lorsque celui-ci en comporte déjä un qui est défini, on n'en utilise pas un deuxiéme comme en 2. Lorsque le superlatif suit le substantif, le substantif est alors accompagné d'un determinant, défini ou possessif, mais non indéfini, et ľadjectif est dans touš les cas, méme si le substantif est accompagné de mou, accompagné de le. Faute de préciser cela, la regle autorise bien 1, qui est correct, mais aussi 4 (substantif accompagné d'un article indéfini), 5 (superlatif précédé de mou), 8 (superlatif précédé de de). Si ľ on voulait remplacer cette regie par une autre qui soit vraiment opéra- toire, il faudrait indiquer : 1. Quelle doit étre la forme du superlatif, ce que d'ailleurs faisait la grammaire en question : c* est celle du comparatif (on n'a considéré que le comparatif de superioritě, mais la méme analyse pourrait étre faite avec le comparatif ďinfériorité : c*est mon ami le moins eher). 2. Que, dans aueun cas, le superlatif ď est compatible avec un determinant indéfini. 3. Que, dans les autres cas, si le superlatif precede le substantif, il est precede du determinant qu'exige le substantif, et que, s'il le suit, il est precede de le. Ce n'est qu'a cette condition que la regie pourrait étre precise et opératoire. 2. Les emplois de beaucoup But de ľexercice: essayer de proposer une regle explicite. II est indiqué dans une grammaire du francais : Beaucoup s'emploie comme adverbe de quantité avec des verbes ou des comparatifs ďadjectifs ou ďadverbes. Remarque : Beaucoup, place apres un comparatif d'adjectif ou apres un verbe ď excellence, ou employe avec un superlatif, doit étre précédé de la preposition de. Place avant un comparatif d'adjectif, il peut étre précédé de la preposition de. A ľ aide des exemples suivants, montrer que cette regle d'emploi ď est pas suffisamment explicite : 1. II beaucoup souffre. Quelques généralités «19 3. II est beaucoup plus mauvais. 4. II a beaucoup decide de partir. 5. II consent beaucoup ä ce que vous partiez. 6. II declare beaucoup souffrir. 7. II declare beaucoup decider seul. 8. Je prétere beaucoup qu'il ne vienne pas. 9.11 ľ empörte de beaucoup sur son rival. 10. II est beaucoup meilleur que moi. Correction On envisa^era successivement le cas des verbes et celui des adjeetif s. Pour les verbes, les phrases 1 et 2 posent le probléme de la place de beaucoup, sur laquelle la regle ne dit rien et qui en fait n'est pas indifferente, puisqu'on peut dire seulement; II souffre beaucoup. II a beaucoup admiré le spectacle. II conviendrait done d'ajouter dans la regie que beaucoup se place aprěs la forme verbale conjuguée, ce qui implique qu'il se place aprés ľauxiliaire. De ce point de vue, 4 et 5 devraient étre acceptables, or ce ď est pas le cas. Ce qui est en cause ici, c'est le lexique du verbe. Decider et consentir renvoient ä un acte ponctuel, qui n'est pas susceptible de gradation, de plus ou de moins. Ils ne sont done pas compatibles avec beaucoup qui marque un degré. La regle devrait done préciser que beaucoup ne peut s'employer qu'avec des verbes susceptibles de degré. Cela va peut-étre de soi, mais les regies de grammaire doivent expliciter méme les evidences. En 6, beaucoup est possible, non en raison du lexique de declarer, qui n* est pas compatible avec beaucoup, mais parce que ľ adverbe porte en fait sur souffrir. En pareil cas, portant sur ľinfinitif, la place de ľ adverbe est indiffé- 1 rente, puisque ľ on pourrait également dire : 2 II declare souffrir beaucoup. Í ^n 7l si beaucoup porte sur declarer, la phrase est inacceptable. Elle devient | a la rigueur possible s'il porte sur decider seul et peut étre paraphrase par | souyent. Ceci n'est pas un contre-exemple ä ce que ľ on vient de dire sur le § lexique de decider, car ľ on precise ici de quel type de decision il s'agit, laquelle _g peut etre plus ou moins fréquente, eu égard aux autres types de decisions. g L empörter sur consume sans doute ce que la grammaire appelle dans la | remarque un verbe ď excellence et de beaucoup est parfaitement normal. Or a en 6 qui ne présente pas un tel verbe, il faut pourtant dire : 5 Je prétere de beaucoup qu'il ne vienne pas. 0 taudrait done ajouter aux verbes ď excellence les verbes qui impliquent un< | omparaison et le mieux serait encore de donner la liste de ces verbes. 1 co Ce qU1 concerne les adjectifs, la regie est plus explicite puisqu'elle tier mple des emplois de beaucoup aprés le comparatif et indique qu'il doit éti 20 • La Gramrnaire precede de la preposition de, mais eile ajoute le cas du superlatif, dont on se demande pourquoi il figure seulement en remarque, et donne comme un libre choix beaucoup et de beaucoup devant un comparatif. En realite la forme en de beaucoup est peu naturelle avec les comparatifs dits analytiques, formes avec plus (ou moins) alors que beaucoup est trés rare avec les comparatifs dits synthétiques, comme meilleur ou pire, qui sont de toute facon en pareil cas accompagnés de bien. 10 ď est done pas acceptable et la repartition naturelle des formes est la suivante : Jean est beaucoup plus intelligent Jean est plus intelligent de beaucoup Jean est meilleur de beaucoup Jean est bien meilleur. On voit ainsi les paramětres supplémentaires qu'il faudrait ajouter ä la regie pour la rendre explicite et opératoire. 3. Uacceptabilité But de ľexercice: réfléchir sur la diversité des conditions qui font qu'une phrase est possible ou non. Dans le corpus suivant, séparez les phrases qui vous paraissent acceptables de celieš qui ne le sont pas. Précisez sur quels eritěres se fondent vos distinctions : 1. Notre rosier est mort pendant les vacances. 2. Notre rosier est décédé pendant les vacances. 3. La souris mangeait un blé. 4. Le bois est fait de cette table. 5. Anatole, qui était le nom de mon voisin, ne bougeait plus. 6. Le chat dont la queue qui était ďun noir que je n'avais jamais vu aupa-ravant dans ma vie qui, je ľespére, sera ďune durée propre ä satisfaire touš mes désirs qui sont nombreux, balayait le sol, guettait une souris. 7. En m'apercevant, je me fis un grand sourire. 8. Je mange touš les jours des cailloux. 9. Je mangerais bien des cailloux. 10. J'ai ľestomac dans les talons. 11. J'ai ľestomac dans les orteils. 12. L'homme que je t'ai parle est revenu. Correction On décrira ici un systéme ď acceptability parmi d'autres. Seules 1, 9 et 10 paraissent ä la fois bien construites grammaticalement et acceptables sémantiquement. II f aut cependant préciser que 9 et 10 présentent un sens figure (cf t. 1, p. 131) que ne présente pas 1, et que ces phrases ne sont interprétables que pour qui connait ces métaphores codées. Les 3, 5, 6 et 12 contreviennent aux regies grammaticales : 3 parce que blé, nom non comp-table (cf p. 114 et t. 1, p. 63) doit s'employer avec du et non un, 5 parce que Quelques generalises • 21 Anatole est pris comme un substantif en usage dans la proposition principále (Anatole ne bougeait plus renvoie ä ľindividu Anatole) et en mention, auto-nyme (cf. t. 1, p. 112), dans la relative (Anatole renvoie au signe). Or la langue n'autorise pas qu'un merne signe soit ä la fois pris en mention et en usage. 6 n'est pas mal formée, dans la mesure ou chaque relative est tout ä fait correcte, mais c'est leur succession, et leur emboitement qui est impossible, vu leur nombre. Une relative peut se trouver insérée dans une autre relative : Le chat dont la queue qui était d'un noir que je n'avais jamais vu auparavant. balayait le sol, guettait une souris. mais les capacités psychologiques en interdisent davantage. Enfin, dans 12, ď est cette fois un mauvais emploi du relatif, que au lieu de dont, qui est en cause. Quant aux autres phrases, elles sont bien formées, mais inacceptables pour des raisons diverses : 2 est interprétable, mais bizarre, en tout cas sans contexte particulier et par opposition avec 1, car si mourir s'emploie pour les humains, les animaux et les plantes, décéder, qui fait reference ä un acte de la vie sociale, s'emploie ordinairement exclusivement pour les humains. 4 est impossible, étant donne la relation lexicale de type métonymique, qui joue entre table et bois, ce que dit ľ expression le bois de la table. 7 est exclue, sauf contexte particulier (en m'apercevant dans le miroir), car, pour des raisons extralinguistiques, il est impossible de se dédoubler et de s'apercevoir. De merne 8 et 11 ne sont-elles pas possibles dans un univers ordinaire. L'usage ď en a pas fait des figures codées, ce que montre ľ opposition de 8 et de 9 et de 10 et de 11. D'un point de vue absolu, il est sans doute aussi étrange de dire qu'on a ľestomac dans les orteils ou dans les talons, mais ľ usage a consacré la deuxiéme expression et non la premiére. On voit done intervenir des raisons syntaxiques, lexicales, mais aussi prag- § matiques, et enfin des questions d'usage. ~ 4. Celui, celie, ceux I But de ľexercice: s'entraíner ä ľétude de la distribution des unites | syntaxiques. c Parmi les phrases suivantes, celieš qui sont agrammaticales sont précédées de = deux astérisques, celieš qui ne sont pas autorisées par les puristes le sont ď une ~ ii-------f loc r^v)^ cľemoloi de celui (celie, ceux) en francais t deux astérisques, celieš qui ne sont pas auionscca p II n'a pas plu depuis longtemps. g Dans la langue parlée, ne, qui pourtant est étymologiquement négatif, alors g que pas ne ľest pas, est fréquemment omis : c Ü C'est pas de la tarte! o % Inversement, il est parfois seul utilise dans des proverbes : a: II n'est pire eau que l'eau qui dort. § avec certains verbes modaux ou aspectuels (cf. p. 51): Q II ne cesse de se plaindre. I Je ne le peux ni le veux. @ et dans quelques autres emplois figés. 36 • La Grammaire Dans un certain nombre de cas, ne n'a pas de sens négatif. On parle de ne explétif et il peut alors généralement étre également onus, ä la difference des cas precedents. Cest ce qui se produit par exemple dans les propositions comparatives : II est moins grand que je ne le pensais / que je le pensais. aprěs les verbes de crainte oů l'on peut opposer : Je crains qu'il ne vienne /je crains qu'il vienne. ä Je crains qu'il ne vienne pas. aprěs d moins que ou sans: ä moins qu'il ne vienne / ä moins qu'il vienne. etc. Les emplois de ne apparaissent ainsi complexes et difficiles, ee qui explique sans doute son absence fréquente dans la langue parlée. A côté de la negation, il faut enfin faire une place ä la restriction ou exception, oil ne est associé ä que : Je ne souhaite que la tranquillité. Ne et que encadrent le verbe, et pas seulement la forme conjuguée : II n'a pas plu. vs II n'a plu qu'une heure. Ces restrictions combinent un sens positif (je souhaite la tranquillité) et un sens négatif (je ne souhaite ríen ď autre). Elles ont une portée restreinte et ne peuvent porter sur le verbe lui-méme. Pour cela, il faut employer seulement, ne faire que, ou ne rien faire d'autre que : II ne travaille pas, il bavarde seulement. II ne fait que bavarder. Par ailleurs, la restriction en ne... que, encadrant le verbe, ne peut porter sur son sujet. II faut avoir recours ä seul ou ä il /;'v a que... qui : II n'y a que Jean qui soit venu. Seul Jean est venu. La restriction ne peut pas non plus porter sur un element déplacé en téte de phrase. II faut la aussi avoir recours ä une construction telle qu'elle mette devant cet element une forme verbale : II travaille la nuit II ne travaille que la nuit mais : La nuit, il travaille La nuit seulement, il travaille Ce n'est que la nuit qu'il travaille. La phrase • 37 On voit ici que les positions des unites linguistiques peuvent jouer un role aussi important que leurs fonctions. ▲ L'ordre. Les phrases exprimant un ordre sont ä ľimpératif, lorsque ľordre porte sur les personnes 2, 4 et 5 et au subjonctif (cf. p. 87) pour les autres: Viens! Qu'il vienne! Elles sont caractérisées par une intonation speciale (cf. t. 1, p. 23) qui se traduit dans ľécrit par la presence du point d'exclamation. L'ordre négatif, c'est-ä-dire la defense, se marque simplement par la negation ne... pas : Ne viens pas! Diverses interjections, allons, eh! bien, y compris done dans un emploi non coordonnant, peuvent souligner cette modalite : Viens un peu ici! Enfin, on signalera que la modalite jussive peut également ětre indirectement exprimée par le futur : Tu ne me parleras plus jamais sur ce ton! par la presence d'un verbe marquant ľ obligation : Tu ne dois plus te comporter ainsi. ou par un infinitif dans certaines situations : agiter avant usage. ▲ L'interrogation. On envisagera ici seulement ľ interrogation directe (sur les subordonnées interrogatives indirectes, cf. p. 61). Comme pour la negation, on distingue deux types ď interrogation : selon qu'elles portent sur I'ensemble de la phrase — ce sont les interrogations totales auxquelles on répond par oui ou par non : Viendras-tu demain? — Oui. ou selon qu'elles ne portent que sur un element, et ce sont les interrogations partielles auxquelles on répond par une unite lexicale : Quand viendras-tu? — Demain. - Les interrogations totales Dans touš les cas, méme si elles ne présentent pas ď autre marque, elles sont caractérisées par une intonation montante spécifique (cf. t. 1, p. 23). Certaines n'ont pas de marque supplemental, en particulier dans ľ oral, oil la construction utilisée est généralement la méme que pour l'assertion : Tu viens au cinema avec moi? 38 • La Grammaire D'autres, dans un niveau de langue plus soutenu, présentent une inversion du sujet. Comme pour ľinversion dans les phrases assertives, on note une difference entre les pronoms personnels et les autres sujets : cette fois, ce sont les premiers qui peuvent se placer aprěs Ie verbe : Viendras-tu demain? et, en cas de forme composée, aprěs la forme fléchie : Est-il venu hier? Cette inversion se produit sans element en téte de phrase, et quelle que soit la construction du verbe : As-tu acheté la robe dont tu avais envie? Avec des SN sujets ou des pronoms autres que personnels, ľinversion, dite complexe, fait intervenir une reprise pronominale, et c'est ce pronom qui apparait aprěs le verbe : Jeanne a-t-elle acheté la robe dont eile avait envie? Quelqu'un s'est-il servi de mon stylo? si bien que la phrase interrogative peut étre mise en relation, ä la pause pres, avec une phrase assertive comportant une forme d'emphase : Jeanne, eile a acheté la robe dont eile avait envie. comme si l'interrogation s'appuyait sur une mise en relief préalable. Enfin, l'interrogation totale peut se marquer par la presence en téte de proposition de la particule interrogative est-ce que suivie ď une proposition avec ordre normal, et trěs fréquente dans ľusage parle : Est-ce que vous devez aller ä Paris? On peut remarquer que cette particule correspond au présentatif c 'est que, et done encore ä une forme de mise en relief. - Les interrogations partielles Elles permettent ďinterroger sur ľidentité ďun des elements de ľénoncé : Qui devez-vous rencontrer? — Monsieur Durand. Oů allez-vous? — Au cinéma. représenté en téte de phrase par un pronom, un determinant ou un adverbe interrogatif. En ce qui concerne les pronoms, les formes sont les mémes que celieš du pronom relatif (cf. p. 56), mais la repartition n'est pas la méme. En premier lieu, on peut opposer les formes de ľinterrogatif simple, qui, que, qiioi, aux formes composées, lequel, laquelle, lesquels. Ces derniěres ne sont utilisées que lorsqu'on offre un choix entre des elements déjä présentés : La phrase • 39 J'ai apporté des gäteaux. Lequel veux-tu? Pour les formes simples, la repartition se fait en premier lieu selon la distinction animé / inanimé : pour ľanimé on utilise qui, quelle que soit la fonction : sujet: Qui est venu? attribut: Qui es-tu done? complement: Qui as-tu rencontre aujourd'hui? A qui penses-tu? Ces formes peuvent se renforcer par qui est-ce qui, qui est-ce que. Pour ľ inanimé, il n'y a pas de forme de sujet et ľon est oblige de recourir ä qu'est-ce qui: Qu'est-ce qui s'est passé? Pour l'attribut et le complement direct d'objet, e'est que (qu'est-ce que) qui apparait: Que veux-tu? et quoi (prep, quoi est-ce que) en cas de complement prépositionnel: A quoi penses-tu? ainsi que les adverbes ou, quand, comment, pourquoi, combien. Avec un substantia on utilise le determinant quel. Si l'interrogation est renforcée par est-ce que (qui), l'ordre du sujet et du verbe est sans changement: Qui est-ce que tu as rencontre? Dans les autres cas, ľinversion est trěs fréquente, sauf évidemment si le pronom interrogatif est sujet. Elle est nécessairement simple si le sujet est un pronom personnel: Quand partez-vous? eile peut étre simple pour les autres sujets si le verbe est intransitif : Quand partent tes parents? ou complexe dans tous les cas, ce qui est la seule solution possible avec une construction transitive : Quand tes parents partent-ils? v Quand tes parents visiteront-ils la region? II faut néanmoins signaler qu'avec ľinterrogatif que ľinversion simple est la seule possible : Que veulent tes parents? *Que tes parents veulent-ils? mais que, bien sür, on peut dire, en utilisant une mise en relief: Tes parents, que veulent-ils? 40 • La Grammaire Les modes et les temps dans les interrogatives sont les mémes que dans les assertives. Ľinfinitif est parfois utilise : Pourquoi partir? La negation peut également étre utilisée. Elle appelle quelques remarques. En cas ďinversion mettant en jeu un pronom, eile ne doit pas séparer ce pronom du verbe : Quand done ne diras-tu plus de sottises? Elle est trěs fréquente dans les fausses questions ou questions rhétoriques, qui ne visent pas ä une demande ď information, mais correspondent ä une affirmation : Qui ne serait ravi ď une telle aubaine? (tout le monde doit étre ravi) ou permettent de repousser un fait jugé scandaleux : N'y a-t-il done plus de morale en ce monde? ▲ L'exclamation. La modalite exclamative exprime les reactions d'étonne-ment, de plaisir, de colěre, etc., du sujet parlant devant ľévénement. Elle se caractérise par une intonation spécifique, par une portée de voix plus forte que dans le debit normal et par la presence eventuelle ď accents d'emphase (cf. t. 1, p. 22). Signalons qu'un grand nombre ďénoncés exclamatifs ne sont pas proposi-tionnels, mais consistent dans des groupes de mots : Oh, la belle voiture! que seule la mise en relation avec la situation permet ď interpreter. Lorsqiťon a affaire ä des phrases, elles ne se distinguent parfois des assertives que par l'intonation : II est bete! On peut observer une utilisation particuliěre des articles indéfinis (cf. p. 135): II est ď une bětise! Les exclamatives sont souvent proches des interrogatives, lorsque, dans un style littéraire, elles utilisent 1'inversion : Est-il bete! ou lorsqu'elles s'appuient sur des pronoms ou determinants, qui sont les mémes que les interrogatifs : Quelles bétises il a pu nous dire! Elles peuvent enfin utiliser des adverbes, comme, que, qui lui sont spécifiques, et combien qui apparaít également dans les interrogatives : Qu'il est béte! Par ailleurs, les exclamations utilisent fréquemment des outils lexicaux parti-culiers, les interjections: La phrase • 41 Mince alors, j'ai oublié mon parapluie! Les modes sont les mémes que dans les propositions assertives, mais ľinfinitif est d'emploi assez frequent: Moi, mentir! en particulier lorsque l'on veut exprimer l'indignation. La negation, comme dans les interrogations rhétoriques, sert parfois ä renforcer un fait: Qu'est-ce qu'il ne nous a pas dit, comme bétises! Avec un infinitif, eile a sa valeur ordinaire : Moi. ne pas venir pour ton anniversaire! Tu n'y penses pas. ▲ Les procédés de mise en relief. Bien que cela ne concerne pas les moda-lités fondamentales de la phrase, on dira un mot des présentatifs et des procédés de mise en relief: a. Les présentatifs, accompagnés d'un SN, permettent d'obtenir une proposition complete sans qu'il y ait besoin d'un verbe : II y a un probléme; c'est un probléme; void le probléme. tandis que les procédés de mise en relief isolent un element dans une proposition par ailleurs complete : Cest Jacques qui est venu. Les présentatifs comprennent void (voilá), il y a et c 'est. Void et voilá sont ä ľorigine formés de ľimpératif de voir et d'un adverbe de lieu mais ils sont actuellement percus comme un tout. De leur origine verbale, ils conservent néanmoins le pouvoir de servir de centre ä la proposition et la construction du groupe nominal qui les suit est celle d'un complement, comme on peut le voir dans la pronominalisation: Void Jean / le voici. Sur le plan sémantique, voici et voila, ä cause du déictique qu'ils comprennent, sont les plus démonstratifs des présentatifs. Ils sont lies ä ľénonciateur, qui determine ľopposition ťhéorique entre d, indiquant la proximité, et lá, ľéloi-gnement. En fait, cette distinction tend ä s'effacer au profit de lá, qui est de plus en plus utilise. Void et voilá, enracinés dans ľénonciation, sont rivés au lieu et ä l'instant presents. Les emplois de il y a sont plus divers, selon qu'il constitue un vrai nceud verbal, ou que, lexicalisé, il est trěs proche d'une preposition temporelle : II y avait beaucoup de monde dans le train. II est parti il y a deux heures. 42 • La Grammaire Dans le premier cas, il y a peut étre fléchí en temps, mais ne varie pas en personne. De ce point de vue, ce n'est rien d'autre qu'un verbe unipersonnel comme il faut, il existe... (cf. p. 103). Ä la difference de void et voile), qui peuvent étre suivis d'un SN comprenant pratiquement n'importe quel determinant, // y a s'emploie surtout avec un article indéfini ou un determinant indiquant une quantité : II y a une voiture qui arrive. II y a trois livres sur la table. C est que. du point de vue sémantique, H y a est moins un présentatif, attirant l'attention sur un element de la situation, qu'un actualisateur d'existence, marquant la presence d'un element qui s' impose ä nous. C est ce qui explique son affinité pour un, qui sert ä poser l'existence d'un objet, et le fait qu'il doive étre accompagné d'un minimum de determination, soit situationnelle, soit contextuelle, par une proposition relative ou un complement de phrase indiquant le lieu. A la difference des deux présentatifs precedents, e'est a un double role. Comme eux, il sert ä introduire un element, mais il a de sureroít un role de pivot avec ce qui precede, puisque c' reprend un element du contexte anté-rieur. Par consequent, il ne sert pas ä poser l'existence d'un objet ou d'un individu, mais suppose qu'on s'interroge, implicitement ou explicitement, sur ľidentité de quelqu'un ou de quelque chose, dont la presence a déjä été düment constatée : Qui est la? — Cest votre voisine. Méme lorsque le terme représenté se trouve dans la méme proposition que c 'est: Votre frere, e'est un trěs gentil gareon. une question implicite est posée sur son referent, ce que manifeste ľ intonation montante de votre frére, ä laquelle répond l'intonation descendante du membre de phrase introduit par c 'est. Comme il y a, e'est peut subir la flexion temporelle. II peut également varier en nombre et s'accorder avec le SN qui le suit, accord qui n'est jamais obligatoire et est méme impossible devant nous et vous: Cest nous et non *ce sont nous. b. Les procédés de mise en relief comprennent ce que ľon appelle souvent ľextraction et le détachement. Ils utilisent le présentatif c Vsí ou la representation pronominale. Ľextraction, également appelée construction clivée, consiste dans ľ insertion entre e'est... qui ou e'est... que selon sa fonetion de ľélément que ľon veut mettre en relief: Cest Jean qui est venu. Cest Jean que j'ai rencontre. La phrase • 43 Qui et que sont originellement des relatifs. Ľextraction s'utilise essentielle-ment pour marquer un con traste ou apporter des precisions : Cest Jean que j'ai rencontre, et non Pierre. Le détachement reprend par un pronom un element détaché par une pause du reste de la proposition : Jean, il est gentil. Jean, e'est un gentil gareon. Ce que j'aime, e'est aller au cinéma. II introduit une segmentation dans ľénoncé. 2. De la phrase simple ä la phrase complexe: juxtaposition, coordination et subordination Quelles que soient ses modalités, une phrase peut étre simple, e'est-a-dire ne consister qu'en une proposition, ou étre complexe, e'est-a-dire comprendre plusieurs propositions. Pour passer de la proposition ä la phrase complexe, on dispose de trois modes principaux d'enchainement: la juxtaposition, la coordination et la subordination, auxquels il faut ajouter la correlation, qui prend tantôt la forme d'une juxtaposition, tantôt celie d'une subordination, et ľin-cise, qui insére un element dans une phrase dont eile rompt la construction. Les difficultés de distinction tiennent au fait qu'en ce domaine comme en beau-coup d'autres secteurs de l'analyse syntaxique, il n'y a pas nécessairement accord entre le sens et la forme. Par exemple, une relation de consequence entre propositions peut se traduire par touš les types d'enchainement: juxtaposition : II pleuvait, Jean ne sortit pas. coordination : II pleuvait et Jean ne sortit pas. subordination : Puisqu'il pleuvait, Jean ne sortit pas. correlation : II pleuvait si fort que Jean ne sortit pas. incise : Jean — il pleuvait — ne sortit pas. On essaiera de montrer en quoi ils se différencient, et en quoi ils se rejoignent. 2.1. Les differences: les exemples clairs La juxtaposition, comme son nom l'indique, consiste dans le fait que sont posées côte ä côte, séparées par une pause que l'ecrit transcrit par une virgule, plusieurs propositions : Le vent souffle, la pluie tombe, le tonnerre gronde. Les meilleurs exemples sont ceux des structures énumératives, ou n'existe pas d'autre relation entre les propositions que l'addition, si bien que l'ordre des propositions pourrait étre modifié sans danger ni pour la cohesion syntaxique, ni pour la coherence sémantique. 44 • La Grammaire La coordination est la mise en relation de deux propositions dans un tout oü ľune et ľautre ont le méme role, et sans que ľune soit plus importante que ľ autre. Elle est done proche de la juxtaposition ä laquelle eile est souvent associée : Le vent souffle, la pluie tombe et le tonnerre gronde. Rappelons que la juxtaposition et la coordination, ä la difference de la subordination qui ne joue qu'entre propositions, peuvent s'établir, ä ľintérieur ď une proposition, entre mots ou syntagmes : II travaille lundi, mercredi, jeudi. II travaille lundi. mercredi et jeudi. Quant ä la subordination, eile implique une dépendance formelle et séman-tique de ľune des propositions : Je sors quand il ne pleut pas. Si quand il ne pleut pas peut étre supprimé sans dommage, il n'en va pas de méme pour je sors qui apparaít ainsi comme la proposition principále. Quelques eritěres formeis permettent de différencier la coordination et la subordination qui, toutes les deux, impliquent la presence ďune conjonction. En premier lieu, une proposition coordonnée ne peut s'antéposer par rapport ä la proposition ä laquelle eile est liée : *Car il pleut, je ne sortiraí pas. alors qu'une subordonnée le peut: Parce qu'il pleut, je ne sortirai pas. Par ailleurs, une coordonnée ne peut s'employer comme réponse ä une question alors qu'une subordonnée le peut: Pourquoi ne sortez-vous pas? — *Car il pleut, Pourquoi ne sortez-vous pas? — Parce qu'il pleut. Elle ne peut pas non plus, ä la difference des subordonnées, étre mise en relief par c 'est... que: Cest parce qu'il est malade qu'il n'est pas venu. *C'est car il est malade qu'il n'est pas venu. Enfin, la subordination peut entrainer un fonctionnement particulier des modes et des temps (cf. p. 88) qui n'existe ni avec la juxtaposition ni avec la coordination. 2.2. Les difficultés de distinction Bien souvent, le lien sémantique entre les propositions est le méme dans les trois cas, comme ľ ont montré les exemples ci-dessus. Mais la distinction est surtout obscurcie par ľexistence, ä côté de relations claires ďindépendance ou La phrase • 45 de dépendance, de liens de solidarite, ou de correlation entre propositions. Par exemple, dans les propositions hypoťhétiques : Si la pluie cesse, j'irai me promener. la realisation du fait rapporté dans la principále depend du fait relate dans la subordonnée, si bien qu'il y a contradiction entre la dépendance formelle et la liaison sémantique. Dans deux propositions juxtaposées comme : Plus il grandit, plus il est bete. les deux propositions sont bien indépendantes formellement, mais il y a entre elles une solidarite sémantique. Un autre exemple de contradiction entre relation sémantique et relation formelle se rencontre dans ce que ľon a appelé la subordination inverse. Ainsi dans la phrase : A peine arrive-t-il qu'il s'affale dans un fauteuil. ľ element subordonné sur le plan sémantique est ä peine arrive-t-il, comme le montre le fait que ľon pourrait avoir : Des qu'il arrive, il s'affale dans un fauteuil. mais l'outil de subordination que precede ľautre proposition. On peut d'ailleurs se demander si que, en pareil cas, constitue bien une conjonction, et s'il ne vaudrait pas mieux en faire une sorte ď element tampon, qui apparait dans plusieurs autres emplois : C est une veritable plaie que travailler! 3. Juxtaposition et coordination 1 On rapproche souvent la coordination et la juxtaposition, et ľon parle méme » parfois de coordination par juxtaposition. De fait, elles sont souvent associées, % essentiellement dans les structures énumératives: 2 Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches (Verlaine). TO o On choisira pourtant ici de les séparer sur la base des trois arguments o suivants : ľ ordre des elements juxtaposes est généralement interchangeable, g du moins sur le plan syntaxique, alors que la proposition introduite par une o conjonction a une place fixe. Les rapports sémantiques dans la juxtaposition J sont implicites alors qu'ils sont explicites dans la coordination. Enfin, les deux ^ propositions sont vraiment indépendantes dans la juxtaposition alors qu'elles g ne le sont pas complětement dans la coordination puisqu'elles s'inserent dans o un ensemble oü elles sont sur un pied ďégalité. < c -i. t 46 • La Grammaire 3.1. La juxtaposition Elle s'établit entre elements semblables, propositions, mots ou groupes de mots ayant une méme fonction par rapport au verbe ou ä la phrase : II restera mardi, mercredi, jeudi. et ayant aussi la méme nature : *II restera mardi, longtemps. *I1 veut partir, que tu ľaccompagnes. Elle suppose une pause transcrite ä ľécrit par une virgule et une intonation particuliěre, montante sur le premier element ou chacun des premiers, descen-dante sur le dernier. Ľ ordre des elements est en théorie interchangeable, bien que parfois, en particulier lorsque sont en jeu des relations de succession temporelle, ce soit pratiquement impossible. Quant aux valeurs sémantiques, elles sont multiples, addition, opposition, consequence, etc. 3.2. La coordination Elle unit deux membres identiques dans un ensemble, ä la difference de la juxtaposition qui ne crée pas un tout. Les membres lies ne sont done pas tout ä fait indépendants, mais plutôt solidaires de ľ ensemble. Elle est marquee formellement par la presence en téte de la deuxiěme proposition d'un outil de jonction, qui reprend en méme temps la proposition precedente. Tradition-nellement, la liste de ces elements se limite ä mais, ou, et, done, ni, car, or. On dit que les conjonctions ne sont pas mobiles ct ne se combinent pas entre elles. II faut alors en exclure done, qui peut apparaitre ailleurs qu'en téte : II était malade, il n'est done pas venu. et qui peut se combiner avec et: II était malade, et done il n'est pas venu. II convient plutôt ď adopter une position souple et de défmir les conjonctions de coordination comme des elements n'ayant pas de role par rapport au verbe ou ä tout autre element de la phrase ä la difference des adverbes Cef. p. 153), impliquant la presence d'une unite antérieure et servant ď elements de jonction. On peut done y integrer puis, ensuite, pourtant, cependant, toutefois, enfin, etc., ľ hesitation étant possible pour plusieurs termes. En ce qui concerne sa valeur logique, la coordination s'inscrit entre les deux poles offerts par la juxtaposition et la subordination. Dans certains cas en effet, par exemple dans ľénumération, eile n'est rien d'autre qu'une juxtaposition agrémentée d'un element de jonction et ľ on pourra avoir : asynděte : II s'est levé, il s'est habillé, il a bu son café. coordination ordinaire : II s'est levé, il s'est habillé et il a bu son café. polysynděte : II s'est levé et il s'est habillé et il a bu son café. La phrase • 47 Dans d'autres cas, par exemple lorsqu'elle exprime la causaKté ou la consequence, e'est une sorte de subordination masquée. Sur le plan sémantique, eile peut exprimer ľ addition : • , II est bete et il est méchant. et cette forme particuliěre ď addition qu'est la succession : II est venu et il est reparti aussitôt. Dans le dialogue, et est souvent utilise pour indiquer ľ addition ou la succession non pas de proces relates dans ľénoncé, mais ďactes ďénonciation. II est alors paraphrasable par je dirai meine plus, en particulier dans ľenchaínement de répliques du dialogue : X : Un petit verre de temps en temps, ca ne fait pas de mal! Y : Et ca chasse les idées noires! Ici, et sert ä la fois ä ajouter les proces relates (ne pas faire de mal et chasser les idées noires) et les énonciations successives (tu as dit cela, moi j'qjouterai que...). Ensuite et puis entrent dans cette premiére catégorie. Mais, pourtant, cependant, toutefois, etc., marquent un rapport ďopposition : II a travaillé mais il n'a pas réussi. La coordination peut indiquer la cause, avec car, la consequence avec par consequent, done... Elle peut marquer une etape dans un raisonnement avec or. Enfin, eile peut marquer ľalternative avec ou, qui a deux sens, ou inclusif (ľun ou ľ autre ou les deux) paraphrasable par et/ou : II mange de la viande ou du poisson. et exelusif (ľun ou ľautre, mais pas les deux) : Au menu, il faut choisir entre la viande ou le poisson. Ou s'utilise dans un contexte positif. Dans un contexte négatif, e'est ni qui est utilise : II ne sourit ni ne rit jamais. Ni suppose la presence ďéléments communs dans les deux propositions, ce qui explique qu'il s'accompagne souvent ď ellipses, comme celle du sujet dans ľ exemple precedent ou du verbe dans celui-ci: II n'est pas venu, ni non plus Marie. Ajoutons que la coordination, surtout avec et, peut avoir une valeur rythmique : Au loin, des bestiaux marchaient, on n'entendait ni leurs pas, ni leurs mugis-sements; et la cloche, sonnant toujours, continuait dans les airs sa lamentation pacifique. (Flaubert). Dans ce dernier exemple, le et constitue ce que l'on peut appeler un et de relance rythmique. 48 • La Grammaire 4. La Subordination 4.1. Definition et typologie On la définira comme la relation ďune proposition non autonome ä une proposition principále. Si la subordonnée et la principále forment bien un tout comme les propositions coordonnées, les deux ne sont pas sur un pian ďégalité, et ľune depend de ľautre. Une proposition subordonnée est intro-duite par une conjonction autre que les conjonctions de coordination, comme quand, puisque, ou par une locution conjonctive comme des que, merne si, ce qui exclut de la liste des propositions subordonnées les infinitives et les parti-cipiales. D'ailleurs, n'étant pas centres autour d'un verbe ä un mode personnel, ces groupes ne méritent merne pas d'etre appelés propositions, et sont des complements du verbe ou de la phrase d'un type particulier (cf. exer-cice n° 9). Les subordonnées, enfin, ne se relient pas directement ä ľénon-ciation, et la subordination a pour consequence de suspendre les modalités de la phrase. Plusieurs classements des subordonnées peuvent étre proposes, selon leur point d'incidence et leur fonction par rapport ä tel ou tel element de la principále, selon le terme introducteur, ou selon leur sens. Aucun n'est entiěrement satisfaisant. On adoptera un classement mixte, discutable lui aussi, et on distinguera : - les propositions conjonctives, introduites par une conjonction (ou une locution conjonctive), cest ä-dire par un element invariable qui n'a aucune fonction dans la proposition subordonnée. Elles se subdivisent selon qu'elles sont complements d'un element de la principále, généralement le verbe (complements de verbe, CV), ou qu'elles complětent ľensemble de la proposition (complements de phrase, CP). II s'agit la ďune distinction analogue ä celie qui existe pour les SN (cf. p. 124) avec lesquels les propositions conjonctives commutent le plus souvent. On distingue ainsi les conjonctives pures, oü la conjonction n'a pas de sens, et complements d'un verbe (d'un substantif ou d'un adjectif) dit Operateur, qui a précisément la possibilité de se combiner avec une proposition (et parfois avec un infinitif) : Je souhaite í son depart. | qu'il parte. [ partir. et les conjonctives circonstancielles ou adverbiales généralement complements de phrase : Dans ces conditions, í je souhaite son depart. Puisqu'il en est ainsi, i et pour lesquelles la conjonction ou locution conjonctive a un sens. - les propositions relatives qui ne sont pas introduites par une conjonction, mais par un pronom ou un determinant relatif, et s'articulent généralement La phrase • 49 non pas sur un verbe mais, ä la maniere d'un adjectif, sur un substantif. De plus, le relatif a une fonction dans la proposition qu'il introduit, sujet dans ľexemple suivant: L'homme qui est venu portait un chapeau de feutre. - les propositions interrogatives indirectes dont les unes commencent par si et sont des conjonctives pures, et dont les autres sont introduites par un pronom, determinant ou adverbe interrogatif ä la maniere des relatives. Toutefois elles ne sont pas liées ä un substantif, mais partagent avec les conjonctives pures le fait d'etre complements du verbe : je te demande qui est venu. si tu viendras. On trouvera dans le tableau suivant la liste des traits impliqués pour ľ analyse de chacun de ces types de subordonnées, ce qui permettra de faire apparaitre la diversité des classements que ľ on peut en proposer, ainsi que celie de la terminologie utilisée : TERME INTRODUCTEUR NATURE FONCTION PROPOSITION FONCTION AUTRE NOM conjonctives conjonction nulle CV attribut sujet CP complétives conj. pures r circonstancielles 1 adverbiales relatives pronom oui adjectivales t propositions 1 adjectives int. indirectes conjonction pronom determinant adverbe nulle oui oui oui CV attribut sujet f complétives On examinera successivement chacune de ces propositions. 