Pierre de Ronsard (1524-1585) Je voyais, me couchant, s’éteindre une chandelle, Et je disais au lit bassement à-par-moi, Plût à Dieu que le soin, que la peine et l’émoi, Qu’Amour m’engrave au cœur, s’éteignissent comme elle. Un mâtin enragé, qui de sa dent cruelle Mord un homme, il lui laisse une image de soi Qu’il voit toujours en l’eau : Ainsi toujours je voi, Soit veillant ou dormant, le portrait de ma belle Mon sang chaut en est cause. Or comme on voit souvent L’Été moins bouillonner que l’Automne suivant, Mon Septembre est plus chaut que mon Juin de fortune. Hélas ! pour vivre trop, j’ai trop d’impression. Tu es mort une fois, bienheureux Ixion, Et je meurs mille fois pour n’en mourir pas une. Sonnets pour Hélène (1578)