1 Extraits surrealisme 1- Paul Nougé 2- Marcel Lecomte 2 Maintenant c'est moi qui tiendrai compagnie aux hommes et aux femmes de mauvaise volonte Je me constituerai leur prisonnier Je m'installerai dans leur mensonge dans leur souvenir dans les chambres variables de leur vie Je m'insinuerai dans leur disgrace Je debrouillerai leurs ressentiments Je soufflerai sur leur colere Je les pousserai sur la place Je me tiendrai derriere leur dos lis ne reconnaitront ni leurs gestes ni leur cri lis trahiront fidelement leur parole La derniere apparition Au tournant des mensonges, ses levres s'eclairent et dispensent la seule lumiere dont je dispose encore. Les objets, que l'on decouvre peu ä peu, ne l'ont pas encore trahie, ils ne cessent d'obeir ä la tendre pression d'un regard qui invente plutot qu'il ne retrouve. Les portes s'ouvrent sans bruit, toutes les fenetres s'ouvrent toutes ensemble sur des paysages mobiles qui ne sont plus de ce monde et pourtant lui ressemblent toujours. Les pensees qui lui viennent, et qui peut-etre sont les miennes aussi, gardent leurs distances, nous menagent un vide tres pur oil toutes choses peut-etre deviennent possibles, - ou l'ont ete. Le monde oil nous vivons se compose ä sa droite, mais ä sa gauche, commence lentement de se defaire. Et cependant, eile n'a pas detourne la tete, elle n'a pas quitte la place de son coeur. L'amateur d'aubes J'ai accoutume depuis longtemps de me lever un peu avant l'aube pour surprendre, dans l'instant qui va suivre, ce qu'il adviendra de la nuit. Elle est la, contre mon visage, elle a tout pris, elle semble impenetrable, mais derriere eile, je devine, rassemblee, toute la lumiere qui tremble comme un deluge avant de s'abattre. D'abord la nuit resiste ä cette pression des grandes eaux eblouissan-tes; mais, poreuse, et dans ses profondeurs, elle laisse enfin suinter doucement quelque clarte laiteuse qui s'etend, tache de phosphore, et commence d'engendrer l'espace. J'ai longtemps souhaite une soudaine rupture, une totale invasion de lumiere. Que cette grace m'ait ete refusee, que la vigueur que Ton prete ä l'imagination n'ait pu jusque-la forcer le monde, maintenant je tiens cet echec pour une maniere de bonheur. La nuit s'imbibe avec lenteur et change, se decompose, laisse paraitre, comme au hasard, la transparence d'une atmosphere, un mouvement de foret ou de nuage, l'eclair d'une mare ou d'un fleuve, les courbes char-nelles de la terre, parfois un fragment osseux de ville, - mais cependant rien d'humain que moi-meme. Si la nuit se transforme en plein jour, ce n'est jamais de la meme maniere. Ä quoi tient sans doute le prodige. Ronde de nuit L'immense fleur liquide chavire, se resout en musique sans pesanteur; la mort de l'ombre aussitöt marque le crepuscule. Ce chemin entre ses murs de brique, voici l'eau tranquille ou glisserait tout le ciel. II ne faudrait qu'un son lointain et pur pour que la Campagne ainsi fut vraiment notre meilleur visage. La nuit lucide appuie ä peine, accorde les gestes de midi, et la plaine deserte, transfiguree, devoile le sens des villes au soleil. Elles flottent ä distances egales de notre chair et de notre pensee. Nous portons dans nos mains le cceur calme du jour. Mais le visage detendu d'une femme agenouillee ne pouvait conjurer ce grand cri de l'espace. Les ecluses du sommeil ont cede dejä. Le matin a brise les vitres trop fragiles. II faut qu'ä nouveau nos yeux aveugles soient nus sous la lumiere. 