4.2. Les conjonctives a Les conjonctives pures ou complétives Elles sont introduites par la conjonction que, qui, comme toutes les conjonctions, n'a évidemment aucune fonction grammaticale dans la subordonnée, mais qui, de surcroít, n'a aucune valeur sémantique. Elle a comme seul role de relier la principále et la subordonnée. Comme leur fonction la plus fréquente est d'etre complement: Je pense qu'il viendra. 50 • La Grammaire on les appelle souvent propositions complétives, bien qu'elles puissent avoir d'autres fonctions, comme la fonction sujet: Qu'il vienne maintenant ne me conviendrait guěre. ou attribut: Ľimportant est qu'il a réussi. Lorsque la completive doit suivre une preposition, comme avec les verbes tenir á ou déduire de, que est precede de ce, qui n'a aucune valeur : on a affaire ä une distribution complémentaire oú que est non precede de preposition, et ce que precede de preposition : je tiens ä ce qu'il vienne vs je veux qu'il vienne. Les complétives peuvent aussi completer un substantif: Je formule le voeu que cette année vous soit prospěre. ou un adjectif: II est hostile ä ce que nous prenions une telle decision. Les modes sont ľindicatif et le subjonctif, selon le sens de ľ element dont depend la completive (cf. p. 88). Deux problěmes doivent étre soulevés ä propos des complétives. Le premier concerne leur rapport avec les complements SN du verbe. On observe en effet généralement un parallélisme de construction : Je veux ce livre. Je veux que tu me prétes ce livre. ce qui se traduit par le fait que la pronominalisation est la merne : Je le veux. Mais parfois, la construction peut différer : Je songe ä ľavenir. Je songe que ľavenir est plein ďincertitudes. Or, la pronominalisation du SN et celie de la completive continuent ä ôtre identiques : J'y songe. Rien ne permet ďexpliquer cette disparition de la preposition devant la completive. Ľ autre probléme concerne la relation entre les complétives et la construction avec infínitif: Je te promets que je partirai de partir. La phrase »51 ľ infínitif étant un type particulier de complement. On peut observer tantôt ľ absence ď une construction infinitive : que je partirai j'annonce tantôt au contraire sa presence : *partir t . que je partirai e promets j V J r \ de partir. Deux cas sont alors ä distinguer, selon que ľ agent de ľ infinitif est le měme ou non que le sujet du verbe principal: Je veux partir. vs Je te demande de partir. II peut enfin arriver que ľ infínitif soit seul possible, et que la completive n'ap-paraisse pas. Cest ce qui se produit avec des verbes Operateurs que ľ on appelle modaux-aspectuels et qui sont les seuls ä pouvoir se combiner avec un unipersonnel: i7 doit pleuvoir. lis expriment soit un aspect de ľ action, commencer ä courir, soit une de ses modalités, devoir travailler : II doit partir. *I1 doit qu'il parte. II faut enfin faire une derniěre remarque, c'est que ľ infinitif, en particulier lorsqu'il est sujet ou attribut, est souvent precede de de (parfois méme de que de) qui ne constitue pas vraiment une preposition, puisqu'il n'est pas lié ä ľ element qui commande ľ infinitif, mais seulement un element tampon : je promets de partir je promets que je partirai c'est agréable (que) de partir c'est agréable que nous partions : ▲ Les conjonctives circonstancielles ou adverbiales 5 Elles jouent généralement le role de complement de phrase, ce qui se marque > par le fait qu'elles sont mobiles, ä la difference des coordonnées de sens voisin : Je ne sors pas quand il pleut. Quand il pleut, je ne sors pas. 1 vs Je ne viendrai pas s" il pleut. l S'il pleut, je ne viendrai pas. et peuvent étre supprimées sans attenter ä la coherence syntaxique de la phrase, ä la difference des complétives : Je te demande s'il pleut. *Je te demande. Je ne viendrai pas s'il pleut. Je ne viendrai pas. 52 • La Grammaire Les elements qui les introduisent sont invariables et n'ont pas de fonction dans la subordonnée. Les uns sont spécifiques, comme lorsque, bien que, les autres apparaissent pour introduire ď autres types de subordonnées, comme si. A la difference de que, ces conjunctions offrent une valeur sémantique : temps, concession, hypothese, etc. Certaines sont simples: si, quand.... d'autres, et c'est la majorite, sont composées d'un element porteur du sens et de que, intégré ou non dans la conjunction, qui marque la liaison : lorsque, quoique, bien que, etc. Lorsque que n'est pas intégré, on parle de locution conjonctive. On distingue plusieurs types de conjonctives circonstancielles sur la base de la conjunction (ou de la locution conjonctive) qui Ies introduit et de leur valeur sémantique qui conduit ä regrouper plusieurs conjunctions. Cette valeur sémantique étant susceptible de plus ou moins de nuances, la liste des circonstancielles et la terminologie sont aussi variables que eelles des complements circonstanciels substantivaux. Celles qui sont retenues ici n'ont done aucune valeur absolue. a. Les temporelles : elles sont introduites par une conjonction simple, quand, par des adverbes suivis de que, alors que, par des prepositions suivies par que, děs que (ces prepositions introduisent alors en fait toute la conjonctive qui peut commuter avec un SN): II s'en va děs I que l'aube pointe. \ l'aube. Ces conjunctions ou locutions marquent la simultanéité {quand, lorsque, děs que, aussitôt, etc.), ľantériorité (avant que) ou la postériorité (aprěs que). Le mode verbal (cf. p. 88) est généralement ľindicatif sauf dans les propositions qui marquent ľantériorité et oü done ľévénement est seulement envisage. Ľanalogie entrame cependant le subjonctif avec aprěs que, ancien-nement suivi de ľindicatif, ce qui est un pur emploi syntaxique, non conforme ä la valeur du subjonctif, puisque le fait a été düment constaté : II s'est arrété de pleurnicher aprěs que nous lui ayons cédé. b. Les causales : elles sont introduites par paree que, puisque, comme (qui est aussi une conjonction temporelle) pour proposer une cause, non que, sous pretexte que pour en repousser une, et soit que... soit que, pour presenter une alternative. La repartition entre ľindicatif et le subjonctif est ici conforme ä la valeur des modes, puisque ľindicatif insiste sur la realite d'une cause, et le subjonctif sur sa fausseté ou son incertitude : II n'est pas venu. non qu'il soit malade, mais parce qu'il est paresseux. c. Les finales : elles sont introduites par pour que, afin que, de maniere (ä ce) que, de peur que, qui équivaut ä pour que ne pas. Le mode est tres normale-ment le subjonctif, qui a ici sa valeur modale de volonte : II m'a telephone, pour que je lui rende ses livres. II ne m'a pas telephone, de peur que je (ne) lui reclame ses livres. La phrase • 53 d. Les consécutives : elles sont proches des finales, surtout lorsque la consequence est seulement envisagée et non posée. Elles sont introduites par de sorte que, de maniere (ä ce) que, et sont souvent annoncées dans la principále par un element corrélatif, tellement, si, tel, etc. : II est d'une telle paresse qu'il ne telephone méme plus. Le mode est tantôt ľindicatif, tantôt le subjonctif, selon que la consequence est presentee comme effectivement réalisée, ou seulement envisagée : II agit de maniere a ce que personne n'est mécontenté. vs II agit de maniere ä ce que personne ne soit mécontenté. e. Les concessives : elles sont introduites par bien que, quoique, sans que, méme si, quand bien méme, et expriment une reserve. Avec les trois premieres, le mode est le subjonctif, bien qu'il soit parfois incompatible avec le fait que ľévénement soit bien reel. Ľindicatif tend done ä se répandre avec bien que et quoique pour indiquer en particulier un futur : II n'en parlera plus, bien qu'il y pensera toujours. Avec méme si ou quand bien méme, e'est ľindicatif qui est généralement employe : Méme s'il le voulait, il n'y arriverait pas. II n'y arriverait pas, quand bien méme il le voudrait. et les temps utilises avec méme si sont ceux que ľ on utilise dans les hypoťhé-tiques. f. Les hypothétiques : elles sont essentiellement introduites par si, bien que quand (qui exprime en méme temps une reserve) puisse étre utilise, et qu'on rencontre également á condition que, suivi du subjonctif. Ľ emploi des modes et des temps dans les systěmes conditionnels, autant dans la subordonnée que dans la principále, demande quelques precisions supplémentaires. Dans ce type de subordination, principále et subordonnée sont paralleles, et constituent un systéme. II faut alors distinguer plusieurs cas, la seule constante étant que l'emploi du futur et du conditionnel est proscrit aprěs si: 1. si est suivi du present de ľindicatif : La principále peut prendre les formes suivantes : indicatif present: Si tu paries, tu es un homme mort. indicatif futur : Si tu paries, tu mourras. impératif : Si tu paries, subís-en les consequences. Ajoutons que ľon peut dans ce systéme trouver aprěs si un passé compose qui est la forme composée correlative du present (cf. p. 92): Si votre signature n'a pas été légalisée, ľ attestation n'est pas valable. Dans tous les cas, la conditionnelle envisage les faits dans leur realite. 54 • La Grammaire 2. si est suivi de l'imparfait de l'indicatif: La principále présente un conditionnel dont on sait que, morphologique-ment, il présente un morpheme d'imparfait (cf. t. 1, p. 71) si bien qu'il y a une concordance entre les morphemes flexionnels des verbes de la principále et de la subordonnée : Si la pluie s'arrétait, nous sortirions. Les faits rapportés, en raison de la valeur modale de l'imparfait et du conditionnel, paraissent plus incertains. On peut également rencontrer un imparfait de l'indicatif, avec lequel la concordance est encore plus nette : Si la pluie continuait. nous étions inondés. et qui a pour consequence de situer ľéventualité dans le passe, et ainsi de ľécarter. 3. si est suivi du plus-que-parfait de l'indicatif : On trouve encore une concordance avec la principále qui présente un conditionnel passé : Si la pluie avait continue, nous aurions été inondés. Les faits sont seulement envisages, et la condition comme sa consequence sont écartées. Ces trois systěmes sont les plus frequents. On rencontre plus rarement, dans la langue parlée, un systéme avec present de l'indicatif dans les deux propositions: Si la voiture avance, eile m'écrase. pour évoquer non une eventualite future, mais une eventualite passée qui ne s'est pas réalisée. Le francais standard dirait ici : Si la voiture avait avance, eile m'aurait écrasé. Dans la langue soutenue. surtout écrite, on peut noter dans une des deux propositions ou dans les deux le subjonctif plus-que-parfait pour évoquer une eventualite non réalisée : S'il eüt vécu, il eüt créé de grandes choses. S'il avait vécu, il eüt créé de grandes choses. S'il eüt vécu, il aurait créé de grandes choses. Les conditionnelles représentent un cas ä part dans les subordonnées, étant donne le parallélisme modal et temporel entre les deux propositions, qui appa-raissent ainsi comme interdépendantes, corrélées: la terminologie de principále et subordonnée est ici inadequate. A côté de ces propositions avec si, on peut rencontrer ďautres outils, comme au cas oú, pour le cas oň, ä supposer que, en supposant que, pour pen que, pourvu que, á condition que. La liaison entre les deux propositions n'est La phrase »55 alors pas aussi forte qu'avec si. Les modes et les temps varient selon l'outil qui est utilise. Avec an cas ou et ses variantes, dans ľhypothese ou, c'est l'indicatif conditionnel avec sa valeur modale d* eventualite qui apparait: Dans ľhypothese oü vous changeriez d'avis, faites-le moi savoir. Au contraire avec les locutions qui comportent que, c'est généralement le subjonctif qui est employe avec sa valeur ď eventualite ou de souhait: Tout ira bien pourvu que vous soyez prudents. On constate done ľ absence de correspondance stricte entre modalités et modes. Certains termes servent ä introduire une alternative, selon que... ou selon que..., soit que... soit que..., que... ou que... C'est le subjonctif qui est employe : Qu'il ait raison ou qu'il ait tort, il s'obstine. sauf avec selon que et suivant que, oů les temps de l'indicatif sont en accord avec le temps principal: Suivant qu'il arrivera lundi ou dimanche, nous fixerons notre depart au mardi ou au mercredi. Enfin, lorsque ľ on veut indiquer ä la fois ľhypothese et ľ opposition, c'est quand, merne quand, quand bien meine suivis du conditionnel ou méme si, suivis des mémes modes et temps que si qui sont utilises : Merne s'il ne vient pas, nous ne changerons pas nos projets. Quand bien méme il ne viendrait pas, nous ne changerions pas nos projets. g. Les comparatives Comme la subordination est loin d'etre l'outil le plus frequent de la relation de comparaison et que ď autre part la relation de solidarite entre les deux propositions, dont l'une comprend les elements compares, et ľ autre les elements comparants, n'est nulle part aussi étroite, et ä titre de recapitulation sur la facon dont une méme notion peut étre exprimée par différentes constructions, on envisagera ici ľ expression de la comparaison, et non pas seulement les subordonnées de comparaison. La relation de comparaison s'exprime de facon implicite par la juxtaposition et la coordination, constituant ce que la rhétorique appelle parallele : La rose ne dure qu'un matin, (et) nous ne durons que l'espace d'une vie. avec souvent ellipse du second verbe lorsqu'il serait identique au premier : Le peuple a sa colore et le volcan sa lave (Hugo). Elle est souvent explicitée par des elements comme ainsi, pareillement, de méme, oů il est permis de voir des conjonctions de coordination : La rose ne dure qu'un matin, ainsi nous ne durons que l'espace d'une vie. ■ 56 • La Grammaire ou par des elements corrélatifs, tels que plus..., plus..., tel..., tel..., etc, : Plus il a tort, (et) plus il s'obstine. Ľ element compare apparait toujours dans la seconde proposition. Enfin, la comparaison peut se marquer par la subordination ou c'est ľ element compare qui apparait le premier. On peut alors distinguer deux types de systěmes : - les systěmes corrélatifs avec que, reprenant un comparatif dans la principále : Le jardin est plus beau qu'il ne ľa jamais été. avec ellipse des elements identiques : Notre jardin est plus beau que celui de Paul. Faire accompagné d'un pronom est souvent utilise pour reprendre un verbe ď action ä un temps different: II va plus souvent au cinema maintenant qu'il ne le faisait autrefois. Les locutions conjonctives á mesure que, au fur et a mesure que renvoient ä un comparatif: II fait de plus en plus froid, ä mesure que ľ on avance dans ľ hi ver. - les systěmes non corrélatifs avec comme. Ľellipse apparait dans les conditions ordinaires: II est sage comme une image. Les subordonnées de comparaison apparaissent ainsi comme tout ä fait parti-culiěres, ä la fois parce qu'elles n'offrent pas une veritable subordination sémantique, et parce qu'elles présentent le plus souvent une ellipse. 4.3. Les relatives Elles partagent avec les interrogatives indirectes partielles le fait qu'elles ne sont pas introduites par une conjonction, mais par un element, pronom, ou determinant, qui a une fonction ou un role dans la proposition qu'il introduit. De plus, elles portent généralement sur un groupe nominal de la proposition principále, dit antecedent du relatif: La vie qu'il mene est sans intérét. ▲ Les elements introducteurs - Les pronoms : Comme les interrogatifs, ils comprennent une série simple, qui, que, quoi, dont, oil et une série complexe, formée sur lequel. a. Les formes qui comportent ľélément qu— : plusieurs principes de repartition interviennent. Lorsque le relatif est precede d'un antecedent, le critere le La phrase • 57 plus important est celui de la fonction et ľon doit distinguer les pronoms sujets, qui, ou lequel, complements directs ou attributs, que ou lequel et complements prépositionnels. Dans ce dernier cas il faut prendre en consideration deux autres critěres, et d'abord la distinction entre antecedent animé et inanimé. Pour un antecedent animé, on a le choix entre qui et lequel : Jacques est un garcon sur qui on peut compter. Jacques est un ganjon sur lequel on peut compter. Pour un inanimé, il faut de plus distinguer les antecedents sans marque de nombre et de genre pour lesquels quoi intervient nécessairement: Voilä ce sur quoi je compte. U n'a rien ä quoi se raccrocher. et les autres antecedents inanimés, pour lesquels quoi apparait comme un archai'sme et qui demandent lequel : La chaise sur laquelle il est assis est branlante. La distinction entre les formes simples et composées est alors automatique et n'est pas liée ä ľ interpretation et ä la relation de ľensemble de la relative ä ľ antecedent. II n'en va pas de méme pour les fonctions sujet, et objet direct. Qui et que sont dans touš les cas possibles alors que lequel ne l'est que dans une relative détachée de ľ antecedent par une pause (une virgule dans ľécrit): J'ai écrit aux amis qui m'avaient envoyé leurs vceux. J'ai écrit ä Jeanne, laquelle m'avait envoyé ses voeux. Lorsqu'il est possible, lequel est employe (sans qu'il soit obligatoire) de preference ä qui dans la langue littéraire pour lever une ambígui'té lorsqu'on peut hésiter entre deux antecedents : Le fils de la voisine, laquelle est malade, est trěs inquiet. soit encore pour indiquer le nombre apres entre et parmi. Lorsqu'il s'agit d'un relatif sans antecedent, ce sont obligatoirement les formes simples qui sont utilisées, avec la méme repartition que celle des pronoms interrogatifs (cf. p. 38), c'est-a-dire qui pour toutes les fonctions de ľ animé: Qui m'aime me suive. J'interroge qui je veux. et que pour ľinanimé non prépositionnel. Mais ces derniers emplois sont raris-simes : Advienne que pourra! sauf comme complement d'infinitif: Je n'ai que faire de vos excuses. 58 • La Grammaire Enfin quoi est utilise pour ľ inanimé prépositionnel: J'ai de quoi nťoccuper. II existe enfin un pronom relatif indéfini, quiconque, qui ne s'utilise que comme sujet animé dans une relative sans antecedent: Je répondrai a quiconque joindra une enveloppe timbrée. b. dont: ce relatif s'emploie souvent ä la place de de + relatif, et ce, quelle que soit la fonction de ce groupe, complement de verbe, de substantif ou d'ad- jectif: II s* est offert le voyage dont il révait depuis toujours. Je vais vous relater les attaques dont il a été victime. Voici la voisine dont il dénonce le bruit. Dont ne peut étre rappelé dans la relative ni par un pronom personnel, ni par un determinant possessif, et des phrases comme : *I1 a épousé une femme dont il déteste sa facon de s'habiller. sont ä proscrire. Enfin, dont est exclu lorsqu'il devrait completer un complement prépositionnel. On ne dira pas: *Je redoute une intrigue dont je ne suis pas dans le secret, mais Je redoute une intrigue dans le secret de laquelle je ne suis pas. c. oil: dans la langue classique, oil s'employait merne pour renvoyer ä un animé : ce fils oü je place toutes mes espérances. Actuellement, il n'est possible qu'avec un antecedent inanimé complement de lieu : Je ne connais pas la ville oů il habite vs la ville ä laquelle il pense. ou de temps : au moment oil en alternance avec an moment que. II peut étre precede ď une preposition : ľendroit d'oü je reviens. On peut ainsi dresser le tableau suivant: FONCTION SUJET COMP. PREP. COMP. ANTECEDENT ANIMÉ INANIMÉ qui + + + + + + + + + + + que + + + + + + + quoi _ - + +/- - + (neutře) lequel + + + + + + dont _ - de + + + Oil - - lieu (temps) +/- - + La phrase • 59 - Les determinants : II s'agit de lequel, morphologiquement compose de deux autres determinants, le et quel. II ne s'emploie guere que dans la langue juridique ou littéraire : Le non-respect de la priorite, laquelle infraction sera sévěrement punie... ' *•< ▲ Fonctionnement des propositions relatives On distingue pármi les propositions relatives celles qui fonctionnent ä la maniere d'un adjectif et qu'on peut appeler relatives adjectives, et celles qui, n'ay ant pas ď antecedent, fonctionnent comme des substantif s et que ľ on peut appeler relatives substantives. Les relatives adjectives sont les plus fréquentes. Elles ont avec ľ antecedent la merne relation qu'un adjectif avec un substantif (cf. p. 144): épithěte liée : Tu vois ľ enfant qui porte un cache-nez rouge? > épithěte détachée (apposition): L* enfant qui porte un cache-nez rouge, n'attrapera pas froid. attribut: Je vois ľ enfant qui court. En fait cette derniére phrase est ambiguě et peut signifier aussi bien, avec relative épithěte : je vois celui des enfcints qui court, que, avec relative attribut: je vois courir Venfant. Dans le premier cas, la pronominalisation conduit ä : Je le vois. et dans le second, ä : ' Je le vois qui court. § On distingue souvent par ailleurs les relatives determinatives et les relatives § explicatives. Les premieres permettent de préciser ou ď identifier les elements © vises dans un groupe alors que les secondes apportent seulement une caracté- •$ risation ä des elements déjä identifies. On opposera ainsi: 3 Les enfants qui portent un cache-nez n'attraperont pas froid. c (tous dans le groupe n'en portent pas si bien que certains attraperont froid) ä : o Les enfants, qui portent un cache-nez, n'attraperont pas froid. o š (aucun enfant n'attrapera froid, puisqu'ils portent tous un cache-nez). Cette % distinction recoupe partiellement la distinction entre les épithétes, souvent 2 determinatives, et les appositives, toujours explicatives. 8 Malheureusement. un certain nombre ďépithetes sont également expli- 5 catives. II faut alors recourir ä ď autres critéres que la presence d"une pause ou í ď une ponctuation, comme la possibilité pour les explicatives d'etre suppri- © mées ou remplacées par une coordination ; 60 • La Grammaire Les enfants qui jouaient dans l'eau ont attrapé froid. Les enfants ont attrapé froid car ils jouaient dans l'eau. Le probléme est qu'en réalité, avec une relative épiťhěte, un grand nombre de cas ambigus existe, et que pour savoir si le test de la coordination s'applique il faut déjä avoir determine ä quel type de relative on a affaire. De surcroit, ces questions ďinterprétation ne concernent pas seulement les relatives, mais aussi ľadjectif. Si ľon dit: Les enfants malades ne sortiront pas. s'agit-il de tous les enfants, qui sont malades et demandent á étre soignés, ou, pármi les enfants, seulement de ceux qui sont malades? Au contraire, avec ľ apposition : Les enfants, malades, ne sortiront pas. aucune hesitation n'est possible : il s'agit de tous les enfants. Dans tous les cas, ľinterprétation depend en fait du SN. Avec un nom propre, seule ľappo-sítíon et ľinterprétation explicative sont possibles; avec un nom commun, il faut prendre en consideration le determinant de N. Avec tout, par exemple, seule ľinterprétation determinative est possible : Toute parole qui s'éleverait serait mal accueillie. Toute parole un peu vive serait mal accueillie. Avec les articles, les deux le sont. Ces difficultés ďinterprétation, ainsi que ľabsence de spécificité de ces deux fonctionnements qui ne concernent pas seulement les relatives, font que ľon peut en faire ľéconomie et s'en tenir ä la distinction des relatives épithětes, appositions et attributs. Les relatives substantives sont formellement proches des interrogatives indirectes avec lesquelles elles partagent le fonctionnement des elements relatifs: Embrassez qui vous voulez. Dites-moi qui vous voulez. ví Embrassez ceux que vous voulez. Ces relatives peuvent étre : sujet: Qui m'aime me suive. objet: II aime qui lui résiste. attribut: Ce sera qui vous voulez. complement prépositionnel: Pensez ä qui vous voulez. complement circonstanciel: Promenez-vous oü vous voulez. Rappelons qu'on ne considěre pas comme relative sans antecedent les relatives en ce qui (que, etc.) oú le fonctionnement du relatif est le méme aprěs ce qu'apres n'importe quel autre antecedent. Enfin, en ce qui concerne les modes, c'est généralement ľindicatif qui est utilise, sauf aprěs un antecedent indéterminé ou qui marque ľ exception : II n'y a que Jean qui sache aussi bien la calmer. Connaissez-vous quelqu'un qui puisse s'occuper du jardin? La phrase • 61 4.4. Les interrogatives indirectes On les a regroupées pour leur unite sémantique et leur identite de fonction (ce sont des complements du verbe), bien qu'elles appartiennent ä deux categories différentes en ce qui concerne les elements qui les introduisent: les unes sont introduites par la conjunction si, et ľ interrogation est alors totale, les autres sont introduites par un pronom, determinant ou adverbe, qui joue un role dans la proposition, si bien que ľ interrogation, portant sur ce seul element est partielle : Je te demande si tu viendras / — Oui. Je te demande quand tu viendras / — Demain. En réalité, la terminologie ď interrogative indirecte est trompeuse, puisque les subordonnées, on ľa dit, ne peuvent indiquer une modalite de phrase. C'est la principále — dans les deux exemples precedents grace au verbe — qui indique la demande ď information. Et de fait, avec un verbe principal exprimant une certitude : Je sais si tu viendras. Je sais quand tu viendras. la proposition subordonnée, qui ne saurait marquer une interrogation, est exac-tement de méme nature que celle qui suit demander. a Les elements introducteurs Dans ľ interrogation totale, la seule conjonction utilisée est si. Pour les interrogations partielles, les termes interrogatifs employes sont les mémes que ceux de ľ interrogation directe (cf. p. 38) ä ľ exception des formes ce qui et ce que, en réalité formes de relatifs avec antecedent ce, utilises respectivement pour renvoyer ä ľinanimé sujet et objet au lieu de que : = Que se passe-t-il? Je te demande ce qui se passe. c Que veux-tu? Je te demande ce que tu veux. S Ce dont est employe en concurrence avec de quoi: .a Précise-moi de quoi tu as besoin. 3 Précise-moi ce dont tu as besoin. CO § et ce ä quoi avec á quoi: CD g- Dis-moi ce ä quoi tu penses. o Dis-moi ä quoi tu penses. o r: £■ Les interrogatives indirectes introduites par des pronoms ne se distinguent ^ done pas toujours des relatives sans antecedent ou de celieš dont ľ antecedent 0 est ce. C'est alors le sens du verbe introducteur qui permet généralement de q decider ä quel type de proposition on a affaire : 1 Demande-lui ce qu'il a fait aujourd'hui (interrogative indirecte) © vs Admire ce qu'il a fait aujourd'hui (relative). 62 • La Grammaire ainsi que la commutation possible ou non avec une interrogative totale intro-duite par si : Demande-lui si le film était bien. *Admire si le film était bien. ▲ Construction et fonction des interrogatives indirectes Contrairement ä ce qui se passe dans certaines interrogatives directes (cf. p. 38), mais conformément ä ľusage dans toutes les subordonnées, on ne trouve pas dans les interrogatives indirectes ďinversion du sujet: Oú vas-tu? ví Je te demande oü tu vas. L'inversion n'apparait qu'avec un pronom interrogatif attribut lorsque le sujet est un SN : Je me demande qui est ce garjon. ví Je me demande qui il est. Les interrogatives indirectes sont le plus souvent complements, mais peuvent également s'employer comme sujets: S'il doit ou non partir a fait ľ objet ďune discussion. Enfin, en ce qui concerne les modes, temps et pronoms, on observe les mémes differences avec ľ interrogation directe que dans toute autre proposition du discours indirect (cf. p. 63): II me demanda : «Qu'as-tu hi?» II me demanda ce que j'avais lu. A côté des interrogatives indirectes, on peut faire une place aux exclamatives indirectes : Je suis remplie d'admiration : comme eile est sage! J'admire comme eile est sage. 4.5. Le discours rapporté Un cas particulier de subordination est offert par le discours rapporté. II s'agit de la fa^on dont les paroles d'autrui peuvent étre citées par un autre locuteur : II m'a dit: «Comment vas-tu?» II m'a demande comment j'allais. On distingue trois types de discours rapporté, dont l'un seulement implique la subordination. Ce sont le discours direct, sans subordination, le discours indirect avec subordination, et le discours indirect libre qui est un type mixte et qui sera envisage dans 1'exercice nu 15. Le discours direct est censé rapporter fidělement les paroles (pensées) d'autrui, ou de soi-méme, lorsqu'elles ont été (ou seront) prononcées ä un moment autre que celui de ľénonciation : Je lui ai dit textuellement ceci: «Tu n'es qu'un cretin.» La phrase • 63 II est introduit par un verbe de parole (ou un substantif), comme dire, demcmder, annoncer, etc. Les paroles citées le sont apres une pause, générale-ment marquee dans ľécrit par deux points. La presence des guillemets souligne le statut particulier des mots qu'ils encadrent. II se produit en effet un phénoměne tout ä fait particulier dans ces citations directes, c'est que le repěre énonciatif change en cours ďénoncé. Ainsi, dans : II m'a annoncé son manage en ces termes : «Je me range.» les pronoms de rang 1 désignent successivement ľénonciateur principal qui prend en charge ľ ensemble de ľénoncé (m') et ľénonciateur secondaire dont sont relatées les paroles (je). On a alors affaire ä deux chronologies distinctes, définies ä partir du present constitué par chacune de ces enunciations succes-sives. De méme, c'est ä partir de chacun de ces je que se met en place la repartition des pronoms : II m'a dit textuellement ceci: «Je ne veux plus te voir.» si bien que celui qui disait je dans la premiére partie de ľénoncé est designe par tu dans la citation. Le discours direct, plus que par la vivacité qu'on lui attribue généralement, est ainsi caractérisé par un souci d'auťhenticité, de fidé-lité aux paroles rapportées, méme s'il ne s'agit lä que ďune fiction. Cest done un des rares cas, en dehors de ľautonymie (cf. t. 1, p. 131), oú il est possible de méler deux langues : II m'a dit en anglais : «I won't stand it.» Le discours indirect rétablit le fonctionnement habituel de la langue, en plagant tout ľénoncé sous la responsabilité d'un énonciateur unique grace ä la subordination. II se caractérisé en effet par la presence d'un terme de parole, suivi de que, lorsqu'il s'agit ď une declaration, de si ou d'un adverbe, pronom I ou determinant interrogatif, ou exclamatif, s'il s'agit d'une interrogative ou c d'une exclamative : 5 II m'a dit qu'il n'était plus sorti depuis plus d'une semaine. ■g II m'a demande si j'aimais Brahms, o II m'a avoué combien il détestait les huítres. g Par consequent, tous les pronoms se défimssent par rapport au seul je énon- g ciateur, et c'est lui qui constitue le repěre fondamental. Ľévénement auquel 6 correspond le verbe dire constitue le repěre second par rapport auquel se % situent les verbes de ľénoncé rapporté (cf. p. 85). Pronoms, modes et temps q- sont done différents de ceux du discours direct, comme on le voit dans les -1 tableaux suivants : d ° Modes: 1 >X DD DI • í ' indicatif indicatif © impératif subjonctif ou infinitif 64 • La Grammsire Temps : verbe introducteur present futur temps du passé DD DI meines temps memes temps present imparfait passé plus-que-parfait futur conditionnel Pronoms: PRONOM DANS LE DISCOURS RAPPORTE DIRECT je tu (= interlocuteur) tu (* interlocuteur) il (interlocuteur) il (* interlocuteur) tu (=je énonciateur) tu (* je énonciateur) il (=je énonciateur) il (/je énonciateur) INDIRECT je tu il tu il tu je il je il tu ( = je énonciateur) tu (= interlocuteur du je énonciateur) tu (* des deux) il (= je énonciateur) il (= interlocuteur duje énonciateur) il (* des deux) Ainsi, on peut opposer : u je tu il je tu et et Tu lui as dit (en parlant de raoi) : «Elle est complětement folie.» Tu lui as dit (en parlant de moi) que j'étais complětement folie. II m'a dit (en parlant de toi) : «II viendra demain.» II nťa dit (en parlant de toi) que tu viendrais demain. Ä ces differences formelles, on ajoutera une difference d'emploi: c'est que le discours indirect n'implique pas une fidélité totale aux paroles d'autrui. puisqu'il suppose une modification au moins de la forme de ces paroles, merne si la signification est censée rester inchangée. Ainsi, les propos en langue étrangére devront étre traduits. La oil le discours direct présente done deux points de vue successifs. le discours indirect aligne tout dans ľunité ďun seul, responsable en definitive de ľ interpretation des paroles rapportées. La phrase • 65 Entraínez-vous 8. La repartition entre c'est ef il est But de ľexercice: étudier la distribution ďunités presque semblables. Soit le corpus : 1. C'est une mere admirable. 2. Elle est mere avant d'etre épouse. 3. II est malin. 4. Cest malin. 5. C et enfant, il est vraiment difficile ä supporter. 6. Un enfant, c'est vraiment difficile ä supporter. 7. C'est professeur, et En proposition subordonnée, la langue écrite connait les quatre formes et §" pratique un ajustement morphologique appelé généralement concordance des % temps. II s'agit d'un phénomene caractéristique de la syntaxe de subordination, a selon lequel les formes de la principále et de la subordonnée sont en accord, le -! present entraínant le present, sous sa forme simple ou composée, et ľ imparfait (le g passé simple et le conditionnel), ľ imparfait sous sa forme simple ou composée : g je souhaite qu'il réussisse / qu'il ait réussi 1 je souhaítais qu'il réussit / qu'il eüt réussi. © C'est un systéme qui sort de plus en plus de ľ usage. 88 • La Grammaire b. Les valeurs modales La encore il convient de distinguer les emplois en principále et les emplois en subordonnée. 1. En principále et indépendante II s'agit essentiellement des nuances de la volonte, qui n'est que ľ une des valeurs qui apparaissent en subordonnée. Le commandement est rare mais possible aux personnes 3 et 6 ou n'existe pas de forme ďimpératif : Qu'il vienne! Proches de ces emplois sont ceux ou le subjonctif indique un souhait avec ou sans que: Le ciel nous en preserve! Vienne la nuit, sonne ľheure (Apollinaire). Ce sont des emplois littéraires ou figés qui apparaissent alors meme dans la langue populaire : Qu'il crěve! De toute facon, ils ne sont pas productifs. Ils sont souvent accompagnes ďune inversion comme dans ľexemple ď Apollinaire. Le seul emploi vivant de ce type de subjonctif est aprěs pourvu que : Pourvu qu'il ne lui soit rien arrive! Enfin, le subjonctif en principále peut marquer ľéventualité, bien qu'il s'agisse la encore ď emplois de plus en plus rares qui caractérisent certains types de discours, comme le discours didactique : Soient deux droites perpendiculaires. Soient les phrases suivantes... ou certaines attitudes, comme ľindignation ou le refus : Moi, que je lui fasse des excuses! Cest ce type ď emploi qui apparait, precede de que dans des systômes hypo-thétiques sans subordination (cf. exercice n° 10) : Qu'il vienne, et il verra. En fait, tous les emplois du subjonctif en principále, en dehors de locutions figées ou ď emplois avec verbes modaux (dussé-je; puissé-je) sont rarissimes si bien que le subjonctif parait surtout lié aux subordonnées. 