vivant, ä aiguiser ce sens de ľémerveillement qui est ä la pointe de toutes les découvertes et de toutes les joies de la science et de la poesie. Et ce que je vois encore qu'on pourrait inculquer ä nos jeunes, par la geographic, e'est le respect de la nature, ce sont les sentiments de fienč, de reconnaissance, les notions de propnete, d'utilisation et de defense collectives, toutes choses indispensables ä la formation du citoyen. Les enfants des villes fournissent aujourd'hui la clientele la plus nom-breuse de la plupart de nos grandes čcoles. Privés de la nature, condamnčs ä grandir dans un climat artificiel et anémié, ils devienncnt plus lard comme fatalement enclins ä ces speculations sans fondement qui peuvent briller d'un certain éclat, mais n'apportent rien de constructif ä ľédification de la cité. Je consens volontiers ä l'abstraction quand je la vois, comme une fleur, sortir du reel; mais, je m'en méfie comme de tous les diables lorsqu'elle s'évapore d'un esprit séparé du concret. Ces tristes conditions oil se trouvent les enfants et surtout les pauvres des villes, sont un trěs grave probléme pour l'enseignement mčme religieux. Les éducateurs doivent suppléer, par toutes sortes de moyens, ce dont leurs élěves sont si dangereusement frustrés. Ce ministěre de suppléance exige ingéniosité, preparation; et encore, si vivant et dévoué qu'on le suppose, il ne remplacera jamais le contact personnel avec la nature. Cest pourquoi, il importe de favoriser et de multiplier les bienfaisantea initiatives que sont les clubs 4-H. les cercles de jeunes naturalistes, le scou-lišme, les colonies de vacances, et songer ä d'autres formules qui ouvriraient ä tant de jeunes infortunés les porieš qui donnent sur les champs, les bois el les eaux de leur pays. Cette initiation par la geographic, par les sciences dites naturelles, et surtout cette incorporation de tout l'etre dans le contexte vivant de la nature, sont essentielles ä la vie et ä la bonne sante de I'intelligence; elks sont un correctif ä cette dure civilisation des techniques et des mécaniques, ä ce climat | čtou ffani, mal ventile, d'idéologies, ď abstractions oú les jeunes sont dčsor-mais condamnčs ä vivre. Si j'avais un bon conseil ä donner ä quelque apprenti-poéte, je ne le détourncrais pas des maitres, bien súr; mais je ľcngagerais vivement á quitter souvent les livres et ä prendre le chemin de ce qu'on appclle la grande nature. II irait avec joie, mais sans rien heurter, sans rien violenter, ä pas discrclN et pareils ä ceux de ľäme. U s'arréterait surtout ä la moindre merveille, regardant, čcoutant, palpanl; et par toutes sortes de délicatesses et ďégards, U s'appliquerait ä gagner II con fiance et ľ intimite des č t res. Puis, un bon jour, il découvrirait que les arbres, les herbes, les flcurí, par quel phénomčne? je ne sais, ont poussé en lui-mémc chacun son double; oui, un double qui n'a rien ďabstrait, qui n'est pas une simple image, maní qui vit réellement ä la fois de sa propre vie et de la vie de I'intelligence cl du coeur oů il s'est implanté. Et, désormais, et pour tou jours, le beau, le vivant, le fécond jardin qut mon disciple aurait en lui-méme, la charmante retraite loin du monde et e cette splendeur qui s'en va De la clarte qui s'echappe Par les fissures du temps L'automne presque depouilie" De Tor mouvant Des forSts Et puis ce couchant Qui glisse au bord de l'horizon A me faire crier d'angoisse Toutes ces choses qu'on m'enleve J'ecoute douloureux comme passe une onde Les chatoiements des voix et du vent Symphonie deja perdue deja fondue En les frissons de I'air qui glisse vers hier Les yeux le cceur et les mains ouvertes Mains sous mes yeux ces doigts ecartes Qui n'onl jamais rien retenu Et qui fremissent Dans l'e'pouvante d'etre vides Maintenant mon 6tre en eveil Est comme deroule' sur une grande etendue Sans plus de refuge au sein de soi Contre le moitel frisson des vents Et mon cceur enamel est