29 juillet 1924 Cette pensee courbe effleurant aux facades les jets droits du soleil et les ombres au bord des cours, quel chant planerait d'une joie si legere. Les pas s'enchainent ainsi et la chanson retombe, ploie enfin et se repose dans ce branchage epais qu'un bras courbe illumine. La voix dure et ronde d'une sirene delivre le sang, l'haleine, notre front. L'eau etincelante cependant, ce nuage de neige dispersem leur marche concertee. Des mouvements allonges, l'espoir de la danse, ont comble le paysage. Seule une longue patience nous garde de mourir. Source: Paul Nouge, L'Experience continue, L'Äge d'Homme,« Lettres differentes», Lausanne, 1981, p. 369-380, p. 29, p. 29-30, p. 47-48, p. 48. © SABAM Belgium 2005 Promenade On glisse sans effort aux pentes sensibles du paysage. Ses flancs qui se meuvent, respirent avec nous, soulevent aussi toutes les odeurs et les paroles. Nos paumes en coupe recueillent une lumiere si dense qu'on la souhaiterait au fond de soi pour toujours. Teiles Saisons inclinees s'ef-feuillent et refleurissent. Nos pas assembles en corolle savourent enfin cet infini de terres et d'aeriennes torpeurs qui coule sans remous au creux de notre hiver. Marcel Lecomte (1900-1966) Marcel Lecomte (1900-1966) Fils ďun peintre, fait partie de ces écrivains beiges qui ont cótoyé certains membres de la colonie littéraire allemande á Bruxelles en 1914-1918, et particuliěrement Sternheim. Membre du groupe surrealisté de Bruxelles, il s'y distingue par la conviction que Von ne peut sortir de la littérature qu'á travers la littérature, comme par une certaine propension pour Vésotérisme et les tarots. A cóté ďune importante ceuvre critique tant picturale que littéraire et politique, Lecomte laisse quelques récits á 1'écriture incroyablement travaillée dont son dernier titreLe Suspens (1971) donne la clé psychique. On pointera entre autres parmi ses oeuvres L'Homme au complet gris clair (1931), Le Vertige du réel (1936), Les Minutes insolites (1936), L'Accent du secret (1944) ethe Carnet et les instants (1964). L'Homme au complet gris clair Dans cet extrait de L'Homme au complet gris clair, 1'identité du personnage central, qui ne cesse ďéchapper ä celui qui le poursuit, significativement nommé Ilien, ne se révěle qu'au dernier chapitre, celui qui est ici reproduit. On y retrouve 1'homme au complet gris clair, mort et comme statufié - ce qui entraine la confusion ďllien. La trajectoire de ce dernier n'a en effet cessé de croiser la sienne. Situation inverse, en somme, de celle de 1'expérience du dieu Terme chez Jean Ray. Une mort réussie Ä quelque temps de la encore, dans la banlieue de la ville, Ilien se prome-nait avec un ami revenu depuis quelque temps d'un séjour prolongé ä 1'étranger. Les deux hommes se trouvaient aux abords ďune universitě nouvellement construite dont les bátiments revétaient aux yeux ďllien une grandeur, une solennité toutes particuliěres. Cétait 1'époque des vacances. Iis entrěrent bientót dans 1'énorme cour entiěrement deserte, que séparaient ďune extremitě ä l'autre deux constructions trěs longues. Ilien et son compagnon n'avaient fait que quelques pas lorsqu'ils virent ä quelque distance, sortant du grand bätiment de gauche, dans un bruit de porte paraissant combler 1'espace pendant plusieurs secondes, un jeune homme větu ďune de ces blouses blanches que les étudiants revé-tent au laboratoire et courant vers le grand bätiment de droite. D'un mouvement simultane, assez surprenant en somme, les deux amis incliněrent tout de suite eux aussi ä droite, suivirent un chemin tracé au milieu ďune pelouse dont 1'herbe était rase puis se dirigěrent vers 1'entrée ďune galerie vitrée par laquelle avait disparu le coureur. Aprěs avoir un moment longé la galerie, ils aboutirent ä un couloir plus sombre dallé de pierres blanches et noires et bientöt s'approcherent ďune sortě de cour intérieure oü ils apercurent un groupe de personnes s'agitant autour ďune statue, sembla-t-il ďabord et, ensuite, ils s'en rendirent compte un instant aprěs, autour ďun homme assis au fond ďun fauteuil au pied de cette tneme statue. Comme l'on s'ecartait de 1'homme ä certain moment