Comprendre 14 Les temps changent. Viens diner, on fera la vaisselle... Qui a dit que les Francois etaient des egoi'stes replies sur eux-memes ? lis sont 93 % a « aimer recevoir chez eux pour mi repas », affirme le Credoc dans une enquete effectuee a I'initiative du Comite des arts de la table. Mieux, la convivialite est une valeur en hausse : les trois quarts des 25-70 ans invitent au mains une fois par mois, un taux en progression. Pas de petits plats dansles grands On s'invite, done, mais differemment. Si le diner assis reste un modele largement dominant, trois personnes sur dix tendraient a lui preferer F aperitif, « qui requiert nette-ment moins de travail et d'expertise ». La tele au menu Inaugure par les soirees foot, consacre par les reunions Star Ac' et Bachelor1, le plateau-repas tend a devenir un mode d"invitation comme un autre. II convient part icu Herein en t aux celibataires et aux jeunes, lesquels ne semblent pas s'emouvoir de devoir manger des chicken nuggets sur leurs genoux, pourvu que ce soit en compagnie de Zidane, Michal2 ou Steven3. « Cette tendance ne va cesser de $ 'etendre », par France VlOLLET prophétise le Credoc. Avec un « temps moyen passé devant la télé en perpétuelle augmentation » et la flora ison ď emissions cultes,« se retrouver pour les regarder tout en mangeant va vrai-semblablement progresser á I 'avenir ». Invite á mcttre la main ä la päte Si Jean-Pierre Loisel, directeur du departement consommation au Credoc, reconnait un « effritement des schémas tradi-tionnels » (diminution du temps passé pour preparer un repas, recours croissant aux aides culinaires industrielles), e'est pour mieux souligner une « convivialite qui devient plus chaleureuse ». Portée par les jeunes generations, celle-ci se concentre exclusivement sur l'im-pératif ď« étre bien ensemble ». De lá une décontraction inédite pour tout ce qui ne releve pas de cet objectif. L'invite qui mettait les pieds sous la table peut desormais s'attendre ä devoir porter la main ä la päte. II a meme une (maf)chance sur dix de se voir requisitionne pour la vaisselle. Avis aux faineants : les jeunes, les celibataires et les hommes ont le moins de scrupules en la matiere. Cela tiendrait ä leur « vision moins "sacralisee " de la reception », enseigne le Credoc. Ponctualite et cadeau La desacralisation ne remet pas en question le souci des aurres. Un Francais sur deux tient ä decorer sa table, mais aussi sa maison, avant d'enfiler une toilette raffinee pour recevoir ses convives. Des convives qui, eux-memes, se pretent volon- tiers au jeu des bienseances. Presque tous arrivent ä l'heure (neuf sur dix), la plupart un cadeau ä la main (plus de deux sur trois). Et qu'importe ce que l'hote leur servira, ils sont generalement prets ä tout engloutir, histoire de ne pas les froisser. Ä noter: deux sur trois poussent la civilite jusqu'ä eteindre leur telephone portable pendant le repas. France Viollet, Liberation, mercredi 25 fevrier 2004. 1. Emissions de telcr6alit6 francaise. 2 et 3. Personnes rendues celebics par des emissions ä la television. 70 • soixante-dix