TO 2 Literature amérindienne du Quebec Poémes 103 mkihitin*. Au passage de ces mots, la nature s'en acca-pare et se nourrit avec allegresse. Timidement, une petite brise nocturne vient de me lancer un defi amical... Je menveloppe d'un aripikoraf* pour me tenir au chaud. Debout face a I'Est, je termine cette ceremonie par un rituel d'usage. Une derniere fois,je crie... Kir ni Manitom***. Ni kicteriten ni coweriten kitici-nikasoinin*, Seule la fumee qui monte indique une presence. Je ramasse les branches seches et les mets sur la braise. Je souffle sur la braise et la lumiere est. Comme la coutume le veut, je mets une poignee de tabac sur le feu. Les etoiles semblent me faire des clins d'ceil. La position de rnatotasiiuatekw^ symbolise beaucoup de nos croyances. Tambour, donne-moi la note pour chanter ma chanson du courage. Oui... vraiment je me sens bien. {Braderies sur mocassins, Chicoutimi JCL, 1988, p. 48-49) * Je t 'atme en atikamekw. ~* Couverture en atikamekw. *** Toi, man Créateur en atikamekw. t Je respects et j'aime ton nam en atikamekw. ^ Sudation cn atikamekw. Myra Cree Nt'e en igjj, Myra Cree est originaire de Kanesatake (Oka) oil elle demeure encore aujourďhtii. Sa carriére ď animal rke pour la radio de Radio-Canada lui vatil pludeun prix et distinctions, Les deux satires qui suiventfont partie ďune serie itititute'e Les bouts rimés de Myra Qt&t,publiéc duns la rewweTerres en vues entre rýyj et rcjgó comme une sorte ďéditorial alternatif. Myra Cree y étale tout son humour, son irónie, son eloquence, sous un mode satirique, carkatural ou pampblélaire. La fete ä Arthur Plaubert disait «la vie nest tolerable qu'avec [ une marotte » ; Les autochtones furent et demeurent [ celle d'Arthur Lamothe. Sur son sujet de predilection, Arthur est disert, Nest pas ne celui qui le ferait taire. Impermeable aux «tu nous les bassines avec [ tes Innu », tu nous escagasses*. Mieux que le Seigneur, Arthur est parmi nous [ — plus efficace. Quittant sa Gascogne natalc, comment aurait-il pu [ i maginer Fextraordinaire aventure Qui l'attendait au Quebec, en cette terre [ d'amerindienne culture ? Comment pouvait-il deviner qu'il prendrait les Montagnais en plein cceur Dans ce pays qui les avait plutöt sur le cceur? Qu'il deviendrait le chantre de leur histoire, Le depositaire de leur memoire ? Escagasser signifie assommer (régionalisme du Sud-Est de la France) io4 Littérature amérindienne du Quebec Aux vues imprenables sur bouleaux et épinettes, II a prčíeré leur paysage intérieur, leur petite [ musique secrete, Témoignant des injustices dont ils étaient victimes, Leur accordant demblée ce que ďautres [ leur refusaient: foi et estime. Un créateur, dit-on, est son ceuvre : Artbur en est la vivante preuve. Dans 1'attente queclate Le Silence des fusils* Nous avons fait la féte a notre noble ami, Nous permettant méme de taquiner [ ce grand distrait Qui a frólé le décor ďun peu trop pres, Lui rappelant affectucusement que mieux vaut [ vin et cote ďamour assurée Que ravin et cótes cassées. (Terres en vues, vol. 3, n° 2,1995, P- ") Mon pays révé ou la PAX KAN ATA Mon pays reve commence, a 1 evidence, au lcndemain d'un ultime referendum, une fois le «verduct rendi» pour ecrire comme l'ineffablc Jean Chretien parle. L'autonomie nous est acquise, nous avons notre propre Parlement, il y a dorenavant trois visions de ce pays. * Titre d'un film d'Arthur Lamothe. Poemes 105 Au Quebec, on est copains comme cochons avec [ la communaute francophone qui sest mise a letude des langues autochtones. Nos reserves, sur lesquelles nous en emettions tant, sont devenues des colonies de vacances et nos chefs, qui se repartissent egalement entre homines et femmes, de gentils organisateurs. A Kanesatake, ou j'habite, y'a du bouleau et du pin pour tout le monde. Le terrain de golf a disparu et tous, Blancs et Peaux-Rouges (je reve en [ couleurs) peuvent, tel qu'autrefois, profiter dc ce site [ enchanteur. Nos jeunes ne boivent plus, ne se droguent pas, la scolarisation a fait un bon prodigieux. Tout va tellement bien dans nos families (il n'y a plus trace de violence) que l'association Femmes autochtones du Quebec sest recyclee en cercle litteraire. Le Deuxieme sexe de Simone de Beauvoir vient d'etre traduit en mohawk.; FXYde Videntite masculine\ d'Elizabeth Badinter, devrait letre en montagnais pour le Salon du livre qui se tiendra a Kanawake, et L'Amant de Duras, en inuktitut (9a va degivrer sec dans les iglous). II est question que Marie Laberge soit jouee en cri et Denys Arcand s'apprete a tourner [ une comedie musicale, musique de Pierre Letourneau, inspiree de la vie [ d'Ovide Mercredi, qui a accepte de jouer son propre role. Titre provisoire : Je veux t'aimer tous les