Ilien le reconnut aussitót. Cétait son adversaire. II était mort. L'on disait qu'on venait de le trouver lä il y avait peut-ětre quelques instants á peine. Alors 1'ami ďllien lui saisissant le bras lui parla ä l'oreille: c'etait 1'in-dividu de la route de T..., sans nul doute. Ilien garda le silence; il semblait n'avoir pas entendu. L'on menait autour du corps grand tapage et les mouvements précipi-tés notamment de deux ou trois hommes contrastaient douloureusement avec le lyrisme des gestes dépouillés de tout dramatisme de la statue. Les deux amis se retirěrent sans avoir été remarques. Ilien pensait en marchant ä cette facon qu'avaient les événements ďarriver déja depuis quelque temps ďune certaine maniěre ä la fois imprévue et douce et ayant pour cadre justement aussi une série de jours beaux et calmes. Et il en venait ä réver ďun hasard plein ďune puissance extrémement absorbante ďou il déduisait que, étant données cent chances, par exem-ple, pour que telle chose imprévisible arrivät, il fallait se comporter comme si rien de semblable, en réalité, ne devait se passer. André quitta Ilien ä la sortie de l'Universite ayant quelque visite ä rendre non loin de lä ainsi qu'il l'en avait averti au depart. II irait le voir le lendemain dans le courant de l'apres-midi. Ä quoi se pouvait bien rapporter l'allusion d'Andre ä la vue du corps de l'homme au complet gris clair. Aun episode remontant ä quelques années, ä certaine époque oü Ilien, André avaient une vie dont le fond était compose de difficultés materielles ä peu pres constantes, faisant l'objet de leur preoccupation quotidienne; le plus clair du temps passait pour eux en effet ä chercher une occupation ä laquelle ils donnaient, en plissant les lěvres (et cela prenait chez eux un curieux aspect ďironie méchante) le nom ď«acceptable". Et le soir venu il leur arrivait de se rendre, s'il faisait trěs beau, dans cette sortě 140 Marcel Lecomte (1900-1966) ďenivrement, de fiěvre oú ils se trouvaient, dans ce besoin effréné de mouvement qui ne cessait de les tenir malgré la fatigue, au fond des campagnes. Ils erraient parfois trěs tard, en débraillé au milieu des terres, des tombeaux antiques, des maisons en ruině ou en construction. Ils aimaient demeurer pendant des heures dissimulés au fond de quelque cuisine ou salon passé, futur, écoutant autour ďeux les bruits; le craquement léger du bois des charpentes, les cris au loin ďenfants qui se réveillaient en proie á quelque terreur ou á quelque mal, 1'aboiement des chiens et ils pouvaient voir les premieres voitures maraichěres lour-dement chargées se dinger vers la ville, que suivaient toujours peu de temps aprěs des groupes ďouvriers marchant en silence, precedes ďun guide porteur de lanterne. Or, un soir, il leur arriva, comme ils avaient fait déjá á plusieurs reprises, de pénétrer dans un de ces bátiments ouverts au vent de la plaine rase. Chacun ayant avec soi une petite lampě en promenait plein de curio-sité, de tous les cótés, la lueur. Cette maison paraissait tout á fait en ruines, abandonnée; de 1'herbe grasse croissait méme á certain endroit défoncé, vide de carrelage ďoíi Ton pouvait voir un trěs mince arbuste au bois sans écorce s'elever, ďune blancheur extraordinaire. Dans le temps qu'André s'en était allé examiner une « piece » voisine de celle oú était Ilien, celui-ci avait dirigé vers le pavement la lumiěre de sa lampě de poche et ďabord il n'avait vraiment constaté rien que ďor-dinaire puis soudain avisant un carreau de ce pavement qui contrairement aux autres semblait n'etre plus trěs solidement joint, par jeu simplement, il 1'avait soulevé, ayant ensuite éclairé 1'excavation, il avait discerné ainsi, roulé dans un sac de toile grise quelque objet de forme rectangulaire. Ayant retire le paquet, déployé la toile grossiěre, il