FJIB508 Základy akademického psaní 03) Titres et recours aux théories 1) Quel serait le titre descriptif et synthétique du présent extrait ? C'est peut-tre la notion de "distance", ou de "tension", qui caractériserait le mieux dans sa diversité l'acte de parole ironique : distance d'un énoncé avec renoncé d'autrui: distance d'un énonciateur l'égard de son propre énoncé; distance d'un énoncé d'avec son contexte de référence réel; enfin, distance, interne l'énoncé, entre deux éléments disjoints de cet énoncé (un comparant et un comparé, une cause et son effet, un diagnostic et son pronostic, etc.). L'ironie, comme toute conduite sociale, relverait alors d'une manire la fois de "garder ses distances" avec autrui par l'entremise de distances sémantiques et syntaxiques construites dans et par le discours, manire ambiguë et rusée de bénéficier en mme temps d'une impunité ("je n'ai jamais dit cela") et d'une efficacité ("j'ai bien dit cela"), manire donc la fois de fonder une connivence, d'affirmer une cohésion et un lien, de réduire pratiquement une distance (avec ceux qui me comprennent demi-mot, qui font donc partie de mon monde), tout en excluant, en mettant distance ceux qui me servent de cible et ceux qui n'accdent qu'au sens explicite de mon discours. Comme dans le schéma du "bouc émissaire", comme dans la plupart des jeux qui sont la fois conjonctifs (d'une communauté, d'une équipe) et disjonctifs (d'avec un adversaire), dans l'acte d'ironie on communie par une communication tout en excommuniant les balourds et les nafs. P. Hamon, L'ironie . Le Grand Atlas des littératures. Encyelopaedia Universalis éditeur, 1990, p. 57. 2) Vous devez traiter de l'ironie chez Balzac. Quels seraient les éléments pris dans le texte théorique qui suit que vous citeriez pour appuyer votre raisonnement méthodologique? Avant de présenter les principales fonctions du texte ironique, rappelons que l'ironie, dans la mesure o elle se définit toujours par rapport une norme, s'inscrit le plus souvent dans un discours idéologique. Comme Ta montré Ph. Hamon (Le Grand Atlas des littératures), le texte ironique repose en effet sur un schéma de communication que l'on peut formaliser l'aide du systme actantiel de Greimas. Le sujet l'origine du discours (l'ironisant) prend pour objet (c'est--dire pour cible) un ironisé. Le destinataire, en raison du double discours constitutif de l'ironie, est lui-mme dédoubler en deux instances : l'une nave, recevant le texte au niveau littéral, l'autre complice, car comprenant l'intention véritable de l'émetteur. Mais l'ironie, discours allusif et détourné qui s'explique bien souvent par l'impossibilité de proposer un discours transparent, suppose aussi un opposant, savoir la norme (sociale, politique ou culturelle) qui interdit précisément la parole explicite. Dégager l'opposant d'un texte ironique permet donc de réinscrire un récit dans son contexte idéologique. L'adjuvant sera la norme, existante ou supposée, qui unit l'ironisant et le destinataire complice dans la dénonciation de la norme en vigueur. Si l'on reprend l'extrait de Candide cité plus haut, le narrateur se présente comme un ironisant dont l'ironisé (la cible) est le fanatisme religieux. Si le destinataire naf, convaincu que les autorités - en particulier religieuses - ont toujours raison, peut souscrire l'idée de l'autodafé, le destinataire complice reconnaît dans le discours du narrateur une dénonciation de ce que le fanatisme a d'absurde et de monstrueux. L'opposant est la norme politique de l'Ancien Régime, la monarchie de droit divin, qui oblige le narrateur un déplacement de sa critique (il s'en prend l'université de Combre et non au clergé de la France de Louis XV). L'adjuvant est la norme nouvelle proposée par les philosophes du XVIIIe sicle, cet esprit des Lumires s'opposant l'obscurantisme et qui, entre autres valeurs, défend la liberté de conscience. L'ironie a donc d'abord une fonction critique : elle permet d'attaquer, de dénoncer un point de vue en le ridiculisant. Si l'ironiste campe le lecteur en complice, c'est sur le dos d'un ennemi commun (l'ironisé), cible implicite du discours. La force critique de l'ironie tient au fait qu'elle commence par souligner l'absurdité ou la vacuité du point de vue contesté avant d'amener le lecteur rejoindre le point de vue de l'énonciateur. Destinateur et destinataire se rassemblent ainsi dans le rejet de Terreur avant de le faire dans l'acceptation de la vérité. L'ironie permet également d'exprimer une idée en lui donnant une force particulire. Présenter une idée sous forme d'antiphrase, c'est une façon de la singulariser, de la défamiliariser comme auraient dit les formalistes russes. Parler d'un affrontement militaire comme d'une boucherie héroque (Voltaire) est ainsi une façon de souligner le scandale de la guerre. L'ironie est donc, aussi, une force d'inspiration : elle suggre, stimule, donne penser. En pointant les limites d'une pensée convenue, elle ouvre des perspectives, oblige dépasser la façon habituelle de voir les choses. Enfin, lorsque l'ironie porte sur l'ensemble d'une énonciation, elle n'est plus un simple instrument polémique : elle a pour fonction d'opérer une rupture avec nos modles culturels de perception qui supposent un sujet cohérent et une réalité