2. En subordonnée II faut distinguer les emplois dans les circonstancielles, dans les complé-tives et dans les relatives. Dans les premieres, le subjonctif est souvent mécanique, bien qu'il soit parfois concurrence par ľindicatif lorsque la subordonnée implique un fait actualisé, alors que dans les autres propositions, oü ľ on a souvent le choix entre indicatif et subjonctif, il présente plus fréquem- Le verbe * 89 _ Les circonstancielles On n'examiner a ä titre d'exemple que les circonstancielles ternporelles, les autres le seront dans les exercices (cf. exercices nos 17 et 18). On s'attendrait ä ce que ľindicatif soit utilise aprés les conjonctions ou locutions conjonctives qui actualisent un événement: Depuis que ľorage a éclaté, je respire mieux. et le subjonctif dans le cas contraire : En attendant qu'il vous receive, installez-vous confortablement. Mais les hesitations qui se sont fait jour au cours des siěcles montrent le conflit entre valeur modale et role syntaxique. Par exemple, au xvile siécle, jusqu'á ce que se construisait avec ľindicatif pour parier d'un fait accompli et düment constaté : Le sang enivre le soldát jusqďä ce que ce grand prince... calma les courages émus (Bossuet). et avec le subjonctif quand il s'agissait ď une chose ä venir et incertaine, alors qu'aujourd'hui le subjonctif est de regle dans tous les cas. De méme, ľindicatif devrait étre employe avec aprés que, qui situe trés précisément un événement dans une chronologie antérieure. Or le subjonctif est la aussi de plus en plus frequent, sans doute par analogie avec ce qui se produit aprés avant que, avec pour seule valeur un role syntaxique. D'une maniere generale, on peut dire que, dans les circonstancielles, le jeu du subjonctif est ainsi obscurci par la concurrence entre les valeurs modales (volonte et eventualite) et syntaxiques. ^ - Les complétives "% lei, les verbes (substantifs, adjeetifs) Operateurs de la principále expriment § souvent eux-mémes la modalite. Mode et modalite sont alors en rapport de S complémentarité réciproque et le subjonctif s'explique plus rarement pour ■g des raisons de simple subordination. On peut distinguer trois types de verbes, 2 les volitifs, vouloir, ordonner, les subjectifs, se désoíer, se féliciter, et les £ dubitatifs, douter. c Avec les volitifs ľ emploi du subjonctif est quasi automatique, sauf pour un g. certain nombre de verbes qui marquent une resolution trěs ferme: arréter, o décréter, disposer, decider, établir, proscrire, regier, résoudre et stipuler, |[ avec lesquels ľindicatif marque que le fait est envisage comme ineluctable : Je propose qu'il vienne. Í Je decide qu'il viendra. ^ ^ 1 ľt non ndée de volonte ou de souhait. © 90 • La Grammaire II faut vraiment souhaiter qu'ils réussiront. ví II faut vraiment souhaiter qu'ils réussissent. Les subjectifs sont des verbes ou des constructions qui impliquent un juge-ment, une appreciation du locuteur, comme // semble, je regrette que, le malheur est que... Pourtant, alors que le lexique marque la modalite, le subjonctif n'est pas automatique. Le fait qu'on ait souvent le choix : Le malheur, c'est qu'elle ne sache pas se taire. Le malheur, c'est qu'elle ne sait pas se taire. démontre que le subjonctif, lorsqu'il est employe, a sa pleine valeur modale et renvoie ä un fait simplement envisage. Enfin les dubitatifs comprennent des verbes ou des expressions dont le lexique exprime le doute et surtout des verbes ou expressions qui ne ľexpri-ment pas mais qui sont ä une forme énonciative qui ľimplique, comme ľinterrogation, ľinsertion dans une hypothétique, ou la negation ďun verbe de certitude : Si je savais que | Qui pourra croire que > nous puissions réussir! Je ne crois pas que J Dans tous ces cas-lä, le contexte est clairement modal, et c'est le subjonctif qui est le plus employe. Ajoutons une pure contrainte syntaxique : lorsque la completive precede le terme qui la regit, eile est automatiquement au subjonctif et on peut opposer : Qu'il puisse le faire, je le crois. et Je crois qu'il peut le faire. - Les relatives L'indicatif est d'usage normal. Cependant, le subjonctif est possible, mais non automatique, lorsque la principále marque une exception, avec un superlatif: II a commis I 'action la plus basse qu'on puisse imaginer. ou un adjectif ou une locution de sens restrictif: Je ne connais qu'une personne qui ait ee type d'audace. Comme précédemment, la presence d'une negation ou d'une interrogation en principále suffit a entrainer le subjonctif: Connais-tu quelqu'un qui sache le chinois? mais la forme en -rait peut généralement lui étre substituée : Connais-tu quelqu'un qui saurait le chinois? Pour conclure, on notera en premier lieu la dissymétrie entre l'emploi du subjonctif en principále, ou il est rarissime, et son emploi en subordonnée oú il est vivace. Cette remarque conduit ä poser le rapport du mode et de la Le verbe «91 subordination. II convient alors de distinguer trois cas dans l'emploi en fran-cais du subjonctif en subordonnée : a. Les cas oů l'indicatif et le subjonctif s'opposent: L'important, c'est qu'il est la. vs L'important, c'est qu'il soit la. La distinction est alors modale. b. Les cas oü ľoccurrence de l'indicatif ou du subjonctif est en accord avec une modalite indiquée ailleurs par le contexte : Je crois qu'il vient. vs Je ne crois pas qu'il vienne. La forme du verbe est alors seulement compatible avec le contexte dans lequel eile figure. c. Les cas oü il n'y a plus aucune correlation entre la forme et la modalite du contexte. En ce cas, l'apparition de ľoccurrence est purement syntaxique. II est clair qu'une des difficultés de ľétude du subjonctif tient ä ľexistence de ces trois cas, ainsi qu'aux glissements qui peuvent toujours s'opérer de l'un ä ľ autre. 2.3. Les temps et les aspects a Definitions. Sous le nom de temps, on designe deux choses, qu'il convient de bien séparer : les tiroirs verbaux, c'est-ä-dire les morphemes flexionnels du verbe, et leur eventuelle valeur temporelle, c'est-a-dire leur relation ä la chronologic. Outre cette valeur temporelle, ils peuvent également presenter une valeur aspectuelle. On commencera done par définir la chronologie et ľaspect avant ď analyser le detail de chaque tiroir verbal. II faut distinguer deux types de chronologie, selon qu'elles s'établissent ä partir du moment de ľénonciation (R = L), ou bien ďun repére distinct (R ž L). La premiere est ce qu'on appelle chronologie absolue : on y ä distingue le present, qui sert de point de reference, le passé et le futur, époques S qui se déterminent par rapport au present. Cette premiére chronologie est déic- = tique, puisqu'elle se définit ä partir de ľénonciation. »> La deuxiéme est la chronologie relative : eile suppose un point lui-méme m situé par rapport ä ľénonciation, en chronologie absolue, qui va servir de point ■2 de repére pour un autre événement qui, lui, sera non plus passé ou futur, mais ™ simultane, anténeur ou postérieur. Cette chronologie n'est pas déictique. Dans ° la premiére chronologic c'est ľ opposition passé/présent/futur qui compte, g. dans la seconde, c'est ľopposition plus tôt (avant)/ en méme temps/plus 0 tard (apres). La premiére chronologie n'est pas stable, car ce qui est par 4 exemple present maintenant sera passé demain, alors que la seconde ľ est: si .3 un événement a eu lieu avant un autre, il lui sera toujours antérieur. § Quant ä ľaspect, il est tres difficile ä définir. On dira de facon generale 8 qu'il s'agit de la maniere dont le sujet envisage ľévénement dans son i déroulement, et non plus, comme le mode, dans son degré de realisation. Si 1 cette definition est relativement simple, eile se complique děs que ľ on essaie @ de défmir les différents types ď aspects. La premiére difficulté tient ä ce que 92 • La Grammaire ľ aspect n'a pas de marque flexionnelle propre. De plus, ľ aspect et la chronologie sont souvent lies et il est clair par exemple qu'il y a une relation entre l'aspect achevé et le passé : II partit par un beau jour ďété. Enfin, ä la difference du temps et plus que le mode, ľaspect tient ä la fois au lexique du verbe, ä ses marques flexionnelles et ä la construction gram-maticale. Ainsi on peut opposer le sens de verbes comme naitre ou mourir, ä celui d'un verbe comme vivre (cf. exercice n" 19), un tiroir verbal comme /'/ chantait ä il chanta, et une construction simple comme il chcmte ä une construction périphrastique comme il commence ä chanter. Différentes periphrases verbales se combinent en effet avec l'infinitif pour indiquer le debut, le déroulement ou la fin d'un proces (cf. exercice n° 19): ětre sur le point de commencer ä avoir fini de venir de, etc. ▲ Valeurs chronologiques et aspectuelles des tiroirs verbaux de l'indicatif. Cest en effet essentiellement ä ce mode que le verbe peut presenter différentes valeurs chronologiques, puisqu'il est le seul ä combiner énonciation et actualité. Tout tiroir verbal est susceptible, dans des proportions variables, de valeurs modales, aspectuelles et chronologiques. Comme d'ailleurs dans les autres modes, il convient de distinguer deux series de formes, les unes simples et les autres composées. puisqu'elles sont formées d'un auxiliaire, avoir ou ětre, et d'un participe passé. Ä une forme simple correspond toujours une forme composée de méme niveau. On a ainsi: simples composées present passé compose imparfait plus-que-parfait passé simple passé antérieur futur futur antérieur conditionnel conditionnel passé. On peut remarquer combien la terminologie est sur ce point trompeuse puis-qu'eľle ne met pas en relation les formes semblables et rapproche au contraire des tiroirs verbaux trěs différents, du moins du point de vue morphologique. Ainsi, le present de l'indicatif se trouve coupé du passé compose que ľ on devrait plutôt appeler present compose et qui est rapproche du passé simple sur lequel il n'est pourtant pas forme. C'est que la terminologie hésite entre un principe morphologique et un principe sémantique. Signaions que certains francais (langue trěs soutenue ou francais regional comme les francais meridional ou romand connaissent méme des formes surcomposées: j'ai eu chant é, j'avals eu chanté, j'aural eu chanté, j'aurais eu chant é.) Un dernier point ä souligner est que ľintégralité de ces deux series ne caractérise que la langue écrite et que le systéme de ľoral est plus restraint, Le verbe * 93 puisqu'il ignore le passé simple et le passé antérieur. Le nombre des formes étant done different dans la langue écrite et dans la langue parlée, il est evident que les valeurs seront différentes. - Les formes simples. A l'indicatif, elles sont done au nombre de quatre. Le present fonctionne comme forme non marquee. Et ce, d'abord sur le plan morphologique, puisqu'il ne présente pas de morpheme particulier, mais aussi en ce qui concerne son emploi, puisque le present est susceptible de remplacer n'importe quelle autre forme verbale, ce qui est la definition méme d'une forme non marquee. Et, par consequent, il est susceptible de renvoyer aussi bien au present du locuteur : En ce moment il fait beau. qu'ä son passé : Hier, ne voilä-t-il pas que je rencontre Jacques! ou ä son futur : Je pars la semaine prochaine en vacances. D'une facon generale, on peut dire qu'en l'absence de toute indication contraire, une forme de present sera automatiquement rapportée ä ľactuel, c'est-ä-dire aux conditions de ľénonciation : ľ événement et le moment de ľénonciation coincident, ou plutôt sont vus comme coi'ncidant. Cela explique que le present puisse s'employer pour renvoyer ä un événe-ment objectivement passé ou futur, s'il est percu comme faisant partie de la sphere, toujours extensible, de ľénonciation. Le present peut évidemment renvoyer ä un événement (approximative- ^ ment) contemporain de ľ acte ď énonciation : •0 c J'entends des pas. Z Je te promets de venir. ■S Mais il peut aussi presenter une valeur generale et ľ on parlera de present § gnomique : n Souvent femme varie. c c ou de present ď habitude selon les contextes : 5. . ' 8 La siréne sonne tous les mereredis ä midi. o ■g. Ils s'expliquent par la valeur aspectuelle du tiroir, car, si sa valeur chronologique 5 est difficile a établir avec precision, il n'en va pas de méme de sa valeur aspec- | tuelle : il ne peut marquer que des aspects compatibles avec ľinaccompli et en 8 aucun cas les limites, debut ou fin, de ľ action exprimée ne sont prises en compte. I Dans ď autres emplois. le present ne renvoie pas ä un événement objecti- | vement contemporain de ľacte d'énonciation puisqu'il est situé dans le passé © ou le futur. On a alors généralement besoin ď indices dans la situation : 94 • La Grammaire Qu'est-ce que tu fais? — J'arrive! ou dans le contexte : - presence de la conjonction si dont la valeur hypothétique confere au present valeur de futur : S'il pleut, je ne sortirai pas. - marques temporelles du passé (datations, adverbes, autres tiroirs verbaux) comme pour le present historique utilise, comme son nom l'in-dique, dans des textes oil la chronologie est clairement indiquée : Chateaubriand meurt le 4 juillet 1848. Bien qu'on ľen distingue souvent, on rapprochera de ce present le present de narration, qui sert ä évoquer des événements passes dont le souvenir est parti-culiěrement vivace ä la conscience et qui suppose également un contexte passé : Ä peine Julie m'eüt-elle apercu qu'elle me reconnüt. Ä ľinstant, me voir. s'écrier, courir, s'élancer dans mes bras ne fut pour eile qu'une méme chose. Ä ce son de voix je me sens tressaillir; je me retourne, je la vois. je la sens. (Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloíse). Dans certains romans modernes, on trouve un present continu : La petite fille quitte la fenétre et se met ä chanter un chant étranger dans une langue qu'elle ne comprend pas. Elle n'a pas encore tout ä fait fermé le rideau de la fenétre et on voit encore clair dans la chambre. Elle se regarde dans la glace. Elle voit des cheveux noirs et la clarté des yeux (Marguerite Duras, Aurélia Steiner). Dans la mesure oú aucune datation n?est requise, l'effet n'est pas le méme. Cet emploi est une sorte de present d'aplatissement, gommant touš les reliefs de la chronologie pour évoquer la durée étale de la conscience de ľénonciateur. Touš ces presents caractérisent surtout ľécrit. II en est qui au contraire se rencontrent essentiellement dans la langue parlée. Dans l'exemple suivant: Si la voiture avance, je suis mort. qu'il faut interpreter non pas comme se rapportant au futur, mais indiquant une eventualite qui, fort heureusement, ne s'est pas réalisée, c'est le contexte into-natif et la situation qui permettent de voir que le present porte sur le passé. Signaions enfin le cas particulier du present passif: la presence du parti-cipe passé, ä valeur d'accompli, fait qu'une phrase comme : Ce travail est fait en dépit du bon sens. peut s'interpreter soit comme renvoyant ä un proces en train de se faire, soit comme indiquant le résultat present ďun proces accompli et passé. En pared cas, le participe passé fonctionne plutôt comme un adjectif attribut aprěs le verbe etre que comme element servant ä former le passif (cf. p. 99). Le verbe • 95 L'imparfait est en continuité aspectuelle avec le present, puisque, comme lui, il est impropre ä l'accompli et ne marque pas les limites du proces. II repré-sente la transposition du present dans le passé et il sert essentiellement ä marquer la simultanéité. C'est de sa valeur aspectuelle fondamentale qu'il tire la majorite de ses effets, selon le contexte : imparfait d'habitude, imparfait descriptif qui pose un cadre sur lequel vont se detacher des faits saillants. Dans touš les cas, il exprime un temps percu comme continu. Employe en contraste avec un passé simple, il introduit autour de lui un fond de continuité. II a évidemment peu ďaffinités pour les verbes indiquant une action ponc-tuelle bien qu'il ne soit pas exclu. Mais il n'est pas indifferent ďécrire : En 1768 naissait ä Saint-Malo M. de Chateaubriand. au lieu ďutiliser le passé simple. Si rien n'est change en ce qui concerne la chronologie, ou le type de proces impliqué par le lexique du verbe, l'imparfait introduit un prolongement, et fait de cette naissance un événement prometteur gros de consequences, lä oú le passé simple aurait simplement inséré un événement dans une série. Signalons enfin la valeur modale qu'il tire peut-ětre de son imprecision aspectuelle : il peut atténuer les contours de la realite, évidemment aprěs si dans 1'hypothěse, mais méme employe seul dans des usages charges affecti-vement et dit hypocoristiques, comme dans l'imparfait que l'on utilise avec les enfants ou les animaux : Qu'il était joli, ce petit bébé! ou ľutilisation de la troisiéme personne au lieu du tu renforce l'effet de mise ä distance, ou dans les emplois dits de politesse oú il atténue la brutalite ďune demande : Je voulais vous demander un service. Dans ce dernier emploi, il est ä mettre en série avec ď autres tiroirs verbaux, de plus en plus atténuatifs : Je voudrais vous demander un service. J'aurais voulu vous demander un service. On peut enfin employer l'imparfait dans une chronologie relative : on ľap-pelle parfois imparfait de perspective et il marque que ľ événement est vu dans la continuité du repěre auquel il est donne comme simultane : lis m'ont avoué (El) qu'ils détestaient (E2) ce film. L ------------El = R-------------------------------------------------------- . E2 Comme dans cet exemple, cet emploi est particuliěrement frequent dans le discours indirect. Le passé simple renvoie au passé comme l'imparfait mais il indique les limites de Taction. II aura done une affinité avec les verbes qui renvoient ä une 96 • La Grammaire action circonscrite et présentent done un aspect perfectif (cf. exercice n° 19). II n'est pas en continuité avec le present et indique que les événements évoqués, révolus une fois pour toutes, sont tenus ä distance de la conscience du locuteur. Cest ce qui explique que ce soit un temps frequent dans le discours historique. II est particuliěrement apte ä situer les faits dans une série ď événements et il marque alors la succession : Quand nous accostámes le móle, les gendarmes et les douaniers sautěrent sur le pont, visitěrent nos bagages et nos passeports (Chateaubriand, M. O. T.). Cest évidemment lorsque passé simple et ímparfait sont employes en contraste dans un méme énoncé que la valeur aspectuelle de chacun d'eux est particuliěrement sensible : le passé simple permet de detacher un événement la oů ľimparfait décrit un cadre : J'étais frappé de ľair pauvre du pays : ä peine quelques máts se montraient dans le port: une population en carmagnole et en bonnet de coton s'avanjait au devant de nous le long de la jetée : les vainqueurs du continent me furent annoncés par un bruit de sabots (Chateaubriand, M. O. T.). Dans l'exemple qui precede, le passé simple, aprěs les deux points allusifs, souligne la brutalite de la conclusion en forme de constat. Signalons enfin que le passé simple n'est pas utilise en chronologie relative et qu'il ne semble pas avoir de valeur modale. Le futur permet de situer le proces dans la chronologie absolue, dans une époque ä venir par rapport au moment de ľénonciation. Cette époque peut étre plus ou moins lointaine et ce ne sont que des determinations contextuelles qui permettront de parier de futur proche : Je partirai dans quelques minutes, ou lointain : Je partirai dans une eternite, ä supposer que cette opposition, toute relative, ait vraiment un sens Iinguis-tique. Sa valeur aspectuelle est la méme que celie du present, mais il a en commun avec le passé simple, dont il comporte la terminaison aux personnes du singulier, de pouvoir suggérer un fragment de temps autonome et discon-tinu et de renvoyer ä des faits qui se succédent ä ľintérieur ďune série. II lui est done possible de marquer la succession, comme le passé simple : Demain, je me lěverai tôt. Je boirai rapidement un café et je me mettrai au travail, ou de ne pas la marquer, comme ľimparfait: Nous disparaitrons sans retour : vous renaitrez. oeillet de poete [...]; mais nous, nous ne revivrons pas (Chateaubriand. M.O.T.). Du fait qu'il situe ľévénement dans ľavenir, le futur a une inevitable valeur modale. Comme ľimparfait, il est apte ä atténuer les contours de la realite et sera done utilise pour traduire ľhypothése en ľabsence méme de toute indication contextuelle : Le verbe • 97 Quel est ce bruit? Ce sera le vent. ou pour atténuer une affirmation : Vous avouerez qu'il y a de quoi s'inquiéter. Mais il peut aussi exprimer la volonte et a la méme valeur que ľiihpératif, comme dans les dix commandements : Tu ne tueras point. Le conditionnel, enfin, a une valeur temporelle moindre que sa valeur modale. Lorsqu'il marque le temps, il ne peut s'employer en chronologie absolue, mais seulement en chronologie relative par rapport ä un repěre passé auquel ľévénement qu'il vise est postérieur, ďoů le nom qu'on lui donne parfois de futur dans le passé : II m'a dit qu'il viendrait. II est évidemment trěs frequent dans le discours indirect introduit par un verbe de parole au passé. Sa valeur modale est fondamentale, e'est celie de ľéventualité et il s'em-ploie lorsque la probabilitě de realisation est moindre qu'avec un futur : On proposera une reforme au printemps. vs On proposerait une reforme au printemps. - Les formes composées. Elles ont en commun d'exprimer l'aspect accompli, puisqu'elles comportent une forme de participe passé dont e'est la valeur. Elles peuvent s'employer seules, en chronologie absolue, mais, en dehors du passé compose, le plus souvent en chronologie relative. Le passé compose sert ď accompli au present, tiroir de ľauxiliaire qui ;^ permet de le former, et il a alors des emplois paralleles ä ceux du present, par c exemple renvoyer au futur : ™ Tu arrives? — J'ai fini de me preparer dans une minute! $ Mais de ľaccompli ä ľantérieur, il n'y a qu'un pas, si bien que le passé | compose sert souvent de passé. II fonetionne alors différemment selon qu'il c s'agit de la langue écrite ou de la langue parlée. Dans les deux cas, le repére ° étant L, on est dans une chronologie absolue, mais les emplois sont évidem-g- ment plus larges a ľoral, qui ignore le passé simple. Dans la langue écrite, le o passé compose, en concurrence avec ce dernier tiroir, s'en distingue en ce ^ qu'il permet ďévoquer des événements passes, certes révolus, mais dont les 3 consequences sont encore présentes ä la conscience, comme le montre dans s l'exemple suivant ľemploi du futur qui le suit: o q En passant dans Villeneuve, je jetais un regard sur la rue deserte et sur la < maison fermée de mon ami. La derniěre fois que cela m'arriva, j'allais en | ambassade ä Rome [...] II a plu ä Dieu ďouvrir ä M. Joubert une Rome © celeste [...] Je ne le rencontrerai plus ici-bas (Chateaubriand, M.O.T.). 98 • La Grammaire Dans la langue parlée, le passe compose cumule les valeurs qu'il a ä ľécrit avec celieš du passé simple. Le plus-que-parfait, en chronologie absolue, sert ä indiquer ľ accompli de ľimparfait, qui, on ľa vu, ä Iui tout seul, ne peut indiquer cet aspect: Ä huit heures, la nuit était déjä tombée. II est alors compatible avec n'importe quel temps du passé : La nuit était déjä tombée quand il sortait. La nuit était déjä tombée quand il sortit. La nuit était déjä tombée quand il est sorti. En chronologie relative, il marque ľantériorité par rapport ä un repére passé, exprimé par ľimparfait: II m'a dit que, quand il avait fini, il sortait. Le futur antérieur sert de la merne facon ä indiquer 1 accompli du fütur dont il a les valeurs modales : II n'est toujours pas la. II se sera arrété en chemin. En chronologie relative, il marque ľantériorité par rapport ä un repěre futur : II dit qu'il partira quand il aura fini. Le conditionnel passé marque ľ accompli du conditionnel: Les deux armées adverses se seraient exterminées. ou ľantériorité : SMI faisait beau, je sortirais quand j'aurais terminé. Le passé antérieur, rare, puisqu'il est forme sur le passé simple, est un accompli du passé ou sert ä marquer ľantériorité du passé simple. Signaions enŕin qu'on analyserait les formes surcomposées par rapport aux formes composées de la merne facon que celles-ci par rapport aux formes simples. Ľexamen, merne rapide, des tiroirs verbaux, permet ainsi de faire appa-raítre la complexité du systéme ou la combinaison des différents types de valeurs, temporelles, aspectuelles et modales produit une gamme ďeffets, varies et trěs souples. Leurs utilisations stylistiques, que certains exemples littéraires auront permis ďentrevoir, en sont la consequence directe (cf. exercice n° 20). 3. Formes et voix Dans les langues anciennes, le verbe est caractérisé également par la voix, on dit parfois la diathěse, qui indique la facon dont le sujet du verbe participe au proces : par exemple, dans ľactif, il est agent, alors que dans le passif, il est patient et subit ľ action. Dans les langues modernes, les f aits sont beaucoup moins clairs, si bien que ľ on aura ä se demander si des constructions comme i.e verhe • 99 le pronominal ou le passif méritent le nom de voix ou sont seulement des formes particuliěres du verbe. 3.1. ľactif et le passif Le passif est défini en liaison avec ľactif, c'est-ä-dire qu'ä une forme : SNI V SN2 Des coups ébranlent la porte. est associée une forme : SN2 est Vpp prép SNI La porte est ébranlée par des coups. Le verbe offre done une autre construction : le complement ď objet de la construction active est le sujet du passif, et, dans quelques cas trěs rares, il en va de merne d'un complement indirect: Tous obéissent ä Jacques. Jacques est obéi de tous. Ce sujet ne se distingue pas des sujets des constructions actives : les phénoménes ď accord sont les mémes et ľ on peut avoir une coordination entre passif et actif : II a été mordu par un chien et il a beaucoup souffert. Enfin le sujet de la construction active est complement prépositionnel precede de par, de et parfois dans dans la construction passive équivalente : La carafe contient du vin. Le vin est contenu dans la carafe. Chacun de ces points est soumis ä un certain nombre de conditions particuliěres et de restrictions : '■S a. Le sujet: 5 Le passif est plus frequent lorsque SN2 est un animé, car la tendance de la "§ phrase franchise est, semble-t-il, ď aller de ľ animé ä ľinanimé. On dira done -8 plus volontiers : ■§ Le passant a été renversé par une voiture. c que : Une voiture a renversé le passant. .© D'autres facteurs concernant le sujet sont analyses dans ľexercice n° 21. o o b. Les verbes: -§_ Le lexique influe sur la formation du passif (cf. exercice n° 21). On doit égale- 5 ment s'interroger sur la construction en étre + participe, qui existe en dehors í merne du passif, avec certains verbes intransitifs : o q Paul est sorti. | ou avec des verbes transitifs avec lesquels étre attributif peut étre suivi ďun @ participe passé adjectival: 100 • La Grammaire Le mur est démoli. Pour pouvoir parier de passif, il faut pouvoir mettre en parallele la construction avec une forme active. Si ce n'est pas possible, comme dans: La mer est salée. que personne ne songerait ä rapprocher de : On sale la mer. on ne parlera pas de passif. De plus, il faut signaler qu'il n'y a pas toujours concordance ďaspect entre ľactif et le passif : lis construisent la maison. implique un déroulement, alors que : La maison est construite. implique, sauf contexte tout ä fait particulier, un aspect accompli, lié ä la presence du participe passé. Le passif n*est toujours en concordance avec ľactif que pour les verbes statifs qui marquent un état: Une nappe recouvre la table. La table est recouverte ďune nappe. Au contraire, il y aura décalage lorsque recouvre, avec sujet animé, implique une action en train de se faire : Je recouvre la table d'une nappe. c. Le complement d'agent: II est introduit par une preposition qui est le plus souvent par, parfois de ou une preposition de lieu. Anciennement, il pouvait aussi l'etre par á (mangé aux mites). De est utilise avec des verbes statifs, souvent psychologiques : Elle est hale de tous. Ľ est passionné de theatre. Ce complement peut généralement étre omis, mais ľomission d'un animé est plus fréquente que celie d'un inanimé et certains complements, en particulier lorsque le verbe est pris au sens figure, sont obligatoires : Mille arriere-pensees sous-tendent la conversation. La conversation est sous-tendue par mille arriere-pensees. *La conversation est sous-tendue. Si done il est aisé de formuler la regle de formation du passif, on voit combien son application pose de problěmes dans le detail. En ce qui concerne leurs valeurs sémantiques, il faut se garder d'attribuer ä actifet h passif leur sens étymologique. Tout comme actif n'est pas ä relier nécessaírement ä action produite, passif ne peut pas l'etre ä action subie. Par exemple dans: Le verbe • 101 II existe. ■ -.. le proces renvoie ä un état, dans : II souffre. le sujet n'est pas agent, mais patient, dans : II retjoit une lettre. il est le bénéficiaire de Faction, etc. Ľactif présente done toute une gamme de valeurs sémantiques (cf. p. 122 ä propos des valeurs des sujets). De méme en va-t-il pour le passif. Dans: Des coups lui furent donnés. ce ne sont nullement les coups qui subissent Faction, mais bien celui qui est designe par lui. Le passif n'exprime pas non plus un état, comme le prouve le fait que, selon le lexique du verbe, il est compatible avec étre en train de, alors que les verbes d'état ne le sont pas (cf. exercice n° 19) : Cette maison est en train d'etre reconstruite. ví *Cette maison est en train de pencher comme la tour de Pise. II semble done que la seule unite que Fon puisse attribuer au passif soit dans ľéchange des rôles syntaxiques de sujet et de complement, et dans la possi-bilité de supprimer le complement prépositionnel. Mais en consequence, ä côté du passif, il faut envisager d'autres constructions ou se manifestent ces mémes phénoměnes, comme les constructions en se faire ä sens non causatif: II a été piqué par un frelon. II s'est fait piquer par un frelon. (dans les deux c as, frelon est construit avec la preposition par), ou celles qui 1 component des verbes reversibles (cf. exercice n° 24): 2 La cuisiniěre cuit le gäteau. $ Le gäteau est cuit par la cuisiniěre. 'g Le gateau cuit. | On voit que le méme sens peut étre exprimé par des constructions fort diffé-§ rentes si bien qu'on peut rencontrer des expressions ambigués comme : i. II a fait manger ses poules. o % qui peut étre : °- II a donne ä manger ä ses poules. -1 ou II a donné ses poules ä manger. g Si Fon cherche done une valeur commune a toutes les constructions en SN2 § est Vpp par SN1, il est clair qu'on n'en trouvera pas. Force est de trouver son 1 unite dans un fonctionnement syntactico-sémantique tel que ľéchange des © rôles et de la place des elements avec lesquels se construit le verbe. 102 • /.a Grammaire 3.2. Les verbes pronominaux lis ont un fonctionnement et des valeurs différents, mais offrent une definition formelle commune : - la presence d'un pronom conjoint de méme rang que le sujet :je me, tu te, il se, etc. Aux personnes 3 et 6, c'est se (cf. p. 150) qui apparait et non le (la, les). - l'emploi constant de ľauxiliaire étre aux temps composes : II s'est enfui. Elle s'est habillée. vs Elle a habillé sa fille. On peut néanmoins. ä ľintérieur de cette catégorie generale, distinguer quatre types différents : - les réfléchis: II se lave. La construction pronominale peut alors étre opposée ä une construction non pronominale du méme verbe : II lave sa voiture. qui permet de comprendre quelle est la fonction du pronom, direct d*objet dans ľexemple precedent, mais indirect dans le suivant: II s'est attribué tout le mérite. II a attribué tout le mérite ä Jean. et de savoir qu'aux temps composes le participe reste invariable dans le second cas : Elle s'est donnée tout entiěre ä cette activité. vs Elle s'est donne des regies. - les réciproques: lis se battent entre eux. II s'agit en fait d'un cas particulier du precedent, oů le sujet est obligatoire-ment pluriel. Les réciproques peuvent étre paraphrases par mutuellement, réciproquenient. ľun ľ autre (les uns les autres). Ce sont du point de vue du lexique géneralement les mémes verbes que les réfléchis et ľ on rencontre ainsi un grand nombre d'emplois ambigus: lis se sont plaints (mutuellement ou chacun de son côté). - les verbes dits essentiellement pronominaux: Elle s'est évanouie. La construction pronominale ne peut alors pas étre mise en relation avec une autre construction du verbe, soit qu'il n'en existe aucune autre, comme pour s'évanouir, s'enfuir, se souvenir, soit que, s'il en existe, elles n'aient aucun rapport sémantique. Ainsi se tenir bien ne saurait étre relié ä tenir quelqu'im le verbe • 103 ou quelque chose. C'est une expression entiěrement lexicalisée dont le rapport avec le verbe simple n'est pas descriptible. Ces pronominaux sont trěs produc-tifs, en particulier dans la langue populaire et en argot: se casser, se magner, se carapater, se trisser... - les constructions pronominales ä sens passif: Ce produit se vend bien. La construction pronominale ne peut pas étre mise en rapport avec une construction active : *Ce produit le vend bien. mais avec une construction passive : Ce produit est bien vendu. ou avec une construction active ou le sujet du pronominal est complement: On vend bien ce produit. Plusieurs contraintes pěsent sur cette construction. Le sujet est géneralement inanimé et, s'il est animé, il s'agit d'un effet de style, comme le montre dans ľexemple suivant l'emploi du pronom inanimé ca: Les enfants, ca s'éléve äla trique. Le sujet ne peut renvoyer ä un element isolé, mais ä une classe : :|:Mon fils, §a s'éleve ä la trique. Cette valeur générique explique la presence fréquente d'adverbes ou de complements de maniere, comme a la trique dans ľexemple precedent, et ľaf-finité de la construction avec le present, sans que cela soit une obligation : $ Ce sport se pratique en plein air. v, L'agent, qui était exprimé en francais classique, ne ľ est plus, et il est sponta- o nément interprete comme un animé. | Devant la diversité des emplois que ľ on vient ďénumérer, il est difficile i de préter aux pronominaux une valeur generale et ď y voir une voix impliquant o un type de participation particulier ä ľ action. On parlera done plutôt de forme ■2 pronominale. o 0 3.3. Verbes et constructions unipersonnelles n La situation des pronominaux est en fait la méme que celie des verbes uniper- z sonnels (ou impersonnels) dont on ne fait pourtant pas une voix. 8 Ces verbes n'admettent qu'un pronom sujet, il ou ce, qui ne peut commuter i avec un autre : 1 II pleut. II arrive une voiture. q *Elle pleut. *Elle arrive une voiture. T 04 • La Grammaire Cest ce qu'indique le terme ďunipersonnel, preferable ä impersonnel. Ce il ne peut pas davantage étre mis en relief: *Lui, il pleut. *C'est lui qui pleut. En fait, il fait quasiment partie du verbe comme un morpheme flexionnel de personne. Dans certains cas, rarissimes, il peut commuter avec un SN : Les coups vont pleuvoir. II s'agit alors de verbes qui expriment un phénoméne météorologique, et ces SN indiquent la matiere, généralement métaphorique. Les unipersonnels peuvent étre suivis ďun SN, infinitif ou proposition : II faut un médecin partir que tu sortes. Se pose alors le probléme de la fonction de ces elements. II sera examine au chapitre 4. On signalera seulement ici qu'on parlera de sequence de ľuni-personnel. On peut distinguer deux types ďunipersonnels, sel on qu'íls peuvent ou non étre mis en relation avec une autre construction du méme verbe : les verbes intrinsěquement unipersonnels comme ilfaut, il est question de, ainsi que les verbes qui désignent des phénoměnes atmosphériques, // neige, il pleut, il gréle, dont c'est la seule construction, et les constructions uniper-sonnelles de verbes admettant par ailleurs des constructions personnelles : II arrive line voiture. Une voiture arrive. On classera pármi les verbes intrinsěquement unipersonnels des verbes comme /'/ semble, il paratt, il s'agit, parce que, méme si ces verbes sont susceptibles d'emplois personnels, la construction unipersonnelle et la construction personnelle ne peuvent pas étre mises en relation : II semble qu'il fera beau. *Qu'il fera beau semble. ví II lui semble bon de partir. Partir lui semble bon. oü ľ on peut mettre les deux en relation. Lorsque la construction unipersonnelle peut étre reliée ä la construction personnelle, plusieurs points sont ä noter. En premier lieu, lorsque le sujet de la construction personnelle est un SN, il ne peut apparaitre comme sequence de la construction unipersonnelle que s'il est precede d'un article indéfini: Une voiture arrive. II arrive une voiture. La voiture arrive. ? II arrive la voiture. Le verbe • 105 Les SN ä determinant défini sont rares et littéraires : lei il ne roule que le feu jailli de la melinite (Apollinaire). La construction unipersonnelle se rencontre avec des verbes ä construction intransitive (cf. p. 127): II nalt et meurt beaucoup de gens chaque jour. mais non pas transitive : *I1 emprunte chaque jour beaucoup de gens des centaines de livres dans cette bibliotheque. ä moins qu'elle ne soit au passif : II est emprunté chaque jour des centaines de livres dans cette bibliotheque. ou ä la forme pronominale ä sens passif : II s'emprunte chaque jour des centaines de livres dans cette bibliotheque. On peut avoir ce type de construction méme avec des verbes qui n'admettent ordinairement pas le passif : On a parle du projet. *Le projet a été parle. II a été parle du projet. Signaions enfin qu'il est presque impossible de prévoir les verbes auxquels va s'appliquer la construction unipersonnelle : II vient trois personnes. ? II court trois personnes. et que parfois, eile n'est possible qu'avec certaines sequences : 1 II tombe des cordes. c ví ? II tombe des livres de la table. 3 Z 3.4. Transitivité et intransitivité On ne développera pas ce point ici, puisqu'on y reviendra ä propos de ľexamen des functions des SN. On se contentera d'indiquer que, si la presence du sujet est obligatoire (ailleurs évidemment qu'ä ľimpératif), un verbe peut régir un ou plusieurs complements ou ne pas en avoir : o 8 0 complement: Pierre court. Ě 1 complement: Pierre mange un gäteau. « 2 complements : Pierre donne un gáteau ä Jacques. z Pierre parle ä Jacques de son travail. £ Une constiTKtion sans complement est dite intransitive, les autres transitives. ? Chaque venie peut ainsi étre caractérisé par une ou plusieurs constructions. 106 • La Grammaíre -mmmtmmmmmmm EíltraíneZ-VOUS mmsmmmmmmim 16. Ľinfínitif But de ľexercice: réfléchir sur le statut de ľinfínitif, par rapport au verbe et par rapport au nom. Soit le texte suivant: Insistons sur un detail. N'avoir jamais menti, n'avoir jamais dit, pour un intérét quelconque, méme indifféremment, une chose qui ne füt la vérité, la sainte vérité. c'était le trait distinctif de la sceur Simplice; c'était ľaccent de sa vertu. Elle était presque célěbre dans congregation pour cette véracité imperturbable. Ľabbé Sicard parle de la soeur Simplice dans une lettre au sourd-muet Massieu. Si sincěres, si loyaux et si purs que nous soyons, nous avons tous sur notre candeur au moins la félure du petit mensonge innocent. Elle, point. Petit mensonge, mensonge innocent, est-ce que cela existe? Mentir, c'est l'absolu du mal. Peu mentir n'est pas possible; celui qui ment, ment tout le mensonge; mentir, c'est la face méme du démon; Satan a deux noms, il s'appelle Satan et il s'appelle Mensonge. Voilä ce qu'elle pensait. Et comme eile pensait, eile pratiquait. [...] En entrant dans ľobédience de saint Vincent de Paul, eile avait pris le nom de Simplice par choix special. Simplice de Sicile, on le sait, est cette sainte qui aima mieux se laisser arra-cher les deux seins que de répondre, étant née ä Syracuse, qu'elle était née ä Ségeste, mensonge qui la sauvait. Cette patronne convenait ä cette urne. (V. Hugo. Les Miserables) Emplois et valeurs de ľinfínitif dans ce texte. Correction On dit généralement que ľinfinitif, comme le participe, fait partie des modes du verbe. En realite, ľétiquette de mode renvoie ä deux phénoměnes distinets. Pour ľindicatif, ľimpératif et le subjonctif (cf. p. 86), le mode a le plus souvent une valeur modale. Ce n'est pas le cas de ľinfinitif et du participe. Mode, ici, vient de modus significant, «maniere de signifier». L'un comme ľautre, en effet, renvoient ä la notion exprimée par le verbe ä la facon ďun nom, pour ľinfinitif, et ä la facon d'un adjectif, pour le participe. En d'autres termes, ľinfinitif est le substantif du verbe. 