ouvert comme une plaie D'ou s'echappe aux torrents du desir Mon sang distribue aux quatre points cardinaux. Cage d'oiseau Je suis une cage d'oiseau Une cage d'os Avec un oiseau L'oiseau dans ma cage d'os C'est la mort qui fait son nid Lorsque rien n'arrive On en tend froisser ses ailes Et quand on a ri beaucoup Si 1'on cesse tout a coup On I'entend qui roucoule Au fond Comme un grelot C'est un oiseau tenu captif La mort dans ma cage d'os Voudrait-il pas s'envoler Est-ce vous qui le retiendrez Est-ce moi Qu'est-ce que c'est II ne pourra s'en aller Qu'apres avoir tout mange Mon cceur La source du sang Avec la vie dedans U aura mon ame au bee. Accompagnement Je marche a cote" d'une joie D'une joie qui n'est pas a moi D'une joie a moi que je ne puis pas prendre Jc marche a cdte de moi en joie J'entends mon pas en joie qui marche a cole de moi Mais je ne puis changer de place sur le trottoir Je ne puis pas mettre mes pieds dans ces pas-la et dire voila c'est moi Je me contente pour le moment de cette compagnie Mais je machine en secret des echanges Par toutes sortes d'operations, des alchimies. Par des transfusions de sang Des deme'nagemcnts d'alomes par des jeux d'equilibre 570 571 Afin qu'un jour, transpose, Je sois porle par la dansc dc ces pas de joie Avec le bruit decroissant de mon pas a cot£ de moi Avec la perte de mon pas perdu s'6tiolant a ma gauche Sous les pieds d'un 6trangei qui prend une rue transversale. [POEMES RETROUVES] [Te voilá verbe] Te voiia verbe en face de mon ětrc un poeme en face de moi Par une projection par-dela moi de mon arriěre-conscience Un fils tei qu'on ne I'avait pas attendu Ětre méconnaissable, frěrc ennetni. Et voilá le poeme encore vide qui m'encercle Dans 1'avidité d'une terrible exigence de vie, M'encercle d'une mortelle tentacule, Chaque mot une bouche sucante, une ventouse Qui s'applique á moi Pour se gonfler de mon sang. Je nourrirai de moelle ces balancements. [C'est eux qui m'ont tu6] C'est eux qui m'ont tue Sont tombed sur mon dos avec leurs armcs, m'ont me" Sont tombes sur mon coeur avec leur haine, m'ont tue Sont tombes sur mes nerfs avec leurs cris, m'ont hie" C'est eux en avalanche m'ont ecrase' Casse' en eclats comme du bois Rompu mes nerfs comme un cable de £U de fer Qui se rompt nel et tous tes fils en bouquet fou Jaillissent et se recourbent, pointes a vif Ont cmiette ma defense comme une croute seche Ont egrene mon coeur comme de la mie Ont tout eparpille cela dans la nuit lis ont tout pi&ine' sans en avoir 1'air, Sans le savoir, le vouloir, sans le pouvoir, Sans y penser, sans y prendre garde Par leur seul terrible mystere stranger Parce qu'ils ne sont pas a moi venus m'cmbras.ser 4 Ah! dans quel desert faut-il qu'on s'en aille Pour mourir de soi-méme tranquillement. | On dirait que sa voix] On dirait que sa voix est felee D6ja? II rejoint parfois 1'eclat du rire Mais quand il est fatigue Le son n' em pi it pas la forme C'est comme une voix dans une chaudiere Cela s'arrete au milieu Comme s'il ravalait le bout deja dehors Cela casse ct ne s'etend pas dans Fair Cela s'arrete ct c'est comme si n'aurait pas du commenccr C'est comme si rien n'&ait vrai Moi qui croyais que tout est vrai a ce moment Deja? Alors, qu'est-ce qui lui prend de vivre Et pourquoi ne s'etre pas en alle7 [II y a certainement] II y a certainement quelqu'un qui se meurt J'avais decide de ne pas y prendre garde et de laisser tomber le cadavre en chemin Mais c'est 1'avance maintenant qui manque et c'est moi Le mourant qui s'ajuste a moi. | Apres les plus vieux vertiges] Apres les plus vieux vertiges Apres les plus longues pentes Et les plus lents poisons Ton lit certain comme la tombe Un jour a midi S'ouvrait a nos corps faiblis sur les plages Ainsi que la mer. Apres les plus lentes venues Les caresses les plus brulantes Apres ton corps unc colonne Bicn clairc cl piirfaitcmcnt dure Mon corps unc rivlcrc ctendue et dresse* pur jusqu'au bord de l'eau. 572 573