unifiée. FJIB508 Základy akademického psaní 03) Titres et recours aux théories 1) Quel serait le titre descriptif et synthétique du présent extrait ? C'est peut-tre la notion de "distance", ou de "tension", qui caractériserait le mieux dans sa diversité l'acte de parole ironique : distance d'un énoncé avec renoncé d'autrui: distance d'un énonciateur l'égard de son propre énoncé; distance d'un énoncé d'avec son contexte de référence réel; enfin, distance, interne l'énoncé, entre deux éléments disjoints de cet énoncé (un comparant et un comparé, une cause et son effet, un diagnostic et son pronostic, etc.). L'ironie, comme toute conduite sociale, relverait alors d'une manire la fois de "garder ses distances" avec autrui par l'entremise de distances sémantiques et syntaxiques construites dans et par le discours, manire ambiguë et rusée de bénéficier en mme temps d'une impunité ("je n'ai jamais dit cela") et d'une efficacité ("j'ai bien dit cela"), manire donc la fois de fonder une connivence, d'affirmer une cohésion et un lien, de réduire pratiquement une distance (avec ceux qui me comprennent demi-mot, qui font donc partie de mon monde), tout en excluant, en mettant distance ceux qui me servent de cible et ceux qui n'accdent qu'au sens explicite de mon discours. Comme dans le schéma du "bouc émissaire", comme dans la plupart des jeux qui sont la fois conjonctifs (d'une communauté, d'une équipe) et disjonctifs (d'avec un adversaire), dans l'acte d'ironie on communie par une communication tout en excommuniant les balourds et les nafs. P. Hamon, L'ironie . Le Grand Atlas des littératures. Encyelopaedia Universalis éditeur, 1990, p. 57. 2) Vous devez traiter de l'ironie chez Balzac. Quels seraient les éléments pris dans le texte théorique qui suit que vous citeriez pour appuyer votre raisonnement méthodologique? Avant de présenter les principales fonctions du texte ironique, rappelons que l'ironie, dans la mesure o elle se définit toujours par rapport une norme, s'inscrit le plus souvent dans un discours idéologique. Comme Ta montré Ph. Hamon (Le Grand Atlas des littératures), le texte ironique repose en effet sur un schéma de communication que l'on peut formaliser l'aide du systme actantiel de Greimas. Le sujet l'origine du discours (l'ironisant) prend pour objet (c'est--dire pour cible) un ironisé. Le destinataire, en raison du double discours constitutif de l'ironie, est lui-mme dédoubler en deux instances : l'une nave, recevant le texte au niveau littéral, l'autre complice, car comprenant l'intention véritable de l'émetteur. Mais l'ironie, discours allusif et détourné qui s'explique bien souvent par l'impossibilité de proposer un discours transparent, suppose aussi un opposant, savoir la norme (sociale, politique ou culturelle) qui interdit précisément la parole explicite. Dégager l'opposant d'un texte ironique permet donc de réinscrire un récit dans son contexte idéologique. L'adjuvant sera la norme, existante ou supposée, qui unit l'ironisant et le destinataire complice dans la dénonciation de la norme en vigueur. Si l'on reprend l'extrait de Candide cité plus haut, le narrateur se présente comme un ironisant dont l'ironisé (la cible) est le fanatisme religieux. Si le destinataire naf, convaincu que les autorités - en particulier religieuses - ont toujours raison, peut souscrire l'idée de l'autodafé, le destinataire complice reconnaît dans le discours du narrateur une dénonciation de ce que le fanatisme a d'absurde et de monstrueux. L'opposant est la norme politique de l'Ancien Régime, la monarchie de droit divin, qui oblige le narrateur un déplacement de sa critique (il s'en prend l'université de Combre et non au clergé de la France de Louis XV). L'adjuvant est la norme nouvelle proposée par les philosophes du XVIIIe sicle, cet esprit des Lumires s'opposant l'obscurantisme et qui, entre autres valeurs, défend la liberté de conscience. L'ironie a donc d'abord une fonction critique : elle permet d'attaquer, de dénoncer un point de vue en le ridiculisant. Si l'ironiste campe le lecteur en complice, c'est sur le dos d'un ennemi commun (l'ironisé), cible implicite du discours. La force critique de l'ironie tient au fait qu'elle commence par souligner l'absurdité ou la vacuité du point de vue contesté avant d'amener le lecteur rejoindre le point de vue de l'énonciateur. Destinateur et destinataire se rassemblent ainsi dans le rejet de Terreur avant de le faire dans l'acceptation de la vérité. L'ironie permet également d'exprimer une idée en lui donnant une force particulire. Présenter une idée sous forme d'antiphrase, c'est une façon de la singulariser, de la défamiliariser comme auraient dit les formalistes russes. Parler d'un affrontement militaire comme d'une boucherie héroque (Voltaire) est ainsi une façon de souligner le scandale de la guerre. L'ironie est donc, aussi, une force d'inspiration : elle suggre, stimule, donne penser. En pointant les limites d'une pensée convenue, elle ouvre des perspectives, oblige dépasser la façon habituelle de voir les choses. Enfin, lorsque l'ironie porte sur l'ensemble d'une énonciation, elle n'est plus un simple instrument polémique : elle a pour fonction d'opérer une rupture avec nos modles culturels de perception qui supposent un sujet cohérent et une réalité unifiée.