1. Ľinfínitif appartient au verbe Du verbe, ľinfinitif garde la construction. Le texte en présente plusieurs exemples : qui aima mieux se laisser arracher les deux seins. Laisser se construit comme le verbe conjugué avec pour complement un infinitif: eile se laissa arracher les deux seins. II s'agit done d'un verbe Operateur (cf. exercice n° 9). Quand ä arracher, c'est un verbe ordinaire construit avec un SN complement de verbe. Dans les deux cas, ä la difference de ce qui se passe pour un Le verbe • 107 substantif dont le complement est nécessairement prépositionnel, la construction est directe. C'est également ce qui se passe pour n'avoir jamais dit une chose qui nefiit la vérité. Enfin, dans le texte, un infinitif se construit avec un adverbe de quantité, peu mentir. Du verbe, ľinfinitif a également la possibilité d'indiquer ľ aspect. II possěde en effet deux formes, ľ une qui est simple et ľautre qui est composée avec l'auxiliaire qu'aurait le verbe conjugué, mentir / avoir menti, comme je mens / j'ai menti, dire / avoir dit, comme je dit / j'ai dit. Avec la forme composée, c'est l'auxiliaire qui se met ä ľinfinitif, suivi du participe passe du verbe. De méme, ä un infinitif actif peut correspondre — aueun exemple ne figure dans le texte — un infinitif passif ; blesser / étre Messe. Dans la série active, la forme composée est une forme ď accompli. Elle est done utilisée pour marquer ľantériorité : précédemment au moment oů la soeur est décrite avec sa vertu principále, eile n'a jamais menti. Mais ä proprement parier, ľinfinitif ne marque pas le temps, et la terminologie ď infinitif present et d'infinitif passe est de ce point de vue trompeuse. Enfin, ľinfinitif peut étre employe avec une negation: n avoir jamais menti. La negation, ici ne... jamais, encadre l'auxiliaire comme avec la forme verbale conjuguée : eile n 'a jamais menti. A la forme simple, eile encadrerait le verbe : ne jamais mentir. 2. Ľinfinitif appartient au nom Ľinfinitif est en effet apte ä remplir les fonctions du nom. Dans le texte, il est complement, laisser du verbe aima, et arracher, de laisser. II est également sujet: Peu mentir n'est pas possible, et peut apparaitre en position détachée (sur le détachement, cf. p. 42) : N'avoir jamais menti, c'était le trait distinctif de la soeur Simplice. Le texte présente plusieurs exemples de cette construe-^ tion {Mentir, c'est l'absolu du mal). 1 Ľinfinitif ď autre part renvoie ä la notion exprimée par le verbe hors actua- § lisation comme un substantif sans determinant. C'est ľidée qui est évoquée, et aj non ľ action dans sa realisation concrete. La reference est virtuelle, lexicale ■| (ľinfinitif est d'ailleurs la forme du verbe que ľon trouve dans les diction- 0 naires). On n'est done pas étonné de rencontrer dans le texte le substantif M mensonge employe sans determinant: petit mensonge, mensonge innocent. ° La aussi, la reference est virtuelle. II s'agit de renvoyer ä n'importe quel §_ mensonge, ä ľidée de mensonge, et non ä tel ou tel mensonge particulier. g V. Hugo use et abuse de ľinfinitif dans ses romans. Cest qu'il cherche ä E expliquer les caractěres, ä s'élever au-dessus des contingences pour proposer ™ toute une philosophic de ľexistence. Emploi du present gnomique (cf. p. 93), s infinitif s, substantif s sans article, autant de moyens ďéviter une trop grande 8 actualisation. i Et si ľinfinitif est apte ä entrer dans un certain nombre de structures qui ne 1 sont pas representees dans le texte, comme ľexclamation ou l'interrogation, © c'est précisément parce qu'il s'agit alors d'évoquer ľidée d'une action, hors 108 • La Grammaire de toute determination, ä la maniere ďun nom sans determinant, comme dans ľexemple suivant: Moi, le faire empereur? Ingrat! ľavez-vous cru? (Racine, Britanicus) ou Agrippine refuse ľidée méme que Néron a évoquée. Ainsi les emplois particuliers de ľinfinitif se laissent-ils expliquer par sa valeur fondamentale. 17. ľemploi du subjonctif dans les subordonnées qui marquent la reserve But de ľexercice: mesurer la part ďarbitraire et de motivation dans ľemploi du subjonctif en subordonnée. Soit le corpus d'exemples suivants (tous empruntés ä la langue soutenue) relevés dans quelques gramniaires : 1. Ce tourment, pour impérieux qu'il füt. ne me privait pas de sommeil. 2. II était généreux, quoiqu'il füt économe. 3. A ľheure actuelle Mirabeau ne remuerait personne, bien que sa corruption ne lui nuirait pas. 4. Bien loin qu'il se repente, il s'obstine dans sa rebellion. 5. Ici, il a fait des clairs de lune admirables, bien qu'ils ne valent pas ceux qui brillent sur la riviere. 6. Bien qu'il dormirait encore un coup, il doit se tenir ä cheval. 7. Les reserves et les critiques, pour judicieuses qu'elles sont, tiennent fort peu de place, 8. Pour petite qu'elle est, eile est précieuse. 9. II refuse de sortir, bien qu'il fasse beau. 10. Le sens des nuances lui échappera toujours, bien qu'il en parlera sans cesse. Vous indiquerez quelles sont les phrases qui présentent des infractions par rapport ä la norme et vous expliquerez ľemploi des modes dans les propositions subordonnées de concession. Correction Dans ces circonstancielles qui expriment comme on le dit généralement la concession, ou plutôt la reserve, il est d'usage d'employer le subjonctif. Ce subjonctif ne peut s'expliquer pour sa valeur modale que lorsqu'on envisage un événement sans se prononcer sur sa realite comme en 4. Lorsqu'il s'agit de repousser un fait reel, le subjonctif ne se justifie que pour des raisons syntaxiques de subordination. II existe en quelque sorte un conflit entre le mode et la valeur modale. Cest ce qui explique ľemploi frequent de ľindicatif en dépit de la regle. On distinguera plusieurs cas selon ľ element qui introduit la proposition. Avec bien que et quoique, le subjonctif est la regle, et 2 et 9 y sont conformes. II semble pourtant qu'il soit surtout utilise aprěs une principále au Leverbe • 109 present comme en 9, mais qu'il soit concurrence, méme dans ľécrit, par ľindicatif, surtout pour les emplois qui indiquent clairement une chronologie (futur en 10) ou une hypothěse (conditionnel en 3 et 6), sans doute pour plusieurs raisons. La premiere est qu'une reserve tranche s'accommode mal du mode de ľ eventualite et envisage plutôt la realite du fait, si bien qu'il y a contradiction avec la valeur modale du subjonctif, surtout quand ľ événement a été düment constate dans le passe. La seconde est qu'en particulier pour le futur, ľutilisation de ľindicatif est la seule fa^on de marquer les époques et ľ on opposera par exemple : Le sens des nuances lui échappera toujours, bien qu'il en parle sans cesse. et: Le sens des nuances lui échappera toujours, bien qu'il en parlera sans cesse. Enfin, seul le conditionnel permet d'indiquer clairement ľhypothése sans employer un verbe de modalite et ľ on opposera 6 ä : Bien qu'il souhaite fortement dormir encore un coup, il doit se tenir ä cheval. Lorsque la reserve s'accompagne d*une evaluation, avec quelque... que, pour... que, le subjonctif, sans doute en raison de cette subjectivité, est moins concurrence par ľindicatif. Néanmoins, ľindicatif n'est pas rare, comme en 7 ou 8, et permet d'insister sur la realite d'un fait constate. On assiste done avec ľemploi de ľindicatif dans ce type de propositions ä un fait de remotivation, qui contrecarre ľarbitraire ď emplois du subjonctif auxquels on ne trouve pas de justification. 18. Les emplois du subjonctif dans un texte But de ľexercice: s'entrainer ä ('observation et au classement des faits. Relevez, classez et expliquez ies emplois du subjonctif dans le texte suivant: ! II avait le don du sarcasme. Mais ce n* était pas le seul don que le Dieu de la ■ force lui eüt fait. Quoique, dans son économie animate, le caractěre tut sur le \ premier plan, comme chez presque tous les hommes d'action, ľ esprit [,..] 5 n'en était pas moins [...] une puissance. Nul doute que si le chevalier de i Mesnilgrand avait été un horame heureux, il n'eüt été spirituel; mais, i malheureux, il avait des opinions de désespéré et, quand il était gai, chose 5 rare, une gaíté de désespéré; [... ]. Seulement, ce qu'il avait par-dessus tout, 5. c'était, avec les passions qui fermentaient dans son sein, une extraordinaire 3 eloquence. Le mot qu'on a dit de Mirabeau et qu'on peut dire de tous les I orateurs : «Si vous ľeussiez entendu!...» semblait fait spécialement pour 3 lui. [... ] Et, en effet, n'importe ä quel moment on touchät ä de certaines I cordes, immortellement tendues en lui, il s'en échappait des resonances ä í renverser celui qui aurait eu ľ imprudence de les effleurer [...]. Grand, fort §> bien tourné, quoiqu'il se voutät un peu du haut du corps, comme si la vie 110 • La Grjmmaire qu'il portait eüt été une armure trop lourde, le chevalier de Mesnilgrand avait, sous son costume moderne, l'air perdu qu'on retrouve dans certains majestueux portraits de famille [...]. Le fait est qu'aucun jeune homrae de Paris ou de Londres ne ľ eüt empörte par ľ elegance sur ce misanthrope, qui n'était plus du monde... (Barbey ď Aurevilty, Ä im diner ďathées). Correction On ne rencontre dans ce texte que des emplois en subordonnée. On examinera successivement chacune de ces subordonnées en suivant le classement présenté dans ľexposé du chapitre 2. A. Les subordonnées conjonctives 1. Les conjonctives pures : Nul doute qu'il n'eüt été spirituel Le fait est qu'aucun jeune homme ne ľ eüt empörte. Dans le premier exemple, le subjonctif ne s'explique pas ä cause du substantif Operateur doute de la principále, puisqu'il est accompagné d'une negation, mais ä cause de l'expression de l'hypothese, qui serait identique en dehors de la completive : S'il avait été un homme heureux, il eüt été spirituel. (L'influence de la completive se marque seulement par la presence du ne explétif). Le subjonctif plus-que-parfait marque une eventualite passée qui ne s'est pas réalisée. Dans le second, le subjonctif n'est pas davantage lié ä la principále, puisque ľ element qui introduit la completive est lefait, lequel évidemment ne marque pas une eventualite. Le subjonctif se justifie de la méme facon que précédemment: il a la méme valeur que la forme plus courante : Le fait est qu'aucun jeune homme ne l'aurait empörte et marque ľéventualité. 2. Les conjonctives circonstancielles : a. Les hypothétiques: Si vous ľeussiez entendu! On a affaire ici au premier membre d'un systéme hypothétique, dont le membre principal est absent: Si vous ľeussiez entendu, vous auriez (eussiez) été émerveiľlés. Le subjonctif marque évidemment ľéventualité et le plus-que-parfait une eventualite passée, ce qu'il marquerait également en principále. II s'agit ďun emploi trés soutenu, qui, dans la langue ďaujourďhui, serait remplacé aprěs si par un imparfait de ľindicatif comme dans: Le verbe • 111 Si le chevalier de Mesnilgrand avait été un homme heureux et en principále par un conditionnel passé. Ľ explication serait la méme dans : Comme si la vie qu'il portait eüt été une armure trop lourde, avec de surcroit une concordance modale, le subjonctif étant en accord avec celui de la proposition concessive, dont depend la comparative conditionnelle introduite par comme si. b. Les concessives: Quoique le caractěre rut sur le premier plan. Quoiqu'il se voutät du haut du corps. Conformément ä la regle, c'est le subjonctif qui est employe aprěs quoique, alors méme que le fait est bien reel. II est ici essentiellement entrainé par la subordination. L'ajustement temporel est également respecté. B. Les subordonnées relatives: Ce n'était pas le seul don que le Dieu de la force lui eüt fait. Le subjonctif ici est lié ä la restriction dans la principále, puisqu'elle suppose une appreciation. De nos jours le subjonctif est moins employe qu'autrefois, et ľ on pourrait rencontrer : Ce n'était pas le seul don que le Dieu de la force lui avait fait. L'indicatif insisterait alors sur la realite d'un fait düment constate. Dans la langue courante, et en tout cas dans la langue parlée, ce n'est pas le plus-que-parfait du subjonctif qui serait de toute facon employe, mais le passé : Ce n'était pas le seul don que le Dieu de la force lui ait fait. Z Dans le texte, le plus-que-parfait, comme le passé, marque ľantériorité par ° rapport au verbe de la principále, mais de surcroit il respecte l'ajustement des 'm formes, la concordance des temps. o c C. Les interrogatives indirectes : ° II n'y a qu'un exemple ď interrogative partielle : 8 N'importe ä quel moment on touchät. o •c La completive interrogative indirecte á quel moment on touchät, introduite par .3 le determinant interrogatif quel, offre un subjonctif qui marque un fait envi- § sage, et non actualisé, en accord avec le verbe unipersonnel de la principále, 8 n'importe, qui marque ľindétermination. Quant ä ľ imparfait, outre sa valeur i propre ď eventualite, il est en accord avec le temps de la principále. 5 (r < T12 • La Crammaire 19. Ľaspect lexical des verbes But de l'exercice: manipuler des tests syntaxiques; prolonger la reflexion sur ľaspect verbal pour prendre conscience de sa complexité. Soient les verbes étre, exist er, avoir, connaitre, marcher, courir, sortir, tomber, saisir, écrire, peindre, éclater, e.xploser, trouver, franchir. 1. Vous essaierez de les utiliser dans des phrases simples avec les periphrases verbales : a. etre en train de; b. venir de; c. commence?-ä; á.finir de. 2. Vous essaierez de les mettre ä ľimpératif. 3. Vous essaierez de les reprendre par faire. 4. Vous essaierez de les combiner avec les complements de temps suivants : a. en une heure b. pendant une heure 5. Vous essaierez de les employer avec mettre une heure á et mettre une heure avant de. Sur la base des possibilités et impossibilités constatées, vous proposerez un classement des verbes du corpus. Vous vous efforcerez de donner ä ces classes une caractérisation aspectuelle. Correction On testera successivement chacune des constructions indiquées et on récapi-tulera les observations sous forme de tableau : 1. Les periphrases verbales : a. étre en train de : Cette périphrase qui marque ľaspect progressif présente le déroulement du proces. Elle est compatible avec les verbes marcher, courir, réfléchir, écrire, peindre. Cest beaucoup plus difficile pour les autres verbes, bien que certains complements, lorsque le verbe est transitif, rendent cet emploi possible : *Je suis en train ď avoir des yeux bleus. ? Je suis en train ďavoir de la chance. *Je suis en train de trouver un bracelet sur le sol. Je suis en train de trouver la solution du probléme. *L'éditeur est en train de sortir. Ľéditeur est en train de sortir un nouveau livre. On constate une fois de plus (cf. t. 1, chap. 3) les liens du lexique et de la syntaxe : ici les différents sens de verbes polysémiques sont ä mettre en relation avec leurs diverses constructions. Ceci rend ires difficile de tester ľacceptabilité de tel ou tel emploi. Cest pourquoi on a raisonné sur des differences ďacceptabilité et non sur des attributions absolues. Le verbe • 113 b. venir de: la plupart des verbes du corpus sont compatibles avec venir de : Je viens de sortir. sauf étre, exister, avoir et connaitre : *Je viens ď avoir les yeux bleus. *I1 vient d'etre bran. On pourrait avoir: Je viens ďavoir la grippe. qui s'oppose aux exemples precedents car ce qui y est présenté n'est pas une qualité pemianente mais un episode momentane. On constate une fois de plus, comme d'ailleurs dans tout ľexercice, les difficultés de maniement et ď analyse de ľaspect. c. commencer ä: outre étre, avoir, exister et connaitre, les verbes sortir, tomber, franchir, saisir, éclater, e.xploser, trouver acceptent mal la périphrase : *Je commence ä franchir la limite. *Je commence ä trouver un bracelet. Dans certains de ses emplois, connaitre ľaccepte : Je me méfie de lui, car je commence ä le connaitre. d. finir de : cette périphrase, ä moins qu'on ne lui donne le sens de cesser de, n'est vraiment compatible qu'avec écrire ou peindre, s'ils sont suivis ďun complement: J'ai fini d'écrire mes lettres. J'ai fini de peindre le tableau que j'avais commence hier. k Lorsque le sens de la périphrase est cesser de, eile est compatible également '■S avec ces mémes verbes sans complement: cz ■5; J'ai cessé (fini) d'écrire. CD •j> et avec marcher, courir ou réfléchir, mais non avec éclater, e.xploser ou trouver, 3 *I1 a cessé (fini) de trouver un bracelet. CO g ou avec sortir, tomber ou saisir, c'est-a-dire avec les verbes momentanes. CD § 2. Ľimpératif également n'est pas toujours possible. II est exclu (ainsi que 1 les adverbes qui indiquent une volonte comme délibérément) avec étre, m exister, avoir, connaitre, éclater, e.xploser ou trouver: 1 *Connais la solution du probléme. 0 *Trouve la solution du probléme. Q -, • 2 1 3. La reprise par faire n'est pas possible pour les verbes étre, exister, avoir © et connaitre: 114 • La Grammaire mais *I1 a des yeux bleus et Jeanne fait de méme. 4. a. Le complement de temps en une heure nest possible qu'avec les verbes sortir, saisir, tomber, éclater, exploser, troitver: II a trouvé la solution en une heure. *I1 a eu les yeux bleus en une heure. b. Quant ä pendant une heure, il n'est guére possible qu'avec marcher, courir, et écrire et peindre sans complement, ä moins que ce complement ne soit au pluriel : ? Jacques a écrit une lettre pendant une heure. Jacques a écrit des lettres pendant une heure. Jacques a écrit pendant une heure. 5. Mettre une heure ä ou mettre une heure avant de ne peuvent guěre s'em-ployer qu'avec sortir, saisir, franchir, exploser, éclater et trouver: vs Jacques a mis une heure ä trouver la solution. Jacques a mis une heure avant de trouver la solution. '? Jacques a mis une heure ä marcher. 7 Jacques a mis une heure avant de marcher. Ces observations peuvent étre récapitulées dans le tableau suivant 2 3 ------- 4 5 a b c d a b ětre _ _ -------- exister _ _ — - avoir _ _ ~ — connaitre _ _ ~ — marcher + + + _ + + + — courir réfléchir sortir + + + + + + + + + - + + + + _ + + - saisir + + + - + franchir + + + - + — + + + + + + écrire peindre éclater + + + + + + + + + + + + + + + + + + exploser _ + + + + - + trouver + — + --------------1-----------------L ^JLi ~ + + ~ + On voit ainsi apparaitre plusieurs classes de verbes. La premiere comprend les verbes etre, exister, avoir et connaitre. II s'agit, du moins dans toemploL testes, de verbes d'etat (d'oü ľimpossibilité de la reprise par/«/re et dľľim Le verbe «115 pératif), qui renvoient ä des proces dont les limites ne sont pas précisées (ďoů ľimpossibilité ď employer des periphrases qui précisément portent sur ces limites ou des complements qui en indiquent la durée). La deuxiěme regroupe les verbes marcher, courir et réfléchir. II s'agit cette fois de verbes qui désignent des actions, et non plus des états, actions dont le debut est indiqué, mais non la fin, car on peut les continuer indéfini-ment. On ne peut done pas les combiner avec des elements qui font mention de ľintervalle de temps nécessaire ä ľaccomplissement ďune action, comme en wie heure ou mettre une heure á ou avant de. Ce sont des verbes imperfectifs. La troisiéme comprend les verbes sortir, saisir et franchir. Ce sont aussi des verbes ď action, mais ď action comprise entre des limites, quelle qu'en soit la durée, courte ou non. Cela signifie qu'on ne peut continuer indéfiniment ä sortir. Une fois que ľ on est sorti. Faction est bel et bien terminée, ce qui explique que ces verbes aeeeptent la mention d'un laps de temps, mais pas d'une durée, ou alors l'effet produit est celui ď une repetition : Pierre est sorti du labyrinthe pendant une heure. c'est-ä-dire qu'il a passe son temps ä y entrer et ä en sortir. Ce sont des verbes perfectifs. La quatrieme, caractérisée par un profil de +, comprend les verbes écrire et peindre. En fait, ces verbes superposent le profil des deux classes précé-dentes. Selon en effet qu'ils auront ou non un complement, leurs limites seront ou non indiquées (une fois que ľon a peint un tableau, il est bel et bien termine, mais on peut peindre ou écrire indéfiniment). lis sont done polysé-miques du point de vue de leur aspect. Enfin, les verbes éclater, exploser et trouver sont des verbes d'achévement qui prennent en compte la limite terminale de faction, ce qui explique qu'ils admettent mal commencer ä. % On constate ainsi que les verbes selon leur lexique présentent des aspects c différents. Sur un corpus d'énoncés véritables, on s'apercevrait encore plus ■a nettement que de nombreux paramétres contextuels viennent obseurcir ces <» classes. Par exemple, franchir est en principe incompatible avec pendant: o *J'ai franchi la frontiére pendant une heure. CC § Pourtant il le devient pour peu qu'il soit accompagné d'un sujet pluriel qui % indiquera la repetition : Q. g Les soldats ont franchi la frontiére pendant une heure. o q- II s'agit done d'une question extrémement complexe. 116 • La Grammaire 20. Les tiroirs verbaux de ľindicatif dans un texte But de ľexercice: passer de l'analyse de la phrase ä celie du texte; mettre en relation la syntaxe et le style. Soit le texte suivant, extrait de Ĺ 'Étrcmger de Camus: Les lampes de la rue se sont alors allumées brusquement et elles ont fait pälir les premieres étoiles qui montaient dans la nuit. J'ai senti mes yeux se fati-guer ä regarder les trottoirs avec leur chargement d'hommes et de lumiěres. Les lampes faisaient luire le pavé mouillé, et les tramways, ä intervalles réguliers, mettaient leurs reflets sur des cheveux brillants, un sourire ou un bracelet ďargent. Peu aprěs, avec les tramways plus rares et la nuit déjä noire au-dessus des arbres et des lampes, le quartier s'est vide insensiblement, jusqu'ä ce que le premier chat traverse Ientement la rue de nouveau deserte. J'ai pensé alors qu'il fallait diner. J'avais un peu mal au cou d'etre reste long-temps appuyé sur le dos de ma chaise. Je suis descendu acheter du pain et des pátes, j'ai fait ma cuisine et j'ai mange debout. J'ai voulu fumer une cigarette ä la fenétre, mais ľair avait fraíchi et j'ai eu un peu froid. J'ai fermé mes fenétres et en revenant j'ai vu dans la glace un bout de table oú ma lampe ä alcool voisinait avec des morceaux de pain. J'ai pensé que c'était toujours un dimanche de tiré, que maman était maintenant enterrée, que j'allais reprendre mon travail et que, somme toute, il n'y avait rien de change. Vous étudierez ľemploí et la valeur des tiroirs verbaux de ľindicatif. Correction Analyser les tiroirs verbaux suppose que ľ on prenne en consideration leur valeur chronologique, aspectuelle et modale. Les trois valeurs ne sont pas toujours representees dans touš les textes, mais il convient de s'interroger sur leur eventuelle presence. Dans ce texte de récit, si ľ on considěre les formes verbales conjuguées, on ne rencontre que des indicatifs, ä ľexception ďun subjonctif, jusqu'ä ce que le premier chat traverse Ientement la rue. II s'agit en effet de la relation, presque sans modalités, ďévénements. Les tiroirs verbaux ont ainsi seulement une valeur chronologique et aspectuelle. Ces indicatifs se répaitissent en : - 13 passes composes: se sont allumées, ont fait, ai senti, s'est vidé, ai pensé, suis descendu, ai fait, ai mange, ai voulu. ai eu, ai fermé, ai vu, ai pensé. - 10 imparfaits: montaient, faisaient, mettaient, fallait, avais, voisinait, était, était enterrée, allais, avait. - 1 plus-que-parfait: avait fraichi. Le verbe «117 II s'agit dans tous les cas de temps de tiroirs verbaux du passé, mais on note ľabsence du passé simple. Ce relevé permet de conclure ä une narration ďévénements passes sans prospection vers le futur, et ä une langue plus proche du récit oral que du récit écrit trěs soutenu. On étudiera successivement la valeur des tiroirs verbaux en chronologie absolue, puis en chronologie relative, et ľ on conclura sur une rapide explication stylistique. a. La chronologie absolue : Rappelons qu'elle se determine ä partir du moment de ľénonciation, de ľacte de parole de celui qui dit je : L = R E passes E futurs se sont allumées montaient. Passé compose et imparfait renvoient également au passé du locuteur. Ils ont la méme valeur chronologique, mais s'opposent par leur valeur aspectuelle. Le passé compose est forme de ľauxilliaire avoir ou etre au present et du participe passé du verbe, II unit done ľ aspect inaccompli du present ä ľ aspect accompli du participe. C'est ce qui explique qu'il renvoie ä un passé entiěre-ment révolu, mais encore present ä la conscience de celui qui parle. En opposition avec le passé simple, qui est propre ä évoquer la succession, la mise en série, le passé compose provoque un resserrement des époques, une sorte de nivellement. Dans le texte, les valeurs de ľ imparfait et du passé compose se détermi-nent mutuellement et ľabsence du passé simple fait que le passé compose se _. charge de certaines de ses valeurs. II est apte ä relater des événements clos la ig oú ľ imparfait suggěre ľouverture. Ľ imparfait est ainsi en accord avec le i lexique des verbes qui expriment le mouvement: montaient, et il exprime 1'as-| pect progressif, ou un proces qui dure (j 'avais un pen mal au ca-ur). II est apte ä ■S suggérer la repetition, en particulier associé ä un complement pluriel (mettaient o leurs reflets) ou un complement circonstanciel de temps (á intervalles régu-* Hers), ou un decor stable (oú ma lampe ä alcool voisinait avec des morceaux ° de pain). •g_ Le contraste des tiroirs verbaux permet en particulier d'exprimer les liens § de causalité qui ne sont jamais explicités dans le contexte, puisqu'il n'y a jj pratiquement que des propositions juxtaposées, et de toute facon pas de subor- ra données causales, comme dans : _i § J'ai senti mes yeux se fatiguer ä regarder les trottoirs... Les lampes o faisaient luire le pavé mouillé... Q < CC 1T 8 • La Crammaire b. La chronologie relative : lei, R et L sont distinets. C'est ce que ľon rencontre avec ľemploi du plus-que-parfait pour exprimer ľantériorité : J'ai voulu (El) fumer une cigarette ä la fenétre, mais ľair avait fraíchi (E2). L ----E2----------------------El = R________________________ E2, étant antérieur ä E 1, est évidemment lui aussi situé dans le passé. Toutefois ce n'est pas cela qui compte, mais bien sa position par rapport ä E1=R. C'est en partículier dans le style indirect (cf. p. 63) que ľon trouve des emplois en chronologie relative. C'est le cas dans le texte aprés le verbe penser: J'ai pensé (El = R) qu'il fallait (E2) díner. Ľimparfait s'emploie pour marquer la simultanéité avec un événement situé dans le passé. Chronologie absolue et chronologie relative convergent dans ce texte pour privilegier seulement deux tiroirs verbaux, le passé compose et ľimparfait (avec sa variante accomplie, le plus-que-parfait). Comme d'ailleurs dans ľ ensemble du roman, on a ainsi affaire ä un ton monotone, ä une grisaille sans relief. Lä oü le passé simple permettrait ä quelques faits saillants de se detacher sur fond ďimparfaits. le passé compose provoque un resserrement, une indistinction des événements dans un temps ressenti comme uniforme par une conscience qui n'a pas de recul. On voit ainsi l'utilisation stylistique interessante qui est faite de cet emploi des temps. 21. Quelques contraintes qui pěsent sur ľemploi du passif But de ľexercice: mesurer la distance qui, en syntaxe comme en morpho-iogie, existe entre la regle et ľapplication de la regle. Soit le corpus : 1. Cette affaire concerne Paul. 2. Cette affaire regarde Paul. 3. Marie regarde Paul. 4. Des dizaines de personnes respirent ce gaz toxique. 5. Son visage respire la santé. 6. Paul en recoit la garantie formelle. 7. Paul en a recu la garantie formelle. 8. Le chat mange la pátée. 9. Le chat a mangé la pátée. 10. Le chat a mangé du páté. 11. Le chat a mangé sa pátée. Le verbe «119 12. Paul agace sans cesse Marie. 13. Paul agace sans cesse Marie de ses remarques. 14. Paul a dégouté Marie. : ' 15. Paul a dégouté Marie par son aspect repoussant. ' : ' 16. Les profits compensent les pertes. 17. Les profits compensent les pertes pour Paul. Toutes ces phrases présentent une construction active dans laquelle le verbe est accompagné d'un complement construit directement. Vous essaierez de faire correspondre ä ces phrases une phrase passive. Sur la base des impossibilités constatées, vous préciserez dans quelles conditions peut s'employer le passif. Correction Le passif apparait possible dans les phrases 1, 3, 4, 6, 7, 8, 9, 12, 14 et 16. Cependant, ä ľintérieur méme de ces phrases, certaines sont plus naturelles que d'autres. On mettra cela en evidence en comparant deux ä deux les phrases qui ne different ä l'actif que par un parametre, comme un determinant ou le temps du verbe. La possibilité ď employer ou non le passif semble d'abord liée au sens du verbe. Ainsi, avec le verbe regarder, le passif n'est possible qu'en 3, alors que la construction est la méme qu'en 2. C'est qu'en 2, le fait d'avoir un sujet non animé impose au verbe un sens figure qui empéche la construction. C'est également ce que l'on constate dans le couple 4 et 5, oü ä ľemploi métapho-rique (son visage respire la santé) ne correspond pas de passif. On signalera qu'il ne s'agit pas la d'une regie, mais seulement d'une tendance. La compa-raison de 1, ou le passif est possible, et de 2 montre que ce n'est pas le sens de la phrase qui est en cause, car c'est le méme, mais le lexique des verbes. Regarder figure et concerner ont le méme sens, mais ils sont différents et le passif possible avec l'un ne l'est pas avec l'autre. La confrontation des phrases 8 et 9, oü le passif est possible, avec 10 et 11 ou il ne l'est pas, ou en tout cas donne lieu ä des phrases qui ne peuvent guére se trouver que dans les exemples de grammaire, fait apparaitre que le determinant de SN2 est également en cause. II est difficile ä un determinant indéfini de commencer une phrase : ? Du páté a été mangé par le chat. ce qui est un phénoměne trěs general (cf. p. 137). Quant au possessif, il fonc-tionne généralement comme anaphorique et renvoie ä un element antérieur, si bien qu'on ne peut que trěs difficilement, dans : Sa pátée a été mangée par le chat. le mettre en relation avec le chat. Si 12, 14 et 16 supportent sans probléme la construction passive, eile se révěle impossible pour 13 et 15, et acceptable pour 17 seulement si le complement pour Paul est en téte de phrase : 120 • La Grammaire Pour Paul, les pertes sont compensées par les profits. Cest que dans toutes ces phrases apparaít un complement prépositionnel en plus du complement direct, qui semble bloquer ľ utilisation du passif. Enfin, la comparaison des phrases 6 et 7, 8 et 9 montre que le passif est plus naturel avec un passé compose qu'avec un present: La garantie formelle en est recue par Paul. La garantie formelle en a été recue par Paul. sans doute parce que ľ aspect non clos du present se concilie mal avec la presence du participe passé. On constate done, alors méme qu'on s'en est tenú ä quelques-unes des restrictions qui pěsent sur ľemploi du passif, combien son utilisation est complexe. Elle ne se réduit pas ä ľemploi mécanique d'une regle formelle au demeurant facile ä établir, mais implique la prise en consideration de facteurs subtils et difficiles ä determiner trěs précisément. ▲ Le verbe = centre de la proposition. II indique la personne, le mode, le temps et ľaspect. ▲ Ľexistence de trois modes : ľindicatif, le subjonetif et ľimpé-ratif qui s'expliquent par des facteurs énonciatifs (les modalités) ou par des contraintes syntaxiques. ▲ Ľexistence de deux chronologies, absolue et relative; nombre et repartition des formes différents selon ľécrit ou ľ oral. ▲ Ľexistence de ľaspect, exprimant la facon dont ľénonciateur se représente le déroulement du proces; liaison de facteurs lexicaux, syntaxiques et morphologiques qui en rendent ľ analyse difficile. a Ľexistence de plusieurs formes : actif, passif, verbes pronomi-naux, verbes unipersonnels, constructions transitives et intransitives. II est parfois difficile d'attribuer une valeur sémantique unique ä ces formes. Chapitre 4 Le syntagme nominal 1. Les fonctions nominales ..................... 122 1.1. Le sujet................................ 122 1.2. Les complements de verbe................... 124 1.3. Les ajouts ä la proposition ................... 128 2. La composition des SN ...................... 131 2.1. Les substantifs ........................... 131 2.2. Les determinants.......................... 133 2.3. Les adjectifs............................. 142 3. Les pronoms............................... 147 3.1. Definition et différents types.................. 147 3.2. Les pronoms personnels..................... 147 3.3. Les pronoms démonstratifs................... 152 3.4. Les pronoms possessifs ..................... 153 3.5. Les numéraux et les indéfinis................. 153 4. Ľ adverbe................................. 153 Entraínez-vous : 22. Ľinversion du sujet (156) — 23. Quelques complements directs du verbe (159) — 24. Les COD qui peuvent étre supprimés (161) — 25. Articles indéfinis et partitifs (163) — 26. Les determinants possessifs (164) — 27. Le determinant tout (167) — 28. Certain, autre, méme (170) — 29. Critěres de definition de ľad-jeetif (172) — 30. La place de l'adjectif (174) — 31. Les pronoms personnels (175) — 32. La preposition de (177). Apres ľ etude de ce chapitre, ľétudiant doit pouvoir : ▲ avoir une vue ď ensemble du role du syntagme nominal dans la proposition; ▲ distinguer la nature (substantif, pronom, etc.) et la fonction des elements (sujet, complements, etc.) qui constituent ce syntagme; ▲ analyser la composition du syntagme nominal, et la nature des elements ainsi repérés (determinants, substantifs, adjectifs, pronoms); ▲ repérer les différents modes d* insertion du syntagme nominal dans la proposition selon ľ element auquel il se relie, e'est-a-dire sa fonction. 122 • La Crammaire Ce chapitre, qui termine l'examen des elements de la proposition, porte sur le syntagme nominal, SN. Pour faire directement suite au chapitre sur le verbe, on commencera par l'examen des functions du SN qui permettent de définir le profil des constructions du verbe. On analysera ensuite la constitution de ces syntagmes et la nature des elements qui les composent. Les fonctions nominales peuvent étre remplies par un nom propre, un groupe comprenant un substantia un pronom, un infinitif ou méme une proposition : Pierre me plait bien. Un long voyage me plairait bien. Cela me plairait bien. Partir me plairait bien. Que nous puissions voyager me plairait bien. Les exemples cites permettent ainsi de définir une classe ďéquivalence dont ľunité tient ä la fonction identique que touš ses membres ont par rapport au verbe. Méme si, pour des raisons de commodité, la plupart des exemples cites par la suite comprennent des substantifs, 1'analyse vautpour touš les autres elements. 1. Les fonctions nominales 1.1. Le sujet On définit sou vent le sujet par son sens en disant qu'il représente 1 agent de Faction exprimée par le verbe. Or, en liaison avec le verbe qui, on ľa vu, n'ex-prime pas nécessairement Paction, certains désignent des patients : Jean souffre. ou des bénéficiaires du proces : Jean a recu un cadeau. ou encore, dans le cas de substantifs qui renvoient ä des inanimés, des instruments . Le marteau enfonce le ciou. En réalité, toutes ces notions se déduisent du sens de ľénoncé et n'ont que peu ä voir avec la relation syntaxique elle-meme entre le verbe et le groupe nominal. Dans ces conditions, un test commode pour mettre en evidence le sujet d'une phrase est qu'il répond ä la question qui est-ce qui ou qu 'est-ce qui, ce qui ne préjuge pas de la relation sémantique, agent, patient, etc., du sujet avec le verbe. Mais dans le cas des verbes unipersonnels, ce test n'est pas applicable : *Qu'est-ce qui pleut? On propose parfois également une definition Iogique du sujet, en l'identifiant au theme de ľénoncé, c'est-ä-dire ce dont on parle, et en ľopposant au prédicat, ce que ľon en dit. Ainsi dans la proposition : Le syntagme nominal «123 Les enfants mangent trop de bonbons. les enfants constitue le thěme, et mangent trop de bonbons, le prédicat. II s'agit la de categories logiques générales applicables ä tous les énoncés. Mais la difficulté tient au fait qu'il n'y a pas nécessairement de coincidence entre organisation logique et structure syntaxique, méme si c'est le cas le plus frequent. Ainsi, dans le cas des unipersonnels, c'est le verbe lui-méme qui constitue le thěme du propos et c'est précisément ce qui caractérise la difference entre : Une voiture arrive. et II arrive une voiture. le thěme étant dans le premier cas une voiture, dans le second, il arrive. La seule definition generale du sujet est done une definition morphosyn-taxique. En premier lieu, le sujet impose un accord au verbe, qui marque clairement leur interdépendance. Cet accord se fait en genre et en nombre : L'enfant jouera. Les enfants joueront. Le garcon est tombé. La fillette est tombée. et en personne, selon le cas: Je jouerai. Tu joueras. II convient de signaler quelques cas particuliers. En ce qui concerne le genre, lorsque l'on a affaire ä plusieurs sujets de genre different, c'est le masculin, qui constitue alors une catégorie plus generale, une catégorie non marquee, qui est utilise : Jean, Jeanne, Christine et Pierrette sont tombés. En ce qui concerne le nombre, lorsque se succědent plusieurs sujets singuliers, juxtaposes ou coordonnés, le verbe se met au pluriel: Jean et Jeanne viendront demain. Le singulier n'est possible que lorsque les sujets sont coordonnés par ni et ou : Jean ou Jeanne viendra. Jean ou Jeanne viendront. Lorsque le sujet est un terme collectif, il peut étre repris par un pluriel (accord selon le sens) : Un groupe a envahi la salle. lis ont tout saccagé. et si le terme collectif est accompagné d'un complement prépositionnel pluriel, l'accord peut se faire au singulier comme au pluriel: Un groupe de personnes a bloqué ľentrée. Un groupe de personnes ont bloqué ľentrée. 