jours [ de la semaine. Liítérature amérindienne du Quebec Poěmes Brefj c'est beau comme l'antique, tout le monde il est content, tout le monde [ il est gentil, on est trěs bien TRAITÉ. Je me pince pour y crolre, trop fort sans doute, car c'est ä ce moment-lä que je me suis réveillée. Avec mes meilleurs vceux, que Tan prochain, si nous ne sommes pas plus, nous ne soyons pas moins. (Terres en vues, vol. 3,11° 4,1995, p. 23) Jean Sioui Jean Sioui, ne en 1948, est Wendat (Huron), 11 demeure ä Wendake sit il conceit des projets pourpromouvoir lecriture par ks Amerindiens. Le langage simple, clair et con eis de Jean Sioui, permet au iecteur d'interpreter ses Pen sees wen dates de multiples faeons. Comme des maxinies, dies deviennent universelles et rappellent ä ckacui) d'etre ä lecoute de l'envhonnement, de porter une attention particulüre aux moindres details de la vie. lie pas de I'lndienj* Le pas de f Indien est leger son empreinte est ineffacable (Le Pas de lIndien. Pensées wendates, Quebec, Le Loup de Gouttiěre, 1997, p. 12) [Garde le silence] Garde le silence si tu crains que le vent n'emporte tes paroles au mauvais endroit Arrete-toi un moment ecoute les bruits de la foret regard? la hauteur des arbres respire l'odeur du bois touche la fraicheur du sol et repars enivre de vie (Le Pas de I'lndien. Petistfes -wendates, Quebec, Le Loup de Gouttiere, 1997, p. 50) Les litres enrre crochets cmt été ajourés pour rendre les extraits plus faci-lenierit reparables. Literature amerindienne du Quebec Poemes 109 [Le brin de paillel Le brin de paille foule a tes pieds ne te semblc ricn mais loge dans lceil par un leger vent il epargne le chevreuil du tir du chasseur aveugle (Le Pas de f'Indkn. Pensees -wendates, Quebec, Le Loup de Gouttierc, 1997, p. 51) fl.e bon chasseur] Le bon chasseur sait ecouter les bruits de son territoire Le bon pere sait ecouter les bruits de sa maison (Le Pas de I'lndien. Pensees -wendates, Quebec, Le Loup de Goutticre, 1997, p. 53) [J'avais un bei arbrel J'avais un bel arbre devant ma maison je meditais a lbmbre de ses branches un grand vent brusque l'a fait tomber II m'a manque longtemps Aujourd'hui je me souviens de lui en regardant les pousses nouvelles a 1 'endroit meme ou il etait Mon peuple est semblable je sais qu'il survivra (Le Pas del'Indien. Pensees "wendates, Quebec, Le Loup de Goutticre, 1997, p. 54) [Dans ces temps] Dans ces temps on nous donne des droits artificiels sous reserve Dans nos temps on possedait des droits naturels sans reserve (Le Pas de /'Indien. Pensees vjendates, Quebec, Lc Loup de Gouttiere, 1997, p. 73) [Lorsque tu es venu] Lorsque tu es venu tu as ete accueilli tel que tu etais Parce que tu es reste tu nous a voulus tel que tu etais Nous ne voulons pas que tu partes mais nous serons toujours tels que nous sommes (Le Pas del'Indien. Pensees -wendates, Quebec, Le Loup de Goutüere, 1997, P- 7&) Littérature amérindienne du Quebec [Ä tante Lucia] A tante Lucia, je dis: Assise dans ta berceuse a la cuisine tu perlais des mocassins a la journee longue ton eternelle pipe au bee bourree du tabac que tu avais hache Tes silences me parlent encore {Le Pas dtl'lndien. Pensfes wendates, Quebec, Le Loup de Goutticrc, 1997, p. 85) [On nous a longtemps percus bien calmesl On nous a longtemps percus bien calmes on nous a longtemps trouves bien silencieux C est le naturel de notre peuple Aujourd'hui on nous accuse de vouloir parier {Le Pas de/'Indien. Pensees -wendates, Quebec, Le Loup de Gouttiere, 1997, p. 92) |Un jour] Un jour, un sage me dit: J'ai parle et la nature meine sest tue } ecoute lä cet homrae qui veut parier mais un klaxon me dit qu'il faut avancer {Le Pas de l'lndkn. Pensées wendates, Quebec, Lc Loup de Gouttiere, 1997. P- 99) Poěmes JIT Sylvie-Annc Sioui-Tmdel Wendat (Huronne) d'origine, Syhie-jinne Sioui-Trudel nait en tqg$. Elle vit ä Montreal oü eile dirige sa propre compagnic: Aataentsk Masques Sc Theatre. Les poemes de Sylvie-Anrie Sioui-Trudel degagent une harmo-nieuse musicalite fonde'e sur divers procedes sty/istiques tch /'assonance, /'alliteration, la rime, tesjeux de mots. On comprend quelle les integre sans difficulte' dans ses pieces de theatre, pour qu'ils vivent intmse'ment sur la scene interprets par des come'diens. Plomb et azur Des mains pointant 1'horizon Des yeux percant le temps Trois outardes crispées en sang Ont cntendu leclat tueur Ont attend téte-béche Dans la boue des maréeages Silence partout A bout portant Fusil claquant Charge d'acier L'aile plombée La pluie de sang La neige perdue On nespěre plus Regard ďun pere Silence d'un nom Silence d'une mere Et sur leur front s'inscrit mon nom {Ecrire centre le racisme: lepouvoirde fart, Montreal, Les 400 coups, 200a, p. +4)