JEAN-CLAUDE MARGOLIN rétablit sous sa forme exclusivement littéraire : resolution qui n'offre au lecteur moderne aucune difficulté pour la bonne raison que, dans le bas des quatre pages qui ont élé nécessaires pour transcrire tout le sonnet (une page pour chacun des quatrains, une page pour chacun des tercets), ont été imprimés les vers ä partir desquels ont été faconnées les sequences verbo-pictographiques. Dove son gli occhi et la serena forma, Del santo, aiegro, et amoroso aspetto ? Dov'é la man eburna ov'el bel petto Ch'appen sarvi hor"in fonté me transforma ? Dove del fermo píé quella sanť orma Col ballar pellegrin pien di dilelto ? Dov'é '1 soavé canto, et I'inlelletto, Ché fu d'ogni valor prestaňte norma ? Dov'é la bocca é ľauré viole, Ľabito vago, et ľalmé treccie biondé Ché facean nel fronte un nuovo solč ? Lasso, ché poca terra hoggi ľascondé, Non la retruova '1 mondo amor si duolé Ch'ardemo io cliiami ogn' hor chi no rispunde. Nous en proposerons la traduction suivante18 : Oú sont les yeux et la beauté sereine De cet air de piété, ďallégresse et ďamour? Oú est la main ďivoire, oú done la belie poitrine Don t la seule pensée me transforme en fontaine ? Oú est ľempreinte sacréc de ce pied assure Don! la danse gracieuse vous ravissait ? Oú sont le doux chant et ľesprit Qui ŕut, de toute excellence, le modéle accompli } Oú sont la bouche, et le souffle de violette, La noble elegance ei les belles tresses blondes Qui faisaient de son front un nouveau soleil ? dun bref du pape Paul III. On peut lire : PAVLVS PAPAI1I. Datum RomaeapudSanctum Marcum sub annulo Piscatoris, DieXVI. Augusti M.D.XXXX Poniificatus nostriAnno sexto. On notera aussi le privilege de * l'illustrissime Senat de Venise », et — juste avant, l'epttre dedicatoire a laquelle nous avons fait allusion (n. 15) et le sonnet elogieux dcTommaso Spica de 11 Spinteri, Romano. — L'exemplaire utilise est celui de la 2' edition (1545), Bibl. Nat.. Res, p. V. 317 (Al - H8 v°, soil 64 ff.). — Voir aussi la notice descriptive des diverses editions du Libra nuovo dans le Catalogue Calligraphy 1535-1685 (« A Collection of 72 Writing-Books and Specimens from the Italian, French, Low Countries and Spanish Schools »), description et introduction de Stanley Morison (Milano, La Bibliofila, 1962), p. 37-41. Ony compteS editions del'imprimeur Antonio Blado : 1540,1545,1548,1550 et t^c* ' 7'iliii-tit nnpinftlr fp ihliec' ri'.-ilement I Rome en 1^40^ ne serail pas cp\\<- dp SONNET FIGURE D E< PALATINO « DOVE SON OU OCCIIL 123 Hélas ! A present qu'un peu de terre la recouvrc, Lc monde ne la retrouve pas : Amour se plaint Que, tout embrasé, ä toute heure j'appelle celle qui ne répond pas. Une question peut venir ä l'esprit sous forme d'objection : en quoi les elements figures, auxquels correspondent immédiatement les syl-labes, les mots ou les syntagmes que Ton peut lire d'une maniere discursive dans les vers enliěrement littéraux du bas de chacune des quatre pages, peuvent-ils modifier l'analyse du sonnet ? Ne seraient-ils pas des elements ludiques, purement surajoutés ä litre de« divertissement », ou, comme l'indique la preface du traité oú est venu s'inserer le sonnet, faisant partie de ccs jeux de société qui plaisent tant aux femmes et aux trěs jeunes gens 19 ? D'autre part, l'ulilisation de ces pictogrammes en quoi consistent les rébus n'esl pas propre aux sonnets, pas plus qu'ä certaines formes poétiques bien déterminées, comme les rondeaux. N'importe quel support littéraire, de prose ou de vers — des proverbes, des sentences, voire un discours quelconque, ou au contraire un discours specialise, de type mathématique ou philo-sophique, un article de journal, etc. — convient parfaitement ä cette representation figurée — partielle ou integrale — des phonemes énoncés. Et de conclure que 1'aspecí facétieux introduit