124 • La Grammaire Enfin, dans k cas d'accord en personne, la presence parmí les sujets ď une personne de rang 1 ou 4 impose ľ accord avec la personne de rang 4 : Lui et moi, nous partirons. Lui et nous, nous partirons. Toi et moi, nous partirons. Vous et nous, nous partirons. cependant que la presence (en dehors de ce cas) ď une personne de rang 2 ou 5 impose un accord avec la personne de rang 5 : Lui et toi, vous partirez. Lui et vous, vous partirez. Avec une telle definition du sujet comme ľélément de la proposition qui impose ľaccord au verbe, le sujet des verbes unipersonnels ne peut étre que le pronom il. Dans le cas des verbes qui ne sont pas statutairement unipersonnels, on n'utilisera done pas ľopposition souvent faite entre sujet apparent, /'/, et sujet reel, une voiture, dans 1'exemple suivant: II arrive une voiture. En realite, ce prétendu sujet reel est plus proche des complements du verbe (cf. p. 125) et peut étre appelé sequence de ľunipersonnel. Par ailleurs, l'ordre des mots (cf. p. 33) est également un critere permettant de repérer le sujet. Ainsi, dans la phrase assertive, le sujet precede le verbe, ce qui permet en particulier de distinguer le sujet de ľ objet, puisque notre langue ne possěde plus de cas pour marquer la fraction : Pierre voit Paul vs Paul voit Pierre. On défínira done le sujet comme ľélément qui impose ses marques d'accord au verbe avec lequel il entretient des contraintes d'ordre. Par consequent, seront exclus de cette fonction, outre le prétendu sujet reel des unipersonnels, le dit sujet de ľinfinitif, qui peut tout au plus étre un agent, un bénéficiaire... de Paction, mais qui, formellement, comme le fait clairement apparaitre la pronominalisation, a le comportement d'un complement: Je vois les enfants jouer. Je vois les enfants. Je les vois jouer. Je les vois. U faut ainsi accepter ľidée que la meilleure definition des fonctions est morphosyntaxique. On gardera néanmoins évidemment en memoire que le sujet, ne serait-ce qu'en raison de sa place, coincide souvent avec le theme du propos et qu'il est lie au verbe par des relations sémantiques particuliěres. 1.2. Les complements de verbe ▲ Complements de phrase et complements de verbe. Les complements du verbe (CV) sont fortement lies au verbe et participent ä la definition de la proposition minimale, e'est-a-dire réduite aux elements indispensables ä la coherence syntaxique. Les complements de phrase (CP), au contraire, ne i.e syntagme nominal »125 sont pas indispensables au cadre propositionnel minimal: ils ne sont pas lies au verbe, mais portent sur ľ ensemble de la proposition. Plusieurs tests permettent, dans la majorite des cas, de distinguer les CV et les CP. Les CP se laissent supprimer : L'orage menace touš les soirs. L'orage menace. L'orage menace dans le lointain. L'orage menace. alors que les CV ne le peuvent pas : II a proféré une énormité. *I1 a proféré. ou ne peuvent ľ étre que dans certaines conditions trěs particuli&res : Je lis un livre. Je lis. (le complement est ici supprimé parce qu'on peut le reconstituer sans grand risque d'erreur, ä la difference de ce qui se passe pour les CP, cf. exercice n° 24). Le deuxieme test est celui de la possibilité de déplacement du complement. Les CP sont déplagables : Tous les soirs, dans le lointain, l'orage menace, alors que les CV ne le sont pas plus que le sujet: *Un livre je lis. On constate enfin, dans le cas oú les CV sont des complements indirects, c'est-ä-dire lies au verbe par une preposition, que cette preposition est géné-^ ralement fixe et ne peut pas commuter avec une autre preposition, comme -g e'est le cas pour les CP : c - II pense au jardin. ® *I1 pense du jardin. '§ vs II se proměně (dans, vers, le long de, etc.) le jardin. o i Avec les CV, la preposition est un pur outil syntaxique qui ne présente guěre | ďintérét sur le plan sémantique, ä ľinverse de ce qui se passe avec les CP. s; Dans le detail, la distinction des CP et des CV est parfois difficile ä établir. 8 Ce n'est pourtant pas une raison pour ľ abandonner. Comme souvent en ° linguistique, il faut poser ľexistence de deux pôles distincts, entre lesquels se n situent toute une série de fonetionnements intermédiaires. _j z d ▲ Les complements du verbe q lis peuvent étre construits soit directement, et on parle de complements I ď objet direct: ® Je cueille des fleurs. 126 • La Grammaire • soit indirectement, par ľintermédiaire d'une preposition (ou locution prépo-sitionnelle), c'est-ä-dire d'un de ces elements invariables qui permettent la liaison d'un SN avec un verbe {penser ci Jeanne), un autre SN (le chapeau de Jeanne, cf. exercice n° 32) ou un adjectif (»lalheureux ä cause de Jeanne). Ce sont alors des complements d'objet indirect: Je parle de la pluie et du beau temps. Ces constructions sont directement dépendantes du verbe lui-méme, et ne se justifient généralement pas, comme le prouve par exemple la comparaison entre téléphoner á quelqu'un et appeler quelqu'un, La definition sémantique souvent avancée pour le complement ďobjet direct (le COD est ce sur quoi s'exerce Taction exprimée par le verbe) n'est guěre plus satisfaisante que la definition sémantique du sujet, et la relation du verbe et du COD est tout aussi diverse que celle du verbe et de son sujet: objet sur Iequel s'exerce le proces : Je déguste une glace. résultat du proces : Je creuse un trou. Iieu du proces : Je descends la pente. cause du proces : Je clame ma colěre, etc. Mais il est beaucoup plus difficile que pour le sujet d'en proposer une definition formelle, car il n'existe pas de critěre unique et spécifique (cf. exercice n° 23). On définira done le COD de la facon suivante : il se trouve aprěs le verbe et n'est pas déplacable, il peut étre pronominalisé par le, la, les. en parti-culier dans le détachement: Ma peau supporte trěs bien le soleil. Le soleil, ma peau le supporte trěs bien. et ne peut pas commuter avec un adjectif. Lorsque le determinant n'est pas défini, ce qui est une condition pour que la pronominalisation se fasse avec le, le groupe peut néanmoins étre considéré comme un COD si son determinant peut commuter avec un article defini: Paul a consulté un livre. Paul a consulté le livre. mais J'ai une peur bleue. *J'ai la peur bleue. Sont done exclus par cette definition l'attribut, qui partage la plupart des propriétés du COD, mais peut commuter avec un adjectif: Cet événement est une catastrophe. Cet événement est catastrophique. (cf, p. 127) mais aussi des CV comme : Elle vit une vie de folie. II mesure deux metres. II respire ľ ennui. i.e syntagme nominal «127 qui constituent des complements d'un type particulier (cf. exercice n° 23) et les prétendus sujets reels des unipersonnels. S'ils sont bien ä droite du verbe, ne sont pas déplacables, ni commutables avec un adjectif, ils ne le sont pas davantage avec un groupe défini: II arrive une voiture. *I1 arrive la voiture. et n'aeeeptent pas la pronominalisation en le (la, les). On peut appeler sequence du verbe unipersonnel ce type de complement, pour en marquer la spécificité. Le complement ďobjet indirect peut étre défini de la méme facon comme un complement postverbal, precede de la preposition exigée par le verbe, et pronominalisable. La liste large des prepositions se réduit pour les complements d'objet indirect ä de (parier de), ä (partieiper á) et sur (compter sur) dans une moindre mesure. Ces complements peuvent également étre pronominalisés : en réver, réver de lui y penser, penser ä lui y compter, compter sur lui. Signalons enfin qu'il existe des verbes ä double C V : accuser quelqu'un d'une faute offrír des fleurs ä sa mere. Les verbes qui se construisent ainsi avec un CV sont transitifs, directs ou indi-rects selon le cas. Un verbe transitif peut parfois se presenter avec une construction intransitive : II travaille ä sa dissertation. II travaille. (cf. exercice n° 24). ▲ L'attribut. La definition sémantique indique que l'attribut exprime ľ etat du sujet, dans le cas de ľ attribut du sujet: Jean est gen til. ou de ľobjet, dans le cas de l'attribut du complement: Je trouve Jean gentil. De fait, le sujet (ou ľobjet) et l'attribut sont relies doublement, par l'accord éventuel: Jeanne est gentille. et par le fait que l'attribut designe une caractéristique ou une propriété du sujet ou de ľobjet. Pourtant, il faut tenir compte du verbe qui met en relation ces deux elements. L'attribut est different d'une apposition. Du point de vue de sa construction (place ä droite du verbe) et de la pronominalisation : 128 • La Grammaire Jean est un gentil garcon ou en tout cas il le parait. il est proche des CV. Dans touš les cas, le verbe donne sa cohesion ä ľénoncé et constitue le support des formes pronominales. La fonction attribut doit done étre liée au verbe, les verbes qu'elle met en jeu ayant la particularité de relier ľ element qui les suit et le sujet. On peut les appeler verbes attributifs, étre, devenir, sembler, paraítre, mais aussi trouver, appeler, etc... en cas d'attribut de ľobjet. La fonction attribut est done particuliěrement complexe, puisqu'elle met en relation trois termes et non pas deux comme les autres : le verbe attributif, ľattribut et le sujet (ou ľobjet) auquel ľattribut est lié sémantiquement et éventuellement morphologiquement par ľaccord. 1.3. Les ajouts ä la proposition II s'agit ď elements qui bien entendu ont un intérét sur le pian sémantique et qui de ce point de vue sont parfois nécessaires, mais qui ne servent pas ä constituer la proposition minimale, ä la difference du sujet et des CV. On y trouve les complements de phrase, mais aussi les appositions et les apostrophes. ▲ Les complements de phrase. Ce sont des complements non indispensables qui peuvent étre supprimés sans attenter ä la coherence syntaxique de la proposition et n* ont pas de place fixe. Sur le plan sémantique, ils expriment les circonstances du proces, lieu, temps, cause, but, consequence, instrument, accompagnement, etc. Cette classification n'a guére de valeur grammaticale, et ľ on se contentera ici de mettre en evidence un certain nombre de caracté-ristiques formelles de ces circonstants. Ces complements sont le plus souvent introduits par une preposition. Cependant un certain nombre d'entre eux n'en présentent pas, en general quand ils comprennent un substantif qui appartient ä ľ une des deux grandes categories déictiques de ľespace et du temps. Ils indiquent alors notamment un point de repére : II dort la nuit. vs Le meurtre a eu lieu pendant la nuit. Ils ont rendez-vous place de la gare. vs Ils se proměnent autour de la place de la gare. avec un substantif qui présente une indication codifíée soit par le calendrier, soit par la topographic Certains de ces complements sont lies ä ľénonciation et indiquent une modalite : Par bonheur, il n'a pas été blessé. En ďautres termes, il a été renvoyé. Dans la majorite des cas figure une preposition qui indique clairement, indépendamment merne du substantif, la valeur sémantique du CP : Le syntagme nominal «129 II est venu avec sa femme. II s'est promené dans le jardin. II ne sort plus en raison du mauvais temps. Certains CP ď en présentent pas et posent des problémes particuliers: Les vétements en bataille (sales), eile a fait irruption dans la piece. Le vent soufflant avec violence, nous étions transis. S'ils ne sont pas formes de la meme facon, ils ont néanmoins en commun de presenter un premier groupe determine par un second. Dans le premier exemple, le CP est forme de deux syntagmes nominaux dont le second est prépositionnel et. dans le deuxiéme, d'un syntagme nominal et ďun syntagme participial (on n'accordera pas ä le vent soufflant avec violence le statut de proposition, le participe n'étant pas une forme conjuguée du verbe et on ne parlera pas plus de proposition participiale que de proposition infinitive). Si ľ on supprime ce second element, la phrase ď est plus acceptable : *Les vétements, eile a fait irruption dans la piece. *Le vent, nous étions transis. Lorsque le second groupe comprend un participe present, il ďexiste pas de contraintes lexicales pesant sur le type de substantif s utilises. II n'en va pas de méme avec les autres complements. lis présentent en effet nécessairement un terme désignant une partie du corps, ou un vétement (cf. t. 1, exercice n° 39). En téte ou fin de phrase, ces CP décrivent une maniere ď étre du sujet. Pour pouvoir étre rapportés ä un complement, il f aut qu'ils lui soient immédiate-ment contigus : ľai rencontre Jeanne, le visage hagard. le regard égaré. ú Cest la un comportement qui les rapproche des appositions. ■o ~ ▲ Ľapposition. De méme qu'on a traité de ľattribut avec les CV, les uns et % les autres étant indispensables ä la proposition, on rapprochera les appositions ■g des CP, bien qu'elles en different sur plus ďun point. Cest que, comme eux, a les appositions ne font pas partie de la proposition minimale, mais constituent g des ajouts non nécessaires sur le pian syntaxique. CP et appositions sont des © elements mal integres, souvent hors phrase, qui sont plus ä relier ä ľénoncia- 8 tion qu'ä ľénoncé lui-méme. % On réservera le terme d" apposition aux groupes substantivaux, pronoms et £ propositions, et pour ľadjectif, on parlera plutôt dépithěte détachée : _i z Cet enfant, trés intelligent, réussit trés bien en classe. o □ Si, sémantiquement, ľapposition peut se rapporter ä ľ ensemble de la proposi- | tion, et avoir valeur de circonstance : CC q Orphelin trés tôt, il a été sevré de tendresse. 130 • La Grammjire eile s'articule toujours syntaxiquement ä un terme (ou groupe) de cette proposition, qui est dit terme support, et qui peut étre lui-méme un groupe substantival, un pronom ou une proposition : II a promis qu'il viendrait, enorme mensonge. Ľ apposition est liée directement au terme support, et on en exclura les constructions avec la preposition de : la ville de Paris qui ne different pas de complements de noms comme : une dizaine d'enfants le metier de professeur oů la preposition de peut également étre paraphrasée par étre. Ľ apposition peut étre liée : un enfant modele ou détachée : cet enfant, modele de sagesse c'est-ä-dire séparée par une pause du terme support. Ľapposition liée ne comporte jamais de determinant et suit toujours immédiatement le terme recteur. Le terme appose ne peut étre qu'un substantif, non accompagné de determination. Ľapposition détachée, si eile accompagné un complement, le suit obligatoirement. Elle comporte un determinant si eile ne présente pas ďautre determination : J'ai rencontre Jean, ce filou. J'ai rencontre Jean, filou notoire. *J'ai rencontre Jean, filou. Quant ä ľapposition au sujet, eile peut se placer en tete de phrase, aprěs le verbe, et méme en fin de phrase. En tete, eile est obligatoirement sans determinant mais accompagnée ďun adjectif, ďun complement, etc. : ... oů, flottaison bléme Et ravie, un noyé pensif parfois descend (Rimbaud). Dans les autres positions, l'article est fréquemment omis si ľapposition comporte des determinations : Voilä que monte en lui le vin de la Paresse, Soupir d'harmonica qui pourrait délirer (Rimbaud). ou est juxtaposée ou coordonnée ä une autre apposition : La barque aux barcarols chantants Voguait cygne mourant siréne (Apollinaire). Autrement, l'article est requis. le syntagme nominal • 131 ▲ Ľapostrophe. Elle indique explicitement l'interlocuteur auquel s'adresse le locuteur, qu'il soit par ailleurs déjä indiqué ou non par tu ou vous : Soldats, la victoire est proche! Soldats, je suis fier de vous! Elle peut étre précédée de ô : Sois sage, ô ma douleur (Baudelaire). en particulier dans un style soutenu. Elle ne comprend généralement pas de determinant, bien qu'un determinant possessif, comme dans ce dernier exemple, ou un article défini puisse apparaitre : Salut, ľ artiste! La presence d'un autre determinant indique que ľon a affaire ä un groupe exclamatif: Des soldats! des soldats! on en voit partout! Cette absence quasi generale de determinant donne ä ľapostrophe, comme déjä ä ľapposition, un role de satellite dans ľénoncé. Elle doit étre mise en relation avec la personne du dialogue ou la situation. 2. La composition des SN Un SN est compose d'un substantif et éventuellement des elements qui ľac-compagnent, tels que les articles et les adjectifs. Le but de ces paragraphes est ď examiner la constitution de ces groupes et de passer en revue la nature des principaux elements qui les composent. f 2.1. Les substantif s = On les range en deux categories, les noms communs (qui seraient mieux S nommés substantifs communs), dont on dira seulement que, pour pouvoir S fonctionner comme sujets, ils ont besoin d'etre accompagnés d'un determinant: o H *Chat miaule, CO g vs Le chat miaule. c §. et les noms propres, qui peuvent fonctionner seuls, méme lorsqu'ils sont en 8 usage. On se souvient (cf. t. 1, p. 131) que touš les signes peuvent étre pris en ě usage, lorsqu'ils renvoient au monde, comme dans ľexemple precedent, et en 3 mention, lorsqu'ils renvoient ä eux-mémes : g Chat a quatre lettres et deux phonemes. o § Dans ce dernier emploi, dit également autonyme, le substantif ne présente pas 1 de determinant, mais ce n'est pas l'emploi le plus courant du signe. Au © contraire, le nom propre, dans ses emplois ordinaires, n'en comprend pas : 132 • La Grammaire Minette miaule. Les noms propres sont trěs difficiles ä définir, car aucun critere ne permet ä coup súr de les séparer sans ambiguité des noms cornmuns. De surcroit, les différents critěres utilises ne sont pas nécessairement convergents. On peut néanmoins dire que le prénom constitue le prototype du nom propre. Les noms propres ont souvent une graphie particuliěre : ils commencent par une majuscule, et on dít qu'ils n'ont pas d'orthographe particuliěre. De méme, ils échappent souvent au systéme phonologique, par exemple pour la prononciation des prénoms. En ce qui concerne la morphologie, ils présentent souvent un mode de formation particulier, comme dans les diminutifs (Pitou pour Philippe, Dilou pour Odile, etc.), accompagné ďun fonctionnement affectif ou hypocoris-tique. Par ailleurs, ils donnent trés peu naissance ä des derives, en dehors des adjectifs relationnels : Balzac —> balzacien. lis échappent done ä la morphologie du nom commun. Si un certain nombre peuvent subir la flexion en genre pármi les prénoms (Germain / Germaine), e'est loin d'etre le cas par exemple dans les patronymes (noms de famille) qui ne la connaissent pas. Enfin, ils ne peuvent subir la flexion en nombre qu'en prenant un determinant: les Duponds ce qui les rapproche des noms communs. Encore faut-il signaler qu'on ne sait en pared cas s'il faut leur mettre un s. En ce qui concerne la syntaxe, ľélément fundamental est évidemment ľabsence d'article. A ce propos, on soulignera qu'elle est surtout de regle pour le prénom et le patronyme : Jean Durand mais que Particle peut se rencontrer par exemple dans des noms de lieux (toponymes) : Le Havre, la Seine et méme dans des patronymes oú ľon parle ď article integre : Legrand. Dans tous les cas. Particle est fixe : la Seine et non *une Seine. Enfin, il faut signaler qu'il existe un processus qui tend ä faire passer le nom propre dans la catégorie du nom commun, précisément par Padjonction d'un article : le petit Pierre, et qui lui permet alors d'etre accompagné d'un adjectif. Ce processus est trěs frequent par exemple pour les noms de marque : Renault mais la/les, une/des Renaults. Sur le plan sémantique et pragmatique, le nom propre n'a pas de sens, et il est vrai qu'on ne peut pas lui donner de definition autre que métalinguistique : Jean est un prénom. Mais il sert ä renvoyer ä un individu. II a ainsi un usage référentiel unique. Dire : Jacques est venu. e'est viser un individu unique, méme s'il existe des centaines d'individus qui s'appellent Jacques. Enfin, le nom propre sert ä interpeller : Jacques, viens done ici! et il est souvent en apostrophe. ' ' "' Le syntagme nominal «133 Les noms propres ont done un ancrage pragmatique dans la situation de communication (ils renvoient ä l'interlocuteur) qui les rapproche des déic-tiques et par exemple des pronoms personnels : Toi, viens done ici! Les autres SN comprennent, outre le substantif commun, des elements qui le déterminent ou le caractérisent. 2.2. Les determinants ▲ Determinants et adjectifs. Les premiers indiquent une propriété de la classe ä laquelle appartient le substantif, mais non les seconds. Ainsi dans : deux chats Wanes deux renvoie ä P ensemble et non ä chaque chat, alors que blanc caractérise chaque chat pris isolément. Cette opposition recouvre généralement une difference syntaxique, selon laquelle les premiers elements, que Pon a coutume d'appeler determinants, se placent ä gauche du substantif alors que les seconds se placent ä droite, certains adjectifs dits qualificatifs comme bon, jeune, etc., ayant la possibi-lité d'apparaitre dans les deux positions. Par ailleurs, si les determinants peuvent étre employes seuls devant le substantif, il n'en va pas de méme des elements qui le caractérisent: *Chats blancs miaulent. vs Deux chats miaulent. On conviendra de conserver le terme ď adjectifs pour ces elements caractéri-sants. Ils comprennent, si Pon reprend la terminologie usuelle, outre ľadjectif qualificatif, les ordinaux, comme premier, second, et un certain nombre d'in-définis, comme autre ou méme (cf. exercice n° 28) : *Chat premier miaule. ou *Premier chat miaule. '■•■ Autre chat miaule. on *Chat autre miaule. On définira les determinants comme des elements toujours situés ä la gauche du substantif qui lui permettent, dans des conditions ordinaires, de fonctionner comme sujet: *Chats blancs miaulent. mais Les chats blancs miaulent. Deux chats blancs miaulent. Lorsqu'un element classé dans les determinants apparaít aussi ä droite, il change de sens et devient un element caractérisant, comme certain, qui présente ainsi des formes homonymes : determinant: Certaines réussites ne me tentent pas. adjectif : Une réussite certaine me tente. 134 • La Grammaire Si on dresse un tableau de concordance entre la terminologie traditionnelle et celle-ci, on obtient: articles adjectifs démonstratifs adjectifs possessifs adjectifs numéraux cardinaux adjectifs indéfinis adjectifs qualificatifs adjectifs numéraux ordinaux determinants articles determinants démonstratifs determinants possessifs determinants cardinaux determinants indéfinis adjectifs adjectifs adjectifs mais __________________________________________________________________________________________________________________i ▲ Les différentes categories de determinants. On peut classer les determinants selon qu'ils peuvent se combiner directement avec le substantif: plusieurs hommes *la plupart hommes, selon au contraire qu'ils peuvent se combiner avec un SN, comprenant lui-méme un determinant, au moyen de la preposition de : la plupart de mes livres *les de mes livres, et selon enfin qu'ils peuvent étre employes seuls comme adverbes : Jean lit beaucoup de livres. Jean lit beaucoup. On peut aussi distinguer deux grands types de determinants, selon qu'ils ne peuvent se combiner entre eux, et ce sont les articles, les possessifs et les démonstratifs : *le mon livre *mon le livre ou selon qu'ils peuvent se combiner avec ceux-ci ou entre eux : deux livres quelques livres ces deux livres ces quelques livres deux cents livres quelques cent livres. Ce sont les numéraux et la plupart des indéfinis de la nomenclature officielle. Signaions enfin qu'il n'y a aucune raison d'exclure de la classe des determinants des elements qui comprennent eux-mémes un substantif et un determinant comme cette sorte de, un groupe de, oü c'est bien tout le groupe qui permet au substantif qui le suit de fonctionner comme sujet. A côté des determinants, il faut faire une place aux prédéterminants, elements ordinairement considérés comme adverbes ou locutions adverbiales, qui ont également la propriété de porter sur un determinant, et qui parfois méme ont seulement cette propriété : Le syntagme nominal «135 Environ (ä peu pres, ä peine,...) vingt personnes sont venues, mais *I1 lit environ. ▲ Les determinants articles. Un inventaire des formes fait apparaitre la repartition suivante : Article défini MASCULIN FEMININ forme longue le [1b] forme courte /' [1] forme longue la [la] forme courte /' [1] sg forme longue [lez] les forme courte [le] Pi Article indéfini MASCULIN FEMININ forme longue un [čěn] une [yn] forme courte un [03] sg forme longue [dez] des forme courte [de] Pi 5 Article partitif MASCULIN FEMININ forme contractée du [dy] forme courte de 1' [dal] forme longue de la [dala] forme courte de I' [dal] sg forme longue [dez] des forme courte [de] Pi z On ne reviendra pas sur les problěmes de ľ elision et de la liaison (cf. t. 1, 8 p. 56) sinon pour noter que ľécrit au pluriel présente une forme unique régu- z latrice, les, des, lä oü la morphologic orale fait alterner une forme longue et 1 une forme courte. On soulignera que le pluriel neutralise dans les articles @ (comme dans les possessifs et les démonstratifs) les oppositions de genre. 136» La Grammake On n'a pas fait figurer dans le tableau la forme de (pas d'enfants). Ce point fait difficulté et les grammairiens se divisent pour savoir s'il faut faire de cette forme un article ou une preposition. On y reviendra dans l'examen des emplois. L'utilisation de ces determinants, ainsi que celle des autres, est un moyen ď assurer, pour le substantif, le passage ď une reference virtuelle, purement lexicale, ä une reference actuelle. Si je dis livre, je ne renvoie qu'au contenu lexical du mot, general et large. Si je dis mon livre, je renvoie cette fois ä un referent objet du monde, particulier et restreint, et en méme temps j'indique la quantite d'objets du monde, un dans le cas present, auxquels le substantif est applique. Ce sont les determinants qui permettent cela, chacun ä leur facon. Mais ce mode d'actualisation de la reference, qui depend de la repartition entre determinants, est en partie conditionné par la catégorie lexicale du substantif determine. Enfin, il faut également prendre en compte le contexte oů se trouve inséré le groupe nominal. En ce qui concerne le role du lexique, on opposera les substantifs non comptables (cf. t. 1, p. 63) renvoyant au continu, et les substantifs comptables renvoyant ä ce qui est concu sous ľ angle du discontinu. Le est possible dans tous les cas, pour renvoyer ä la matiěre dans le premier et ä un referent isolé dans le second : le sable, le jardin, mais un et du se répartissent selon le substantif. Avec un substantif comptable, c'est un qui est employe, avec un substantif non comptable, c'est du : un jardin mais du sable. Les énoncés peuvent ďailleurs jouer de cette opposition. II suffit que ľ article ďun substantif non comptable soit un pour que ce substantif soit du méme coup transfere dans la classe des substantifs comptables : un vin. un sable ou qu'ä ľinverse le substantif comptable soit précédé de du pour qu'il soit transfere parmi les substantifs non comptables, donnant lieu ä des emplois plus ou moins codifies ou plus ou moins humoristiques : acheter du veau manger du cure ä tous les repas. La rhétorique voit des synecdoques dans ces emplois, mais il s'agit moins, comme dans les autres tropes, de changement de sens que de mécanismes niorphosy ntaxiques. Par contre, avec les termes abstraits, courage, intelligence, passion, c'est le qui est utilise. On opposera ainsi ľ intelligence ä une aptitude ä, le premier mot renvoyant ä une faculté de ľ esprit, le second ä une disposition concrete s'exercant dans un domaine particulier. L'utilisation de ces mots, générale-ment singuliers, au pluriel est un moyen de les faire passer de ľabstrait au concret et du general au particulier, ce qui autorise des : II existe bien des courages. Le syntagme nominal »137 En ce qui concerne le mode de renvoi au referent, pour expliquer la repartition des trois articles, on peut s'appuyer sur deux principes de distinction suivant ď une part que le referent est connu ou non, et suivant ď autre part qu'il est particulier ou general. Si le referent est connu, parce qu'il a été antérieurement défini, ou qu'il fait partie de ľ univers de reference commun ä celui qui parle et ä son interlo-cuteur, c'est le qui sera utilise. Le suppose que l'objet, l'individu, la notion auxquels renvoie le substantif sont connus soit parce qu'ils ont déjä été mentionnés dans ce contexte, soit parce qu'au sein de telle ou telle commu-nauté linguistique, ils possédent une notoriété particuliěre. En ce sens, le porte assez mal son nom ď article défini, puisqu'il ne sert pas lui-méme ä définir, mais s'associe ä un element connu et défini par ailleurs. Le sert done fonda-mentalement ä renvoyer. II peut ou bien faire reference ä des individus ou elements uniques, et par cela méme définis: Le soleil brille. ou bien renvoyer ä l'individu d'un genre auquel on pense le plus, dans des circonstances et dans un groupe donnés. Dans : Le president a fait un discours. le president peut théoriquement étre aussi bien le president de la République que le president du club de pétanque local, la notoriété étant toujours relative. Le peut enfin avoir valeur anaphorique et reprendre un element mentionné dans le contexte antérieur : J'ai rencontre Jean. Le malheureux était brülant de fiévre. Un ou du. selon le cas, servent ä presenter, ä nommer, et, en dépit du nom ďindéfini, ä définir ce qui ne ľa pas déjä été. Ils permettent de poser ľexis-ig tence d'un referent que ľon mentionne pour la premiére fois. C'est ce qui c explique leur emploi avec U y a, rarement suivi de le : 1 II y a un chat sur la terrasse, .$ vs ? II v a le chat sur la terrasse. 1 C'est aussi ce qui explique la difficulté de commencer un énoncé par un ou du, c la stratégie de discours la plus fréquente étant ď aller de ce qui est connu ä ce H; qui est nouveau. On hésitera ä dire : 'q. 8 Une voiture passe dans la rue. o De ľeau chauffe sur le feu. .c Q. 5 et on passera par le relais ďun présentatif initial: ^ Voilä une voiture qui passe dans la rue. 0 II y a de ľeau qui chauffe sur le feu. 1 La repartition des articles se fait aussi selon que le referent est general ou @ particulier. Lorsqu'il est particulier, le et im (du) s'emploient en fonetion des 138 • La Grammaire principes précédemment évoqués. Mais lorsqu'il est general, le singulier présente une valeur générique : L'homme est un rat pour ľhomme. Un peut lui aussi presenter une valeur generale : Une femme est toujours femme. mais, ä la difference de le, il renvoie moins au genre lui-méme qu'ä n'importe lequel des elements du genre. Les contours de ces elements sont dessinés, ce qui n'est nullement le cas avec le. On comprend alors qu'on puisse dire : Les mouches, ca ne s'attrape pas avec du vinaigre. Une mouche, 9a ne s'attrape pas avec du vinaigre. mais non : ? La mouche, 9a ne s'attrape pas avec du vinaigre. fa, demonstratio qui implique une reference ä un element particularise, est bien compatible avec le pluriel de le qui fait reference ä toutes les mouches du genre, avec un, qui renvoie plus particulierement ä ľ une d'elles choisie comme representative du genre, mais non ä la qui ne renvoie guěre qu'a la reference lexicale. Enfin, le contexte joue un role dans la repartition des articles. Ainsi, ľ opposition de un et de du ne vaut que si le substantif est au singulier et n'est pas accompagné ď une caractérisation. Le pluriel et le terme caractérisateur, intro-duisant ľun et ľ autre une forme de specification, peuvent faire passer du continu au discontinu, si bien que un devient possible : un sable gris une intelligence vive. Inversement, un substantif accompagné ď une relative ou ďun complement prépositionnel, présentera le au lieu de un. On opposera : II parle avec une facilité déconcertante. ä II ne parle plus avec la facilité déconcertante qu'on lui connaissait. Le en pareil cas a une valeur cataphorique. puisqu'au lieu de reprendre un element du contexte (valeur anaphorique), il en annonce un. Le partitif pose des problěmes particuliers. Le premier concerne la forme de pluriel qui est commune avec ľindéfini. On traitera de ce point dans ľexer-cice n° 25. Le second concerne la forme de: boire du vin /ne pas hoire de vin. Les grammairiens ne s'accordent pas sur ľ analyse de cet element. Pour les uns, il s'agit de la preposition, pour les autres, d'une forme de ľ article. On distinguera des cas litigieux ceux ou de est clairement une preposition, ce que font apparaítre les commutations: réver de voyage réver d'un voyage Le syntagme nominal • 139 © réver du voyage (du = de + le) sa soif de biěre sa soif ď une biére bien fraíche. La preposition est ici exigée par la construction du verbe ou du complement de nom. Ľemploi est également clairement prépositionnel lorsque de est suivie d'un determinant: Je vais vous offrir de mon vin. De indique dans ce dernier cas un prélévement sur une quantité. II n'en va pas de merne si ľ on confronte les exemples suivants: Je n'ai plus une seule allumette. / Je ďai plus d'allumette. J'achéte des pommes rouges. / J'achéte de bonnes pommes. Dans ce dernier exemple, d'ailleurs, on pourrait avoir, bien que la forme avec de soit jugée meilleure par les puristes ä cause de la place de ľ adjectif : J'achéte des bonnes pommes. Puisque de est commutable dans ces exemples avec un autre article, il vaut mieux y voir une forme particuliere de Particle partitif ou indéťíni II convient enfin d'examiner le cas de ľabsence ďarticle. En ancien francais, eile indiquait que seule la reference lexicale était envisagée, indépendamment de toute prise en consideration des elements ou des individus du monde. La repartition était done claire entre substantif et determinant + substantif Aujourd'hui, ľemploi des determinants s'est generalise, si bien que la plupart des emplois sans article représentent des survivances ou ne peuvent plus s'ex-pliquer que pour des contraintes purement syntaxiques. La reference virtuelle apparaít encore dans les proverbes oü contrairement ä la regle énoncée plus haut, un nom commun peut fonetionner tout seul comme sujet: Pierre qui roule n'amasse pas mousse. La notion est envisagée sous ľ angle de la plus grande generalite. Elle apparait aussi dans certains emplois aprés preposition et ľ on opposera : ■ II est sorti sans manteau / sans son manteau. : Un comportement de chef / le comportement du chef. ! Elle apparait finalement dans les locutions verbales telies que faire peur, I donner soif faire scandale. 11 faut remarquer que ľemploi d'un adjectif J- specific la reference et on note alors la presence d'un article fige : faire une í peur bleue. ] On peut en revanche se demander la raison d'etre de ľabsence d'article a dans certains tours comme : l Ordre a été donne de se replier. Notification a été faite de payer un tribut. 140 • La Grammaire oü le contenu de ľ ordre ou de la notification est actuel et connu. On rangera également dans les emplois syntaxiques les cas oü le substantif est attribut ou apposition et devient en fait un adjectif: Jacques est médecin. La encore, la presence ďun adjectif ou ď une relative rétablit ľ article : Jacques est un médecin connu (qui a pignon sur rue). Signaions enfin que ľexistence ďune série : II n'y a ni rigueur ni reflexion dans cet article. Narcisses, jonquilles et anemones composaient le bouquet. permet ľ absence ď article, puisque F opposition des termes limite la reference de chacun d'eux, et les fait passer du plan du virtuel ä ľ actuel sans qu'un article soit nécessaire. ▲ Les determinants demonstratio L'inventaire morphologique est le suivant: MASCULIN FEMININ forme longue cet [sei] forme courte ce [sa] cette [s£t] sg forme longue [sez] ces forme courte [se] pl On constate les mémes neutralisations au pluriel que pour les determinants articles. II s'agit ici des formes simples. Les formes composées ne font qu'ad-joindre aux précédentes un adverbe de lieu, ci ou la, qui se place apres le substantif : ce livre-ci, ce livre-la. En ce qui concerne les emplois, le determinant démonstratif seit ä presenter et ä montrer un element isolable soit dans la situation, et il a une reference exophorique (cest alors un déictique): Regarde ce triste temps! soit dans le contexte : J'ai rencontre Jacques. Ce malheureux garcon a de graves ennuis. II a dans ce dernier cas un fonctionnement anaphorique comme le. Plusieurs elements conduisent ä choisir Fun ou Fautre. Ce contient une emphase que ne r_e syntagme nominal «141 F article permet d'imposer ďemblée une coréférence (c'est-ä-dire le renvoi ä un meme referent): 1. M. Durand m'a parle : le professeur, quoiqu'agrégé, est un imbecile. 