avait connu que c'etait un coffret de bois noir portant quelques caractěres orientaux peints en rouge. Ayant appelé André, Ilien et lui avaient essayé en vain de 1'ouvrir. Ils étaient sortis peu aprěs de la maison. Cest alors que s'etait produit quelque chose ďextrémement brutal et rapide. Comme André portant sous un bras le coffret marchait á quelque distance á la droite ďllien passant á ce moment-lá dans le rayon ďun réverběre, un homme s'etait jeté contre André, 1'enlacant étroitement. Tous les deux roulant sur le sol s'étaient livré une lutte silencieuse dans le noir et pendant laquelle Ilien avait entendu le coffret tomber, rouler puis heurter ses pieds en méme temps que la voix ďAndré lui parvenant un peu sourde mais nullement effarée lui avait dit de prendre le coffret, de fuir. Et Ilien qui connaissait la force ďAndré, le sachant ďautre part armé, constatant en outre qu'il avait laissé, lui, Ilien, sa petite lampě dans la maison désolée, n'avait eu, aprěs un nouvel ordre plus insistant encore de son compagnon, vraiment trop ďhésitation, semble-t-il, ä le laisser seul dans une situation qui n'etait pourtant point sans peril. II faut croire que les circonstances mémes dans lesquelles vivaient ces jeunes hommes avaient en quelque sorte permis ä Ilien ce mouvement désin-volte le conduisant bientöt ä courir sans trop de häte vers la maison oü il n'avait pas tardé ä retrouver sa lampe sur le carreau méme soulevé tout ä l'heure. Ne peut-on penser en effet que si la misěre comme la maladie trans-forme complětement la lumiěre et la couleur des journées, eile peut amener ä la longue et cela fréquemment un sentiment de liberté exces-sif ou au moins přivé de sa nécessité veritable. Ressortant aussitót Ilien avait entendu des pas rapides arrivant de son coté; c/avait été André qui, ayant maitrisé 1'agresseur 1'avait laissé dans le fossé de la route. Revenus chez eux ils avaient réussi ä faire sauter la serrure du coffret qui était rempli de monnaies diverses. Quel röle 1'homme de la route de T..., devenu 1'homme au complet gris clair, avait-il tenu en somme vis-ä-vis ďeux dans la nuit de 1'agression; ce n'avait été qu'un bandit de route, un voleur de Campagne comme André et Ilien en avaient été certains pendant des années. Était-il le propriétaire du tresor du coffret ? Mais comment penser qu'il n'eüt pas cherché děs lors ä en obtenir la restitution ou n'etait-ce plutöt le produit ďun vol en quelque lointain territoire?... Et Ilien ne pouvait detacher sa pensée de cet episode de son existence dont il avait pu estimer qu'il était classé, épuisé et dont la sorte de vulgaritě, apparemment semblable ä celle des plus médiocres romans ďaventures policiěres, rendait ici, qui sait, plus troublante encore la suite, cette suite ayant nécessité de la part ďllien une reprise, un retour complet sur une opinion precedente. Pendant tout le reste de la journée, Ilien se proměna dans le quartier environnant 1'Université. Comme il se faisait que par ses parents il avait été conduit fréquemment de ce cöte-lä, il lui arriva de retrouver des sites connus, en contemplant d'autres qu'il se persuadait de reconnaltre et on les avait transformés pourtant de facon complete. Mais une fois il nota une illusion curieuse: deux blocs de maisons, espa-cés, ménageant un intervalle de terrains vagues et de champs, laissěrent paraitre largement la Campagne et, ä l'horizon, se dessinant sur le ciel un 142 Marcel Lecomte (1900-1966) objet tres eloigne; c'etait une ferme sans doute. Men s'arreta longtemps pour la regarder et se rendit compte a la fin qu'a la distance d'oii il l'aper-cevait, il ne pouvait reussir a reconnaitre les parties anterieure et posterieure du batiment, celui-ci ne presentant qu'un assez faible relief. II rentra chez lui tres tard. Sa rue qui aboutissait