par les pelits dessins n'ajoute ni ne retranche rien ä la valeur poétique du sonnet ou ä son absence de valeur poétique. Celte objection me paralt assez aisément refutable, pour peu que Ton soil familiarise avec ce mode d'exprcssion assez répandu au xvf siěcle, plus particuliérement en France (chez les Rhétoriqueurs et leurs imitateurs), en Italic (chez les emblématistes, auteurs de« devises amoureuses» et chez les pétrarquisants admis dans certaines Academies ou dans des salons ou se pratiquaient toutes sortes de jeux littéraires, énigmes, bouts rimés, acrostiches, etc.20) et, un peu plus tard, aux Pays-Bas, dans Ies diverses Chambres de Rhétorique21. Si l'on a remarqué que les dessins ne sont pas de simples equivalents piclographiques de syllabes ou de phonemes, mais qu'ils sont souvent charges de connotations diverses, autrement dit que ces signifiants sont en méme temps des signifies plus ou moins explicites, et que l'auteur ne choisil pas au hasard entre deux ou trois homophones possibles (comme un dais, un dé ä coudre ou un dé ä jouer), la lecture du sonnet de Palatino ne sera pas non plus la měme, si on le lit« en 19. Maniere assez ordinaire d'excuser ces jeux en les dévalorisanl par cette concession faite « aux femmes et aux janciuli ». 20. Voirnoiamment I'Accademiadegii InlronatiäSienneet leDialogodeiGiochide Girohiinii Bargagli (1572). •• • I I • !• i'i...... .....t., „t.............">^r> • t,f)?n i . APPENDICE Nous donnons ci-dessous la «solulion * délailiče du sonnei-rébus : ä la photiéli-salion ou verbalisation des images nous avons adjoint (enire parentheses) la forme normalised (dans la languc ilalienne moderne). Nous avons donne en souscription la traduction en francais de ees images-mols. 1 D OVE SON (SUON) G Ľ OCCHI E LA SERENA (SIRĽNA) FORMA G Ľ (ceufs) (son) (yeux) (note) (siréne) DEL SANTO ALI (ALE) GRU (GROE) T AMO ROSA (saint) (2 ailes) (unc grue) (crochet) (rose) D OV(E) E LA MANO EB URNA OV(E) E ' (ceufs) (note) (main) (urne) (ceufs) CAPPE (CHAPPE) NSARVI ORA (HORA) Í (IN) FONTE MITRA (2 cappes) (heure) {In abr.) (fontaine) (mitre) (forme) S PETTO (poilrine) LBEL PETTO (poilrine) NS FORMA (forme) 5 D OVE DEL FER (FERRO) MO PIE (PIEDE) QUEL LA SANTA ORMA (ceufs) (fer) (pied) (note) (sainte) (trace) 6 COL (COLLO) BALLA R PELLEGRINO PIE (PIEDE) N DI DI LETTO (col) (ballot) (pelerin) (pied) 7 D OV(E) ELS A (ELSO) AVE CAN (CANE) TO E LIN (LINO) TEL (ceufs) (garde) (chien) (lin) 8 CHE FU D OGNI (LSGNI) VAL OR (ORA) P RESTA NTE N (oignons) (heure) (arret) E LA BOCCA E LA U(UT) RE VIOLE (lit) LETTO (lil) ORMA (trace) 9 D OV(E) (ceufs) (note) (bouchc) (notes) (violes) V AGO E Ľ ALM E (ANIME) TRECCIĽ BI ONDE 10 L ABITO (habit) (aiguille) (2 ames) (tresses) (ondes) 11 CHE FACE AN (ANELLO) FRO NTE V (=UN) N UOVO SOLE (torche) (anneau) (front) (Un abreg.) (ceuf) (soleil) 12 L ASSO CHE P OCA TERRA OGGI LA SC ONDE (as) (oie) (terre) (note) (ondes) 13 NO (= NON) LA RE TR UOVA IL MONDO AMO R SIDUOLE (SETOLE) (/Von abrege) (notes) (ceufs) (monde) (crochet) (deux brosses) 14 CHAR (CARRO) DEDO (= DENDO) I OCCHI AMI GON HOR(ORA) CHI NO (=NON) (charrelte) (yeux) (2 crochets) (heure) [RISP ONDE] (ondes) D DEL NSABYl UI Dove son gli occhi et la serena forma Del santo, alegro, et amoroso aspetto ? Dove la man eburna ove '1 bel petto Ch'a pensarvi hor 'in fonte me transforma ? PREMIER QUATRAIN < . D^^AVE^TO DOTTEL Dov*e del fermo pie' quella tant'orma Col bailor pellegrin picn tli rlilctto 1 Dov'e '1 soavc canto^ciy'intclletto Che fu ďogni valor^r£Kante norma t CPE Do've la bocca e 1'aurc viole', L'abito vago, ct l'almc trcccic biondc, Che faccau jkfJ^o im nuovo sold SECOND OUATRA1N PREMIER TERCET IL UalJk deedi®í5^ ^nMchKQRjJ^ Lasso che poca term hoggi ťascondc Noe la rctniova1 '1 mímd^jimor si duole, Ctí ordendo io chiarni oga'lior clu bod risponde, SECOND TERCET