2. M. Durand m'a parle : ce professeur, quoiqu'agrégé, est un imbecile. En 1,M. Durand et le professeur sont interpreted comme renvoyant ä deux personnes distinctes, alors qu'en 2 il s'agit d'un seul et merne individu. D'autre part, ce pennet la repetition d'un substantif mieux que ne le ferait Un étudiant est venu me voir. Cet étudiant est inscrit en these. ?? Un étudiant est venu me voir. Ľ étudiant est inscrit en these. En dehors de ses emplois exophoriques ou anaphoriques, le démonstratif permet ľexagération et exprime en particulier le haut degré dans une exclamation, avec un tour partitif pluriel, et en F absence merne de toute caractérisation : II fait un de ces froids! ▲ Les determinants possessifs L'inventaire morphologique fait apparaitre que les formes varient selon le rang de la personne ä laquelle le determinant est relié; man, ton, son présen- - —-:«+;^^c ri^» forme ; lang, uv m £,—-___ tent les mémes variations de forme 3 (0 O c Q) Q. O O O O .n o. On constate que Fopposition des genres est neutralisée au pluriel, mais aussi au singulier dans la forme longue. Notre, vatre et lew varient seulement en nombre : notre et nos, votre et vos, leur et leurs. En ce qui concerne les emplois des possessifs on se reportéra ä Fexercice nü26. ▲ Les determinants indéfmis et cardinaux. On s'étendra peu, f aute de place, sur ces determinants. On analysera dans Fexercice n° 27 la forme tout. Les indéfinis et les cardinaux servent essentiellement a marquer la quantité : ce sont des quantificateurs. Les premiers marquent une quantité qui n'est pas mesurée avec precision, qui n'est pas chiffrée, les seconds, une quantité 142 • La Crammaire chiffrée arithmétiquement. lis sont compatibles syntaxiquement entre eux, bien que leur association soit soumise ä des restrictions sémantiques : plusieurs différents enfants deux différents enfants mais *plusieurs deux enfants et ä des contraintes d'ordre : différents plusieurs enfants *différents deux enfants. Enfin, le systéme de la numérotation, qui n'est pas seulement linguistique mais mathématique, fait que certains cardinaux sont compatibles entre eux : mille deux cents, mais qu'ils ne le sont pas dans la série des unites, sauf pour indiquer ľapproximation : II a bu deux (ou) trois verres de biěre. Pármi les quantifícateurs indéfínis, on dístinguera sur le pian sémantique ceux qui renvoient ä touš les elements ďun ensemble, qu'ils soient envisages dans leur totalite {touš) ou chacun isolément (tout, chaque), ceux qui renvoient ä une partie (la plupart, plusieurs, quelques, certains), ceux qui pointent vers un element partículier, souvent représentatif de ľensemble (tel), ceux qui permettent de comparer (différents, divers), etc. On constate qu'un měme element, selon par exemple qu'il est employe au singulier ou au pluriel, pourra presenter des valeurs différentes. Enfin, il existe des determinants de la quan-tité nulle, comme aucun ou nul, que ľon pourrait tout aussi bien classer parmi les numéraux. Ce sont sur ces determinants de la quantité que portent les prédé-terminants: environ dix mílie soldats ä peu pres touš les soldats. 2.3. Les adjectifs lis constituent la deuxiěme catégorie ď elements qui accompagnent le nom. lis ne servent pas ä actualiser une reference, ni ä quantifier le nombre ď elements vises, mais expriment des propriétés de ces elements. Us ne déterminent done pas, ils caractérisent. Us sont compatibles avec les determinants et ne peuvent ä eux seuls permettre ä un substantif de fonetionner comme sujet. ▲ Les différentes categories ďadjectifs. Sur la base de critéres sémantiques et syntaxiques, on peut distinguer différentes categories ďadjectifs. Les premiers sont les adjectifs qui expriment une propriété intrinseque, comme la couleur, la forme, etc. Ils constituent la majorite des adjectifs: une robe rouge, horrible, large, etc. Ils ne sont pas soumis ä des restrictions et ce sont eux qui ont les emplois les plus larges. Parmi eux, on rencontre des adjectifs Operateurs, qui peuvent avoir pour complements un infinitif ou éventuel-lement une completive : Le syntagme nominal »143 Elle est capable de mentir. Jean est fier que son fils ait réussi. Les seconds sont des adjectifs relationnels. Ils expriment done non plus une propriété intrinseque, mais une propriété relationnelle, et peuvent étre paraphrases par un complement prépositionnel : un bätiment municipal un bätiment de la municipalitě. Ils sont soumis ä des restrictions puisqu'ils ne se prétent pas ä ľ expression du degré : *un bätiment trěs municipal et généralement ne peuvent étre employes comme attributs ou épithětes détachées : *Ce bätiment est municipal. ? Municipal, ce bätiment est bien entretenu. II faut également regrouper avec les adjectifs les ordinaux et certains indéfínis qui n'ont pas un fonctionnement de determinant. Les numéraux ordinaux fonc-tionnent différemment des cardinaux. Ils n'indiquent pas une propriété de ľensemble, mais d'un element, et sont obligatoirement precedes d'un determinant: la premiere consigne de sécurité. Ils ont le comportement general des adjectifs ä place fixe (cf. p. 146). Quant aux indéfínis en question, mime et autre, ils n'ont rien non plus ä voir avec les determinants puisqu'ils sont toujours accompagnés d'un determinant (cf. exer-cice n° 28). II faut enfin poser la question des participes qui sont des formes verbales soumises ä la flexion nominale. En ce qui concerne les formes en -ant, si les emplois verbaux et adjectivaux ne se distinguaient dans l'ancienne langue que s par leur construction (le participe ayant celle du verbe) et subissaient les uns c et les autres la flexion en nombre et en genre, une separation s'est opérée ä la ~ fin du xvif siecle de telle sorte que le participe est invariable et conserve la Z construction du verbe : ■o '§ Sa decision surprenant tout le monde nous prit de court. 3 ™ alors que l'adjectif verbal varie et a la construction des adjectifs, nécessaire-c ment avec preposition : 0 Sa decision surprenante pour tout le monde nous prit de court. o ° L'orthographe note parfois ces differences : fatiguant (participe) vs fatigant a (adjectif). ± La distinction entre participe passe et adjectif est plus malaisée, puisque d ľun comme ľ autre sont susceptibles de flexion. Elle est affaire de contexte et a d'interprétation (cf. exercice n° 29): < 1 Je suis fatiguée par ton attitude (participe dans une forme passive). q Je suis fatiguée (adjectif). 144 • La Crammaire ▲ Les fonctions de l'adjectif. On parle de fonctions de ľadjectif, bien qu'elles n'aient den ä voir avec les fonctions nominales et ne se déterminent pas par rapport au verbe, puisque dans tous les cas ľadjectif est lié au substantif, ou ä un element equivalent. Plus que de fonction, il s'agit du mode de construction de l'adjectif par rapport au substantif. L'adjectif peut étre épithěte liée ou détachée. Ľépithete détachée est séparée du substantif par une pause et se distingue de ľépithete liée par sa mobilite : La cliente, toujours furieuse, continue ä vociférer. Toujours furieuse, la cliente continue ä vociférer. La cliente continue ä vociférer, toujours furieuse. Les adjectifs relationnels ne peuvent étre détachés, et inversement le détache-ment est seul possible aprěs les noms propres (en dehors ďépithetes stéréotypées: Petit Jean) ou certains substantifs fortement specifies : *Jean furieux a fait une scene. Jean, furieux, a fait une scéne. *Ma mere furieuse a fait une scene. Ma mere, furieuse, a fait une scene. ainsi qu'avec les pronoms. Aprěs les verbes attributifs ľadjectif peut également étre attribut du substantif, sauf lorsqu'il s'agit d'adjectifs relationnels, ä moins qu'ils ne se trouvent dans un cadre d'opposition : *Cette decision est municipals ví Cette decision est municipale, et non départementale. La distinction entre épithětes et attributs est evidente quand il s'agit de l'at-tribut du sujet. Quelques cas ďambiguľté peuvent se produire avec ľattribut du COD. Dans : U aime la biěre brune. bnme peut étre épithěte ou attribut: Qu'aime-t-il? U aime la biěre brune. Comment aime-t-il la biěre? II aime la biěre//brune. Pour ľépithete, la pronominalisation porte sur tout le groupe : La biěre brune. il l'aime. tandis que, pour ľattribut, eile ne porte que sur Dét. N : La biěre, il l'aime brune. Et ce n'est que lorsqu'il est attribut que l'adjectif peut étre soumis ä 1'extrac-tion, c"est-ä-dire inséré dans c'est... que : C'est brune qu'il aime la biěre. vs C'est la biěre brune qu'il aime. Le syntagme nominal «145 ▲ Les degrés de l'adjectif. U s'agit des différents moyens par lesquels on compare des propriétés exprimées par ľadjectif, ou par lesquels on marque leur intensitě. Dans les degrés de comparaison, on trouve le comparatif de superioritě, plus Adj. que. ďégalité, ciussi Adj. que, et ďinfériorité, moins Adj. que. Le second element de la comparaison est dans tous les cas introduit par que, suivi éventuellement de ne dans une subordonnée aprěs un comparatif d'inégalité : II est moins intelligent qu'il (ne) le croit. Ces comparaisons permettent en particulier de comparer un element ä un ou plusieurs elements d'un ensemble : II est plus sage que Pierre. II est plus sage que la plupart de ses copains. On peut également comparer un element ä tous les autres elements du méme ensemble : Pierre est le plus sage de la classe. 1'élěve le plus sage que je connaisse. La tradition parle en pareil cas de superlatif (cf. exercice n° 1) mais il s'agit toujours d'une comparaison. Les limites de ľensemble peuvent ne pas étre précisées, s'il n'y a pas de complement, ce qui laisse supposer que celui qui possěde la qualité en question ľa plus que quiconque : Pierre est le plus sage. et on est alors proche des degrés ďintensité : Pierre est trěs sage. ^ Ces degrés s'expriment par des moyens trěs varies. On distingue : § - le bas degré, qui se marque par quelques prefixes, tels que hypo (hypo- § tendu), ou sous (sous-alimenté), par des adverbes ou locutions adverbiales .% marquant directement ou indirectement la quantité (peu, un peu, pratiquement 0 pas, faiblement, pauvrement). i - le moyen degré, marqué par des adverbes de quantité et de maniere ° {asset, pas mal, ä peu pres, suffisamment, moyennement). ■%_ - le haut degré oíi la diversité de moyens est la plus grande : § • intonation : // est bete! 1 • tours exclamatifs: Qu'il est bete! a • morphologie : - superlatif s synthétiques, c'est-ä-dire en un seul mot, z comme richissime; 8 - prefixes : super, hyper, archi, sur, ultra, extra. Í • lexique : adverbes de quantité ou de maniere : trěs, extrěmement, parfaite- 1 ment, bien, tout ä fait, drôlement, rudement, vachement, etc. © • rhétorique : repetition : ce n'est pas joli joli. Je parle. 8 *Je, ä voix haute, parle. § J'en parle. Q. 3 les autres, dites disjointes, peuvent en étre séparées: Cest moi qui parle. Je parle de lui. Les premieres sont le plus souvent atones, les secondes toujours toniques. II convient de classer parmi les premieres le pronom on, qui a la méme definition 148 • La Grammaire formelle, bien qu'il ne s'utilise que comme sujet. II commute parfois avec ľune d'elles : Nous arrivons. On arrive. Ces particules ont un caractěre remarquable qu'elles partagent d'ailleurs avec des elements comme les pronoms relatifs ou interrogatifs : ä la difference des substantifs, elles portent la marque de la fonction (je sujet ví me complement), ce qui est une trace de ľancienne langue. L'inventaire des formes distingue la série conjointe et la série disjointe. A ľintérieur de chacune d'elles, les particules different suivant la fonction, le nombre, le genre et le rang. On peut les récapifuler comme suit: formes conjointes 12 3 4 5 sujet je tu il/elle nous vous 6 ils/elles comp. formes disjointes me te on le/la lui se en nous les leur se en y toi lui/elle nous vous eux/elles soi soi Ce tableau fait apparaitre un certain nombre de neutralisations pármi les oppositions dégagées. Comme les substantifs, les formes disjointes ne varient pas selon la fonction. Certaines formes, comme elle(s) ou lui, sont communes aux deux series, mais eile ne sont pas également accentuées. Pármi les formes conjointes, les personnes du dialogue, de rang 1 et 2, et les pronoms de rang 4 et 5 ne marquent pas ľ opposition de genre et n'ont pas non plus de formes propres pour marquer la reflexivitě dans les verbes pronominaux alors que se existe pour les pronoms de rang 3 et 6 : II le regarde. vs II se regarde. On remarque la place tout ä fait ä part des pronoms de rang 3 et 6, seuls ä presenter toutes les oppositions, y compris celie de ľanimé et de ľinanimé (y/hú, et en/de lui) et seuls également pour lesquels on peut parier de variation en nombre. Nous et vous en effet ne sont pas vraiment le pluriel deje et de tu, nous n'étant pas une collection deje, mais pouvant renvoyer ä moi et toi, moi et vous, moi et lui (eile), moi et eux (elles), et vous pouvant étre toi et toi (deux interlocuteurs différents successivement désignés par toi), toi et vous, toi et lui (eile) et toi et eux (elles). Enfin, on n'admet aucune flexion et ne s'utilise que comme forme conjointe sujet. Le syntagme nominal »149 En ce qui concerne la distribution des pronoms personnels il faut d'abord prendre en consideration leur place par rapport au verbe. Les formes disjointes ne posent aucun probléme particulier et se component comme n'im- porte quel SN : Pense ä Marie. Pense ä eile. Les formes conjointes, elles, se placent obligatoirement avant le verbe, ou plus exactement devant la premiére forme verbale portant les marques flexion- nelles : Je le vois. / Je ľai vu. En vertu de cette regle, on disait en francais classique, quand le groupe comprenait un verbe conjugué suivi d'un infinitif : Je le veux manger. De nos jours, le pronom est place devant le verbe dont il est complement: Je veux le voir. Lorsque le verbe est ä ľimpératif, on distingue les cas oil il s'agit d'une forme negative (les regies sont Celles du fonctionnement general) et ceux ou il est au positif. Le pronom suit alors le verbe et ce sont tantôt des formes disjointes qui apparaissent: Regarde-moi. vs II me regarde. Ne me regarde pas. tantôt des formes conjointes accentuées : Regarde-le. vs II le regarde. Ne le regarde pas. L'apparition d'une forme conjointe ou disjointe n'est pas toujours aisée ä I justifier. Ainsi, certains verbes qui entrent dans la construction V ä SN admet-! tent y, mais non lui. On aura par exemple : 5 \ II tient ä ce voyage II y tient I mais II tient ä cet ami. *Il lui tient/Il tient ä lui. \ (En francais courant, v est alors utilise dans touš les cas.) Dans d'autres cas au ° contraire, c'est y qui est impossible : s On attribue ce lapsus ä Jean. 3 On lui attribue ce lapsus. 5 vs On attribue ce lapsus ä la fatigue. °- *On y attribue ce lapsus. CT3 z On constate une fois de plus que le lexique n'a pas ľ apanage de ľarbitraire et 8 des lacunes surprenantes. I II convient en second lieu ď examiner la distribution des pronoms les uns I par rapport aux autres. 2, 3 ou 4 au maximum peuvent se combiner entre a eux : 150 • La Grammaire On vous ľy fera suivre. La compatibilité et ľordre respectif des pronoms peuvent se résumer comme suit : I II III IV V VI je me le lui y en tu te la leur il se les eile nous on vous nous vous ils elles Le numero des colonnes indique ľordre d'apparition des pronoms ä gauche du verbe. Les pronoms qui figurent dans une méme colonne ne sont pas compatibles. Toutes les colonnes sont compatibles entre elles ä l'exception de II et IV. Lorsqu'une combinaison n'est pas possible, on voit apparaitre une forme disjointe : II te confie ä moi. ví *I1 me te confie. Ľordre des pronoms ne suit done pas nécessairement celui qui apparaít avec les SN pour lesquels le COD precede le complement indirect. Cet ordre n?existe que lorsque ce sont exclusivement des pronoms de rang 3 et 6 qui sont impliqués : H le lui donne. Avec les pronoms des autres rangs, c'est le complement indirect qui precede : II me le donne. Le réfléchi de rang 3 et 6 se a sur ce point des affinités avec les personnes du dialogue : II se ľachete. et non *I1 le s'achete. *I1 lui l'achete II le lui achěte. A ľimpératif positif, lorsque sont en jeu des pronoms des colonnes III et IV, on ne note aucun changement par rapport aux phrases affirmatives : Donne-le lui. mais lorsqu'il s'agit des pronoms des colonnes II et III, ľordre s'aligne sur IH + IV: Donne-le moi et non *Donne-moi le. Cette derniěre forme est d'ailleurs trěs fréquente en francos populaire, par analogie avec ľordre de la phrase affirmative : // me le donne. II faut bien dire qu'il est difficile de justifier ces regies sectorielles. Le syntagme nominal »151 En ce qui concerne leur role, certains pronoms personnels ne sont que des nominaux. C'est le cas deje et tu qui ont un fonctionnement de déictiques (on les appelle parfois embrayeurs) en ce qu'ils renvoient ä la situation et non au contexte linguistique. Ils ne peuvent s'expliquer que dans le cadre de ľénon-ciation, puisqu'ils sont anerés directement sur les protagonistes du dialogue. En d'autres termes, ils ont une reference exophorique, et s'articulent sur ce qui est extérieur ä ľénoncé. Au contraire les personnes de rang 3 et 6 sont des représentants et sont le résultat ď une pronominalisation. Elles ont done une reference endopho-rique, puisqu'elles renvoient ä des elements internes au contexte. Ce sont le plus souvent des anaphoriques qui reprennent un element déjä mentionné : Ľhiver est déjä la. II menace d'etre trěs rude. et parfois des cataphoriques, qui annoncent un element: Je le sais bien, que je manque de temps pour tout faire. Ils permettent ainsi ďéviter la repetition ďun element déjä mentionné et ďas-surer la cohesion de ľénoncé. Le SN et le pronom sont coréférents, ce qui signifie qu'ils ont la méme reference. Cette reference peut étre actualisée : Cette mandarine est pourrie. II faut la jeter. ou purement virtuelle, envisagée sous ľangle lexical, conceptuel. En pareil cas, les referents ne sont pas nécessairement identiques : J'ai mangé deux gäteaux et Pierre en a mangé trois. (il est clair qu'il s'agit de gäteaux différents). Nous et vous s'articulent parfois seulement sur la situation ďénonciation, avec le nous de majesté ou de modestie pour renvoyer au locuteur : Nous, Roi de France, décrétons que... Nous traiterons dans ce chapitre de... ou le vous de politesse pour renvoyer ä un interlocuteur unique. Mais ils s'articulent le plus souvent ä la fois sur cette situation et sur des SN du contexte : J'ai rencontre ton frěre. Vous habitez done ensemble? Voici Pierre. Nous travaillons ensemble. Par ailleurs, certaines formes, nécessairement disjointes, sont emphatiques et servent ä des mises en relief. Ces mises en relief se font par ľ extraction (cf. p. 42) ďun pronom oil l'on voit apparaitre une forme disjointe tonique : Je le déteste. Cest moi qui le déteste. ,. ■■., ■ . >. ■ , Cest lui que je déteste. ou par le détachement d'un pronom ou d'un SN : 152 • La Crammaire Je déteste Jean. Moi, je déteste Jean. Jean, je le déteste. Ni l'une ni ľautre de ces formes d'emphase ne peuvent porter sur le // des unipersonnels qui n'est qu'un indice de personne du verbe. Avec en et v, on ne voit pas apparaítre de pronoms personnels disjoints, mais des démonstratifs: J'en veux. Cest de cela (ca) que je veux. J'en veux de cela (de ca). Tels sont done les principaux roles que jouent les pronoms personnels : embrayeurs, représentants, indices flexionnels du verbe, elements d'emphase. 3.3. Les pronoms démonstratifs lis comprennent une série simple : masculin feminin neutře celui celle ce sg ceux celieš pl et une série composée avec un adverbe de lieu, ci ou lň : cehd-ci, cehii-lči, etc. On remarquera la presence au singulier seulement de formes de neutře, ce (c'), ceci, cela (ca en francais courant), trěs rares en francais. La forme simple ce est atone et a des emplois trěs limités, comme sujet de étre ou comme antecedent d'un relatif (cf. p. 60). II est en particulier utilise dans la formation du présentatif c 'est (cf. p. 65) : Cest bien lui. Les formes simples ont un role essentiellement anaphorique, de renvoi: J'ai acheté deux robes. La noire est celle que je préfěre. ou cataphorique : Ca veut dire quoi exaetement, ce que tu racontes? et alternent avec les pronoms personnels de rang 3 et 6 qui ne peuvent pas étre suivis d'une determination : I] y a des livres sur la table. Je les feuillette. íl y a des livres sur la table. Je feuillette ceux qui viennent de paraítre. Les formes composées peuvent renvoyer ä la situation, ce sont alors des déic-tiques qui méritent bien le terme de démonstratifs. (Pour la repartition entre formes simples et composées, voir exercice n° 4.) Le syntagme nominal «153 3.4. Les pronoms possessifs lis sont formes par ľemploi de deux determinants: ľarticle défini et la forme rare du possessif mien : le mien, la mienne, les miens, les miennes. Ce sont essentiellement des représentants, utilises ä la place d'un SN comprenant un adjectif possessif: Veux-tu mon stylo? Non, je préfěre ľécriture du mien (= de mon stylo). lis ne sont employes comme nominaux que dans un certain nombre d'expressions figées : y mettre du sien, passer Noél avec les siens, etc. 3.5. Les numéraux et les indéfínis Comme les determinants correspondants, ils indiquent la quantité nulle, personne, nul, ciucun, rien, non precise, plusieurs, quelques-uns, ou chiffrée, trois, mille, la totalite, tous, etc. En ce qui concerne leur forme, certains sont spécifiques et n'existaient pas pármi les determinants : personne, rien; ďautres, et c'est la majorite, soit sont identiques au determinant: aucun, nul, plusieurs, soit comprennent une forme accompagnée ďun determinant article : ľun, ľautre. Les numéraux présentent ľune ou ľautre forme, selon qu'ils renvoient ä une partie ďun ensemble : J'avais invité quinze amis : trois se sont excuses. ou ä la totalite : J'avais invité des amis : (tous) les trois se sont excuses. Certains de ces pronoms sont seulement des nominaux, comme personne ou rien, d'autres seulement des représentants, comme aucun ou les numéraux, d'autres enfin peuvent selon les cas étre ľun ou ľautre, comme tout: Tout a une fin (nominal). J'ai passé la journée ä faire du courrier. Tout a été expédié (representant). 4. Ľadverbe Les fonctions nominales peuvent enfin étre exercées par les adverbes : II marche avec lenteur. lentement. Mais ce sont des elements dont la nature est fondamentalement différente des elements nominaux et pronominaux puisqu'ils entrent dans la catégorie des mots invariables, avec les prepositions et les conjonctions. Ľadverbe est sur le plan morphologique une catégorie qui n'est pas aisée ä définir. Forme invariable, il ne peut évidemment pas étre characterise par sa flexion. De plus, c'est une categoric heterogene en ce qui concerne sa formation, puisque, si certains adverbes portent la trace de leur formation par derivation 154 • L) Crammaire (suffixe mort -ons, ä tätons, ä croupetons, Suffixe vivant et productif -ment, vivement, (internment), beaucoup d'autres sont directement issus du latin, comme hier, assez, ou sont des locutions figées, en bas, au loin, pied ä pied, devenues inanalysables, Sur le pian syntaxique, ľadverbe modifie un verbe, un adjectif (ou un groupe nominal en fonction ď adjectif): II parle peu. II est peu loquace. C'est bien mon frěre. II peut également porter sur un autre adverbe (un groupe nominal ou une proposition conjunctive ä valeur adverbiale): Ľ est parti bien avant le jour. II est parti bien avant que le jour ne se léve. II est parti bien tôt. Ľadverbe est done une catégorie recursive, comme les determinants dont on a vu qu'ils pouvaíent aussi se combiner entre eux. U est parfois malaisé de distinguer les adverbes d'autres elements de la langue. En premier lieu, il convient de citer les relations qu'ils entretiennent avec les adjectifs. Certains adverbes sont en effet directement issus d'adjec-tifs, sans suffixe. L'adjectif perd alors simplement ses marques flexionnelles : parier haut et fort. A l'inverse, un adverbe peut avoir les fonetions d'un adjectif: Cest une femme bien. Elle est bien. Ľadverbe entretient également des relations avec les determinants (cf. p. 135). II s'agit de ceux qui ne se combinent pas directement avec les substantifs, mais par ľintermédiaire de la preposition de : II a mangé beaucoup de gäteaux. et qui peu vent en effet s'employer seuls : II a beaucoup mangé. Enfin. ľadverbe n'est pas toujours aisé ä distinguer ďune preposition. Outre le fait que formellement ils sont souvent identiques, surtout dans le francais parlé (dessus/dessus le buffet; en face/en face la gare), certains emplois sont malaisés ä interpreter. Ainsi dans : Jean a tape sur Jacques. Jean lui a tape dessus. faut-il voir en dessus, qui correspond au sur du premier exemple, et qui est lie au pronom /;/;', un adverbe ou une preposition? i-e syntagme nominal «155 En dehors du fait qu'ils sont invariables, les adverbes et les locutions adverbiales ont entre eux peu de points communs. On peut en proposer plusieurs classements. On peut distinguer des adverbes de phrase, portant sur ľ ensemble de la phrase, et des adverbes ďélément (adverbes d'adjectifs, de verbes...) pour insister sur le parallele qui existe entre ľadverbe et les groupes nominaux. La definition des adverbes de phrase est difficile, mais on peut dire qu'ils ne sont pas, comme les adverbes ď elements, sujets ä un accord sémantique avec un mot particulier de la phrase, comme le fait apparaitre la réponse ä une question : Est-ce qu'il a neigé sur les Alpes? Abondamment. / *Admirablement. Est-ce qu'il sait nager? Admirablement. / *Abondamment. Abondamment et admirablement sont deux adverbes de verbe lies respective-ment ä neiger et ä nager : ils ne sont done pas interchangeables. Au contraire, naturellement, qui est un adverbe de phrase, conviendrait ä ľune et ľ autre question. Les adverbes de phrase sont en general mobiles : II est naturellement venu! Naturellement, il est venu! alors que les autres ne le sont pas : II a neigé abondamment sur les Alpes. *Abondamment, il a neigé sur les Alpes. Pármi les adverbes de phrase, on peut distinguer plusieurs categories, essen-tiellement les adverbes de lieu, de temps et les adverbes modaux, c'est-ä-dire en definitive autant ď adverbes liés ä ľénonciation : lei a lieu la foire annuelle. Avant, il faudra que je passe chez moi. Evidemment, il n'a pas éteint la lumiere. On peut classer les adverbes d'élément selon la nature de ľ element sur lequel ils portent, adjectif, verbe ou adverbe. On peut également les classer suivant leur valeur sémantique et distinguer des adverbes de maniere, de degré, de repetition, etc., ces valeurs pouvant étre modifiées selon ľ element sur lequel porte ľadverbe. Cest ainsi que la plupart des adverbes de maniere employes avec un adjectif prennent un sens intensif et deviennent interchangeables: II est merveilleusement bon. II est rudement bon. 156 • La Grammaire i^BMww»í*«í * Eíltr3iri6Z-V0US "*">:-t*.í"¥??w?<.*'i%?m 22. Ľinversion du sujet But de ľexercice: s'interroger stir Vordre des mots dans la proposition et sur les facteurs qui peuvent le modifier. Soit le texte suivant: Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours aprěs la peine Vienne la nuit sonne ľheure Les jours s'en vont je demeure Les mains dans les mains restons face ä face Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des éternels regards ľ onde si lasse Vienne la nuit sonne ľheure Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va comme cette eau courante Ľ amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne ľheure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne ľheure Les jours s'en vont je demeure (Apollinaire, Le Pont Mirabeau) Vous analyserez les cas ď inversion du sujet. Correction Le poéme offre plusieurs exemples oil le sujet suit le verbe. II ne faudrait surtout pas les mettre au compte du langage de la poesie ou d'effets stylis-tiques. Non que ces effets n'existent pas, mais la poésie n'a pas le pouvoir de changer les regies de la langue et le style ne consiste pas ä violer la grammaire, mais ä exploiter ses moindres possibilités, y compris les plus rares. Dans ce Le syntagme nominal «157 texte, Apollinaire n'utilise que des regies inscrites dans la langue, méme s'il le fait d'une facon particuliére, et ce sont ces regies qu'il faut mettre en evidence. Deux grandes categories peuvent étre distinguées. Dans la premiere, c'est la position du verbe dans une proposition sans modalite de phrase qui est en jeu, qu'il s'agisse d'une proposition independante (ou principále) assertive, ou d'une proposition subordonnée. Dans la deuxiěme, au contraire, l'ordre modifié est la consequence d'une modalite. a. Impossibilité pour le verbe d'etre en téte d'une proposition soustraite aux modalités. - La proposition assertive L'ordre ordinaire dans la proposition dite canonique, c'est-ä-dire sans modalite ni mise en relief particuliéres, interdit que le verbe y occupe la premiere place. C'est généralement le sujet qui remplit cette position, mais si un autre element ľ occupe, alors le sujet, moyennant certaines conditions, peut suivre le verbe, qui, de toute fa^on, reste ainsi au centre de la proposition. Ľ element qui apparait en tete est généralement un circonstant ou un adverbe. C'est le cas de Sous le pout Mirabeau coule la Seine. Tandis que sans complement de phrase en tete, *couIe la Seine ne serait pas possible, la presence du complement rend acceptable la postposition du sujet la Seine. Tous les verbes cependant n'acceptent pas ľinversion du sujet. II faut qu'ils soient intransitifs. Sous le pout Mirabeau envahit les berges la Seine est impossible, tout comme Sous le pont Mirabeau envahit la Seine les berges ou Sous le pont Mirabeau les berges envahit la Seine. II faut également noter que ľinversion n'est pas possible avec pour sujet un pronom personnel (particule préverbale) : *Sous le pont Mirabeau coule-t-elle. Sans element en téte de phrase, l'ordre verbe + sujet n'est acceptable que dans certains types ďénoncés, par exemple dans les didascalies d'un texte de = théátre : Entre la princesse. Si on analyse comme un indicatif le verbe passent "I (Passent les jours et passent les semaines), on se trouve en presence d'une de ~ ces inversions du sujet rares en ľabsence ďéléments en téte de phrase. Elle est Z rendue tolerable par le sémantisme du verbe qui affirme une fa^on d'etre : cela g fait partie du mode d'existence d'un fleuve que de passer. On a ainsi des inver-3 sions avec les verbes arriver, survenir, rester (Survint alors un événement § extraordinaire). On préférera pourtant analyser passent comme un subjonctif 0 (cf.b). g - Propositions subordonnées ě On sait que les subordonnées échappent aux modalités de la phrase, si bien que « leur cas n'est pas trěs different du cas precedent. Le Pont Mirabeau offre un s exemple de proposition subordonnée conjonctive circonstancielle Tandis que g sous le pont de nos bras passe des éternels regards I 'onde si lasse (- tandis § que sous le pont de nos bras passe ľ onde si lasse des éternels regards). Le 1 sujet des éternels regards ľ onde si lasse, qui comprend lui-méme une modi-© fication de l'ordre des mots, est postposé au verbe en raison de la presence en 158 • La Grammaire téte de la proposition de la conjunction de subordination. On pourrait attribuer la postposition au complement sous le pont de nos bras, mais sa suppression ne changerait rien ä l'ordre des mots : tandis que passe ľ onde, ce qui indique que ľinversion est bien liée ä la conjonction. Le verbe, comme dans les propositions non subordonnées, doit étre intransitif. Ľinversion du sujet est également possible dans les relatives, dont le texte ne présente pas d'exemple : ľ enfant que berce sa mere. En pareil cas, le verbe aura évidemment un pronom relatif complement. Enfin, quel que soit le type de la subordonnée, et comme précédemment, ľinversion n'est pas possible pour un sujet pronom personnel. b. Presence de modalités L'ordre des mots peut étre modifié pour peu qu'interviennent dans la proposition des modalités. - Modalités de la phrase On se souvient que les modalités peuvent se marquer par la construction de la phrase (cf. p. 32). L'interrogation est une de ces modalités, et eile peut entrainer ľinversion du sujet comme dans Faut-il qu'il m 'en souvienne ? On a affaire ä une proposition interrogative totale oů ľinversion de la particule préverbale est normale (cf. p. 37). On se souviendra que si le sujet avait été un SN, ľinversion n'aurait pas été possible, et que ľ on aurait du recourir ä ľinversion dite complexe : Jean doit-il s'en souvenir? - Modalite de ľéventualité ou de la volonte Les modalités peuvent également se traduire par le mode, essentiellement par le subjonctif marquant eventualite ou volonte. Cest le cas dans le refrain : Vienne la tmi t sonne ľheure, oů le parallélisme de construction conduit ä voir dans sonne un subjonctif comme dans vienne. Ľinversion, rendue possible par la modalite, et en ľ absence de ce que certains appellent la «béquille» du subjonctif, que, attendu avec le subjonctif, que vienne la mat, renforce le mode, que l'on peut interpreter ici comme marquant ľéventualité (la mat peut bien venir) ou le souhait (la nuit puisse-t-elle venir). C'est de la méme facon qu'on choisira ďinterpréter Passent les jours et passent les semaines, étant donne la similitude de construction et de sens avec le cas precedent: le temps peut passer, il ne revient pas, de méme que ľheure peut sonner, les jours s'en vont. On ajoutera pour conclure que les inversions sont particuliérement nombreuses dans ce texte d'Apollinaire parce qu'il s'agit d"un poéme oů aux contraintes de la langue s'ajoutent des contraintes de rythme, de nombre de syllabes et de sonorités. Ainsi ľinversion du premier vers permet-elle tout ä la fois le nombre de syllabes (10) et la rime avec peine. Mais ces contraintes n'ont pas le pouvoir de modifier la grammaire. Le syntagme nominal »159 23. Quelques complements directs du verbe But de ľexercice: manier les tests; faire apparaítre des differentiations; réfléchir sur la notion de prototype. Soit le corpus : 1. Jean respire la santé. 2. Elle sent le muse. 3. II dort son dernier sommeil. 4. Elle vit sa vie. 5. II mesure deux metres. 6. Ce colis pěše trois kilos. 7. II a la pépie. 8. J'ai la dent. 9. Jean est médecin. 10. Marie adore le chocolat. 11. Marie adore Jean. 12. Marie erie sa douleur. 13. La tempéte dévaste la côte. 14. Jean devient un enfant de plus en plus capricieux. a. Les SN ä droite du verbe sont-ils déplacables? b. Peuvent-ils étre supprimés? c. Peuvent-ils étre pronominalises, et par quoi? d. Peuvent-ils répondre ä une question introduite par qu 'est-ce que ou qui est-ce que, selon le cas? e. Peuvent-ils commuter avec un adjectif? f. Peut-on donner ä ces phrases un equivalent passif? Correction i a. Aucun SN ä la droite du verbe dans ce corpus ne peut ětre déplacé, et de ce > point de vue, ils sont touš distributionnellement equivalents. > b. Ne peuvent ětre supprimés que les SN des phrases 3, 4 et 12 : \ II dort; Elle vit; Marie crie. 5 Ailleurs, la suppression est impossible (ou trés difficile): = *La tempéte dévaste. |_ ou alors, le verbe change complětement de sens : 2 Jean respire. n Les complements des phrases 3, 4 et 12 sont done moins indispensables ä la ± syntaxe de la phrase que les autres. d c. La majorite des SN du corpus peuvent étre pronominalises, surtout si, pour q rendre la pronominalisation plus naturelle, on la precise par un contexte : < 1 Deux metres? il les mesure bien. ■Si Sa vie, eile la vit (pleinement). 160 • Z.,) Grammaire Elle est cependant difficile en 1, 2, 7 et 8. d. Les questions sont possibles seulement en 2, 7, 8, 9, 10, 11 et 13 : Qu'est-ce qu'elle sent? Elle sent le muse. En 5 et 6, on peut bien poser une question, mais e'est combien qui apparait : Combien mesure-t-il? En 9, la question est possible, mais serait meilleure avec le verbe faire : Qu'est-ce que fait Jean? II est médecin. En 14, la question serait meilleure avec comment: Comment devient Jean? II devient un enfant de plus en plus capricieux. e. Enfin, la commutation avec I'adjectif n'est possible qu'en 9 et 14. f, Moyennant les restrictions sur le passif étudiées dans ľexercice n" 2, il est naturel en 11 et 13 et possible en 10, et impossible partout ailleurs. Sur la base de ces observations, on peut distinguer plusieurs categories de SN ä droite du verbe. Un certain nombre correspondent ä la definition du COD, en 10, 11 et 13. On note ensuite les attributs, aprěs les verbes attributifs étre et devenir en 9 et 13. lis se séparent des COD en ce qui concerne la mise au passif, qui n'est jamais possible, et la commutation, toujours possible, avec un adjectif. Quant aux questions, elles sont possibles, mais spécifiques. En 1 et 2, on a affaire ä des emplois particuliers des verbes respirer et sentit; qui, dans d'autres cas, fonctionneraient comme les verbes de 10 ou 13 (respirer Voir des ebnes, sentir line rose). Certains tests sont du coup difficiles ä manipuler, comme la pronominalisation. Dans 3, 4 ou 12, il s'agit cette fois de verbes qui sont ordinairement intran-sitifs. La encore, certains tests sont difficiles ä apprécier, comme la pronominalisation qui nécessite des contextes particuliers : ? Son dernier sommeil, il le dort. vs Son dernier sommeil, il le dort dans un cimetiěre de Campagne. On parle parfois pour ces complements de complements internes. En effet, ils ne font que reprendre un trait sémantique du verbe, avec lequel, comme pour vivre et vie, ils sont parfois en relation morphologique. Pour ne pas étre entiěrement redondants par rapport ä lui, ils doivent étre accompagnés ďune determination (son dernier, sa, etc.). En 7 et 8, on a affaire ä des locutions verbales stéréotypées, oü le complement fait corps avec le verbe. Enfin, en 4 et 5, il s'agit de complements dont on fait parfois des complements circonstanciels de mesure. En fait, il s'agit bei et bien de CV et non de CP, comme le montrent les deux premiers tests, mais de CV d'un type spéci-fique, puisqu'ils correspondent ä une question particuliěre et n'admettent pas le passif. Le syntagme nominal • 161 Pour un méme type de complements, des CV, on voit done apparaitre dans cet exercice toute une gamme de comportements plus ou moins éloignés d'un modele du COD, représenté dans les phrases 10, 11 et 13, avec lequel ils parta-gent pourtant certaines caractéristiques. Cest la situation la plus répandue en syntaxe oü il est difficile de définir des classes regroupant des elements qui partageraient exactement les mémes propriétés. II faut plutôt concevoir qu'au-tour d'un prototype gravitent des elements plus ou moins ressemblants avec ce modele et entre eux. 24. Les COD qui peuvent étre supprimés But de ľexercice: réfléchir sur les relations entre constructions d'un méme verbe, et sur la notion ďélément obligatoire, facultatif ou aléatoire. 1. Soit le corpus : 1. Je mange un gäteau. 2. Je chante une rengaine. 3. L'huile de foie de morue fortifie les enfants. 4. Cette politique fortifie son prestige. 5. Marie lave le linge. 6. Marie lave la voiture. 7. Le riz nourrit les Chinois. 8. Ces arguments nourrissent la polémique. Vous essaierez de supprimer les CV. Vous préciserez dans quelles conditions peut se produire cette suppression. 2. Soit le corpus : 1. Marie casse la branche. 2. La branche casse. 3. Jean fume une cigarette. 4. Jean fume. 5. La cigarette fume. 6. Jean coupe le gáteau. 7. Le couteau coupe. 