a un boulevard anime paraissait deserte dans la brume de la soiree. Men pourtant peu a peu avait l'impression de guerir d'une maladie longue, cruelle, dont il aurait ignore pendant longtemps l'existence, d'en-trer dans une vie nouvelle. II ecoutait ses pas resonner sur l'autre trottoir. Par la fenetre ouverte de quelque rez-de-chaussee, le tic-tac bruyant en particulier d'une horloge le frappa et plus loin a la hauteur d'une maison a nombreux etages il arreta sa marche jusqu'a ce que la sonnerie prolonged d'un telephone se fut tue. Peu apres il s'approcha d'un homme appuye contre un reverbere. L'homme lui fit le recit d'un vol dont il avait ete la victime. II se disait etre un marchand tres riche mais il n'avait plus d'argent pour s'en retour-ner chez lui au village. Men le fit entrer, l'installa dans la chambre d'amis, et immediatement lui remit une somme qui lui permettrait de se tirer d'embarras au moins momentanement. Le lendemain son hote le quitta avec mille marques de reconnaissance. Vers neufheuresdu matin Men recut la visite de Mac loyce; il avait le teint animé et parlait avec rapidité, d'une voix forte, paraissant géné cepen-dant. II fallut qu'Ilien mimát 1'étonnement de celui á qui Ton annonce une nouvelle inattendue. II connut á cela un curieux plaisir. Mac Joyce déclara que Ton avait transporte le corps de l'homme au complet gris clair á la morgue municipale. ^identification avait permis la découverte du domicile du défunt dont le nom était Mario Paschale et, comme Ton avait perquisitionné chez lui, Ton avait appris que jadis il avait vecu deux ou trois annees dans une terre de colonic. Un silence suivit ces paroles puis Men s'etant levé offrit á Mac Joyce une cigarette. II y eut un nouveau et plus long silence encore pendant lequel les deux hommes debout restěrent immobiles, chacun d'eux semblant attacher son regard á un point particulier de l'espace. Ainsi parut-il á leur attitude que, tout en demeurant dans le domaine corporel et psychique et dépassant ces points de repěre, ces significations plus ou moins explicites éclairant ou non l'oeuvre du destin, ils avaient eu peut-étre le sentiment de saisir en profondeur cette aventure, le sens spirituel de son avenir. Mac Joyce s'etant rassis, Men se rendit á la cave pour en rapporter deux bouteilles d'un vin vieux et par la temperature ďété qui régnait ardente á cette heure de la journée, les compagnons firent au vin grand honneur. Tous deux cependant, comme il arrive aprěs une periodě de tension prolongée se trouvaient á present d'heureuse humeur et parurent se lier ďamitié puisqu'ils établirent un projet de villegiatuře, décidant de partir le mois prochain pour une petite ville des bords de la mer. Plus tard en prenant congé l'un de l'autre, ils se donněrent la main avec une cordialité excessive. Vers le commencement de l'apres-midi la chaleur devint accablante. Men dut se réfugier au fond, á cet angle du mur de sa chambre qui le preserve toujours du soleil. II ne déjeuna point mais se prépara deux ou trois cocktails qu'il but avec une sorte de hate. Peu aprěs il s'etendit sur une chaise longue. André ne vint pas lui faire visite. Men devait trouver le jour suivant un télégramme d'excuse; une lettre allait suivre. André n'arrivant pas, Men souhaita dormir. II n'y put parvenir pendant plusieurs heures: les yeux fermés il gardait la sensation de la lumiěre. Une fiěvre légěre aussi le semblait tenir. Enfin, la nuit le trouva dans un grand sommeil. Mais pourtant jamais plus il ne devait connaitre le repos car bientót aprěs commenca pour lui une suite de malheurs qui le mena peu á peu á la perdition definitive. Source: Marcel Lecomte, «L'Homme au complet gris clair» dansCFuwes, Les Éperonniers, «Passé Present)), Bruxelles, 1980, p. 36-42. © Succession Marcel Lecomte 144