ANTHOLOGIE DE LA POESIE DE LANGUE PRANCA1SĽ BAROQUE NO/R ET MYSTIQUE £tienne durand (1586-1618) I hi pe/rarqnisme rem par la licence et I''ironic, line babilclC I eel 11 titj lie sails dcfaiil, line grande uariete elans les genres, ttne imagination patrtit par I eclat de la passion, Etienne Durand ava.it assurhnent Unit pour devenir lime des globes poetiqites de son epoque, si, conirolcur provincial des guertes, et dtt parti rie Marie de MA&cis cninr le jcune Lottis Kill ct surtout son favori k due de Luyncs, tl n 'avail, poitsscpar unc extreme ambition, comphtt et ccrit contre lantori/i1 du Rut : inculpe' dc crime de Ihe-majesli; il est condantne sans expedient, pais rompu et brule en place de Grci'e: il avail a peine treute-deux am. On compareia, bien stir, ses Stances a 1'inconsrancc aux stances composhs par Jacques Davy du Perron (cf. p. 691). SONNET A LECTURE MULTIPLE Ô Amour ó penscr ô désirs plcins de flamme, Line dame un objet un brasier que jc Ncns Mľ Wesse me iKHirrit conduit mes jeunes ans Á la mort aux douleurs au profund ďune lame. Ô Amour Ô penser couícz tót ä ma danie. Adressen racontez. niontiez coninie presents Á son cceur ä son áme á ses yeux tout-puissants Mes passions, mes maux. les douleurs de mon áme. Poussez faites voir forcez sa resistance, Sa beauté sa rigucur et sa ŕičrc constanec A plaindre ä soLipircr ä reconnaitre mieux Les doulcurs les ennuis les extremes suppliccs, Que j'ai que jc iiourris que je tiens pour délices En aimant, en pensant, en désirant ses ycux. SONNET licaux ycux, qui rccelez tant de traits et de Icux Qu^ rien ne saurait fuir de votre obeissance, Vuus n'etcs point des yeux, mais des soleils heureux, Soleils, nun, mais des dicux d'immortelle naissancc. Mais comment puis-jc avoir dc vous cettc creanee I Des yeux uc pourraiem pas etre si dangercux, Des soleils n'auraient pas unc telle influence, Et des dicux ne seraient jamais si rigouieux. Les yeux sunt pour le bien, vous etes pour les peines, Le soled cntreticnt, vous consommez les veines, Les dieux donneni la vie, ct vous faites mourir. Qu'etes-vous done, mauvais, des beaux yeux en essence, En beaute des soleils et des dieux en puissance Desceitdus ici-bas pour nous tairc souffrir. Voici des vers mourants ct des plaintes de cygne Qui sont de moil trepas et la borne et le signe, Un cri de Pliilomcle, un languureux ennui Qui prend son origine aux cruautes d'autrui, Bref un funeste amas de soupirs que je pense Par les lois du respect etre dus au silence, Que ma plume aflaiblie envoic a ta rigucur, Ma boucke ne pouvant cn decharger mon coeur. Mais las ! comme eclui qui conntu dans la nuc L'audacc dc son fils par sa pertc avenue, Par trois fois, mais en vain, cssaya de graver De quel vol son lcare avait pu s'clever, Sa main par sa douleur demeurant amorcie, Ainsi deja trois fois la miennc appesantie Par le regret de voir mon amour traverse, Ft mon espoir mourant en mes pleurs renverse, A votilu ci-devant mes supplices t'ecrire, L'abscnce et la douleur m'empechant de les dire. [...]