8. Marie cuit le gigot. 9. Marie fait cuire le gigot. 10. Le gigot cuit. 11. Marie épaissit la sauce. 12. Marie fait épaissir la sauce. 13. La sauce épaissit. Pour chaque verbe, vous étudierez les relations syntaxiques et sémantiques entre les constructions avec et sans complement et vous mettrez en evidence ce qui caractérise chacune ď elles. 162 • La Grammaire Correction 1. Les complements peuvent étre supprimés sauf dans les phrases 4, 6 et 8 alors que des verbes identiques sont en cause. On notera en premier lieu que les complements qui peuvent étre supprimés : Je mange un gáteau. / Je mange, ne peuvent pas étre déplacés. D'autres considerations font qu'on ne peut en faire des CP: les CP peuvent étre supprimés quel que soit leur sens, or, les complements auxquels on a affaire ici, qui, d'autre part, obéissent aux tests qui définissent les complements d'objet (cf. exercice n° 23) ne sont susceptibles d'etre supprimés que si certaines conditions sont remplies. En 1 et 2, on peut supprimer le complement parce qu'il est prévisible. On ne peut manger que quelque chose de mangeable, et méme s'il y a perte ďune information spécifique (manger un gäteau au lieu d'un bout de pain ou d'un fruit), le sens de la phrase reste comprehensible. On peut dire que ľobjet ici peut étre supprimé car il renvoie ä un element quelconque de ľ ensemble de touš les objets possibles du verbe, qu'ils constituent un paradigme trěs large, comme pour manger, ou plus restraint, comme pour chanter. En 3 et 7, seuls les complements qui renvoient ä des personnes peuvent étre supprimés : L'huile de foíe de morue fortifie. Le riz nourrit. alors qu'en 4 et 8, ou ils renvoient ä des choses, ils ne le peuvent pas : *Ces arguments nourrissent. Cela va de pair avec le fait que les verbes présentent alors un sens métaphorique, et ľ on constate une fois de plus le fonctionnement particulier du sens figure. Enfin, la confrontation de 5 et 6 fait apparaítre que, pour certains verbes, seuls un petit nombre de complements, renvoyant ä des inanimés, peuvent étre supprimés Hinge mais non voiture). On voit ce qui distingue ces constructions intransitives ďemplois comme agite.r avant usage, ou ne pas expaser a la chaleur, figurant sur tel ou tel produít dans lesquels c'est la situation qui permet de comprendre quel est ľobjet impliqué. On voit aussi ce qui distingue ces complements facultatifs des CP. La suppression du complement ne se produit que s'il peut étre recons-truit. La notion de prévisibilité est done fondamentale. Au contraire, les CP, qu'il s'agisse de complements de lieu, de temps, de maniere, ne peuvent pas étre reconstitués. Les CP ne sont pas facultatifs, mais aléatoires, alors que certains CV, selon le verbe, sont, eux, facultatifs. 2. Cette fois-ci, la presence ou ľabsence du complement est liée au sujet. Pour les verbes tels quefumer, couper, cuire ou épaissir, si le sujet est animé, on a une construction transitive avec COD, éventuellement facultatif dans les conditions que ľon vient ďexaminer : Le syntagme nominal • 163 ♦Marie casse. mais Jean fume. Lorsque le sujet est inanimé, c'est cette fois la construction intransitive qui est de regle : Le couteau coupe. La cheminée fume. et le changement de sujet a pour consequence un léger changement de sens du verbe qui, au lieu d'exprimer une action, exprime un etat. Les verbes cuire ou épaissir ont la caractéristique de pouvoir s'employer avec/flí're. Ľobjet dans la construction avec COD peut devenir sujet dans la construction sans complement, qui exprime, eile, ľétat ou le processus, d'oü le nom de verbes reversibles. On constate done une fois de plus la complexité des processus mis en jeu et ľ interference entre les propriétés syntaxiques et sémantiques. 25. Articles indéfinis et partitifs But de ľexercice: soumettre ä un examen précis des notions traditionnelles critiquables et aménageables sans bouleversement. Soit le corpus: L J'ai acheté un vin de qualité supérieure. 2. J'ai acheté du vin de qualité supérieure. 3. J'ai acheté trois vinš de qualité supérieure. 4. Je bois une biére brune chaque aprés-midi. 5. Je bois de la biére brune chaque aprés-midi. 6. Je bois trois biěres brunes chaque aprés-midi. a. Vous mettrez au pluriel les complements qui sont au singulier dans chacune de ces phrases. b. Vous les pronominaliserez ainsi que ceux que vous venez de faire apparaítre. c. Vous leur appliquerez ľopération de détachement. Sur la base de ces observations, peut-on vraiment dire que des est le pluriel de m/1? Comment pourrait-on presenter le systéme des articles, un, une, du, de la, desl Correction a. Les complements 1 et 2, de méme que 4 et 5, ont le méme pluriel: 7. J'ai acheté des vins de qualité supérieure. 8. Je bois des biěres brunes chaque aprěs-midi. b. Dans la pronominalisation, on voit partout apparaítre le pronom en, mais il est seul en 2 et 5 ainsi que dans les phrases avec des, alors que im est conserve en 1 et 4 tout comme le determinant cardinal trois : 1. J'en ai acheté un. ' 3. J'en ai acheté trois. 164 • La Grammaire vs 2. J'en ai acheté. 5. J*en bois chaque aprěs-midi. On constate done que du (de la) fonctionne comme des, mais que un a un fonc-tionnement different. c. Cest encore ce que ľon remarque dans le détachement pour lequel la forme du pronom est identique ä celle qui apparait dans la pronominalisation : 4. J'en bois une, de biěre brune, chaque aprěs-midi. 5. J'en bois, de la biěre brune, chaque aprěs-midi. 6. J'en bois trois, de biěres brunes, chaque aprěs-midi. Avec des, on a : J'en bois, des biěres brunes, chaque aprěs-midi. De surcroit, avec le partitif comme avec des, le SN est détaché sans aucune modification, de la biěre brune, des biěres brunes, alors qu'avec un ou trois, le SN est modifié, une (trois), de biěre(s) brune(s). Dans tous les cas, on constate que des semble avoir plus ďaffinité avec du (de la) qu'avec un (une) et que un se rapproche des cardinaux. II est vrai que, formellement, des appar-tient ä la méme série que le partitif, puisque e'est la contraction de de suivi de ľ article défini les. Dans ces conditions, il est difficile de voir dans des le pluriel de un. II est done permis de penser que un, comme les determinants cardinaux, dont il partage les propriétés, pose ľ existence d'un element et en indique la quantité precise. II n'a pas de pluriel autre que les cardinaux, qui indiquent eux aussi la quantité déterminée. Du, de la et des indiquent au contraire la quantité indéterminée et, de ce point de vue, sont proches des indé-finis, bien qu'ils n'en aient pas les propriétés distributionnelles. Par consequent, ľ etiquette ď article partitif paraít contestable, car avec du, de la ou des, on n'indique pas qu'on découpe une partie dans un ensemble, ce que font des expressions comme la moitié, une partie, un quart, etc. : J'ai bu la moitié ďune biěre. J'ai bu la plus grande partie de la biěre. mais seulement qu'on renvoie ä une quantité indéterminée. Si ľon réformait la terminologie, on pourrait convenir d'appeler un et les cardinaux determinants de la quantité precise et du, de la et des, determinants de la quantité imprecise. 26. Les determinants possessifs But de ľexercice: s'entrainer au relevé et au classement de faits ä partir ďun texte; completer les informations succinetes données dans ľexposé. Soit le texte suivant: Elle me dit: «Je suis ľ impassible theatre Que ne peut remuer le pied de ses acteurs; Le syntagme nominal »165 Mes marches ďémeraude et mes parvis ďalbátre, Mes colonnes de marbre ont les dieux pour sculpteurs. Je n'entends ni vos cris ni vos soupirs; ä peine Je sens passer sur moi la comédie humaine Qui cherche en vain au ciel ses muets spectateurs. Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre, Ä côté des fourmis les populations; Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre, J1 ignore en les portant les noms des nations. On me dit une mere, et je suis une tombe. Mon hiver prend vos morts comme son hécatombe, Mon printemps ne sent pas vos adorations. Avant vous, j'étais belle et toujours parfumée, J'abandonnais au vent mes cheveux tout entiers, Je suivais dans les cieux ma route accoutumée, Sur ľ axe harmonieux des divins balanciers. Aprěs vous, traversant ľespace oü tout s'élance, J'irai seule et sereine, en un chaste silence Je fendrai ľ air du front et de mes seins altiers.» Cest lä ce que me dit sa voix triste et süperbe. Et dans mon coeur alors je la hais, et je vois Notre sang dans son onde et nos morts sous son herbe Nourrissant de leurs sues la racine des bois. Et je dis a mes yeux qui lui trouvaient des charmes : « Ailleurs tous vos regards, ailleurs toutes vos larmes, Aimez ce que jamais on ne verra deux fois.» (Alfred de Vigny, La Maison du Berger). % Vous ferez une étude morphologique et syntaxique des determinants possessifs. c t 2 Correction 2 Le texte n'offre aucune forme de determinant employe comme adjectif attribut, § si bien qu'on ne rencontre aucune forme en mien : o m Elle est rnienne. c o £ a. La repartition des formes s'explique comme celle de tous les détermi-8" nants selon le genre et le nombre du substantif qui les suit: o o ma route accoutumée vs mon printemps rt mes cheveux _j § mais également selon le rang de la personne qui possěde, comme les pronoms 8 personnels: § ***, 1. ma route < | 4. notre sang - 6. leurs sues, etc. 166 • La Grammaire II s'agit done d'un systéme morphologiquement complexe. Ajoutons qu'il n'y a ä ce systéme aueune nécessité et qu'une langue comme ľ anglais, par exemple, ne marque pas le genre du substantif qui suit, mais, ä la personne 3, celui du possesseur: his book, son livre (ä lui) vs he?- book, son Iivre (ä eile). Aux rangs 1, 2 et 3, les formes sont de méme type, mon, ton, son, et la repartition des formes (cf p. 141) est identique. Aux rangs 4 et 5, on a deux series de formes de méme type, notre et votre, qui ne portent pas ľindication de genre, mais seulement de nombre, et dont la repartition est la suivante : singulier : notre, votre [nDtr], [voir] pluriel : nos, vos : forme longue [noz], [voz] forme breve [no], [vo] : vos cris, vos soupirs, vos larmes. Quant au determinant de rang 6, qui ne porte pas non plus ľ opposition de genre, il ne marque méme pas toujours dans ľ oral celle de nombre, puisque les formes sont au singulier leur et au pluriel leurs, soit ä ľ oral au singulier [leer] et au pluriel [loerz] ou [leer] selon qu'il y a ou non liaison. b. Emplois : on ne reviendra pas sur les questions ď accord, déjä évoquées ä propos de la repartition des formes, sinon pour souligner le probléme que posent les formes de rang 4, 5 ou 6 lorsque, en dehors des cas oil nous est un pluriel de modestie ou de majesté, et oü vous est celui de politesse, elles renvoient ä plusieurs possesseurs. Ľobjet possédé peut évidemment étre unique : Us vivent ä trois dans une chambre : -» leur chambre mais le fait qu'il y a plusieurs possesseurs implique souvent une pluralite ď objets possédés. On peut alors soit considérer la distribution des objets, un par personne, et on emploie le singulier : leur terrier soit ľ ensemble, et on emploie le pluriel: Ieurs sues. En realite, la majorite des emplois sont ambigus, car le singulier peut renvoyer soit ä un objet possédé unique, soit ä un objet possédé par un possesseur; le pluriel, lui, peut renvoyer ä une pluralite d'objets possédés par possesseur, ou ä la somme des objets uniques possédés par chaeun des possesseurs. Ainsi, dans le texte, la connaissance du monde permet de penser qu'il y a au total plusieurs terriers, mais un par groupe de fourmi, et leur terrier représente done un emploi distributif. II est déjä plus difficile de se prononcer pour leur cendre : la cendre de chacun, ou la cendre en general? De méme dans leurs sues, s'agit-il des sues de chacun, ou de la somme des sues individuels? Le syntagme nominal • 167 c. En ce qui concerne la valeur, les determinants possessifs indiquent l'ap-partenance, en donnant ä ce mot un sens tres large (cf. pour la preposition de l'exercice n° 32). lis sont done tous paraphrasables par avoir, faire, produire, ou par un verbe en relation avec le substantif qui suit. Dans ce cas, ils peuvent avoir une valeur dite subjective, lorsque le possesseur est en méme temps l'agent: vos cris, vos soupirs = vous criez, vous soupirez, ou une valeur objective, lorsqu'il est au contraire ľobjet de Taction : ses muets spectateurs : ils la contemplent. Ľ emploi des determinants possessifs pose un dernier probléme, e'est celui de ľaltemance avec un article défini. On rappellera que ľ article peut suffire lorsque le rapport de possession est clairement indiqué par la phrase : Je prends la voiture. Je perds la memoire. en particulier lorsqu' existent des relations lexicales particulieres, telies que le rapport de partie ä tout, surtout pour les parties du corps (cf. t. 1, exercice n° 39 et exercice n° 40). Le texte of f re un exemple interessant: Je fendrai ľ air du front et de mes seins altiers. puisqu'il réunit un emploi avec article et un emploi avec determinant possessif. Cest que le fait que front renvoie ä une partie du corps suffit ä indiquer ľap-partenance, mais qu'avec seins, qui est accompagné d'un adjectif, bien que la relation soit toujours aussi claire, apparait une contrainte syntaxique, qui rend le possessif indispensable. On a ainsi la distribution complémentaire suivante : des seins de mes seins altiers. de mes seins de marbre. de mes seins que rien rťémeut. | 27. Le determinant tout ~ But de l'exercice: montrer la diversité de fonctionnement ďun méme déter- ® minant. £ Soit le corpus: ä 1. Tout étudiant passera ľexamen final. o 2. Toute ľassemblée se leva. •2 3. Je passe tout ľété äla mer. 8 4. Cette toute mignonne fillette est adorable. 0 5. Ce tout petit bébé est adorable. J 6. Tout ce travail est bon ä mettre au feu. CO "! 7. II a déclassé tous mes papiers. g 8. II enregistre toute une emission. Í a. Vous étudierez la distribution de tout et vous essaierez de supprimer ľélé- 1 ment qui le suit immédiatement. a b. Vous essaierez de faire varier tout en genre. 168 • La Grammaire c. Vous essaierez de faire varier tout en nombre. d. Vous ferez commuter tout avec chaque. e. Vous paraphraserez tout par entier. f. Vous pronominaliserez le SN comprenant tout. Sur la base de ces observations, vous mettrez en evidence les différents fonctionnements de tout. Correction a. En ce qui concerne la distribution de tout, on observe qu'il peut étre direc-tement suivi d'un substantif (1), combine avec un autre determinant qu'il precede (2, 3, 6, 7, 8) ou qui le precede (4 et 5), et suivi d'un adjectif (4 et 5). Si l'on essaie de supprimer ľ element qui suit directement tout, on obtient des phrases inacceptables sauf lorsque cet element est un determinant (2, 3, 6 et 8) ä condition qu'il ne soit pas pluriel: II enregistre toute emission, vj *I1 a déclassé tous papiers. En particulier, on remarque que ľ adjectif des phrases 4 et 5, contrairement ä ce qui se passe dans une phrase ordinaire, ne peut pas étre supprimé : Cette petite fille est adorable. Cette rille est adorable. vs *Cette toute fillette est adorable. ce qui montre que tout porte alors sur ľ adjectif. b. La variation en genre (ä supposer bien sür que, lorsque le substantif ne subit pas la flexion en genre, on en change), qui est parfois donnée par le corpus lui-méme, est possible partout. c. La variation en nombre, contrairement ä ce que l'on pourrait attendre, puisque dans la flexion nominale genre et nombre s'appliquent aux meines elements, n'est pas possible dans la phrase 1 ou tout est le seul determinant: *Tous étudiants passeront l'examen final. et c'est ce qui explique que dans la phrase 7 on ne puisse supprimer le determinant. Elle est possible en 4 mais ne l'est pas en 5. d. La paraphrase de tout par chaque est possible seulement en 1: Chaque étudiant passera l'examen final. vs *Chaque ce bruit me gene. e. Celle de tout par entier (avec un changement de place) est possible en 2, 3, 6 et 8 : Je passe ľété entier ä la mer. vs *I1 a déclassé mes papiers entiers. c'est-a-dire partout oü tout est suivi d'un determinant, sauf au pluriel comme en 7. f. Bien que tout ait des emplois pronominaux, la pronominalisation ne fait pas apparaitre de cas oü tout soit seul employe. Une phrase comme : Le syntagme nominal • 169 Tout est ä jeter au feu. ne correspond en effet pas ä : Tout ce travail est ä jeter au feu. mais plutôt ä tout ce qui est dans ce travail, toutes les choses qui sont dans ce travail, c'est-ä-dire ä un element indéterminé. En 1,1a pronominalisation se fait par chacun : Chacun passera l'examen final. En 2, 3, 6, 7 et 8, eile se fait par le pronom personnel, mais tout est conserve : Elle se leva toute. En 4 et 5, le pronom personnel reprend ľ ensemble du groupe : Elle est adorable. On peut récapituler toutes ces observations dans le tableau suivant (ppv = particule préverbale = pronom personnel): distribution genre nbre chaque entier pron. + subs. + dét. dét. + + adj. 1. + _ _ _ + - + _ chacun 2 - + - + + - + ppv + tout 3. - + - + + - + ppv + tout 4. - + + + + - - ppv 5. - + + + - - - ppv 6. - + - + + - + ppv + tout 7. - + - + + - - ppv + tout 8. - + - + + - + ppv + tout ■CD "D = On peut ainsi distinguer trois types d'emplois. Le premier est celui de la <2 phrase 1. 7b«/ est suivi directement d'un substantif (on rencontrerait en dehors •g du corpus des groupes comprenant un adjectif et un substantif: tout nouvel 2 étudiant, mais ľ adjectif peut alors étre supprimé, ä la difference de ce qui se ™ passe en 4 et 5). II est variable en genre, mais ne l'est pas en nombre, en dehors c de cas trěs limités et figés (a tous égards). Tout signifie chaque et envisage un i. par un la totalite des elements d'un groupe qui n'est pas nécessairement explice cite : tout étudiant (de ce groupe). II est pronominalisé par chacun, qui est en -2 fait le pronom qui correspond ä chaque. En d'autres termes, ne lui correspond J3 pas de pronom spécifique. ž Le deuxiěme emploi est celui que l'on observe dans les phrases 2, 3, 7 et 8 8. Tout precede les determinants, le, ce, mon ou un qui ne sont par ailleurs i jamais precedes d'autres elements. II est alors variable en genre et en nombre. | Tout a un sens légěrement different au singulier et au pluriel. Au singulier, oü @ il est paraphrasable par (en) entier, il indique ľintégralité d'un element. Au 170 • La Grammaire pluriel, oü il ne ľest pas, il marque plutôt la totalite ďun ensemble. La prono-minalisation porte sur le SN qui suit tout, et celuí-ci est conserve. Cest ce qui se produit ďailleurs pour ľensemble des indéfinis: J'ai vu plusieurs films. J'en ai vu plusieurs. Dans certains cas, ľensemble du groupe est pronominalisé par tout: II a lu tous les livres. II a tout lu. mais un grand nombre de restrictions pěsent sur cette pronominalisation. Enfin. dans les phrases 4 et 5, tout est en fait un adverbe d'un type particulier. II porte sur un adjectif, et n'est done pas un determinant, mais, alors que les adverbes sont invariables, tout ne ľest pas totalement. II ľest lorsque l'adjectif est masculin : de tout petits enfants, et devant adjectif feminin commencant par voyelle : une tout abnable fillette, mais s'accorde avec un adjectif feminin commencant par consonne : une toute petite fille. Un arrété de 1976 autorise cet accord méme devant voyelle : une toute aimable fillette. On constate done qu'il faut poser plusieurs formes homonymes tout, qu'on ne saurait ramener ä ľ unite de la catégorie indéfini. 28. Certain, autre, méme But de ľexercice: repérer les differences de fonctionnement, comme determinants et comme adjectifs, d'éléments réunis par la grammaire traditionnelle sous ľétiquette d'indéfinis. Soit les elements généralement classes comme indéfinis certain, autre, méme. a. Vous essaierez de les employer comme determinants. b. Vous essaierez de les combiner avec un determinant article. c. Vous étudierez leur place par rapport au substantif dans les emplois posés précédemment comme possibles. d. Vous essaierez de les combiner entre eux. e. Sont-ils susceptibles d'un emploi pronominal? f. Vous ferez la synthěse de ces diverses observations. Correction a. Seul certain peut s'employer comme determinant: Certain enfant que je ne nommerai pas a dérobé des confitures. Autre et meine ne le peuvent pas : *Méme enfant a encore dérobé des confitures. * Autre enfant a également dérobé des confitures. b. Les trois peuvent s'employer avec un determinant article : Le syntagme nominal • 171 Un certain comportement I Un méme comportement n'est pas admissible. Un autre comportement J Cependant certain n'est pas compatible avec le, alors que méme et autre le sont: *le certain comportement vs le méme (ľautre) comportement c. Employes avec un determinant, certain, měme et autre sont susceptibles de précéder ou de suivre le substantif. On observe alors des differences de sens selon la place : un certain dédain (une sorte de dédain) vs un dédain certain (un dédain clair). le méme comportement (identique) vs le comportement méme (precis). Seul autre, qui ďailleurs s'emploie beaucoup plus souvent devant le substantif (e'est la seule place possible avec le), ne change pas de sens. d. Autre et méme, qui sont antonymes, sont ordinairement incompatibles, ä moins qu'on n'adopte des points de repěre différents pour la comparaison qu'ils impliquent. lis sont l'un et ľautre compatibles avec certain, employe seul ou avec un article : certains mémes comportements certains autres comportements un certain autre comportement un certain méme comportement. C'est alors certain qui precede. e. Certain peut s'employer seul comme pronom, mais uniquement au pluriel: Certains sont venus; certaines sont venues. II n'admet pas de se combiner avec un article dans cet emploi : *Un certain est venu. Au contraire, autre et méme, qui ne peuvent pas s'employer seuls, s'utilisent avec article : Le méme est encore revenu. U autre n'a pas réussi. f. Sur la base de ces observations, il est clair que autre et méme sont différents de certain. Celui-ci connait deux formes homonymes, dont l'une est un determinant susceptible d'un emploi pronominal et ľautre est un adjectif dont la place peut varier et qui est soumis ä des restrictions de combinatoire avec les articles. Quant ä autre et méme, ce ne sont pas des determinants, mais des adjectifs qui se pronominalisent, comme tous les adjectifs, par l'utilisation d'un article qui en somme leur donne statut de substantif. Ľétiquette ď indéfini souvent employee pour ces trois unites se révěle ainsi trompeuse, puisque leur fonctionnement syntaxique n'est pas identique. 172 • La Grammaire 29. Crítěres de definition de ľadjectif But de ľexercice: réfléchir sur la spécificité de ľadjectif par rapport aux participes, qui constituent la catégorie adjective du verbe. Soit le texte suivant: Un prie-Dieu était dispose ä côté du lit; une flamme bleuätre voltigeant sur une pateré de bronze jetait par toute la chambre un jour faible et douteux. et cä et la faisait papilloter dans ľ ombre quelque aréte saillante de meuble ou de corniche. Sur la table, dans une urne ciselée. trempait une rose blanche fange dont les feuilles, ä ľexception ďune seule qui tenait encore, étaient toutes tombées au pied du vase comme des larmes odorantes; un masque noir brisé, un éventail, des déguisements de toute espěce, traínaient sur les fauteuils et faisaient voir que la mort était arrivée dans cette somptueuse demeure ä ľimproviste et sans se faire annoncer. [...] Au lieu de ľair fétide et cadavéreux que j'étais accoutumé ä respirer en ces veilles funébres. une langoureuse fumée ď essences orientales. je ne sais quelle amoureuse odeur de femme, nageait doucement dans ľ air attiédi. (Théophile Gautier, La Morte Amoureuse). Parmi les mots soulignés, relevez les adjectifs. Précisez les critěres que vous avez utilises. Correction Le probléme posé par cet exercice est celui de la distinction entre les adjectifs et les participes. On sait en effet que les participes constituent avec 1'infinitif un des modes non personnels du verbe (cf. exercice n° 16), et que si 1'infinitif est le mode nominal, le participe est le mode adjectival. Sur le plan syntaxique, les participes ont en effet une construction adjectivale et peuvent par exemple s'employer comme épithětes : les éleves admis en classe supérieure, les éleves acceptant le redoublement. Sur le plan morphologique, si le participe present est invariable, le participe passe admet la flexion en genre et en nombre. Cependant, les participes ne sont pas tout ä fait des adjectifs puisqu'ils conti-nuent de se construire comme le verbe auquel ils se rattachent, ainsi qu'on le voit dans les deux exemples cites. a. Les adjectifs. Un certain nombre ď unites soulignées ne posent pas de probléme et sont clairement des adjectifs. Ce sont soit des adjectifs qualifi-catifs : bleuätre, faible, douteux, blanche, noir, somptueux, langoureuse, amoureuse, soit des adjectifs relationnels paraphrasables par un complement déterminatif : cadavéreux (= de cadavre), f une b re s (= de funérailles), orientales (= ďorient). Dans un autre contexte, funébre pourrait tout simplement étre un adjectif qualificatif et signifier triste, mais ici, c'est bien la chambre ďune morte qui est décrite et ľadjectif a son sens propre. b. Participes ou adjectifs? - Adjectifs et participes presents : ici, la distinction est aisée, puisque le participe present est invariable. Aussi voltigeant qui ne s'accorde pas avec flamme, Le syntagme nominal «173 et qui, de surcroit, est construit comme le verbe voltiger, est-il clairement un participe. En revanche, saillante, qui suit I'accord avec le substantif aréte dont il est épithéte est réellement un adjectif, méme si l'on continue ä parier pour ce type de formes d'adjectifs verbaux. L'analyse est la méme pour odorante, encore que, le verbe odorer ayant disparu, le lien avec un verbe ne soit plus sensible. Remarque : quelques mots d'histoire de la langue sont ici intéressants. Le participe present et ľadjectif verbal en moyen francais et en francais classique étaient ľun et ľ autre variables, et la distinction ne se faisait que par la construction, seul le participe se construisant comme le verbe : Gens difficiles et factieux affectants une vertu austere (La Rochefoucauld). Vaugelas proposait une série de regies ď accord trěs difficiles ä appliquer. En juin 1679, ľ Academie décida qu'on n'accorderait plus les participes. La decision ne fut pas tout de suite suivie d'effets, mais eile simplifia peu ä peu la situation. j J| - Adjectifs et participes passes. Les choses sont ici plus difficiles ä trancher. i |l| Le participe passe et ľ adjectif s' accordent ľ un comme ľ autre, ils ont la méme (J fonction, et des complements souvent identiques. En d'autres termes, une ill construction comme j 'étais accoutumé est-elle une forme de passif, ou ľ em- I ploi aprés le verbe attributif étre, de ľadjectif attribut accoutumé''! j Dans le texte, les formes épithětes sont toujours ä valeur adjectivale et II pourraient commuter avec des adjectifs descriptifs : une urne ciselée / une jl urne delicate. Sans complement, elles expriment purement et simplement j|| ľ etat. La juxtaposition de blanche et de fanée, comme de noir et de brisé, \\ montre bien que dans touš les cas, il s'agit de caractériser les objets. jj Ce sont les formes employees avec le verbe étre qui peuvent poser I probléme. Ce n'est pas le cas de la mort était arrivée, ou il s'agit du plus-que- jl S parfait du verbe arriver, et oú le verbe étre est un simple auxiliaire de forme § composée marquant ľ accompli. On pourrait faire commuter la forme avec un l| g passé simple : la mort arríva. De la méme fagon, étaient tombées est le plus- I .% que-parfait de tomber. Ľ interpretation de étais accoutumé est plus difficile, g Le fait qu'il soit accompagné d'un complement (á respirer...) pourrait inciter i ä y voir un emploi verbal (construction passive du verbe accoutumer) mais un ° adjectif admettant également des complements, le critere syntaxique n'est pas I ~ décisif. On peut alors recourir ä deux tests. Le premier est ďessayer de para- I § phraser la construction par une construction active du méme temps : ?on 1 m'accoutumait, ?les circonstances m'accoutumaient. La paraphrase n'est ici ra guěre possible. Le second est de faire varier en degré la forme en -é : j 'étais I z tout a fait accoutumé. La variation est possible, alors qu'accoutumer n' admet 8 pas la locution adverbiale : * accoutumer tout á fait. II est done clair que dans § le texte, la construction j'étais accoutumé doit s'interpréter comme la sequence | verbe étre + attribut, et non comme une construction passive. Accoutumé sera @ retenu comme adjectif exprimant ľ etat. 174 • La Grammaíre Au total, les critěres utilises sont de trois ordres, morphologiques (accord), syntaxiques (construction de ľunité envisagée, equivalence avec d'autres constructions) et sémantiques (valeur de ľadjectif, état, caractéristique...). 30. La place de ľadjectif But de ľexercice: réfléchir sur la fa^on dont un écrivain peut jouer des regies syntaxiques. Vous analyserez la place de ľadjectif dans le poěme suivant de Rimbaud : Quand le front de ľ enfant, plein de rouges tourmentes. Implore l'essaim blanc des rěves indistincts. II vient pres de son lit deux grandes soeurs charmantes Avec de freies doigts aux ongles argentins. Elles assoient ľ enfant devant une croisée Grande ouverte oü l'air bleu baigne un fouillis de fleurs, Et dans ses lourds cheveux oü tombe la rosée Proměnent leurs doigts fins, terribles et charmeurs. II écoute chanter leurs haleines craintives Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés. Et qu'interrompt parfois un sifflement, salives Reprises sur la lěvre ou désirs de baisers. II entend leurs eil s noirs battant sous les silences Parfumés; et leurs doigts électriques et doux Font crépiter pármi ses grises indolences Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux. Voilä que monte en lui le vin de la Paresse, Soupir d'harmonica qui pourrait délirer; Ľ enfant se sent, selon la lenteur des caresses, Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer. (Les Chercheuses de poux) Correction On envisagera ďabord le cas oü ľadjectif est seul. On note alors 5 adjectifs antéposés et 7 postposés : rouges tourmentes freies doigts lourds cheveux grises indolences petits poux vs essaim blanc réves indistincts ongles argentins air bleu Le syntjgme nominal • 175 haleines craintives cils noirs ongles royaux. La proportion ďadjectifs antéposés est plus forte que celie qui existe dans la langue ordinaire. On relěve parmi les adjectifs antéposés deux adjectifs de couleur, ce qui n'est pas conforme aux regies. On peut noter que, dans les deux cas, il s'agit ďemplois en fin de vers, oü la postposition de ľadjectif n'aurait pas fourni la rime attendue. On constate également que ľadjectif de couleur n'y est pas appliqué ä un objet materiel, mais ä un terme psychologique, et qu'il est done employe métaphoriquement. Ľantéposition, qui atténue les contours sémantiques des adjectifs, se préte particuliěrement ä cet emploi figure. A ľinverse, dans touš les cas oü les adjectifs de couleur sont postposés, ils sont appliques ä des termes renvoyant ä des objets. Les adjectifs freie, lourd et petit font partie des adjectifs ä place variable. Antéposés, les deux premiers sont moins deseriptifs qu'expressifs et traduisent une impression. Quant au dernier, il fait partie de ces adjectifs de dimension qui perdent leur sens lorsqu'ils sont antéposés et font corps avec le substantif. Puisque tous les poux sont petits, le mot ne décrit pas mais constitue avec le substantif une association stéréotypée, une sorte ďépithete de nature. Quant aux adjectifs postposés, en dehors des adjectifs de couleur, ce sont tous des derives. Le premier est un derive préfixé par in-. Les trois autres sont des derives nominaux (argent/argentin, erainte/craintif roi/ royal). II semble que ce soit en langue un facteur de postposition. Quant ä royal, e'est de surcroit un adjectif relationnel, dont la place est fixe. Lorsque plusieurs adjectifs sont utilises, plusieurs cas sont ä distinguer. Dans leurs doigts fins, terribles et charmeurs, comme dans leurs doigts électriques et doux, les adjectifs sont coordonnés. En pareil cas, ľordre des adjectifs 1 est regie par les mémes facteurs que précédemment, bien que la postposition c soit la plus fréquente. Lorsque les adjectifs sont hiérarchisés, c'est-ä-dire t; lorsque ľun ďentre eux porte sur le groupe constitue par le substantif et o ľautre, les deux adjectifs peuvent précéder le substantif: le dernier petit ■c verre, ou le suivre : des conseillers pédagogiques efficaces. Ou encore, ľun g peut précéder et ľautre suivre : ď efficaces conseillers pédagogiques. Mais g ľordre de chacun suit les regies qu'il suivrait s'il était seul : *de pédagogiques o conseillers efficaces. Ľexemple de Rimbaud : de longs miels végétaux et g rosés combine les deux types de groupements. o o a 31. Les pronoms personnels ~ž But de ľexercice: montrer la diversité des fonetionnements des ptonoms d personnels et les limites de ľexplication en syntaxe. g Soit le corpus : < g 1. Elle m'a fait une veste. © 2. Elle m'a encore fait une otite. 176 • La Crammaire 3. Avec ce temps, tu t'attrapes un rhume comme rien, 4. Je vous le donne, prenez-en grand soin. 5. Qu'est-ce que vous me dites! Je n'en reviens pas. 6. Es-tu passé ä la banque? J'en reviens. 7. II se la coule douce. 8. II nous en impose. 9. II me les casse. 10. Je me prends une orange et je me la mange. Vous proposerez des critěres qui mettent en evidence les differences de fonc-tionnement entre les pronoms complements de ces phrases. Correction On peut s'appuyer principalement sur trois critěres : la relation entre le pronom complement et le pronom sujet, la commutation avec un SN pour les pronoms de rang 3 et 6, ce qui permettra de faire apparaitre si ce sont des représentants ou non, la commutation avec un pronom de rang 3 pour les pronoms de rang 1 et 2 qui ne sont jamais des représentants, ce qui permettra d*apprécier leur degré ď autonomie dans la proposition. On peut ainsi en premier lieu opposer constructions pronominales et non pronominales. Les premieres apparaissent dans les phrases 3, 7 et 10 : Tu t'attrapes un rhume. Je m'attrape un rhume. *Je lui attrape un rhume. Aucun des verbes qui apparaissent dans ces constructions ne se caracterise par ailleurs par une construction pronominale. D'ordinaire, ils présentent une construction transitive directe : J'attrape une grappe de raisin. Je mange une orange. et les complements prépositionnels, parfois possibles: J'attrape une grappe de raisin pour Jean. ne font pas partie de la construction fondamentale du verbe. On peut en outre faire commuter ces expressions avec des expressions non pronominales : Avec ce temps, tu attrapes un rhume comme rien. Je prends une orange et je la mange. sans que le sens soit change. C'est dire que les pronoms réfléchis en pared cas sont plus des indices sémantiques que grammaticaux ; ils marquent simple-ment que le sujet est vraiment concerné par Faction. II s'agit d'une valeur affective. Dans les constructions non pronominales, on peut distinguer les cas oú les pronoms sont représentants : 5. Je vous le donne /je vous donne ce livre. Le syntagme nominal «177 Cest le cas de le et en en 4, de en en 6. Les personnes de rang 1, 2, 4 et 5 ne peuvent évidemment commuter avec un SN, mais, dans les phrases 1, 4, 5. 8 et 9, elles pourraient commuter avec un representant. La forme du pronom est partout déterminée par la construction du verbe. Dans les autres emplois, le pronom ne peut pas étre mis en relation avec un SN: 2. ?EUe a encore fait une otite ä sa mere. II semble bien que seul un pronom soit possible. Comme dans le cas des pronominaux, il marque ľintérét que prend ä Taction celui qui est designe par le pronom, ce qui explique que ces formes soient surtout utilisées avec je : Elle m'a encore fait une otite. M' fonctionne ici comme une sorte de modalisateur traduisant les reactions du locuteur face ä ľévénement. En 7, comme en 9, la ne renvoie ä rien de precis. C'est une simple marque lexicale trěs fréquente en fran?ais populaire. La comparaison de 5 avec 6 et 8 montre que en peut également fonctionner comme un tel indicateur. Si en 6, en effet, il peut étre mis en relation avec banque, il ne renvoie ä rien en 5, ni en 8. Un cas particulier est offert par la phrase 9. Ľ existence de la locution de sens voisin: II me casse les pieds. pourrait faire penser que les est un substitut de pieds. Pourtant on ne saurait avoir: ?I1 les casse ä son frěre toute la journée. alors qu'on a: í» II casse les pieds ä son frěre toute la journée. 3 La construction avec les semble done figée, si bien qu'il vaut mieux considérer ® que les n'est pas un representant, pas plus qu'il n'en est un dans : ■" II se les roule, etc. o ™ Ľexercice fait done apparaitre toute une série ď emplois oú les pronoms ne 2 sont guěre que des affixes qui donnent au verbe une valeur sémantique parti-Q. culiěre et surtout une charge affective. o o 1 32. La preposition de ^ But de ľexercice: identifier et classer les différents emplois d'une des g prepositions qui en a le plus. q Soit le texte suivant: < I «Elle n'a jamais vu», se dit Antonio. © La nuit était beaucoup plus vaste que le jour. 178 • La Grammaire Sur la terre, tout était efface, des collines, des bosquets et des ondulations des champs. C'était seulement plat et noir et au-dessus des arbres éteints le monde entier s'ouvrait. Au fond, le lait de la vierge; des chariots de feu, des barques de feu, des chevaux de lumiěre, une large éteule ďétoiles tenaient tout le ciel. «Elle n'a jamais vu.» Ca n'était plus cette vie furieuse et hätive de la terre, ces chénes crispés, ces animaux tout pantelants de leur sang rapide, ce bruit de bonds, de pas, de courses, de galops et de flots, ces hurlements et ces cris, ce ronflement de fleuve, ce gémissement que de temps en temps la montagne pousse dans le vent, ces appels, ces villages pleins de meules de blé et de meules ä noix, les grands chemins couverts de silex que les chariots broient sous leurs roues de fer. ce long ruissellement de bétes qui troue les halliers, les haies, les prairies, les bois épais dans les vallons et les collines et fait turner la poussiere rousse des labours, toute cette bataille éperdue de vie mangeuse sous l'opaque ciel bleu cimenté de soleil. Non, c'était le silence et le froid de la nuit. «Elle n'a jamais vu cette nuit gonflée de sang froid comme le fleuve avec ses poissons. Elle n'a jamais vu et moi je lui ai dit que la nuit c'est ce qu'elle voit d'habitude dans sa téte noire.» (Giono, Le Chant du monde). Vous classerez et étudierez les emplois de la preposition de. Correction La premiere täche ä entreprendre est de séparer la preposition de de ľ article de méme forme, et de distinguer les cas oü eile est contractée avec l'article définí, de + les, de ceux oü il s'agit de l'article des. En ce qui concerne de, c'est dans touš les cas dans le texte la preposition, exigée soit par la construction du complement d'un verbe (cette nuit gonflée de sang froid), d'un complement d'adjectif fees villages pleins de meules) ou d'un complement déterminatif de nom {leurs roues defer). II n'y a done pas d'article de. Quant ä des, il s'agit de l'article dans des chariots de feu, des barques de feu, des chevaux de hindere, comme le fait apparaitre la commutation avec l'article défini : Au fond, le lait de la vierge; les chariots de feu, etc. Partout ailleurs, il s'agit de la preposition suivie de l'article défini, comme le montre la commutation avec un singulier : tout était efface, de la colline; au-dessus de Varbre, etc. On distinguera deux grands types d'emplois, selon que la preposition introduit un complement de verbe ou d'adjectif et selon qu'elle introduit un complement déterminatif de nom : a. de introduisant un complement de verbe ou d'adjectif: ces animaux tout pantelants de leur sang rapide ces villages pleins de meules de blé les grands chemins couverts de silex l'opaque ciel bleu cimenté de soleil cette nuit gonflée de sang froid. Le syntagme nominal • 179 On a affaire ici ä des complements d'adjectif s (pleins, couverts; pantelants ä cause de ľ accord est un adjeetif et non un partieipe) ou de partieipes passes {cimenté, gonflée). Dans ce dernier cas, de alterne avec par (cf. p. 100) et on peut y voir la trace de son sens premier qui est de marquer I'origine, puis la cause. Dans les autres cas, il est vain de vouloir lui attribuer un sens. De toute fagon les adjectifs ne se construisent jamais directement, mais toujours avec de ou a, qui sont de purs outils syntaxiques. II en irait de méme apres des verbes actifs (cas qui n'est pas représenté dans le texte), comme dans river de, parier de. Pourquoi a-t-on réver de et réver ä, et aimer faire quelque chose, mais aussi, quoique plus rarement, aimer ä ou aimer de faire quelque chose? Ce n'est que dans quelques rares cas, oü on peut ľopposer ä ďautres prepositions, que la preposition présente un sens precis : je pars ä Paris vs je pars de Paris. b. de introduisant un complement déterminatif de nom: La encore, il est difficile ď attribuer un sens ä de. En fait, les differences sémantiques qui opposent les complements sont le résultat de facteurs morphosyntaxiques et des variables lexicales. En premier lieu, les groupes SN1 de SN2 ainsi constitués peuvent étre paralleles ä des propositions dont SN2 serait le sujet et dont le verbe serait morphologiquement apparenté ä SNI : ce ronflement de fleuve / le fleuve ronfle (cf. la construction qui suit dans le texte ce gémissement que [...] la montagne pousse). La preposition n'a ici absolument aucun sens, comme le montre le fait que la construction verbale n'en comporte pas. Elle est simple-ment la marque du fait qu'un SN ne peut étre directement construit avec un autre SN. On classera ici cette vie furieuse de la terre, ce long ruissellement de betes. Rappelons que le passage de la construction verbale ä la construction nominale s'appelle une nominalisation. |> Dans un second type d'emplois, de peut étre paraphrase par un possessif : g la nuit, son silence. On peut également lui faire correspondre une phrase avec g les verbes avoir, comporter, produire, etc. : on peut dans ces cas-lä parier S d'appartenance, si ľ on y regroupe des notions aussi différentes que la posses-§ sion, la propriété, la relation, la caractéristique, la partie, qui sont ď ailleurs i celles-lä méme que peut aussi presenter avoir: le lait de la vierge, le silence ° et le froid de la nuit, une large éteule ďétoiles, ce bruits de bonds, de pas..., ~ la poussiere rousse des labours, cette bataille éperdue de vie mangeuse. § Dans ces deux groupes d'emplois, SN2 peut ou non comprendre un déter- 1 minant, selon que la relation est presentee comme virtuelle ou actualisée. « Dans un troisiěme groupe, SN2 ne comprend obligatoirement pas de z determinant: il s'agit des complements de matiěre dans lesquels SN2 est 3 un terme non comptable désignant une matiére, et oü de est paraphrasable § par en : des roues defer I des roues en fer. C'est ce que ľ on a encore, avec un | sens figure, dans des chariots de feu, des barques de feu, des chevaux de @ lumiěre. 180 • La Grammaire Enfin, deux emplois ne sont pas représentés dans le texte, c'est ceux oü de peut étre paraphrase par étre : le metier des armes / les armes sont un metier, mon niais de voisin I mon voisin est un niais. On remarque une Ibis de plus, sur ces exemples, qu'il n'y a pas de concordance entre la forme et le sens, puisque, sur le plan de la syntaxe, c'est de SN2 qui depend de SNI, alors que sur celui du sens, sauf pour les complements de mauere, c"est SNI qui determine SN2, comme le montrent les paraphrases verbales. c. II faut signaler un dernier emploi, c'est celui de tout était efface, des coUines, des bosquets et des ondulations des champs. II s'agit d'un emploi frequent avec les determinants de la quantité, quelques-uns de mes amis, phisieurs de mes amis, oü la preposition de marque le prélěvement, et a un sens véritablement partitif. Avec tout, il s'agit d'un cas limite qui consiste ä prélever la totalite de la quantité visée. La preposition est ici suivie de ľarticle défini pluriel avec lequel eile se contracte. Ajoutons enfin que de entre dans un grand nombre de locutions prépositives : au-dessus de par exemple dans le texte, et que de est pour les prepositions ľanalogue de que pour les conjonctions. ▲ La distinction de la nature et de la fonction. ▲ Les principales functions nominales définies ä partir du verbe dans le cadre de la proposition minimale : sujet, complements de verbe, directs et indirects. Les elements hors proposition : complements de phrase, apostrophes et appositions. ▲ La composition des SN : déterminant(s) + éventueľlement adjectif ou relative ou complement déterminatif de nom + substantif. La distinction fondamentale entre les determinants qui permettent au substantif de fonctionner comme sujet et les adjectifs. Les différents types de determinants : articles, démonstratifs, posses-sifs, quantité indéfinie. Les adjectifs : probléme de la place; fonction par rapport au substantif. Les adverbes : adverbes de phrase et adverbes ďélément. Testez vos connaissances II est un certain nombre de points sur lesquels se concentrent les erreurs ď identification en grammaire. Assurez-vous que vous savez éviter les piěges. I. Le (la, les) determinant et le (la, les) pronom 1. Relevez et identifiez les formes le du texte suivant: Ľhomme était parti de Marchiennes vers deux heures. II marchait d'un pas allonge, grelottant sous le coton aminci de sa veste et de son pantalon de velours. Un petit paquet, noué dans un mouchoir ä carreaux, le génait beau-coup; et il le serrait contre ses flancs, tantôt d'un coude, tantôt de l'autre, pour glisser au fond de ses poches les deux mains ä la fois, des mains gourdes que les laniěres du vent ď est faisaient saigner. Une seule idée occupait sa tete vide d'ouvrier sans travail et sans gite, l'espoir que le froid serait moins vif aprěs le lever du jour. (Zola, Germinal) II. De: article, partie ď article, ou preposition ? 2. De apparait isolé, ou contracte avec le (les) dans les phrases suivantes. Quelle est ä chaque fois la nature des elements soulignés? 1. On ne vit pas ď amour et ďeau fraiche. 1. Je ne vois pas ďerreur dans ce travail. 3. Elle dit du mal de touš ses voisins. 4. La table se recouvre de poussiere. 5. II a rencontre ďanciens amis. 6. Elle n'y est plus allée depuis des années. 7. Du bout du quai, la foule se presse vers le train. 8. L'atmosphere est pleine de fumée. 9. Je veux du gáteau. 10. Je veux un peu de gáteau. 3. Dans le texte suivant, relevez et classez les différents de : Le village, si plein de Parisiennes naguere, si bruyant et si gai, n'a plus que ses pécheurs qui passent par groupes, marchant lourdement avec leurs grandes bottes marines, le cou enveloppé de laine, portant d'une main un litre ď eau-de-vie et, de l'autre, la lanterne du bateau. Les nuages viennent du Nord et courent affolés dans un ciel sombre; le vent souffle. Les vastes filets bruns sont étendus sur le sable, couvert de débris rejetés par la vague. Et la plage semble lamentable, car les fines bottines des femmes n'y laissent plus 182 • La Grammaire les trous profonds de leurs hauts talons. La mer, grise et froide, avec une frange d'écume, monte et descend sur cette grěve deserte, illimitée et sinistre. Quand le soir vient, touš les pécheurs ani vent ä la méme heure. Longtemps ils tournent autour des grosses barques échouées, pareilles ä de lourds poissons morts; ils mettent dedans leurs filets, un pain, un pot de beurre, un verre, puis ils poussent vers ľeau la masse redressée qui bientôt se balance, ouvre ses ailes brunes et disparait dans la nuit, avec un petit feu au bout du mät. Des groupes de femmes, restées jusqu'au depart du dernier pécheur, rentrent dans le village assoupi, et leurs voix troublent le lourd silence des rues mornes. (Maupassant, Epaves) 4. Dans le texte suivant, relevez et classez les determinants articles. Alors on s'assit autour d'une haute soupiere d'oü sortait un parfum de choux. [... ] Le cidre était bon, le menage Loiseau et les bonnes soeurs en prirent, par economic. Les autres demanděrent du vin; Cornudet réclama de la biěre. II avait une fa^on particuliěre de déboucher Ia bouteille, de faire mousser le liquide, de le considérer en penchant le verre, qu'il élevait ensuite entre la lampe et son ceil pour bien apprécier la couleur. (Maupassant, Boule de sitif) III. Preposition ou adverbe 5. Identifiez les mots soulignés dans les phrases suivantes : 1. II habite tout pres de chez moi. 2. Avant sa maladie, il faisait touš les jours une promenade. 3. II y avait un arbre couché en travers de la route. 4. Cest comme cela qu'il agissait avant. 5. On se doute que sa mere doit étre tout pres. 6. II y avait un arbre qui barrait la route, couché en travers. 7. Derriěre le múr, il y a un grand arbre. 8. Au-dessus, ce sont les nuages. 9. Restez derriěre et marchez lentement. 10. Au-dessus de sa lěvre, eile a un grain de beauté. 6. Relevez les prepositions et les adverbes du texte suivant: Pas une herbe, pas une plante : du granit, rien que du granit. A perte de vue devant nous, un desert de granit étincelant, chauffé comme un four par un furieux soleil qui semble expres suspendu au-dessus de cette gorge de pierre. Quand on lěve les yeux vers les crétes, on s'arréte ébloui et stupéfait. Elles paraissent rouges et dentelées comme des festons de corail, car touš les sommets sont en porphyre; et le ciel au-dessus semble violet, Hlas, décoloré par le voisinage de ces étranges montagnes. Plus bas le granit est gris scin-tillant, et sous nos pieds il semble rape, broyé; nous marchons sur de la poudre luisante. A notre droite, dans une longue et tortueuse orniěre, un Testez vos connaissances »183 torrent tumultueux gronde et court. Et on chancelle sous cette chaleur, dans cette lumiěre, dans cette vallée brúlante, aride, sauvage, coupée par ce ravin d'eau turbulente qui semble se häter de fuir, impuissante ä féconder ces rocs, perdue en cette foumaise qui la boit avidement sans en étre jamais pénétrée et rafraichie. (Maupassant, Un Bandit corse) IV. Que conjonction ou pronom relatif 7. Identifiez les que des phrases suivantes: 1. II vit de ľespoir que je ťai dit. 2. II vit de ľespoir qďeile reviendra. 3. Je ne vous cache pas que les choses vont de plus en plus mal. , 4. II a fait ä la douane la declaration de ce qu'il a acheté. 5. U a fait les declarations qď on attendait. 6. Sa declaration, qu'il donnait sa demission, a été mal accueillie. 7. L'idée qu'elle ne reviendrait plus ľangoissait. 8. L'idée qu'elle défendait était séduisante. 9. Elle parle sans savoir ce qu'elle dit. 10. Elle sait bien que tout est ä refaire. V. Identification des sujets 8. Dans les phrases suivantes, identifiez les sujets des verbes soulignés: 1. Combien naives et paysannes en comparaison sembleraient les eglantines qui, dans quelques semaines, monteraient elles aussi en plein soleil le méme chemin rustique, en la soie unie de leur corsage rougissant qu'un souffle défait 1 (Proust, Du côté de chez Swimn). 2. Sans doute ce ä quoi aspirait mon imagination et que mes sens ne perce-vaient qu'incompletement et sans plaisir dans le present, je ľavais enfermé dans le refuge des noms. (ibid.). 3. Puis voici la colombe esprit immaculé Ou'escortent ľoiseau-lyre et le paon ocellé (Apollinaire, Zone) 4. II coule un faux fleuve de sang Et sous ľ arbre fleuri d'étoiles un clown est ľ unique passant (Apollinaire, «O majeunesse abandonnée...»). 5. Ici, ľ été plus frais s'épanouit a ľ ombre. Ici durent longtemps les fleurs qui durent peu (V. Hugo, Bievre). 6. Qui done a la science? ou est done la doctrine? Oh! que ne suis-je encore le réveur d'autrefois. Qui s'égarait dans ľ herbe, et les prés, et les bois (V. Hugo, Ä celie qui est restée en France). VI. Indicatif ou subjonctif 9. Dans les phrases suivantes, les verbes soulignés sont-ils ä ľ indicatif present ou au subjonctif present? 184 • La Crammaire 1. Et pour qui voulez-vous qu'ä present je la brode? (Apollinaire. Salome). 2. L'amour veut qu'aujourd'hui mon ami André Salmon se marie (Apollinaire, Poeme hi au mariage ď André Salmon). 3. [...] la liberté en honneur fait qu'on imite maintenant Les feuilles ô liberté végétale (id., ibid.). 4. II n'y a aucune raison pour qu'il n'existe pas de tels arrangements. 5. Rien n'est mort que ce qui n'existe pas encore (Apollinaire, Cortege). 6. Que je m'ennuie entre ces murs tout nus Et peints de couleurs päles (Apollinaire, A la Santé, IV). 7. J'étais bien ennuyée, me dit-elle, que Monsieur sonne si tard aujourďhui (Proust, La Prisonniére). 8. J'avais peur que Monsieur me dispute si je venais ľéveiller (ibid.). Solution des exercices 1. Determinant ou pronom? determinants : l'homme, le coton, l'autre, l'espoir. le froid, le lever, pronoms: le génait, le serrait. 2. De preposition ou article? - Preposition de est preposition seule : phrases 1, 3 (de tons ses voisins), 4, 8, 10 de est preposition contractée avec un article défini: phrases 7 : de + le bout de + le quai - Article de est article seul : phrases 2 (aprěs negation), 5 (ä la place de des devant adjectif) de entre dans la constitution d'un article indéfini : 6 ou partitif, 3 (du mal), 9. 3. De preposition ou article? - Preposition de est preposition seule : plein de Parisiennes, enveloppé de laine, portant d'une main, un litre ďeau-de-vie, de ľautre, couvert de débris, les trous de leurs talons, une frange ďécume, un pot de beurre, groupes de femmes. de est preposition contractée avec un article défini : la lanterne de + le bateau, viennent de + le Nord, les bottines de + les femmes, autour de + les grosses barques, au bout de + le mat, le depart de + le dernier pécheur, le silence de + les rues mornes. - Article de est article seul : de lourds poissons morts. de entre dans la constitution de ľ article indéfini pluriel: des groupes. 4. Les determinants articles - article défini: le cidre, le ménage, les bonnes sceurs, les autres, la bouteille, le liquide, le verre, la lampe, la couleur; - article indéfini: une haute soupiere, un parfum, une facon; - article partitif: du vin, de la biěre. Testez vos connaissances • 185 5. Preposition ou adverbe? - Preposition : 1, 2, 3, 7, 10. - Adverbe : 4, 5, 6, 8, 9. 6. Preposition ou adverbe? - Prepositions (ou locutions prépositives): devant nous, de granit, gar un furieux soleil, au-dessus de cette gorge, vers les crétes, en porphyre, par le voisinage, de ces étranges montagnes, sous nos pieds, sur de la poudre, a notre droite, dans une orniěre, sous cette chaleur, dans cette lumiěre, dans cette vallée, par ce ravin ďeau turbulente, de fuir, ä féconder, en cette foumaise sans en étre pénétrée. - Adverbes (ou locutions adverbiales): ä perte de vue, expres, au-dessus, plus bas, avidement, jamais. 7. Que conjonction ou pronom relatif? - Que pronom relatif : 1, 4, 5, 8, 9. - Que conjonction : 2, 3, 6, 7, 10. 8. Identification des sujets 1. les eglantines qui, dans quelques semaines [...] défait!; qui; un souffle. 2. mon imagination; mes sens; je. 3. ľoiseau-lyre et le paon ocellé. 4. il; un clown. 5. ľété plus frais; les fleurs qui durent peu; qui. 6. qui; la doctrine. 7. je; qui. 9. Indicatif ou subjonctif? - indicatifs: imite (3); existe (5); m'ennuie (6). - subjonctif s: brode (1); se marie (2); existe (4); sonne (7); dispute (8). Glossaire Acceptabilité Le fait pour une phrase d'etre retenue comme possible par les locu-teurs. Une phrase peut étre grammaticale et cependant étre inacceptable. Voir gramma-ticalité. Actualisation Ancrage pragmatique de la proposition qui lui permet de renvoyer ä une situation particuliěre. Ainsi, les desinences temporelles du verbe lui permettent-elles ďévoquer la chronologie, alors que 1'infinitif évoque seulement ľidée renfermée par la base de ce verbe. Ainsi encore, les determinants du nom lui permettent-ils de passer d'une reference lexicale. virtuelle, ä une reference spécifiée. Adverbe Partie du discours invariable qui. á la difference de la preposition ou de la conjunction, ne sert pas ii construire une autre categoric La categoric des adverbes est heterogene sur le plan morphologique comme sur le plan syntaxique, puisqu'ils peuvent porter sur un element de la phrase, ou ľénonciation. Anaphore Operation par laquelle une unite linguistique peut reprendre une unite anté-rieure (L'enfantplciirc puree qu'il est tombc). L'anaphore s'oppose ä la cataphore, par laquelle un element en annonce un autre (Je te le repete, tu vas te faire mal). Antecedent Syntagme que reprend un pronom relatif (ľ komme qui est venu était grand) et auquel la proposition relative s'ad-joint comme un adjectif. Apostrophe Syntagme nominal, générale-ment sans determinant, par lequel le locuteur interpelle ľinterlocuteur. Liée directement a ľénonciation, l'apostrophe fait partie des elements satellites dans la phrase. Apposition Au sens strict, il s'agit de la mise en relation d'un groupe nominal et d'un autre groupe, sans outil syntaxique. Le groupe dit support et le groupe appose sont générale-ment séparés par une pause : le fils de la voisine, ce garcon si vulgaire. Par ses possibi-lités de mobilite, l'apposition constitue un element satellite dans la phrase. On parle parfois aussi d'apposition pour les adjectifs séparés du substantif auquel ils se rapportent par une pause : Les enfants, malades, sont festes ä la maison. II vaut mieux en pareil cas parier ď adjectif épiťhěte détaché. Aspect Categoric de ľénonciation qui designe la maniere dont le locuteur envisage le développement interne du proces verbal (debut, fin. durée, etc.). Assertion Une des modalités de la phrase par laquelle le locuteur fait une declaration affirmative ou negative. Attribut Fonction que le nom partage avec ľ adjectif. L'attribut est un complement particu-lier introduit par un verbe attributif comme étre, sembler, et dans le cas d'un attribut de ľ objet, appeler ou declarer. II est lié sémantiquement au sujet (ou au complement), ce qui peut se traduire par un accord en genre et en nombre avec ce terme. Cataphore Voir anaphore. Chronologie Catégorie verbale. Par ses marques flexionnelles, le verbe peut renvoyer á la distinction en époques par rapport au moment de ľénonciation (chronologie absolue : passé, present, futur) ou ä la situation relative d'un événement par rapport ä un autre choisi dans le contexte comme repére (chronologie relative : antériorité, simultanéité, postériorité). Circonstant Autre nom donné aux complements de phrase qui indiquent les circons-tances de faction. Voir complement de phrase. Clitique Unite qui ne peut porter ď accent, et qui fait nécessairement partie d'un groupe accentuel. Les clitiques. par exemple les parti- Glossaire »187 cules préverbales. les determinants, les prepositions n'ont pas d'autonomie. Un proclitique s'appuie sur ce qui le suit, un enclitique sur ce qui le precede. En francais. les clitiques sont généralement proclitiques. Clivée (construction). Construction oü Vordre des mots est modifié ä des fins ď em-phase ou de focalisation et oü un syntagme nominal se trouve déplacé en téte de phrase par ľextraction. C'est ľété que je préfere; ce que je pre fire, c 'est I 'été. Commutation Substitution d'une unite ä une autre sur l'axe paradigmatique. Les elements qui peuvent commuter constituent une classe ďéquivalence : Ce discours / cela / partir / qu 'il puisse venir me plait. Complement de phrase Complement non syntaxiquement nécessaire ä la phrase et qui porte non pas sur un element, mais sur l'en-semble de la proposition. II est parfois appelé circonstant, car, sur le plan sémantique, il indique les différentes circonstances de faction. Complement de verbe Complement syntaxiquement nécessaire ä la construction du verbe et done de la proposition dont il est le pivot. Le complement de verbe fait partie de sa valence. Voir valence. Completive Proposition subordonnée qui exerce la fonction de sujet ou de complement ^ du verbe de la principále. Elle entre dans la '.g valence du verbe. = Conjunction Partie du discours invariable. $ On distingue les conjonctions de coordination ■8 qui peuvent lier plusieurs groupes dans une g proposition comme plusieurs propositions dans H une phrase, et les conjonctions de subordina- § tion qui, comme la preposition, servent ä jjj construire ce qui les suit. Tandis que la prépo- g- sition construit un groupe nominal, la o conjunction de subordination construit une ■c proposition. ™ Conjunctive Proposition subordonnée § introduite par une conjunction (locution 8 conjonctive) de subordination. Elles sont soit § compléťives, soit circonstancielles. < i Contexte Entourage linguistique d'une © unite (certains auteurs parlent de cotexte). S'oppose á la situation extralinguistique (que certains appellent contexte). Coordination Reunion dans un ensemble, ä ľaide d'une conjonction de coordination, de deux unites équivalentes (ou éventuellement plusieurs, si la conjonction est et, ni, ou). Ces unites peuvent étre des mots, des groupes de mots, des propositions, des phrases, ou des actes d'énonciation. Correlation Interdépendance entre deux propositions, qui ne peuvent s'employer ľune sans ľ autre : plus il grandit, plus il est bete. Elle se distingue aussi bien de la juxtaposition que de la subordination, bien que selon les cas, eile en ait la forme. Déictique Element qui s'articule directement sur un referent, et est lié ä la situation, et non au contexte. On parle parfois en pareil cas d'embrayeur. Voir deixis. Deixis Coordonnées pragmatiques de ľénonciation (moi, ici, maintenant). Détachement Operation de mise en relief par laquelle un syntagme nominal est détaché du reste de la proposition par une pause et repris par un pronom. Le café, je le bois bouitlant I Se le bois bouillant, le café. Determinant Clitique qui precede un substantif, lui permet sur le plan syntaxique de fonctionner comme sujet et fait passer sa reference du virtuel ä ľactuel. II apporte souvent une determination, en modifiant l'extension du substantif. Determination Operation par laquelle se fait ['identification du referent auquel renvoie le groupe nominal. Le groupe se trouve ainsi spécifié. Ä la determination s'oppose la description, la simple qualification. On oppo-sera ainsi les enfants malades (determination : ceux des enfants qui sont malades) ä Pierre, malade (description). La determination peut se faire par un adjectif, une relative, un complement de nom, et naturellement par les determinants. Distribution Environnement linguistique et place dans une sequence d'une unite, phonolo-gique, morphologique, syntaxique. 188 • La Grammaire Ellipse Operation de suppression d'un element déjä mentionné dans le eontexte. Ľellipse suppose que ľ element omis puisse étre recons-truit, comme dans les couples question-réponse, certains types de comparaison, de juxtaposition ou de coordination. Ľellipse, qui est une procedure syntaxique, se distingue ainsi du sous-entendu, oil, ä des fins pragmatiques, l'on n'explicite pas des elements ď information. Enclitique Voir critique. Enonce Tout fragment de la chaine parlée avant et apres lequel il n'y a que du silence. Ľénoncé est le résultat d'un acte particulier ďénonciation. Enonciation Acte de production d'un énoncé par un locuteur qui dit je dans un moment particulier auquel il renvoie par main-tenant, et dans un lieu precis auquel il renvoie par ici. Extraction Operation qui permet de modifier ľ ordre des mots de la proposition canonique ä des fins d'emphase (mise en relief, opposition) et place en těte de phrase un syntagme nominal. Ľélément extrait est eneadré par e'est... qui (que). C'est lui qui me I 'a dit. Voir clivée. Flexion Terme employe en morphologie. Designe ľadjonction reguliere et prévisible ď affixes ä une base. On distingue en francais une flexion verbale et une flexion nominale. Grammaticalité Le fait pour une phrase d'etre conforme aux regies de bonne formation de la langue. Impersonnel (verbe) Voir unipersonnel. Insertion Operation qui consiste ä placer dans la proposition certains elements, de maniere ä verifier la cohesion des groupes. On parle aussi ď insertion lorsque certaines propositions, comme les incises, sont insérées dans la phrase sans lien syntaxique décelable (C'est bien vrai, ajouta-t-elle, il réagit toujours ainsi.) Juxtaposition Reunion sans outil syntaxique de deux ou plusieurs unites équivalentes inté-grées dans un ensemble. Dans ľécrit, la juxtaposition est marquee par la ponctuation (virgule ou point-virgule). Modalite Catégorie de ľénonciation qui indique la maniere dont le locuteur envisage le degré de realite du proces et les appreciations qu'il porte sur lui. Mode Maniere dont le verbe marque la modalite. Nominalisation Operation morpho-syn-taxique qui permet de transformer un element en substantif, le boire et le manger, la charge de la eavalerie (la cavalerie charge). Que dans les propositions complétives permet de nominaliser une proposition qui peut alors exercer Ies fonctions du substantif. Nom propre Substantif d'un type particulier qui se distingue des noms communs par un certain nombre de eritěres qui ne sont pas toujours presents selon les cas, majuscule, absence de determinant, etc., et qui renvoie ä chaque fois ä un objet ou individu unique. Les prénoms constituent le prototype du nom propre. Operateur Verbe, nom ou adjectif qui admet pour complement un infinitif et/ou une completive (enclin a trahir, promettre que, etc.). Paradigme Classe ďéléments, reparables par la commutation, qui fonctionnent de la méme fai;on et constituent done une classe ďéquivalence. Passif Construction d'un verbe, générale-ment transitif direct, qui consiste ä employer le participe avec ľauxiliaire étre. Quand il est possible, le passif aboutit a mettre en tete de phrase le complement de la construction dite active. Ce qui était sujet est en position de complement (dit d'agent), et peut disparattre. On critique Jean /Jean est critique. Permutation Operation par laquelle, dans un énoncé, deux constituants échangent leur place : Je donne le livrc ä Pierre / Je donne ä Pierre le livre. Phrase La plus grande unite de l'analyse syntaxique, caractérisée par son autonomie syntaxique et sémantique ainsi que par son intonation. Prédicat Terme d'origine logique de manie-ment difficile. Le sujet représente dans une phrase ce dont on parle et le prédicat ce que G/ossa/re «189 l'on en dit. On parle souvent en pareil cas de l'opposition entre le theme et le propos. Preposition Partie du discours invariable qui. a la difference de l'adverbe, lui aussi invariable, sert ä construire un syntagme nominal. Présentatif Construction qui fonctionne comme une proposition, bien que son pivot n'ait pas toutes les caractéristiques du verbe, et qui consiste ä presenter un element (void, c'est, il y a). Presupposition Phénoméne par lequel un sens reste implicite se déduit automatiquement du contexte, soit ä partir d'une unite lexicale (Ví'ií/implique ainsi marié), soit ä partir d'une construction syntaxique (une question comme Qui est venu aujourd'hui? suppose que quel-qu'un est effectivement venu). Proces Ľévénement ä quoi renvoie le verbe, action, état, fait de subir. Referent Fragment de realite auquel renvoie (réfěre) une unite linguistique. Restriction Construction qui sert ä marquer ľexception et qui combine un element négatif, ne, ä que. Elle ne peut porter que sur un groupe situé aprěs le verbe : Jean n'aime que les gáteaux. Situation Voir contexte. Subordination Relation, ä ľaide d'une conjunction, de deux propositions dont l'une, dite subordonnée, est sous la dépendance syntaxique de ľautre, dite principále. Sujet Syntaxe nominal qui precede generale -ment le verbe dans la proposition canonique et lui impose un accord en personne, nombre et genre selon le cas. Syntagme Ä ľintérieur de la proposition, groupe de mots syntaxiquement lies entre eux, ce que prouve le fait qu'ils peuvent commuter avec une unite simple (Ies pctits enfants courent/ils courent). Transitivité Propriété de certains verbes qui se construisent avec un ou plusieurs complements. Un verbe qui n'admet pas de complement a une construction intransitive. Unipersonnel (verbe) Verbe ou construction verbale qui n'admet qu'un sujet, il (il pleut, il f aut, il arrive une voiture). Valence Mode de construction des verbes. Le nombre ďunités qu'ils exigent, e'est-k-dire obligatoirement en francais un sujet, et éven-tuellement un ou plusieurs complements, définit leur valence : valence un (un sujet, pas de complement), valence deux (un sujet, un complement) etc. Proclitique Voir clitique. Pronominal (verbe) Verbe construit avec un pronom de méme rang que le sujet, et dont ľauxiliaire aux temps composes est obligatoirement le verbe i'tre (se promener, se taire...). Proposition Phrase minimale formée d'un certain nombre de positions a remplir et qui sont dépendantes d'un verbe ä un mode personnel, pivot de cette proposition. Prosodie Phénoměnes oraux qui se super-posent ä ['organisation de la phrase. On les appelle aussi suprasegmentaux. Les principaux traits de la prosodie du francais comprennent ľ accent, le rythme et l'intonation. Ces phénoměnes, dont la ponctuation dans ľécrit transcrit une partie, sont souvent lies ä la syntaxe. © Bibliographie sommaire ▲ Complétez votre information en grammaire ARRIVE M. et alii, La Grammaire d'aujourd'hui. Paris, Flammarion 1986. BONNARD H„ Code du frangais courant, Paris, Magnard, 1981. CHEVALIER J.-Cl. et alii, Grammaire dufrancais contemporain, Paris, Larousse, 1964. Grevisse M., Le Bon Usage: grammaire frangaise, Duculot, 1936. RIEGEL M. et alii, Grammaire méthodique dufrancais, Paris, PUF, 1994. WAGNER R.-L. et Pinchon J., Grammaire du frangais classique et moderne, Paris, Hachette, 1962. ▲ Poursuivez la reflexion Blanche-Benveniste Cl., Deulofeu J., Stefanini ]., Van Den Eynde K., Pronom et syntaxe. Uapproche pronominale et son application au frangais, Paris, SELAF, 1984. BORILLO A., SOUBLIN F.. Tamine J., Exercices de syntaxe transformationnelle du frangais, Paris, Colin, 1974. Delaveau A., Kerlerolix F.. Prob/emes et exercices de syntaxe francaise, Paris, Colin. 1985. Gary-Prieur M.-N., De la grammaire it la linguistique. Uétude de la phrase, Paris, Colin, 1985. GARY-PRIEUR M.-N., Grammaire du nom propre, Paris, PUF, 1994. GROSS M., Méthodes en syntaxe, Paris, Hermann, 1975. HUOT H., Enseignement dufrancais et linguistique, Paris. Colin, 1981. Hybertie C, La Consequence en francais. Gap, Ophrys, 1996. LYONS J., Linguistique generale, introduction á la linguistique théorique, Paris, Larousse, 1970. MlLNER J.-Cl., De la Syntaxe a {'interpretation, Paris, Le Seuil, 1978. MOREL M.-A., La Concession en frangais, Gap, Ophrys, 1996. MÜLLER Cl., La Subordination en frangais, Paris, A. Colin, 1996. ROTHEMBERG M., Les verbes á lafois transitifs et intransitifs en frangais contemporain. The Hague/Paris, Mouton, 1974. SANDFELD K., Syntaxe du frangais contemporain. Les propositions subordonnées, Geneve, Droz, 1936. Serbat G., Cas et functions, Paris, PUF, 1981. TOURATIER, Le Systéme verbal frangais, Paris, A. Colin, 1996. a Consultez les revues Cahiers de Grammaire, DRAĽV, Le Frangais dans le monde, Le Frangais moderne, Ľ Information Grammaticale, Langages, Langue frangaise, La Linguistique, Travaux du cercle de linguistique aixois. Index des notions essentielles Les pages indiquées en italiques correspondi plus précisément. Acceptabilité, 8; 20-21; 118-120. Accord, 11; 42; 99; 122-124; 128-129; 165-166; 168-169. Actif, 99-101; 109; 118-120. Adjectif, 17-18; 22-23; 26; 49; 50; 59-60; 65-66; 84; 94; 126; 129; 131; 134; 139; 142-147: 167; 168-170; 171; 172-174; 174-175; 178. Adverbe, 10; 16; 18-20; 24; 25-27; 34; 35; 38; 46; 48: 51; 61; 63; 76; 78-79; 84; 94; 103; 134; 145; 153-155; 170. Apposition, 33; 59-60; 129-130; 140; 144. Article. 17-18; 42; 60; 75; 104; 126; 130; 135-140; 163-164; 167: 170-171; 178- 179. Aspect. 51; 85; 87; 91-98: 100: 112-116; 120. Assertion, 32; 33-37; 124. Attribut. 50; 51; 57; 59; 60; 68: 99; 126; 127-128; 140; 144; 159-160; 165. Cardinal. 134; 141-142; 164-165. 1 Chronologic 84-85; 91-98; 116-118. c Complement. 11; 16; 24-25; 39; 41: 113; I 162: $ - ď agent. 100-101; 103; 179; | - circonstanciel, 34; 38; 51-56: 60; 77; 0 112-115; 128-129; 160; 1 - de nom, 58; 75; 177-180; g - de phrase, 51; 128-129; S - de verbe, 34; 50; 60; 67-68; 125-127; 'g- - ďobjet, 39; 57; 60; 68; 99-101; 105; 0 118-120; 126-127; 161-163; -I - prépositionnel, 22; 34; 39; 57-58; 60; « 67-68:77; 177-180. ^ Comptable. 20; 136; 179. g Contexte. 10; 21; 33; 35: 42; 93-94; 118; £ 138; 143; 151; 159. § Coordination, 12; 43-47; 51; 56-57; 69- 1 70; 75; 79; 99; 130. © Correlation, 12; 43; 71-74. aux passages oü les notions sont définies Defense, 37. Déictique, 9, 41, 81, 91, 128, 140. 152. Deixis, 9. Determinant, 35; 38; 42; 48; 49; 56; 59; 60; 66; 104; 111; 119; 126; 130: 133- 142; 179. Démonstratif, 9; 21-23; 134; 140-141; 152. Détachement, 42-43; 126; 144; 151-152; 163-164. Discours rapporté, 62-64; 80-82; 91; 77- 98. Ellipse, 33; 47; 56; 75. Énoncé, 9-10; 10; 11; 32; 84; 85-86; 122; 123; 129; 136; 151. Énonciation, 9-10; 62-63; 84; 86-87; 91; 93; 117-118; 129; 131; 155. Épithete, 59-60; 129; 144. Exclamation, 32; 40-41; 75; 140; 145. Explétif (ne), 36; 110; 145 Extraction. 42-43; 144; 151. Générique, 65; 103; 137-138. Grammaticalité, 8; 20-21. Hypothese, 52; 53-55; 69-71; 73; 94; 110-111. Impératif (ordre), 37; 69-70; 88; 93; 105. Impersonnel (cf. verbe unipersonnel). Indéfini, 58; 134; 141-142; 153; 167-169; 170-171. Indépendante, 12; 43-45; 87. Indicatif. 50-55; 60; 63-64; 86; 92-98; 109-111; 116-118. Infinitif, 37; 41; 48; 66-68; 80; 86-87; 92; 106-108; 122; 124; 142; 149. Interrogatif, 38-39; 56; 61; 63; 111. Interrogation, 37-40; 61-62; 63; 69; 111. Inversion, 33-34; 38-39; 62; 88; 156-158. 192 • La Grammaire Juxtaposition, 12; 43-47; 56-57; 69-70; 75; 79; 123; 130. Mise en relief (precedes de), 38; 39; 41-42. Modalités, 32-43; 51-55; 86-91; 95-97; 108-111; 116. Mode, 37; 41; 44; 51-55; 60; 62; 63; 69- 70; 72; 81; 85-91; 106; 108-111. Negation, 32; 34-37: 40; 90; 110; 149. Nom commun, 24; 60; 131-133; 136; 139. Nom propre, 24; 60; 122; 131-133. Numeral, 134; 141; 143; 164. 159-161; 163-164; 168-170; 171; 175- 177. Pronominal, 84; 102-103; 105; 148; 176- 177. Proposition, 12-13; chap. 2 passim; 84; 124: 128-131. Quantité, 18-20; 35; 42; 141-142; 145; 163-164; 180. Reference, 136-140; 151-152. Relatif, 21; 38; 43; 56-59; 76-77: 78. Restriction, 36-37; 78; 90; 111. Ordinal, 134; 143. Ordre des mots, 33-34; 38-39; 69-70; 124; 143; 146-147; 149-150; 156-159; 159- 160; 171; 174-175. Partie du corps, 129; 166-167. Passif, 99-101; 103; 105; 118-120. Phrase, 10-11; 20-21; 27-30; chap. 2, passim; 84. Populaire (francais), 76-77; 103; 150; 175- 177. Possessif. 17-18; 58; 119; 131; 141; 153; 164-167. Prédéterminant, 76; 134-135: 142. Predicate; 84; 102-103. Preposition, 17-18; 21-23; 50; 66-68; 75; 100-101; 124-127; 128-129; 138-139; 143; 153-154; 177-180. Présentatif, 41-42; 65-66; 137. Pronom, 21-23; 23-25; 34; 38-39; 41; 48- 49; 56-58; 61; 63-64; 76-77; 78; 81- 82; 102-104; 122; 129; 144; 147-153; Situation, 9-10; 32-33; 40; 41-42; 84; 93- 94; 131; 133; 151. Subordination, 12; 43-45; 48-64; 70-71; 71-74; 75; 78-79; 87-91; 108-112. Sujet, 12; 15; 24; 34-35; 38-39; 57; 60; 76; 99-101; 118-120; 122-124: 148; 156-158: 162-163. Syntagme, 12-13; 14-15. Temps. 42; 53-54; 63-64; 85-86; 97-95; 116-118. Theme, 33; 122-123. Transitif (intransitif), 34; 39; 99; 705; 112; 125-127: 159-161; 161-163; 176. Verbe, 10; 11; 24-25; 25-27; 33-43; 48; 66-68; chap. 3, passim; 122-128; 149: 159-161; 161-163; 175-177; 178-179. Unipersonnel. 42; 103-105; 123-124; 147. Valence, 12. Armand Colin Éditeur 21. rue du Montparnasse, 75006 Paris 11003074-(II)-(1,5)-ACT Depot legal : Janvier 2006 Achevé d'imprimer sur les presses de SNEL Graftes sa rue Saint-Vincent 12 - B-4020 Liege Tel +32(0)4 344 65 60 - Fax +32(0)4 341 48 41 Janvier 2006-36701